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Eros et Thanatos

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Message  hugofan Sam 18 Fév 2012 - 2:12

Bonsoir, voilà le début d'une nouvelle que je travaille depuis une semaine, et dans laquelle je n'ai pas vraiment l'impression d'avancer. L'intrigue est simple, ce n'est pas ce qui compte : c'est un texte sur le rapport entre le désir et la mort. Ce qui m'intéresse est plutôt l'écriture : je souhaite rédiger une nouvelle appartenant au genre fantastique. Le début que je poste ici a été travaillé dans le moindre détail. Est-ce une bonne entrée en matière ? Merci d'avance et bonne lecture ^^




Mercredi 09 Octobre 1933,Séville : Encore un tiède après-midi passé dans la pénombre du patio, sous les citronniers fragiles où paresse le vent. J'aime le frémissement orgasmique des branches à son contact. Parfois, il caresse aussi quelques feuilles mortes, des feuilles d'automne, et les soulève en tourbillons paisibles comme un soupir. Le soleil
est toujours au rendez-vous dans cette région chaleureuse, animée ; il inonde de ses rayons les chrysantèmes et les dahlias que j'ai diposées partout, dans le jardin saturé d'un parfum doucereux. La ville de Séville est sans doute l'une des plus bruyantes de tout l'univers : du matin au soir, sans le moindre répit, des femmes, des vieillards et des enfants emplissent l'atmosphère d'un bourdonnement continu, comme au sein d'une ruche étourdissante. La nuit elle-même, avec ses légions de moustiques, refuse de se plier aux lois du silence. On entend alors, à deux pas de chez moi, les froufrous de robes en mousseline et les caresses désordonnées de volages adolescents bravant l'interdiction des familles, au sein même du cimetière de Los Resucitados. Il est assez étrange que ces êtres pleins de vitalité choisissent un endroit aussi funeste comme terrain de leurs attouchements aveugles, au milieu de toute cette mauvaise herbe que la lune baigne d'une lueur bleuâtre et glacée. Làzaro Anciano, mon facteur, affirme haut et fort que ce ne sont pas de jeunes amoureux, mais bien des spectres, sortis furtivement de leurs mausolées de marbre pour se livrer ensemble à des sortes d'orgies post-funéraires. Le pauvre bonhomme n'est à coup sûr qu'un vieil ahuri. Avec ses vêtements sombres, sa démarche hésitante et ses cheveux pommadés, il semble appartenir à une autre époque, indiscutablement révolue. Ce matin encore, tandis qu'il passait devant le patio sans aucun courrier à me transmettre, il m'a salué en soulevant son chapeau de feutre, tout décoloré par l'âge et mangé par les mites. Comme d'habitude à ce moment-là, entre neuf heures et midi, il m'a surpris assis les jambes écartées, légèrement penché en avant. Un pinceau à la main, devant la toile inexorablement vierge où couraient quelques insectes , j'attendais l'inspiration. Depuis deux ans, elle ne venait plus. J'avais beau la guetter dans les levers du soleil, dans son zénith et sa mort ; rien n'y faisait. A trente-trois ans à peine, j'étais un peintre raté.

Pourtant, autrefois, j'avais réussi à me faire un nom dans le milieu, là-bas, à Paris. On venait voir mes expositions ; on les appréciait. J'étais alors le plus jeune artiste dont la renommée fût aussi étendue, aussi hallucinante dans un univers très élitiste où même des individus talentueux ne parvenaient pas à sortir de l'anonymat. Cependant, ce qui me rendait le plus heureux, le plus optimiste en dehors de la réussite artistique, c'était sans conteste Hélène, ma femme. On s'était rencontrés au lycée, dans la cour pierreuse à l'ombre d'un Sycomore. Le frêle et pessimiste garçon que j'étais à l'époque n'avait su résister au torrent cristallin de son rire, à l'insouciance de ses manières, aux fabuleuses pupilles diaphanes qui me fixaient avec appétit. Et pourtant, seize ans plus tard, au sommet de ma carrière, elle est partie. J'aurais dû m'en douter ! Il fallait être un imbécile pour ne pas voir, ne pas remarquer que ce grec, ce Pâris tout vêtu de lin, sous prétexte de venir admirer mes oeuvres, ne cherchait qu'à séduire ma femme ! Et elle, lascive dans sa nature même (je l'ai toujours su) avait adopté d'instinct le comportement d'une chatte en chaleur. Tant et si bien que, quelques semaines après que le grec avait contracté l'habitude de venir me voir l'après-midi, elle s'était mise soudain à marcher en se frottant aux objets, en les caressants de ses jambes lumineuses, où la lumière du crépuscule jouait. Et moi, absorbé par mon travail, confondant lubricité et admiration dans les pupilles de mon visiteur, je ne me suis rendu compte de rien. Comme je m'en veux ! Quel crétin ! En tout cas, quand ma femme est partie, j'ai pris la décision, dévasté, de me réfugier en Espagne, pays pour lequel j'ai toujours eu une affection particulière. J'avais pensé aussi, sans trop réfléchir, que la Muse de l'inspiration serait peut-être plus charitable dans une contrée chaleureuse, gaie et colorée. Mais voilà plus de sept jours que je suis ici et il ne se passe toujours rien. Il faut croire que le socle même de mon art est parti avec ma femme. En tout cas, en attendant peut-être de pouvoir peindre à nouveau, j'ai décidé d'écrire, bien que je ne possède absolument aucun talent littéraire. J'écris en effet trop vite, je ne me relis pas ; en outre, je suis trop maniéré. Pourtant, il m'apparaît indéniable que l'écriture est également un merveilleux moyen d'expression, et c'est ce qui m'intéresse. Tout en essayant donc de vaincre ma propension naturelle à la surcharge adjectivale, j'ai l'intention de consigner minutieusement, scrupuleusement mes impressions, mes sentiments d'artiste au creux de la vague. Mais je m'arrête là pour aujourd'hui : j'ai mal au poignet, et mon ami Aureliano Martino ne va pas tarder à venir me chercher, pour aller boire un coup en centre ville.


Samedi 12 Octobre 1933 : Le temps a beaucoup changé. Les nuages, jusqu'alors absents, se sont mis brusquement à peser sur le ciel et la pluie, bien que très fine, a fait son apparition. Plus question de languir dans le patio. Je reste à l'intérieur, sur mon canapé avec mes livres et mes pinceaux. L'atmosphère est lourde mais mon coeur, lui, est ivre de bonheur. Ça a toujours été comme ça avec moi : je m'enflamme pour un rien. Un romantique à six sous, un incorrigible fleur bleue. Bref, je ne serai pas exhaustif : j'ai rencontré une femme. C'était avant-hier soir où, pour la deuxième fois d'affilée, j'avais entrepris la tournée des bars avec mon ami Aureliano. Au cours de la soirée, nous avons atterris dans une sorte de taverne très sombre, où les clients, agglomérés au comptoir comme des étoiles de mer sur un rocher, paraissaient plus morts que vifs. Dans cette ambiance alcoolisée, fleurant l'anis et l'urine, on se mouvait lentement, comme au milieu d'un marécage. Tout semblait en quelque sorte ralenti, englué dans la mélasse. Cependant, Aureliano et moi, bien qu'ayant quelques verres dans le sang, étions encore relativement frais, beaucoup plus lucides en tout cas que ces mollusques aux visages livides. J'ai pris rapidement place au comptoir. Le patron, un homme énorme aux favoris d'un autre temps, m'a servi un verre, puis un second, un troisième... La chaleur montait. Aureliano, un camélia dans la poche de son costume, sillonnait les recoins obscurs de la taverne, à la recherche de femmes. Tout compte fait, l'endroit s'avérait plus vaste que nous l'avions supposé en arrivant. Des colonnes immenses jalonnaient la pièce et, derrière elles, enveloppées de mantilles à pois, des femmelles attendaient, joyeusement avides de caresses. Pour une bouchée de pain, on pouvait se repaître à loisir de baisers langoureux. Aureliano, très vite, s'est immergé dans la pénombre des colonnes du désir. Je ne l'apercevais plus que lorsque qu'il émergeait de l'une d'entre elles pour disparaître dans la suivante. Il papillonait. Pour ma part, je préférais rester au comptoir, du moins pour le moment. En réalité, j'essayais simplement de gagner du temps. J'ai toujours été très timide avec les femmes. Bon, d'accord, j'ose enfin l'écrire : je n'ai jamais couché qu'avec Hélène. Cependant, lorsque je m'y attendais le moins, une voix fraîche, colorée, une de ces voix de velours que l'on ne rencontre qu'en Andalousie, s'est faite entendre près de moi, comme une cascade argentée.

En me retournant, j'ai frissonné. C'a été comme une apparition : devant moi se tenait, très droite, dans une robe légère aux plis somptueux, une femme, une jeune femme dans la fleur de l'adolescence. Elle portait une rose rouge à l'oreille, où perlaient de petites gouttes factices. Ses cheveux, noirs et abondants, étaient noués en un chignon parfait, immobile, que la faible lumière inondait de reflets bleus. Dans l'ovale de son visage brillaient des yeux en amandes, dorés, aux pupilles dilatées par l'alcool et l'obscurité. Souriante, elle m'avait interpellé : "Hé toi ! ça va ? Tu m'as l'air un peu ramolli !" Totalement pris au dépourvu, je n'avais pas répondu. "Hé ! Oh ! tu n'as pas envie de parler ?" s'était-elle obstiné, presque en colère. Ses gestes étaient si rapides, si juvéniles qu'il semblèrent déchirer l'atmosphère macabre qui avait jusque-là pesé sur la taverne. Elle irradiait la jeunesse et la vie. Ne sachant trop que faire, je lui ai souris. Alors, avec beaucoup de naturel, elle s'est assise en face de moi, sur le tabouret troué par les mégots de cigarettes. C'est alors que j'ai remarqué la splendeur de sa peau brune, qui semblait enduite de miel. Un décolleté généreux laissait également entrevoir la naissance de sa poitrine, sur laquelle on voyait s'étaler, magnifique au-dessus du sein droit, un grain de beauté. Je ne cacherai pas que mon sang, à la vue d'une pareille jeune femme, s'est mis à bouillir dans mes veines au point d'incendier mon visage et mes yeux. Le désir me calcinait. Dans mon pantalon, douloureuse et tenace, une grosseur me gênait. Pendant ce temps, elle m'avait demandé mon nom. Lorsque j'ai voulu savoir le sien, elle a souri coquettement et m'a répondu : "Nona". Quel beau prénom mythologique ! A ce moment-là, derrière l'une des colonnes, des soupirs se sont fait entendre, de plus en plus intenses et précis. C'était Aureliano qui, cette fois-ci, ne s'était pas contenté de caresses. Décidément, en Espagne, les moeurs sont légères. Alors, galvanisé par l'alcool et la présence si réelle de cette femme dont je pouvais sentir le souffle sur mon visage, j'ai décidé, moi aussi, de passer à l'action. Après tout, c'était elle qui m'avait abordé la première ! "Tu as envie qu'on aille derrière les colonnes ?" lui ai-je glissé, hors de moi. Elle a sursauté et rougi violemment. "Quoi ? Tu me prends pour une pute ?" Encore une fois, je me suis sentis maladroit et, voyant que je ne disais rien, elle s'est levée. "Connard !" a-t-elle crié. Mais je l'ai retenue par le poignet. "Attends ! Excuse-moi, j'ai cru que... étant donné ce que les autres femmes font ici... Recommençons depuis le début, tu veux ?"


Elle s'est un peu calmée et nous avons recommencé à parler. Elle semblait savoir beaucoup de choses, sur énormément de sujets. Nous avons passé à peu près deux heures ainsi, à faire connaissance. Maîtrisant très bien l'espagnol depuis mon enfance, je n'ai pu m'empêcher de remarquer que son vocabulaire était rempli d'archaïsmes, d'expressions vieillottes que l'on ne rencontrait plus que dans les vieux livres. C'était d'autant plus étonnant qu'elle m'a avoué n'avoir que dix-neuf ans. En outre, elle n'avait pas été élevée à la campagne, ce qui aurait pu expliquer un certain retard dans le langage, mais bien à Séville, dans un quartier au nom étrange duquel je n'avais jamais entendu parler. Au cours de la soirée, vers les onze heures, un orchestre s'était mis à jouer dans la taverne, avec guitarre, violoncelle et castagnettes. Une piste de danse improvisée s'était ainsi formée. Me prenant soudain par la main, Nona m'a obligé à danser, gracieuse et agile. La piste était mieux éclairée que le reste de la salle, à cause de la lampe à pétrole suspendue à la poutre juste au-dessus. C'est de cette manière que j'ai remarqué, tout en me laissant entraîner par les mouvements artistiques de la jeune fille, que ses mains, ses bras, lorsqu'elle les levait dans la lumière, devenaient étrangement diaphanes, comme le textile des mantilles ; la lueur de la lampe les traversait. En outre, les autres couples nous bousculait sans ménagement, nous tarabustait comme si nous étions nuisibles ou comme s'ils feignaient de ne pas nous voir. Néanmoins, la soirée s'est terminée dans la grâce, pour Nona et moi. Elle m'a promis de me revoir. Elle semble tenir à ce qu'on reste en contact : je ne pouvais pas espérer mieux. Cependant, lorsqu'elle a décidé de partir et qu'elle s'apprêtait à quitter la salle, un vieillard, qui nous avait lorgné pendant un bon moment et qui semblait mort, fané dans son costume serré, a craché trois fois sur le passage de la jeune fille. " Satanas !" a-t-il marmonné. J'ai failli m'en prendre à lui mais Aureliano, séché par la débauche, m'a intimé l'ordre de le suivre : il était temps de rentrer à la maison. Je m'arrête à nouveau ici pour aujourd'hui. Je suis on ne peut plus impatient de revoir Nona ; elle m'intrigue, bien qu'elle soit très jeune ; elle m'excite aussi, beaucoup.
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Message  Misra Sam 18 Fév 2012 - 11:30

Le texte est bien écrit, la lecture fluide. Cependant le thème choisi "Eros et Thanatos" ne me semble pas évident à déceler.
J'ai noté quelques erreurs d'ortho :
- "que j'ai diposées partout" : disposées
- "en les caressants" : pas de "s"
- "nous avons atterris dans une sorte de taverne" : atterri
- "des femmelles" , femelles
- "Il papillonait", papillonnait
- "je lui ai souris" : souri
- "En outre, les autres couples nous bousculait nous tarabustait" : bousculaient, tarabustaient
- "s'était-elle obstiné", obstinée

En ce qui concerne le style, "quelques semaines après que le grec avait contracté l'habitude de venir me voir" m'a paru lourd, ainsi que "ce qui aurait pu expliquer un certain retard dans le langage" (dont je ne saisis pas non plus l'intérêt).

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Message  hugofan Sam 18 Fév 2012 - 11:37

Merci pour votre commentaire, ainsi que pour la correction de mes erreurs. Je vous répondrai que j'ai essayé de mettre en exergue le thème désir-mort d'abord dans les mots, comme "frémissement orgasmique", "feuilles mortes", dans ces adolescents peut-être morts qui se livrent à des orgies dans un cimetière etc... et la nouvelle n'est pas finie. Le champs lexical désir-mort est récurrent. Nona elle-même, d'ailleurs porte le nom de l'une des Parques, celles qui donnent la mort en coupant le fil de la vie des hommes dans la mythologie. Et c'est une nouvelle fantastique, où le surnaturel va surgir....


< Comme on le demande à tous les auteurs, prière de bien vouloir attendre quelques commentaires avant d'y répondre de manière groupée. Ainsi vous éviterez de faire remonter vous-même votre texte en haut de page au détriment de ceux des autres auteurs.
Si vous désirez intervenir souvent ou développer, vous pouvez toujours le faire, à loisir, ICI.
Merci de votre compréhension.
La Modération >

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hugofan

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Message  Invité Sam 18 Fév 2012 - 15:06

Je trouve l'entrée en matière trop longue et l'écriture un peu trop travaillée, à la limite de la préciosité, ce qui n'exclut pas quelques clichés par exemple le soleil qui inonde de ses rayons
torrent cristallin de son rire
et impropriétés : aux fabuleuses pupilles diaphanes (les pupilles sont un trou dans l'iris, donc pas diaphanes !)
J'ai préféré la 2e partie, moins apprêtée que la première et où l'intrigue commence vraiment à se nouer.

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Message  Invité Sam 18 Fév 2012 - 15:58

Je n'ai pas terminé, je trouve le traitement terriblement narcissique, égocentré d'une part et puis franchement je ne supporte pas les clichés, de la pensée ou de l'expres​sion(et là ça foisonne, à commencer par : "le frémissement orgasmique des branches ", cause d'un incrédule grincement de dents).

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