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Finalement l'amour

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Message  Raoulraoul Dim 22 Jan 2012 - 17:58

Finalement l’amour

Le vent décoiffe les pensées sur la plage.
Paula déteste Eva parce que Trecy lui a dit que Eva raconte sur elle de sales histoires aux garçons. Les garçons occupent la pensée de Paula maintenant qu’elle a dix huit ans. Les garçons préfèrent Eva. Qu’est-ce qu’elle leur raconte Eva ? Mais Trecy ne répond pas.
Sur la plage le vent décoiffe les pensées et la tête.
Voici que Reine arrive. Il fait déjà chaud. Le soleil va percer. Reine dit qu’elle a rêvé que le vent avait emporté tous les galets de la plage. Eva dit que Reine est idiote, il n’y a jamais eu de galets sur la plage. Si, à La Montagne du Roule, il y a des galets dit express Paula à Eva pour l’ennuyer. Mais plus personne ne va à La Montagne du Roule depuis la guerre, répond Eva.
Paula trouve Reine beaucoup plus jolie que Eva. Reine dit à Trecy que son nouveau maillot est moche. Trecy ne lui parle plus. Paula s’est rapprochée de Trecy, mais Trecy maintenant ne parle plus à personne. Pourtant Trecy aurait beaucoup à dire.
Cherbourg. Le vent décoiffe les pensées. Des cerfs-volants dans le ciel. Des blockhaus encore dans la blancheur du sable.
Eva est allongée sur le ventre. Ses grosses fesses. De toute façon je suis plus belle qu’elle, pense Paula, même si Paula sait que Eva a été admise à l’université, et qu’elle sait que elle-même ne pourra jamais un jour rentrer à l’université.
Reine regarde au loin.
- A quoi penses-tu ? lui demande soudain Paula.
- Je ne sais pas, à rien.
- C’est faux, on ne pense jamais à rien.
- Je regardais la mer.
- Ou le garçon là qui joue avec son cerf-volant !
- Tu es bête ! conclut Reine.
Le vent décoiffe, le vent pousse les cerfs-volants, le vent mugit, le vent s’insinue dans les cerveaux, le vent est indiscret, il soulève les jupes et il lit dans les pensées des personnes qui ne parlent pas.
Trecy a sorti de son sac un livre.
- Tu lis maintenant ? lui dit Reine.
Trucy ne répond pas.
- Tu lis quoi ? insiste Reine.
- De la poésie, ça te vas ? lui balance enfin Trecy.
- Ca me va. Ne te fâche pas.
Un cargo est venu s’échouer sur la plage. C’est l’attraction depuis quelques semaines. On voit des enfants sur les épaules de leurs parents regarder le cargo.
- J’aimerais bien un cornet de frites, dit Eva.
- Tous les jours tu manges des cornets de frites, dit Paula.
- Et alors ?
- Je dis ça comme ça, pour rien.
- Tu n’aimes pas les cornets de frites, toi ?
- Si, mais je me retiens.
- A quoi ça sert de se retenir si on n’aime quelque chose ?
- Tu as raison Eva. Empiffre-toi de cornets de frites bien grasses !
La conversation en reste là. Trecy propose à Eva d’aller lui acheter un cornet de frites. Tout le monde pourra piocher une frite. Il y a maintenant un peu plus de touristes sur la plage. Les parasols flottent dans le vent. Dans le ciel un avion passe tirant un calicot publicitaire. Des garçons s’installent sur leurs belles serviettes de bain toutes neuves. Des voiliers sont sortis de la rade et donnent de la couleur sur la mer grise.
Trecy revient. Tout le monde pioche une frite, même Paula, pour faire plaisir à Trecy. Paula voudrait tant que Trecy lui raconte ce que Eva dit d’elle aux garçons. Des sales histoires.
- Qu’est-ce que c’est que « Les Illuminations » ? demande Reine à Trecy.
- Tu as lu mon livre ?
- Bien sûr que non, Trecy.
- Les Illuminations, c’est de la poésie, répond Trecy, avec une frite dans la bouche.
Plus personne ne parle. Le vent fait bouger les cheveux. Un garçon s’est approché pour récupérer son ballon au milieu des filles. Elles se regardent et pouffent de rire. Une famille de hollandais, tout blanc, défile en causant très fort. Paula vient s’asseoir à côté de Trecy.
- Pourquoi tu ne demandes pas directement à Eva ? fait soudain Trecy à Paula.
Silence de Paula. Trecy violemment :
- J’ai horreur de dire du mal des autres !
- Tu as commencé, maintenant il faut continuer, marmonne Paula.
- Des cochonneries sur toi, elle dit Eva aux garçons ! finit par avouer Trecy. Mais je ne crois pas qu’elle les pense.
- Des cochonneries ? Eva raconte des cochonneries sur moi, aux garçons ? explose Paula.
Puis Trecy revient à sa poésie.
Le vent maintenant siffle dans les têtes. Mais ce n’est pas le même sifflement dans la tête de Paula, que dans la tête de Trecy, ou bien celle de Eva, ou bien celle de Reine. Reine a piqué un petit roupillon. Eva est allongée sur le dos et ses seins débordent un peu de son maillot. Le vent court sur elle comme sur d’immenses collines. Il glisse entre ses jambes, s’engouffre dans la poche de ses aisselles des bras qu’elle a relevés. Paula aimerait bien être à la place du vent pour connaître les pensées de Eva. Le vent reste à la porte de Eva. Paula en secret a un peu peur de Eva.
Quelqu’un crie soudain « Il y a des galettes de fioul dans le sable ! ». « C’est le cargo ! » réplique la voix d’un vieil homme. Au loin de la musique jaillit des haut-parleurs, provenant des concours de jeux que la municipalité organise. On fait semblant de ne rien entendre, mais c’est insupportable. Toutes les cabines de bain maintenant sont ouvertes. Dans le ciel un morceau de bleu s’est frayé un passage entre les nuages, ici on dit que « c’est la culotte du matelot ».
Et puis Paula soudain raconte :
- Vous savez qu’autrefois, les frites, on les faisait avec de la graisse de chien !
- Arrête tes bêtises ! répond Reine.
- C’est vrai, c’est mon père qui me la dit ! Puis après un silence en regardant Eva : peut-être que ça n’a pas changé…
Eva fixe Paula. Paula soutenant son regard :
- Tu ne trouves pas, Eva, qu’elles ont un drôle de goût, les frites ? Eva pâlit. Paula poursuivant : La graisse de chien, ça coûte moins cher, c’est plus économique… Evidemment ça fait grossir davantage.
Eva s’est levé. Elle pousse Paula. Une sorte de bagarre réunit les deux filles. On ne sait si c’est un jeu. Elles s’empoignent. Elles roulent dans le sable. Leurs rires ressemblent à des petits cris. C’est Eva qui cède. Paula la coinçant sous elle :
- Il paraît que tu racontes des saloperies sur moi aux garçons ?
Eva au bord des larmes :
- Qui t’a dit ça ?
- Trucy !
Les garçons sur leurs serviettes de bain ont regardé les filles. Ils ont ri. Ils ont envoyé quelques bêtises, des bêtises de garçons à propos des filles. Des bêtises qui font rougir. Eva est effondrée de honte. Maintenant elle pleure. Elle voudrait cacher son corps. Elle ne peut. Elle se sauve. Trecy et Reine la suivent. Elles emportent leurs affaires comme un coup de vent qui emporterait tout. Le sable se soulève. Elles sont toutes décoiffées comme des filles dans le vent. Elles disparaissent. Sauf Paula.
Elle est restée sur la plage. Elle se demande pourquoi, sur la plage, seule, elle se retrouve. Elle est dans le regard des garçons, à côté, tout proche. Ils recommencent leurs bêtises, parfois elle entend des cochonneries, dites à son égard. Si elle s’en va, elle aurait l’air de perdre, comme à l’université qui n’a pas voulu d’elle, l’université qui a préféré la grosse Eva, étudiante à l’université. Et Paula qui a dû se contenter d’une formation de coiffeuse. Alors elle reste là, seule sur la plage, recevant les saloperies des garçons.
Mais un enfant si blond, il parle en hollandais, un enfant amène à ses parents hollandais, un oiseau qui essaie de s’envoler. Il se débat, blessé, asphyxié, étouffant sous les yeux de l’enfant et des parents horrifiés. L’oiseau est noir de mazout. Seule sa prunelle minuscule brille encore. Le vieil homme répète au loin « C’est à cause du cargo ! ».
Paula se dit « Je suis bien plus belle que Eva ».
Mais elle ressemble à une mouette, engluée de cochonnerie, mourante sous les désirs des garçons, qui ont pris leurs serviettes de bain et qui sont partis voir de plus près les oiseaux morts, nageant dans les vagues de mazout.
Le vent est tombé. Les pensées sur la plage n’ont plus l’espoir ou la crainte d’être décoiffées. Le sable est blanc et repose.
Dans la rade de Cherbourg, les sous-marins sont amarrés au quai.

Raoulraoul
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Message  Invité Dim 22 Jan 2012 - 18:12

J'aime sans aimer. Charmée mais pas conquise. Etrange impression que ça frémit mais n'atteint pas le point d'ébullition. En d'autres mots, c'est presque ça mais pas ça ; et je reste dans l'expectative d'un texte qui aille au-delà de ce qu'il promet, qu'il dépasse la volonté de faire factuel et crée l'émotion plus que la réflexion, qu'il comble mes attentes de lectrice laissée tout au bord sinon en marge.

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Message  Invité Dim 22 Jan 2012 - 19:52

J'adore l'écriture, très soignée, maîtrisée, aux effets discrets mais séduisants ; elle confère au purement anedcotique un petit quelque chose qui retient. Cela étant, je n'ai pas été « emporté ».

Voici une correction orthotypographique :
– « qu’elle a dix huit ans » : « dix-huit » (trait d'union) ;
– « Qu’est-ce qu’elle leur raconte Eva ? » : virgule après « raconte » ;
– « il y a des galets dit express » : « exprès » (expresse au féminin) ;
– « et qu’elle sait que elle-même » : « qu'elle-même » (élision) ;
– « - A quoi » : tiret cadratin pour les dialogues « — » (Alt + 0151) et « À » (accent sur la majuscule, Alt + 0192) ;
– « - Je ne sais pas » : tiret cadratin ;
– « - C’est faux » : idem ;
– « - Je regardais » : idem ;
– « - Tu es bête » : idem ;
– « - Tu lis maintenant ? » : idem ; virgule après « lit » (le sens est différent) ;
– « - Tu lis quoi ? » : tiret cadratin ;
– « - De la poésie » : idem ;
– « ça te vas ? » : « va » ;
– « - Ca me va » : tiret cadratin ; « Ça » (cédille sous la majuscule, Alt + 0199) ;
– « - J’aimerais bien » : un tiret cadratin ! ;
– « - Tous les jours » : idem ;
– « - Et alors ? » : idem ;
– « - Je dis ça comme » : idem ;
– « - Tu n’aimes pas » : idem ;
– « - Si, mais je » : idem ;
– « - A quoi » : idem ; « À » ;
– « si on n’aime quelque chose » : « si on aime » ;
– « - Tu as raison » : tiret cadratin et virgule après « raison » ;
– « un avion passe tirant un calicot » : virgule après « passe » ;
– « lui raconte ce que Eva » : « ce qu'Eva » (élision) ;
– « - Qu’est-ce que c’est » : tiret cadratin ;
– « - Tu as lu » : idem ;
– « - Bien sûr que non » : pareil ;
– « - Les Illuminations » : pareil ; italique pour un titre ? ;
– « Une famille de hollandais, tout blanc » : « blancs » ;
– « - Pourquoi tu ne demandes » : tiret cadratin ;
– « - J’ai horreur de dire » : idem ;
– « - Tu as commencé » : idem ;
– « - Des cochonneries » : idem ;
– « elle dit Eva aux garçons » : maladroit ;
– « - Des cochonneries » : tiret cadratin ;
– « la tête de Paula, que dans » : pas de virgule ;
– « ou bien celle de Eva » : « d'Eva » ;
– « la poche de ses aisselles des bras » : le double complément du nom est lourd ;
– « pensées de Eva » : « d'Eva » ;
– « à la porte de Eva » : « d'Eva »… ;
– « un peu peur de Eva. » : idem ;
– « dans le sable ! ». » : pas de point ;
– « Au loin de la musique » : virgule après « loin » ;
– « - Vous savez » : tiret cadratin ;
– « - Arrête tes » : tirets simples ! Employez le tiret cadratin pour les dialogues ;
– « - C’est vrai » : bien sûr que c'est vrai ;
– « c’est mon père qui me la dit » : « me l'a dit » ;
– « après un silence en regardant » : virgule après « silence » ;
– « Puis après » : retour à la ligne ;
– « peut-être que » : tiret cadratin et majuscule ;
– « - Tu ne trouves pas » : qu'un tiret cadratin serait préférable ? ;
– « Eva pâlit. Paula poursuivant : » : retour à la ligne juste avant ! ;
– « La graisse de chien » : tiret cadratin, retour à la ligne juste avant ;
– « Evidemment » : « É » (Alt + 144) ;
– « - Il paraît » : tiret cadratin ;
– « Eva au bord » : virgule après « au bord » ;
– « - Qui t’a dit » : tiret cadratin ;
– « - Trucy » : tiret cadratin ; « Trecy » ;
– « Elle ne peut » : « pas » ;
– « cargo ! ». » : pas de point ;
– « plus belle que Eva ». » point à l'intérieur des guillemets.

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Message  Invité Dim 22 Jan 2012 - 22:32

Je crois que je n'aime pas beaucoup le regard que tu poses sur ces filles... il a quelque chose qui me gêne, un côté trop clinique.

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