Prochain arrêt

[Marvejols]

sur une idée originale de Narbah que je remercie et avec sa très aimable autorisation

................Prochain arrêt

J’ai vu dans le bus tout à l’heure
Un gars cabossé par la vie
Il tenait ses béquilles dans le passage
Comme sa seule envie
Sa petite entrave,
Il les tenait comme un maigre bonheur
Celui qu’on agrippe lorsque cède l’épave.

J’ai vu, dans le bus des gens lisses,
De ceux qui n’ont qu’à bosser
Un gars qui puait sa pisse
Un gars qui n’avait plus d’âge.
Il parlait à tous et fort
Avec le son du noir.
Il parlait à tous comme d’un dehors
Avec la certitude de ceux qui ont passé l’espoir.
Il parlait de tous et fort
Avec une voix qui me tendait ma mort.

Il répétait Le malheur des uns
Fait le bonheur des autres
Le malheur des uns fait le bonheur des autres.
Le bus des Ternes emporte un être de pus
Venu dans notre allée s’excuser d’avoir vécu.
Le bus referme sa porte sur un homme de pisse
Qui crie piteusement le silence de sa fin
Dans l’un de nos petits matins.

J’ai vu dans le bus qui fonce
Un gars qui glisse
Un gars qui s’enfonce,
Et j’ai baissé les yeux.


................Marvejols

[post scriptum]

Ce poème partagé par Narbah m'inspire beaucoup aussi. Je trouve les quatre premiers vers très beaux.
J'apprécie dans le texte initial le lexique familier qui décrit ce personnage, ce miroir qui reflète notre incapacité de voir l'essentiel ... Il me semble donc important de conserver ce lexique familier pour évoquer ce personnage familier : nous, l'autre.

J'aime ton adaptation, ton prolongement.
Seulement je pense que le vers 2 est plus fort en enlevant le déterminant : " un gars cabossé par vie ". La vie semble alors personnifiée et donc incontrôlable. La voix passive accentue cette impression de passivité du sujet.
La périphrase " un être de pus " me semble trop facile, dure et trop proche du calembour. Bref, elle détone ici selon moi.

Ce fut un réel plaisir de lire ces deux textes.
Merci Narbah et Marvejols.

[Invité]

Je ne connais pas l'idée de Nardah, mais je trouve la musique du voyage en harmonie avec le fond.
La chute est terrible.

[Marvejols]

Qu'il est terrible de choir et quand choit un homme c'est probablement toute l'humanité qui déchoit. Du moins c'est ce que je perchois comme dirait le d'Estaing.





PS: Bien revenue Eclaircie et toujours aussi nocturne à ce que je vois.

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