Amat, i.

[M-arjolaine]

10 Avril 2012

Me pardonneras-tu ? Pardonne-moi. Dieu sait que je n'ai jamais voulu te tromper, jamais voulu te faire de mal. En cinq ans de relation, c'est forcé, il y a toujours des moments de crise, c'est pareil pour tout le monde, nous ne sommes pas l'exception, même si on a voulu le croire, souvent.
Considères-tu ce que j'ai fait comme une trahison ? Il n'avait rien, rien à voir avec toi. Il exhalait des odeurs de nouveauté, de sauvagerie, des parfums suaves et inconnus qui m'attiraient, me fascinaient, même. Je me souviens, autrefois, toi aussi tu avais ces odeurs là. Mais à vivre ensemble, ton parfum et le mien s'étaient mêlés, et quand je reniflais ton corps, j'avais l'impression aussi de renifler un peu le mien.
Vous étiez si différents l'un de l'autre que j'étais curieuse ; moi qui n'avais quasiment connu que toi, qui n'avais jamais vibré dans une étreinte avec un autre, je me retrouvais pour la toute première fois à me demander si les sensations que je vivrais alors seraient meilleures, ou si tu étais définitivement celui qu'il me fallait, le seul...
Alors que tu es un être de finesse, d'élégance absolue et raffinée, il avait quelque chose de plus robuste, de plus claironnant aussi. Un côté petit paysan qui m'amusait. Je l'abordai une première fois avec peut être trop de vigueur ; déjà, je pensais au moment de l'étreinte.
Effrayé, il me fuit. Je lui laissai un peu de temps, me préparai également de mon côté à ne pas laisser transparaître mon impatience, mon désir, ma hâte... Puis, je revins vers lui, plus doucement cette fois ci. S'il accepta la discussion, il était loin de tout aimer de ma personne. Le rustaud m'empêchait de dire, ou de faire certaines choses, me bloquait le chemin quand j'essayais d'aller trop loin dans son intimité. Puis, au fur et à mesure que nous conversions, nous nous serrâmes l'un contre l'autre, de plus en plus près, et j'osai tenter une fusion. Vraiment, avec lui, ça n'avait rien à voir avec le faire avec toi. Alors que tu es toujours doux, tendre, passionné, lui était fougueux, pressé, violent, et tandis que j'étais habituée à tes souffles et à tes gémissements, lui parlait à voix haute, tempêtait, s'animait de plus en plus. Je ressortis de cette étreinte, presque même de ce combat, les joues rouges et les cheveux décoiffés. Rien, rien à voir avec toi. Des choses qui, pour nous deux, étaient habituelles, évidentes, il ne me laissait pas les faire, ne les comprenait pas, m'empêchait de les mener à bien. En revanche, il n'était pas réticent à d'autres tentatives qui toi, te laissaient toujours de marbre, et que tu refusais toujours très poliment, sans passion, c'était "non Marjolaine, je ne veux pas faire ça, et c'est tant pis pour toi", alors que lui criait "TU N'AS PAS INTÉRÊT A TENTER ÇA OU JE TE JURE QUE ÇA VA MAL FINIR", ce qui dans un sens, avait aussi un aspect excitant.
Mais enfin, je peux te promettre que cette histoire avec un autre m'a convaincue que je te préférais toi, et seulement toi, malgré les difficultés que nous rencontrons, souvent, et dont je sais que je ne les rencontrerais jamais avec d'autres de tes semblables. Aussi, pardonne-moi. Ne me fais pas la tête, et promets-moi que lorsque je te retrouverai demain, nous vibrerons ensemble, comme d'habitude. Ne te focalise pas sur ses odeurs que tu sentiras sur ma peau. Ce n'est même pas de ma faute si cela s'est passé, je ne pouvais simplement pas envisager une journée sans jouer, et si tu ne pouvais être là, alors il me fallait un substitut, n'est ce pas, il m'en fallait bien un ! C'est le luthier lui même qui m'a proposé le petit rustaud, et je le lui rends demain. Je n'y toucherai plus jusqu'à ton retour. Je te jure que tout cela était très innocent. Me pardonneras-tu ? Pardonne-moi.
A demain,

Marjolaine

Spoiler:

[Invité]

Subtil. Claironnant m'a mis la puce à l’oreille, mais je ne m'y suis pas attardé. Trop pianissimo sans doute (quoique pour un mot aussi sonnant). Grand éclat de rire à la fin. Bravo.

Quelques broutilles :
"me fascinaient, même" : il me semble que la virgule est superflue
"et quand je reniflais ton corps, j'avais l'impression aussi de renifler un peu le mien." : renifler 2 fois, humer, sentir, respirer… Sans compter que cela fait un peu "clébard". :-)))
"Vous étiez si différents l'un de l'autre que j'étais curieuse ;" : de quoi ? La phrase l'est en tout cas.
"Alors que tu es un être de finesse" pas sûr, mais il me semble que 'tout en finesse" conviendrait mieux.
"je l'abordai une première fois" puis 'effrayé il me fuit" : n'y a-t-il pas un pb de concordance des temps ?
"Je lui laissai un peu de temps, me préparai également de mon côté à ne pas laisser" : laisser (accordai, concédai).
"Je ressortis de cette étreinte, presque même de ce combat, les joues rouges et les cheveux décoiffés." : "presque même" est de trop et alourdit la phrase.
"Des choses qui, pour nous deux, étaient habituelles" : trop de virgules inutiles.
"je ne les rencontrerais jamais avec d'autres de tes semblables." : "d'autres de tes semblables" me laisse perplexe.
"Ne te focalise pas sur ses odeurs que tu sentiras sur ma peau." : une douche peut-être ?

PS : je n'ai pas compris le titre.

[Jano]

Je me suis fait avoir en beauté. Je trouvais tout de même que vous alliez un peu loin dans votre intimité mais je mettais ça sur le compte de l'audace et paf, dans les cordes !

[Invité]

Et moi qui me disais : jeune mais déjà très au fait de l'inconstance amoureuse et de ses déclinaisons. Tu nous as bien eus !
Cela dit, la personnalisation des objets est un procédé que je n'aime pas ; je reconnais toutefois une réussite ici.

[Invité]

Une maladresse ici, je ne sais pas si elle a été relevée : "ça n'avait rien à voir avec le faire avec toi." (la répétition du "avec", entre autre choses ; je comprends que le choix du "le faire" participe du leurre mais c'est plutôt laid dit comme ça).

[Phoenamandre]

Me suis dit "oh M-arjolaine, voyons ce qu'elle a fait cette fois !"
Et résultat, j'ai adoré ! Différent et pas si différent, la fin de tes textes remet toujours en question le début =D

Spoiler:

[Invité]

J'avais la puce à l'oreille précisément à cause de ce clacissisme tellement inhabituel chez toi ( aussi un peu le titre et je me souvenais que tu jouais du violon) mais j'ai beaucoup aimé.
Juste cet horrible

ça n'avait rien à voir avec le faire avec toi."

qui m'a fait tiquer.

[Janis]

ouais, c'est bien bon
comme jano au début je me suis dit ouhla !
et fait avoir
pareil pour la phrase relevée par coline
(je sais je me foule pas, mais voilà)

[polgara]

Contrairement à Easter, la personnalisation des objets est un procédé que j'adore. Pendant une bonne moitié de texte, je me suis sentie dans la peau d'une voyeuse, partagée entre le "ça-se-fait-pas" et le "chouette-je-m'installe".
Vu le peu de temps qui m'est accordé en ce moment, je choisis complètement par hasard les textes que je vais déguster, celui-ci me fait l'effet d'une gourmandise que l'on prend plaisir à déguster.

[Lucy]

C'est bien vu. Il y a eu des petits moments de doute, mais le vocabulaire employée, lui-même, redoublait ces doutes. Si bien qu'on finit par se dire :"Attendons, simplement, de voir ce qu'elle nous a concocté." Et ça le fait.

[elea]

Je ne me suis pas laissée prendre, c’était trop gros (pour moi) pour ne pas comprendre qu’il y aurait une pirouette finale, même si je ne l’avais pas associée au violon. Je crois que ça vient de la manière de s’adresser au supposé homme trompé, ça fait très peu naturel.
Une partie du plaisir de lecture a donc été un peu gâché parce que je n’ai pas pu m’empêcher de chercher les indices, de trouver les ficelles.

Mais c’est une jolie idée, amusante, qui se laisse lire agréablement question écriture et j’ai aimé relire une deuxième fois en sachant qu’il s’agissait d’un violon, c’est là que j’ai pris le plus de plaisir à lire ton texte parce que j’ai enfin ressenti de l’émotion.

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