Ce soir la lune est calme....
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Ce soir la lune est calme....
Comme elle l'avait espéré, sortir sur la terrasse à une heure aussi avancée de la nuit, seule, avivait les quelques flammèches qui subsistaient en elle. Elle leva le front vers le ciel curieusement clair. La fraîcheur de la nuit décuplait l'acuité de ses sensations. Elle rappela le vieux, si vieux rêve enfoui d'une petite esseulée pleurant sans bruit sous le drap tandis que grinçaient les lattes sous les gros souliers de soeur Angèle. Pour endormir ses pleurs avec sa peur, elle sellait chaque soir un songe et s'obligeait à ne revenir qu'au matin, juste une fraction de seconde avant la cloche du réveil et les houspillements continuels des religieuses, la méchanceté de soeur Agnès:
" Si vous n'êtes pas prêtes, lavées, habillées, rangées et votre lit fait à l'heure de l'office, vous passerez avec moi chez la supérieure; et cela, mes filles, croyez-moi, c'est une expérience que l'on n'oublie pas." Le délaissement que la plupart des petites avaient subi, bien avant leur arrivée dans cet antre, les orientait souvent vers une résignation douce. Or c'était bien ce qu'escomptait la mère supérieure.
I.N.R.I. : Iesus Nazareius Rex Judaeorum: celui-là aussi s'était fait avoir . Pas par une mère mais un père supérieur! " Pauvre vieux..." songeait-elle sur ses genoux endoloris tandis qu'on l'obligeait à des heures de prières. Quelque chose en elle renâclait: "Tu ne m'auras pas pour autant, eh, le nazaréen! Le malheur n'excuse pas tout!"
Requiescat! Oui, qu'il repose en paix. Qu'ils reposent tous! Mais pas dans la paix, les autres! Elle ricana après avoir frissonné, défia l'astre rond, et plein, et clair là-haut, si sot. Non! "In pace", ce n'était pas sa tradition à elle, pas plus que l'indifférence. La vengeance,il n'y avait que cela de vrai!
Ah, il adorait Bunuel cet imbécile qu'on lui avait fait épouser, sagement, pour se débarrasser d'elle! Un chien andalou le mettait dans tous ses états. "Veux-tu être ma Belle de jour?" lui avait-il demandé. Los olvidados, Cet obscur objet...., il l'avait obligée à les voir et les revoir tous, espérant éveiller en elle quelque turpitude délicieuse. Un incommensurable dégoût, voilà tout ce qu'il lui avait jamais inspiré.
Non, elle n'était pas un monstre . Elle voulait seulement être elle, purement et simplement elle, un jour ou une nuit. Et si personne jamais ne comprenait, peu lui importait après tout. Et si elle devait payer pour ce qu'elle avait fait, elle était prête. Seule, la lune la voyait depuis toutes ces années où le monde l'avait niée, enfermée, avait disposé d'elle sous le soleil, au grand jour; oui, ils disaient grand.
"Tu finiras sur l'échafaud!" Il faut bien finir quelque part. Car nous sommes tous mortels. À l'heure dite, missa est.
La lune s'était voilée mais sans colère. Elle se sentait enfin mieux. Plus rien désormais ne la toucherait. Même l'irruption des cris, des flics, des juges, des commentateurs de tout poil dans la chambre où elle l'avait laissé, le cou tranché et où, dès le jour levé, il faudrait laisser entrer l'horreur d'autrui, ne lui était rien à cette heure bénie, sous la protection du ciel pâle. Elle sourit avec délice pour la première, pour la dernière fois et parla à la biche qui, quelque part, se terrait dans les fourrés, craignant le loup et toutes ces bêtes contre quoi on ne peut guère. Elle oublia tout le reste. " Querida, chuchota-t-elle, oh, querida..."
Ce soir la lune est calme.
obi- Nombre de messages : 553
Date d'inscription : 24/02/2013
Re: Ce soir la lune est calme....
Le texte gagnerait à être aéré.
Quelqu'un qui fait référence à Luis Buñuel préfère l'imagination a la raison, un critère que j'ai toujours fait mien.
Je suis passé sans dire grand chose mais j'ai lu. Merci.
Quelqu'un qui fait référence à Luis Buñuel préfère l'imagination a la raison, un critère que j'ai toujours fait mien.
Je suis passé sans dire grand chose mais j'ai lu. Merci.
Re: Ce soir la lune est calme....
Puisqu’il s’agit de parler d’un meurtre, le texte manque de violence à mon avis, on ne sent pas un mobile vraisemblable ( il en faut pour qu’on en vienne à tuer son mari !). Et les images : lune, biche restent dans le registre un peu convenu d’un féminin idéalisé.
C’est la rage qui est à creuser.
C’est la rage qui est à creuser.
Variante peut-être plus claire (?) ou Il n'y a rien à expliquer
Comme elle l'avait espéré, sortir sur la terrasse à une heure aussi avancée de la nuit, seule, avivait les quelques flammèches qui subsistaient en elle. Elle leva le front vers le ciel curieusement clair. La fraîcheur de la nuit décuplait l'acuité de ses sensations. Elle rappela le vieux, si vieux rêve enfoui d'une petite esseulée pleurant sans bruit sous le drap tandis que grinçaient les lattes sous les gros souliers de soeur Angèle. Pour endormir ses pleurs avec sa peur, elle sellait chaque soir un songe et s'obligeait à ne revenir qu'au matin, juste une fraction de seconde avant la cloche du réveil et les houspillements continuels des religieuses, la méchanceté de soeur Agnès:
" Si vous n'êtes pas prêtes, lavées, habillées, rangées et votre lit fait à l'heure de l'office, vous passerez avec moi chez la supérieure; et cela, mes filles, croyez-moi, c'est une expérience que l'on n'oublie pas." Le délaissement que la plupart des petites avaient subi, bien avant leur arrivée dans cet antre, les orientait souvent vers une résignation douce. Or c'était bien ce qu'escomptait la mère supérieure.
I.N.R.I. : Iesus Nazareius Rex Judaeorum: celui-là aussi s'était fait avoir . Pas par une mère mais un père supérieur! " Pauvre vieux..." songeait-elle sur ses genoux endoloris tandis qu'on l'obligeait à des heures de prières. Quelque chose en elle renâclait: "Tu ne m'auras pas pour autant, eh, le nazaréen! Le malheur n'excuse pas tout!"
Requiescat! Oui, qu'il repose en paix. Qu'ils reposent tous! Mais pas dans la paix, les autres! Elle ricana après avoir frissonné, défia l'astre rond, et plein, et clair là-haut, si sot. Non! "In pace", ce n'était pas sa tradition à elle, pas plus que l'indifférence. La vengeance,il n'y avait que cela de vrai!
Ah, il adorait Bunuel cet imbécile qu'on lui avait épouser, sagement, pour se débarrasser d'elle! Un chien andalou le mettait dans tous ses états. "Veux-tu être ma Belle de jour?" lui avait-il demandé. Los olvidados, Cet obscur objet...., il l'avait obligée à les voir et les revoir tous, espérant éveiller en elle quelque turpitude délicieuse. Un incommensurable dégoût, voilà tout ce qu'il lui avait jamais inspiré.
Non, elle n'était pas un monstre . Elle voulait seulement être elle, purement et simplement elle, un jour ou une nuit. Et si personne jamais ne comprenait, peu lui importait après tout. Et si elle devait payer pour ce qu'elle avait fait, elle était prête. Seule, la lune la voyait depuis toutes ces années où le monde l'avait niée, enfermée, avait disposé d'elle sous le soleil, au grand jour; oui, ils disaient grand.
"Tu finiras sur l'échafaud!" Il faut bien finir quelque part. Car nous sommes tous mortels. À l'heure dite, missa est.
La lune s'était voilée mais sans colère. Elle se sentait enfin mieux. Plus rien désormais ne la toucherait. Même l'irruption des cris, des flics, des juges, des fous quels qu'ils fussent dans la chambre où elle l'avait laissé, le cou tranché comme un oeil sot et blanc et vain, où peut-être s'affairaient déjà les fourmis, cette chambre où, dès le jour levé, il faudrait laisser entrer l'horreur d'autrui, ne lui était plus rien à cette heure bénie, sous la protection du ciel pâle. Elle les imagina brièvement eux, les obsédés de la compréhension, qui se croiraient autorisés à lui demander des comptes, à expliquer son geste, à l'excuser peut-être pour les années endurées! Elle se sourit avec délice pour la première, pour la dernière fois peut-être, parla à la biche qui, forcément, se terrait quelque part dans les fourrés, craignant le loup et toutes ces bêtes contre quoi on ne peut guère. Elle oublia tout le reste. " Querida, chuchota-t-elle, oh, querida..."
Ce soir la lune est rouge.
obi- Nombre de messages : 553
Date d'inscription : 24/02/2013
Re: Ce soir la lune est calme....
Oui, on sent bien mieux les choses.
Si je voulais chipoter, je dirais qu'il serait utile de laisser entendre pourquoi elle choisit le meurtre plutôt que le départ, vu son tempérament de rebelle : elle ne peut pas partir (pour x raison de contrainte) ? son mari l'a violée (en plus de lui imposer Bunuel) ?
L'échafaud ajoute une note dramatique, mais un peu datée...à moins que toutes ces questions ne s'expliquent par l'époque à laquelle se déroule l'histoire...mais il y a Bunuel, on n'est pas au XVIIème siècle.
J'espère que je ne t'agace pas avec mes chipotages, c'est toujours intéressant je trouve de bien travailler la cohérence et la vraisemblance d'un récit.
Si je voulais chipoter, je dirais qu'il serait utile de laisser entendre pourquoi elle choisit le meurtre plutôt que le départ, vu son tempérament de rebelle : elle ne peut pas partir (pour x raison de contrainte) ? son mari l'a violée (en plus de lui imposer Bunuel) ?
L'échafaud ajoute une note dramatique, mais un peu datée...à moins que toutes ces questions ne s'expliquent par l'époque à laquelle se déroule l'histoire...mais il y a Bunuel, on n'est pas au XVIIème siècle.
J'espère que je ne t'agace pas avec mes chipotages, c'est toujours intéressant je trouve de bien travailler la cohérence et la vraisemblance d'un récit.
Re: Ce soir la lune est calme....
Non seulement tu ne m'agaces pas mais je te remercie de ce qui, en aucun cas, n'est un chipotage! C'est précieux une lecture scrupuleuse comme la tienne. Et comme tu l'as fait par le passé, tu viens de mettre le doigt sur une négligence.
Je fais les liens dans ma tête et en oublie les jalons pour le lecteur.
Cette femme est d'un tempérament fort (espagnol caricatural peut-être) mais romantique. Je la voyais un peu dans la veine de la duchesse de Sierra Leone de Barbey. Et l'échafaud surélevé est une sorte d'exemple orgueilleux donné au peuple: "Voilà ma tête. Moi je n'ai pas accepté (je refuse de donner un contenu à ce qu'elle n'a pas accepté), quel que soit le prix à payer. Mais peut-être faudrait-il le préciser.
Voici la version trois:
Ce soir la lune est calme...
Comme elle l'avait espéré, sortir sur la terrasse à une heure aussi avancée de la nuit, seule, avivait les quelques flammèches qui subsistaient en elle. Elle leva le front vers le ciel curieusement clair. La fraîcheur de la nuit décuplait l'acuité de ses sensations. Elle rappela le vieux, si vieux rêve enfoui d'une petite esseulée pleurant sans bruit sous le drap tandis que grinçaient les lattes sous les gros souliers de soeur Angèle. Pour endormir ses pleurs avec sa peur, elle sellait chaque soir un songe et s'obligeait à ne revenir qu'au matin, juste une fraction de seconde avant la cloche du réveil et les houspillements continuels des religieuses, la méchanceté de soeur Agnès:
" Si vous n'êtes pas prêtes, lavées, habillées, rangées et votre lit fait à l'heure de l'office, vous passerez avec moi chez la supérieure; et cela, mes filles, croyez-moi, c'est une expérience que l'on n'oublie pas." Le délaissement que la plupart des petites avaient subi, bien avant leur arrivée dans cet antre, les orientait souvent vers une résignation douce. Or c'était bien ce qu'escomptait la mère supérieure.
I.N.R.I. : Iesus Nazareius Rex Judaeorum: celui-là aussi s'était fait avoir . Pas par une mère mais un père supérieur! " Pauvre vieux..." songeait-elle sur ses genoux endoloris tandis qu'on l'obligeait à des heures de prières. Quelque chose en elle renâclait: "Tu ne m'auras pas pour autant, eh, le nazaréen! Le malheur n'excuse pas tout!"
Requiescat! Oui, qu'il repose en paix. Qu'ils reposent tous! Mais pas dans la paix, les autres! Elle ricana après avoir frissonné, défia l'astre rond, et plein, et clair là-haut, si sot. Non! "In pace", ce n'était pas sa tradition à elle, pas plus que l'indifférence. La vengeance,il n'y avait que cela de vrai!
Ah, il adorait Bunuel cet imbécile qu'on lui avait épouser, sagement, pour se débarrasser d'elle! Un chien andalou le mettait dans tous ses états. "Veux-tu être ma Belle de jour?" lui avait-il demandé. Los olvidados, Cet obscur objet...., il l'avait obligée à les voir et les revoir tous, espérant éveiller en elle quelque turpitude délicieuse. Un incommensurable dégoût, voilà tout ce qu'il lui avait jamais inspiré.
Non, elle n'était pas un monstre . Elle voulait seulement être elle, purement et simplement elle, un jour ou une nuit. Et si personne jamais ne comprenait, peu lui importait après tout. Et si elle devait payer pour ce qu'elle avait fait, elle était prête. Seule, la lune la voyait depuis toutes ces années où le monde l'avait niée, enfermée, avait disposé d'elle sous le soleil, au grand jour; oui, ils disaient grand.
"Tu finiras sur l'échafaud!" Elle haussa les épaules se souvenant que, dans ce siècle abâtardi, on en avait défait les marches. Son exécution ne serait pas publique. Peut-être même, en temps que femme, lui refuserait-on la guillotine. Quelle importance? Il faut bien en finir un jour, quelque part. Car nous sommes tous mortels. Eux s'interrogeraient. Longtemps! Elle avait résolu. Ite. Le fantôme horrifié de soeur Agnès courait par les travées, chuchotant. Ite, missa est.
La lune s'était voilée mais sans colère. Elle se sentait enfin mieux. Plus rien désormais ne la toucherait. Même l'irruption des cris, des flics, des juges, des fous quels qu'ils fussent dans la chambre où elle l'avait laissé, le cou tranché comme un oeil sot et blanc et vain, où peut-être s'affairaient déjà les fourmis, cette chambre où, dès le jour levé, il faudrait laisser entrer l'horreur d'autrui, ne lui était plus rien à cette heure bénie, sous la protection du ciel pâle. Elle les imagina brièvement eux, les obsédés de la compréhension, qui se croiraient autorisés à lui demander des comptes, à expliquer son geste, à l'excuser peut-être pour les années endurées! Elle se sourit avec délice pour la première, pour la dernière fois peut-être, parla à la biche qui, forcément, se terrait quelque part dans les fourrés, craignant le loup et toutes ces bêtes contre quoi on ne peut guère. Elle oublia tout le reste. " Querida, chuchota-t-elle, oh, querida..."
Ce soir la lune est rouge.
Je fais les liens dans ma tête et en oublie les jalons pour le lecteur.
Cette femme est d'un tempérament fort (espagnol caricatural peut-être) mais romantique. Je la voyais un peu dans la veine de la duchesse de Sierra Leone de Barbey. Et l'échafaud surélevé est une sorte d'exemple orgueilleux donné au peuple: "Voilà ma tête. Moi je n'ai pas accepté (je refuse de donner un contenu à ce qu'elle n'a pas accepté), quel que soit le prix à payer. Mais peut-être faudrait-il le préciser.
Voici la version trois:
Ce soir la lune est calme...
Comme elle l'avait espéré, sortir sur la terrasse à une heure aussi avancée de la nuit, seule, avivait les quelques flammèches qui subsistaient en elle. Elle leva le front vers le ciel curieusement clair. La fraîcheur de la nuit décuplait l'acuité de ses sensations. Elle rappela le vieux, si vieux rêve enfoui d'une petite esseulée pleurant sans bruit sous le drap tandis que grinçaient les lattes sous les gros souliers de soeur Angèle. Pour endormir ses pleurs avec sa peur, elle sellait chaque soir un songe et s'obligeait à ne revenir qu'au matin, juste une fraction de seconde avant la cloche du réveil et les houspillements continuels des religieuses, la méchanceté de soeur Agnès:
" Si vous n'êtes pas prêtes, lavées, habillées, rangées et votre lit fait à l'heure de l'office, vous passerez avec moi chez la supérieure; et cela, mes filles, croyez-moi, c'est une expérience que l'on n'oublie pas." Le délaissement que la plupart des petites avaient subi, bien avant leur arrivée dans cet antre, les orientait souvent vers une résignation douce. Or c'était bien ce qu'escomptait la mère supérieure.
I.N.R.I. : Iesus Nazareius Rex Judaeorum: celui-là aussi s'était fait avoir . Pas par une mère mais un père supérieur! " Pauvre vieux..." songeait-elle sur ses genoux endoloris tandis qu'on l'obligeait à des heures de prières. Quelque chose en elle renâclait: "Tu ne m'auras pas pour autant, eh, le nazaréen! Le malheur n'excuse pas tout!"
Requiescat! Oui, qu'il repose en paix. Qu'ils reposent tous! Mais pas dans la paix, les autres! Elle ricana après avoir frissonné, défia l'astre rond, et plein, et clair là-haut, si sot. Non! "In pace", ce n'était pas sa tradition à elle, pas plus que l'indifférence. La vengeance,il n'y avait que cela de vrai!
Ah, il adorait Bunuel cet imbécile qu'on lui avait épouser, sagement, pour se débarrasser d'elle! Un chien andalou le mettait dans tous ses états. "Veux-tu être ma Belle de jour?" lui avait-il demandé. Los olvidados, Cet obscur objet...., il l'avait obligée à les voir et les revoir tous, espérant éveiller en elle quelque turpitude délicieuse. Un incommensurable dégoût, voilà tout ce qu'il lui avait jamais inspiré.
Non, elle n'était pas un monstre . Elle voulait seulement être elle, purement et simplement elle, un jour ou une nuit. Et si personne jamais ne comprenait, peu lui importait après tout. Et si elle devait payer pour ce qu'elle avait fait, elle était prête. Seule, la lune la voyait depuis toutes ces années où le monde l'avait niée, enfermée, avait disposé d'elle sous le soleil, au grand jour; oui, ils disaient grand.
"Tu finiras sur l'échafaud!" Elle haussa les épaules se souvenant que, dans ce siècle abâtardi, on en avait défait les marches. Son exécution ne serait pas publique. Peut-être même, en temps que femme, lui refuserait-on la guillotine. Quelle importance? Il faut bien en finir un jour, quelque part. Car nous sommes tous mortels. Eux s'interrogeraient. Longtemps! Elle avait résolu. Ite. Le fantôme horrifié de soeur Agnès courait par les travées, chuchotant. Ite, missa est.
La lune s'était voilée mais sans colère. Elle se sentait enfin mieux. Plus rien désormais ne la toucherait. Même l'irruption des cris, des flics, des juges, des fous quels qu'ils fussent dans la chambre où elle l'avait laissé, le cou tranché comme un oeil sot et blanc et vain, où peut-être s'affairaient déjà les fourmis, cette chambre où, dès le jour levé, il faudrait laisser entrer l'horreur d'autrui, ne lui était plus rien à cette heure bénie, sous la protection du ciel pâle. Elle les imagina brièvement eux, les obsédés de la compréhension, qui se croiraient autorisés à lui demander des comptes, à expliquer son geste, à l'excuser peut-être pour les années endurées! Elle se sourit avec délice pour la première, pour la dernière fois peut-être, parla à la biche qui, forcément, se terrait quelque part dans les fourrés, craignant le loup et toutes ces bêtes contre quoi on ne peut guère. Elle oublia tout le reste. " Querida, chuchota-t-elle, oh, querida..."
Ce soir la lune est rouge.
obi- Nombre de messages : 553
Date d'inscription : 24/02/2013
Re: Ce soir la lune est calme....
Je n'ai lu que le premier jet …
C'est dense, comme si ce texte dur et haineux ne voulait pas se laisser pénétrer. Mais il sait se laisser prendre, plus profondément qu'on ne l'a espéré de prime abord, et on y gagne ...
C'est dense, comme si ce texte dur et haineux ne voulait pas se laisser pénétrer. Mais il sait se laisser prendre, plus profondément qu'on ne l'a espéré de prime abord, et on y gagne ...
midnightrambler- Nombre de messages : 2606
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