Golgotha du rhumatisant

[Arielle]

Carcasse crucifiée que couronne l'épine,
travaillée au burin de l'algie qui la mine,
les phalanges clouées dans leurs nœuds affligeants
et les reins taraudés par le fouet lancinant

Sainte Arthrose ma mère aux grinçantes douleurs
inondez votre fils du baume de vos pleurs,
versez sur son supplice un peu d'huile de prêle
et de reine des prés aux vertus essentielles.

Madeleine, ma fée, couvrez ma nudité
de cette chevelure, hier votre fierté ;
votre maigre chignon, grisonnant à ce jour,
suffira pour voiler l'objet de vos amours !

Quant à toi petit Jean, mon poteau, mon disciple,
Sois plus sage que moi au cours de ton périple
si tu veux éviter les tourments du bourreau
lorsque, pour m'imiter, tu marcheras sur l'eau.

Essuie-toi bien les pieds, je te le recommande,
chaque fois que prenant l'onde pour une lande
tu auras de l'orteil relu ton catéchisme
en mémoire de moi et de mes rhumatismes.

[Ariel]

Pffiouuuuuu...

Impressionné!

(bon, je n'y connais rien en prosodie,
je n'ai pas été recompter si tes pieds avaient des becs de perroquet.

Mais ce bain dans l'yeun leur va si bien)

[Rebecca]

Une pépite ! C'est superbe et pertinent et ça a le mérite de parler de quelque chose qui pour notre malheur est intemporel ! Avec un talent qu'aucune arthrose jamais ne lésera :-)

[Maryse]

Bravo!
C'est grinçant!

[Phylisse]

Quel poème ! Le fond, la forme, quel talent, Arielle. Les deux premières strophes sont incroyables de réalité, tant les images et les mots employés prennent vie et corps (si je peux dire...) dans l'association qui en est faite. Et puis ça prend tellement vie ensuite, qu'après le côté visuel, c'est le côté émotionnel qui a pris le relais, j'ai été touchée.

Une sonorité a retenu mon attention, j'aime beaucoup la fin de ce vers :
"chaque fois que prenant l'onde pour une lande"

Je vais ranger ce texte quelque part où je pourrai le relire, m'en inspirer peut-être.

[CROISIC]

Depuis le choix du titre jusqu'au moindre détail de ce poème... quelle prière magnifique tu nous offres ! Je vais la garder précieusement car elle me sera utile dans les prochaines années, j'aime tout particulièrement les vers ci-dessous, même si l'ensemble m'enchante par sa drôlerie et sa causticité.

Madeleine, ma fée, couvrez ma nudité
de cette chevelure, hier votre fierté ;
votre maigre chignon, grisonnant à ce jour,
suffira pour voiler l'objet de vos amours !

[Ba]

Même les os en rient
Quand Arielle les conte
La douleur se plie
Sous le talent du ponte...;-)

[Invité]

Oh que j'espère que tu vas nous refaire le nouveau testament in extenso ! L'ancien, ça va, mais le nouveau m'a toujours profondément ennuyée... sauf revu et corrigé par toi !
Si tu le ré-écris, je ferai la catéchaise ( on fatigue moins !) T'sais que tu aurais sûrement du succès dans les diocèses ?

[Annie]

Très drôle et bien entendu impeccable!
moiqui développe une pénible allergie aux alexandrins boiteux, je trouve ici un baume qui me soulage.

[Damy]

Ce rapport au corps, mystique, presque fétichiste, m'évoque, notamment dans son 3° quatrain, ce poème de Baudelaire (association incongrue d'idées, mais Baudelaire aussi pensait ses plaies aux corps et que Jésus me pardonne).


La chevelure
Charles Baudelaire (Les fleurs du mal – Spleen et idéal)

Ô toison, moutonnant jusque sur l'encolure !
Ô boucles ! Ô parfum chargé de nonchaloir !
Extase ! Pour peupler ce soir l'alcôve obscure
Des souvenirs dormant dans cette chevelure,
Je la veux agiter dans l'air comme un mouchoir !

La langoureuse Asie et la brûlante Afrique,
Tout un monde lointain, absent, presque défunt,
Vit dans tes profondeurs, forêt aromatique !
Comme d'autres esprits voguent sur la musique,
Le mien, ô mon amour ! nage sur ton parfum.

J'irai là-bas où l'arbre et l'homme, pleins de sève,
Se pâment longuement sous l'ardeur des climats ;
Fortes tresses, soyez la houle qui m'enlève !
Tu contiens, mer d'ébène, un éblouissant rêve
De voiles, de rameurs, de flammes et de mâts :

Un port retentissant où mon âme peut boire
A grands flots le parfum, le son et la couleur ;
Où les vaisseaux, glissant dans l'or et dans la moire,
Ouvrent leurs vastes bras pour embrasser la gloire
D'un ciel pur où frémit l'éternelle chaleur.

Je plongerai ma tête amoureuse d'ivresse
Dans ce noir océan où l'autre est enfermé ;
Et mon esprit subtil que le roulis caresse
Saura vous retrouver, ô féconde paresse,
Infinis bercements du loisir embaumé !

Cheveux bleus, pavillon de ténèbres tendues,
Vous me rendez l'azur du ciel immense et rond ;
Sur les bords duvetés de vos mèches tordues
Je m'enivre ardemment des senteurs confondues
De l'huile de coco, du musc et du goudron.

Longtemps ! toujours ! ma main dans ta crinière lourde
Sèmera le rubis, la perle et le saphir,
Afin qu'à mon désir tu ne sois jamais sourde !
N'es-tu pas l'oasis où je rêve, et la gourde
Où je hume à longs traits le vin du souvenir ?

[Jean Lê]

A Sœur Arielle,
pour soigner ses rhumatisses,
Et pénitence de ce Golgotha impie,
Proféré dans ce bel écrit toujours bien lisse.
Je propose une flagellation aux orties
Puis de couvrir votre nudité d’un cilice.

Frère petit Jean de la Sainte Inquisitrice

[hi wen]

Madeleine, ma fée, couvrez ma nudité
de cette chevelure, hier votre fierté ;
votre maigre chignon, grisonnant à ce jour,
suffira pour voiler l'objet de vos amours !

fichtre, quelle longue chevelure !

[Janis]

super, et drôle en plus

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