Histoire absurde

[Edgar-Allan]

Léopold craqua une cigarette. Les premières bouffées enveloppèrent rapidement son grand visage brun et bleu. Sa nièce (dans le train) devait arriver d’une minute à l’autre. Le quai était gris, le ciel était gris, le train était gris et sa nièce est aigrie. La locomotive pleine de fumée, mais rouge également, s’approcha à toute allure dans un vacarme assourdissant. Elle hésita un peu, puis, s’affaissant en face de lui, poussa de longs soupirs âcres et blancs. Il faisait tout de même un peu froid. Le contrôleur, un homme bleu au costume sale de taches dorées, choisi ce moment pour vérifier le bon fonctionnement de son sifflet. Les portes (qui venaient de bailler en grinçant) claquèrent subitement et le train s’enfuit, dans l’autre direction. Fort heureusement, la vieille nièce rabougrie et son chapeau hideux en hibou étaient parvenus (en s’entraidant, naturellement) à gagner la froide chaleur du quai avant que n’advint cet évènement imprévu. Léopold était fou de joie. Il fit mine d’agiter un grand chapeau melon qu’il n’avait jamais eu et accourra en courant dans le bras (elle avait égaré l’autre à la guerre) de sa chère parente. Bien entendu, Léopold était un jeune homme bien élevé, il s’empara donc de la lourde valise (la charmante enfant ne se séparait jamais de sa collection d’enclumes). -Avez-vous fait bon voyage, très Chère ? -Hihi ! Et nos deux amis joignirent donc la voiture en conversant gaiement de la sorte, ils étaient si heureux, l’un et l’autre, de se retrouver. Les roues lisses cahotèrent un peu, le moteur d’hiver beugla son hymne bien connu mais la voiture démarra mors aux dents. –Allons donc prendre, à la maison, un thé. Léopold avait beaucoup d’esprits. Dehors il pleuvait, dedans non. Léopold et sa nièce se nichèrent sous d’épaisses couvertures et jouèrent, encore et encore, à la belote, au loup, et au Renard. La charmante enfant remportait partie sur partie, évidemment. Puis l’heure vint de se quitter, alarmante… Nos deux amis pleurèrent, crièrent, se lamentèrent, se lamentent à terre mais rien n’y fit… L’heure c’est l’heure. Léopold se vêtit donc, la nièce aussi, la gare aux aiguilles craquantes pris de nouveau son air gris, gris. Le train passa, un imbécile en bleu siffla, le train partit et l’histoire fut finie.

[Le Greico]

J'ai trouvé ça sympathique et cette petite phrase m'a fait beaucoup rire : Le quai était gris, le ciel était gris, le train était gris et sa nièce est aigrie."

[elea]

J’ai bien aimé mais sans être totalement convaincue. Le parti pris absurde fonctionne à merveille par endroits et paraît forcé à d’autres.

Au tout début : La locomotive pleine de fumée, mais rouge également. Pas compris ce également qui me semble bien étrange.
Si le "est aigrie" est joli et fonctionne, ce n’est pas le cas, pour moi, du "se lamentent à terre".
Certaines des parenthèses tombent à plat, peut-être que leur but explicatif enlève un peu de charme.

Mais ce sont des détails, un tout petit peu remanié ce texte serait très chouette, tel quel, pour mon goût, il manque juste le très.

[midnightrambler]

Bonsoir,

Je n'ai pas beaucoup aimé ! Seule la brièveté du texte m'a permis d'aller au bout de la lecture.
Il fallait faire rire -ou sourire - à tout prix, cela se sent trop !

Amicalement,
midnightrambler

[Invité]

A quelques exceptions près (" le train était gris et sa nièce est aigrie."), beaucoup trop forcé pour moi. Mais pas jetable pour autant, avec un petit quelque chose - le côté loufoque - de pas déplaisant.

[gaeli]

Je crois qu'en voulant trop faire dans l'absurbe, l'histoire devient insignifiante genre: ouvrir la porte du refrigérateur et tomber dans un trou...
Je n'ai pas vraiment compris:
un grand visage brun et bleu??
locomotive rouge également ??
homme bleu au costume sale de taches dorées?
cet événement imprévu?? Lequel?
la chaleur froide du quai
etc.

[Lamarjo]

J'ai peut-être mal compris mais... "accourra en courant"? Ce n'est pas la redondance qui me fait bizarre mais le verbe. Pour moi là c'est le verbe courir au futur, il aurait fallu un passé simple... D'ailleurs certains jeux de mots entraînent des changements de temps verbal inopinés ( du passé au présent par exemple), et ça me gêne. Quelques bonnes idées, mais je les auraient bien vues intégrées à une "micro-histoire" en quelques lignes, là c'est presque trop développé en fait, bien que très court, et du coup le côté humoristique et l'effet de surprise perdent de leur efficacité assez rapidement.

[Invité]

J'ai aimé, un texte sympa, vraiment, j'ai passé un bon moment.

— « Le quai était gris, le ciel était gris, le train était gris et sa nièce est aigrie. » : comme tout le monde, j'applaudis à ce jeu de mots très sympathique ;
– « Le contrôleur […] choisi ce moment » : « choisit » ;
– « qui venaient de bailler » : « bâiller » ;
– « à gagner la froide chaleur » : l'oxymore est forcé ;
– « avant que n’advint » : « n'advînt » (subjonctif imparfait) ;
– « cet évènement imprévu » : « événement » (orthographe traditionnelle) ;
– « et accourra en courant » : « accourut » (la formule est redondante, de toute façon) ;
– « -Avez-vous fait bon voyage » : marquez un saut à la ligne, employez le tiret cadratin (et marquez une espace après) pour les dialogues « — » (Alt + 0151) ;
– « très Chère ? » : pourquoi cette majuscule ? ;
– « -Hihi ! » : espace après le tiret, qui devra être cadratin ;
– « nos deux amis joignirent donc » : à une seule ligne d'intervalle, deuxième occurrence de « donc » ;
– « –Allons donc prendre » : tiret cadratin, espace après ;
– « Léopold avait beaucoup d’esprits. » : « d'esprit » :
– « et au Renard » : pourquoi cette majuscule ? ;
– « se lamentent à terre » : le jeu de mots n'est pas convaincant ;
– « la gare aux aiguilles craquantes pris » : « prit ».

[Invité]

Pardon pour le premier tiret, qui n'est pas un demi-cadratin comme les autres ; je pousse le vice très loin, j'en ai conscience, mais ça me gêne et je préfère m'en excuser.

[Jean Lê]

Quelques lourdeurs comme la collection d'enclumes, mais c'est drôle et avec de bonnes trouvailles. Sans doute à retoucher

[hi wen]

c'est un texte connecté. les mots sont connectés à la wagon comme je te pousse, les gens se connectent, en ayant des idées très connectées, tout en connectant sur autre chose. L'auteur a voulu éprouver la fonction d'aiguillage du connectique-cut, à la fois connecté-déconnecté, sans grande conviction, mais il faut bien connecter les neurones, le rouge avec le vert et faire avancer le schmilblick. Attention, haute connection devant, faites péter les claviers.

[Ariel]

Je viens d'essayer de craquer une cigarette, pas évident.

...

On dirait un texte d'atelier d'écriture. Top chrono....

Donc on commence - bien - dans l'absurde, j'ai eu plaisir à y rester, même si ...
Il y a des trouvailles, et des facilités (je suis sûrement aigri, mais celui-là n'a pas vraiment goulayé). A la fin on a l'impression que tu as hâte d'en sortir. Je pense que si tu reprends ton texte dans quelque temps, tu trouveras peut-être de l'élagage à y faire.

Oui, j'aime bien ton absurde, mais il est encore en chantier.

[Contenu sponsorisé]