Les pleurs d'Alalia (2)

[Marvejols]

suite des Pleurs d'Alalia (Janvier 2012 - http://www.vosecrits.com/t10363-les-pleurs-d-alalia )


Comment on en vint au départ

. Les ostraques
L’assemblée avait été annoncée.
Depuis deux jours
Les enfants dont les cheveux portaient le lacet
Avaient cessé d’aider et renoncé à leurs jeux.
Ils s’étaient éparpillés joyeux dans les ruelles
Chantant disputant se chamaillant
Parfois chassés par les pucelles
C’est qu’ils devaient et pour mille
Amasser des morceaux des écailles
De pot de plat ou d’écuelle.
Couleur de lait, couleur de sang
Tous les fallait de la même taille
Arrondis comme font
Le pouce et le doigt mis en rond.
Avant le coucher ils devaient être
Recassés, retouchés, mis à la maille
Enfin présentés au maître.
Sévère, de cuir vêtu et de noir
Ce dernier, comptait, examinait,
Vérifiait et feignait
Se plaignait si besoin, mais sans nuire,
Aux mères et toujours le soir.

Et voilà qu’il finissait
Par déclarer
Qu’il n’en avait jamais mais jamais
-Et vrai depuis Callimaque-
Vu de plus belles de meilleures
Que ces telles ostraques
Et qu’on saurait leur valeur
Lorsque serait l’heure de s’assembler.


. Les mille
L’assemblée avait été demandée
Familles et clans tous vinrent
Parfois mandèrent un délégué
Qui reculant d’un pas
S’excusait de devoir représenter.
On prit place au soir tombé
Sous le grand nouguier
L’air était clément
On s’installait en groupes bavardants
Sur des pierres comme bancs
Qui demeuraient de l’ancienne fois,
Sur aussi de grosses billes de bois
Que les plus jeunes avaient portées
Riant et bousculant.
Sachant le plus souvent
De ce ban l’important
Ils en aimaient pourtant
Le moment.
Au peuple,
Des vingt et cents se demandaient
Si l’on ferait cette fois
Un votement.
Nombreux étaient ceux qui
Préféraient dans l’événement quand
Femmes et hommes, jeunes et plus grands
Se pressaient au rang.
Lorsqu’on allait en file
Dans l’aire sacrée du temple
Déposer dans l’osier tressé
Si longtemps serrée au creux du poignet
L’ostraque rouge ou blanc.
Chacun parmi chants, cousins et mille mains
Défilait en procession et dans l’encens.
Aux cieux la pourpre et le mauve
Montraient les dieux et le sort.
L’on se sentait mille
Et demain serait encore.


. Préférer la beauté du monde
Sous le grand figuier où la lune brille
Où déjà du parfum brûle
Familles et clans tous vinrent.
Aplu fut invoqué
Par deux femmes choisies
Pour la poésie de leurs formules
Que tous reprirent à répons.
Le jeune agneau une fois sacrifié
Une amphore pour les dieux versée
Le vin cramoisi se répandit.
Alors les discours se tinrent.

Bien des hommes parlaient haut
Qui dénonçaient
Avec des mots
Des maux plus affreux encore
Auxquels avec des lances, des clameurs
Et la mort
Ils sauraient
Mettre fin
Et sans elles.
Lors connaissant
Le prix des malheurs
Souvent les femmes
Avaient enfin
Et par leur silence même
Le dernier mot.

Eutert intervint dans l’assemblée.
Son premier mot fut pour le dernier des hommes.

[Marvejols]

Je suis très surpris de retrouver ce midi aggloméré au texte de Janvier celui que j'ai posté hier soir d'autant que cette fusion a été opérée sans que l'on ait pris mon avis.
En effet c'est à dessein que j'ai attendu 3 mois et posté ce texte séparément. D'une part ce n'est pas la suite linéaire du premier, d'autre part il est lisible comme un chapitre autonome, enfin je souhaitais qu'il soit examiné et commenté relativement indépendamment du premier et par exemple, sans que les commentaires -y compris le mien- ne puissent interférer sur la perception de cette partie 2. Par dessus le marché mettre cette dernière au bas de la première c'est d'abord re-proposer celle-ci à la lecture et donner toutes les chances aux lecteurs de ne pas aller voir le second texte dont la présence n'est de ce fait pas portée à leur connaissance.
Je vous remercie en conséquence de bien vouloir redonner son indépendance à ce Pleurs d'Alalia (2) dont le titre suffit à le rendre indépendant pour le catalogue.

[Invité]

Si je comprends ce que vous voulez entreprendre, c’est un projet ambitieux. Une ode qui va bien avec vos paysages méditerranéens. Je crois que la difficulté viens que chaque vers compte pour garder le lecteur en haleine.
Le suspense est là, on a envie de lire la suite. Mais pour la fluidité il faudrait peut-être ne pas céder à la facilité (par exemple avec des mots des maux) et veiller à la musique (par exemple Le jeune agneau une fois sacrifié).
Impressionné par l’ampleur de l’entreprise. Intéressé de lire la suite.

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