Amant

[Frédéric Prunier]

un jour que je promenais, mes rêves d'écrire
au long d'une rangée de livres, mon désir
jouait en caressant les mots, imaginaire
des tatouages d'or, imprimés dans la chair

j'allais ouvrir cette peau de cuir, et plonger
entre les pages entre-ouvertes, sans bouger
le corps à l'arrêt, comme un chien de poétique
hésitant un peu, le choisir est diabolique

quelques noms de poètes suffisent au rêve
et quelques titres d'aventures me soulèvent
d'impossibles souvenirs, sans même les lire

mon esprit est fou à savoir tant de plaisirs
que je voudrais connaître en effleurant du doigt,
autant d'écritures, je ne vis qu'une fois

[Marvejols]

Des alexandrins souvent sans césure, des dodécamètres donc. Et cela passe très bien, fluidité avec quelques pauses très asservies au sens. Un exemple pour moi de modernité dans une tradition. Ce choix permet de mettre en valeur quelques points comme "mon désir", souvent soulignés d'une virgule prévenante. Magnifique. Un "morning glory" poétique ou une poésie morning glorique... J'aime votre art du double sens mine de rien.

[Invité]

On dirait du Proust à la sauce alexandrine.
C'est original et réussi.
L'écriture est fluide, poétique.
Enjambements et assonances rajeunissent la forme du sonnet.

Une très agréable surprise.
Respect Frédéric, je vous avais sous-estimé.

[Pussicat]

Etrange comme ce texte fait écho à ce que j'ai écrit au sujet de votre avatar... tout respire la passion, il transpire la passion votre texte. J'aime la fluidité de votre écriture, sa simplicité apparente, et la force des images qui me transportent immédiatement - comme un kidnapping- dans ces rayonnages labyrinthes d'une bibliothèque... je m'y vois, j'y suis, c'est cela : un kidnapping !
je retiens :
le corps à l'arrêt, comme un chien de poétique

et le dernier tercet, superbe, qui exprime votre soif inextinguible, l'impossible :
autant d'écritures, je ne vis qu'une fois
Les premiers rayons du soleil entrent par la fenêtre, et votre poème les accompagnent.
Merci pour cette lecture matinale.

[Arielle]

Le classique te va bien Frédéric, surtout quand il s'habille, comme ici, de vieux cuir gravé de lettres d'or.

Juste, à mon goût, pour éviter ce vilain e à la césure dans le dernier vers :
autant d'écritures, je ne vis qu'une fois
quelque chose comme: tant d'écrits dérobés, je ne vis qu'une fois, me paraîtrait plus fluide mais c'est toi qui sonnes ;-)

Encore bravo pour cet essai joliment transformé !

[CALIJO]

Personnellement j'aurais préféré un plus grand respect de la prosodie mais bon
j'aime bien l'ensemble finalement avec quelques très beaux vers dont je ressors celui qui me plait le plus :
des tatouages d'or, imprimés dans la chair.

Cordialement

calijo

[brabant]

J'aime beaucoup également ce sonnet à une amante qui ne déçoit jamais, peut attendre patiemment dans l'ombre, habillée de cuir, qu'on la caresse, la hume, la feuillette. Qu'on la pose et la repose. Sans colère et toujours avec la même envie. Amour donné, amour rendu, amour partagé, avec ouverture sur l'infini des impossibles soudain possibles.

Visuel et sensuel.

".. je ne vis qu'une fois", mais de combien de vies ? Ô Protée !

Sonnet inspiré !

Essai transformé !

Bravo !

[Damy]

je m'invite à ton banquet de dieu
dionysiaque, cher

[Pascal-Claude Perrault]

j'allais ouvrir cette peau de cuir, et plonger
entre les pages entre-ouvertes, sans bouger
le corps à l'arrêt, comme un chien de poétique
hésitant un peu, le choisir est diabolique

Hé Hé, ça ressemble à du butinage !
Voilà un beau sonnet moderne plein de passion, Frédéric. Tu m'avais bien dit que t'étais un passionné, je le vérifie ici. Bravo.

[Invité]

J'aime beaucoup le titre, tant la découverte d'un livre, d'une oeuvre est d'abord visuelle, puis tactile ensuite enivrante. et plonger soi-même dans l'écriture est vertigineux.
Sinon, la virgule au premier vers ne me semble pas nécessaire (d'autres l'ont peut-être dit, je n'ai pas lu les commentaires, je le ferai après).
Au troisième vers, j'avais imaginé "les mots imaginaireS"
"Le choisir est diabolique" : ah ! que j'aime !
Et enfin le lien entre écrire soi-même et lire, lire, lire (tant le monde de l'écrit est grand et riche) ne me semble pas indispensable dans un seul poème ou alors ce sont deux thèmes différents.

La passion est évidente dans ce poème.

[Frédéric Prunier]

merci Ô lecteurs et commentateurs ! et trices !!

pour la fin... j'assume le racourci, parce que j'aime aussi le lire phonétiquement au temps ce... autant..

sinon
j'ai juste envie de rajouter que l'écriture de ce texte m'est venu
grâce à nos discussions sur la poésie classique ou pas
dans l'exo du grand oeuvre...
...

amitiéssss

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