Vos écrits
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.
Le deal à ne pas rater :
Pokémon EV06 : où acheter le Bundle Lot 6 Boosters Mascarade ...
Voir le deal

Le général est mort

4 participants

Aller en bas

Le général est mort  Empty Le général est mort

Message  hugofan Dim 22 Avr 2012 - 15:29

Bonjour, je poste le début d'une nouvelle que je prévois beaucoup plus longue. Elle s'arrête ici plutôt brutalement mais j'aime toujours avoir des conseils pour savoir si je fais fausse route. Voilà, bonne lecture ^^



Lorsque nous découvrîmes le général Armando Comala sous un sapin, gisant comme un cachalot sur une flaque de vomissure, aucun d'entre nous ne pensa tout d'abord qu'il pouvait être mort. On l'avait vu affronter tant d'épreuves, surmonter tellement de blessures, survivre à autant d'attentats que nous pensions véritablement qu'il était immortel.
Une fois, il s'était même fait coincer par l'armée dans une grande clairière, en plein milieu de la jungle. Des tireurs d'élite, cachés derrière les arbres, les plantes carnivores gigantesques, l'avaient arrosé de leurs mitrailleuses. " C'est comme une pluie de feu" avait-il dit au médecin du campement qui, plus tard, lui avait extraites une par une les balles dorées qui plombaient sa cage thoracique. Le soir venu, elles étaient douze à briller dans une petite corbeille en osier, que l'on s'empressa de faire circuler à travers toute la colonne. Une autre fois également, Aureliano, un jeune garçon timide aux jambes épilées, récemment engagé parmi nous mais rapidemment démasqué comme un infiltré au service de l'état, avait versé une dose pharamineuse de poison dans le café du général, capable de tuer un cheval. Celui-ci l'avait bu d'une traite, d'un air serein, sans jeter un seul regard sur Aureliano qui, assis sur un tabouret dans un coin de la tente, guettait, le cou tendu, les joues en flammes, la mort de notre patriarche. Nous étions à ce moment-là juste à l'extérieur, occupés à harceler une colonne de l'armée nationale qui s'était repliée au sommet d'une colline. Nous leur tirions dessus pour les contraindre à déguerpir. Cela se répétait souvent. L'armée régulière hésitait toujours à nous attaquer : elle n'était là que pour obéir aux ordres du gouvernement. Tandis que nous, nours mourions pour la justice, l'égalité, l'école dans les campagnes, l'argent pour les pauvres et l'expulsion définitive de ces putains d'amerloques aux cheveux jaunes pisseux. Bref, nous combattions lorsque notre général, un peu pâle, sortit de la tente où il s'était enfermé avec Aureliano. "Que viva el macho !" hurlâmes-nous à nous à plein poumons.
Il nous dit alors, d'une voix très calme : "Je veux que vous me débarrassiez immédiatemment d'Aureliano, c'est un sale traitre. Pas question d'organiser un conseil de guerre ; je n'ai pas de temps à perdre : pendez-le par les couilles !" Nous executâmes alors ce salopard devant toute la colonne, sur la branche d'un arbre. "Voilà ce qui arrive aux suppôts du capitalisme, de l'impérialisme, aux ennemis de la patrie !" hurlait le général, formidable, au milieu des cris du torturé. Ce genre de spectacle ne nous réjouissait guère, mais c'était le seul moyen de dissuader les éventuels mouchards, déserteurs ou assassins, qui pullulaient dans notre mouvement. Le général, d'ailleurs, les découvrait partout. Il avait le don de les repérer ; c'était instinctif chez lui. Des Aureliano, il en avait executé des centaines, par le cou, les couilles, la langue ; il les avait fusillés, écartelés, brûlés, étranglés parfois même de ses propres mains ; tant et si bien que, vers la fin de sa vie, oubliant sa propre invincibilité, il en était venu à soupçonner la présence d'ennemis jusque dans le cercle de ses collaborateurs les plus intimes. Ceux-ci le crurent même capable faire sauter la colonne à la dynamite, ni plus ni moins, pour se mettre à l'abri de ces putains de complots qui hantaient ses nuits d'insomnie.


Alors, lorsque nous découvrîmes qu'il était bel et bien mort, après lui avoir enfoncé un peu partout le canon de nos fusils, ce fut un soulagement. En le retournant sur le dos, nous constatâmes qu'il avait les yeux grands ouverts, vitreux, et une sorte de mousse verdâtre s'épanouissait aux commissures de ses lèvres. Mais aucune trace de sang. "De quoi est-il mort ?" "Que s'est-il passé ?" "Mon Dieu, il pue !" Toute notre colonne s'agitait. "Ecartez-vous !" dit le colonel Gerinaldo Martinez, le bras droit du vieux général. "Quelque chose a du péter dans son ventre. La nuit dernière, je dormais dans la tente à côté de la sienne et j'ai entendu, vers minuit, un énorme rot lui tordre les entrailles. Il a hurlé comme un gosse puis s'est rendormi. Je pense que c'est ça qui l'a tué." La nuit venue, nous l'enterrâmes à la hâte, en catimini, entre deux marécages en plein coeur de la forêt. L'armée régulière, comme si elle avait pressenti la mort du patriarche, avait commencé à pilonner notre campement. Nous étions donc obligés, une fois de plus, de déguerpir. Nous bougions tout le temps. Parfois, l'ennemi nous repérait des jours à l'avance avant de nous bombarder. Des flemmards. Cependant, quand ils pilonnait, ça virait toujours au carnage. Nous n'échangeâmes pas une parole durant tout l'enterrement du général. L'atmosphère était lourde, malgré l'étrange clarté lunaire qui tombait sur les marécages où flottaient des libellules bleues. De petites grenouilles multicolores sautaient également entre les plantes sauvages. Il suffirait de toucher l'une d'entre elles pour mourir instantanément foudroyé par un poison cent fois plus toxique que l'arsenic. Le général fut enterré dans une corbeille en osier gigantesque, accroupi, en simple costume de toile sans aucune décoration. C'était conforme à son souhait. Son corps était énorme, obèse, avec des guibolles éléphantesques, des bras d'orang-outan. Nul ne savait en outre, quel âge il pouvait bien avoir. Lorsque nous étions arrivés, nous, la plus jeune génération à s'engager dans la guérilla depuis les années soixante, il avait déjà l'air très vieux, décrépit, avec un visage semblable à un parchemin tout craquelé, fendillé en mille endroits

hugofan

Nombre de messages : 86
Age : 33
Date d'inscription : 19/04/2009

Revenir en haut Aller en bas

Le général est mort  Empty Re: Le général est mort

Message  Invité Dim 22 Avr 2012 - 17:20

Un bon début, rythmé, vivant, bien écrit et qui sonne familier ; peut-être un thème que tu as déjà abordé dans des écrits précédents ?

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

Le général est mort  Empty Re: Le général est mort

Message  hugofan Dim 22 Avr 2012 - 17:41

Merci beaucoup pour ton commentaire Easter (Island), ça m'encourage à continuer ! Plus je pense à ce texte, plus il se développe dans mon esprit ! Non, je n'ai jamais écris sur ce sujet, mais je me suis exclusivement plongé ces derniers temps dans la littérature latino-américaine et ça m'a marqué, en plus de la lecture d'articles relatifs aux guerillas etc

hugofan

Nombre de messages : 86
Age : 33
Date d'inscription : 19/04/2009

Revenir en haut Aller en bas

Le général est mort  Empty Re: Le général est mort

Message  Invité Dim 22 Avr 2012 - 17:56

Ok hugofan, merci. Et si tu peux répondre ici dorénavant, ça évitera à la modé d'avoir à intervenir :-)

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

Le général est mort  Empty Re: Le général est mort

Message  elea Mar 24 Avr 2012 - 19:17

Une lecture agréable, je lirai la suite avec plaisir. C’est très rythmé, pas une seconde d’ennui, ça coule tout seul. Le personnage du général est bien planté, vivant et crédible, je suis intriguée de voir où cela mène maintenant qu’il est mort.
Quelques coquilles évitables à la relecture mais je suppose que c’est un premier jet.

elea

Nombre de messages : 4894
Age : 51
Localisation : Au bout de mes doigts
Date d'inscription : 09/04/2010

Revenir en haut Aller en bas

Le général est mort  Empty Re: Le général est mort

Message  midnightrambler Mar 24 Avr 2012 - 22:16

Bonsoir,

Non, non ... et non !
Les tireurs d'élite ne tirent pas à la mitrailleuse ... et les balles de mitrailleuses ne sont pas des petits plombs pour tirer les moineaux ! Trop de détails incongrus !

Amicalement,
midnightrambler
midnightrambler
midnightrambler

Nombre de messages : 2606
Age : 70
Localisation : Alpes de Haute-Provence laclefdeschamps66@hotmail.fr
Date d'inscription : 10/01/2010

Revenir en haut Aller en bas

Le général est mort  Empty Le général est mort (suite)

Message  hugofan Jeu 19 Juil 2012 - 2:25

Bonjour, je poste ici la suite d'une nouvelle que j'avais déjà publiée ici, et que je prévois beaucoup plus longue, mais comme j'ai l'impression de m'embrouiller quelque peu, vos remarques seront les bienvenues. En espérant que vous ayez la patience de me lire ^^



Lorsque nous découvrîmes le général Armando Comala sous un sapin, gisant comme un cachalot sur une flaque de vomissure, aucun d'entre nous ne pensa tout d'abord qu'il pouvait être mort. On l'avait vu affronter tant d'épreuves, surmonter tellement de blessures, survivre à autant d'attentats que nous pensions véritablement qu'il était immortel.
Une fois, il s'était même fait coincer par l'armée dans une grande clairière, en plein milieu de la jungle. Des tireurs d'élite, cachés derrière les arbres, les plantes carnivores gigantesques, l'avaient arrosé de leurs mitrailleuses. " C'est comme une pluie de feu" avait-il dit au médecin du campement qui, plus tard, lui avait extraites une par une les balles dorées qui plombaient sa cage thoracique. Le soir venu, elles étaient douze à briller dans une petite corbeille en osier, que l'on s'empressa de faire circuler à travers toute la colonne. Une autre fois également, Aureliano, un jeune garçon timide aux jambes épilées, récemment engagé parmi nous mais rapidemment démasqué comme un infiltré au service de l'état, avait versé une dose pharamineuse de poison dans le café du général, capable de tuer un cheval. Celui-ci l'avait bu d'une traite, d'un air serein, sans jeter un seul regard sur Aureliano qui, assis sur un tabouret dans un coin de la tente, guettait, le cou tendu, les joues en flammes, la mort de notre patriarche. Nous étions à ce moment-là juste à l'extérieur, occupés à harceler une colonne de l'armée nationale qui s'était repliée au sommet d'une colline. Nous leur tirions dessus pour les contraindre à déguerpir. Cela se répétait souvent. L'armée régulière hésitait toujours à nous attaquer : elle n'était là que pour obéir aux ordres du gouvernement. Tandis que nous, nours mourions pour la justice, l'égalité, l'école dans les campagnes, l'argent pour les pauvres et l'expulsion définitive de ces putains d'amerloques aux cheveux jaunes pisseux. Bref, nous combattions lorsque notre général, un peu pâle, sortit de la tente où il s'était enfermé avec Aureliano. "Que viva el macho !" hurlâmes-nous à nous à plein poumons.
Il nous dit alors, d'une voix très calme : "Je veux que vous me débarrassiez immédiatemment d'Aureliano, c'est un sale traitre. Pas question d'organiser un conseil de guerre ; je n'ai pas de temps à perdre : pendez-le par les couilles !" Nous executâmes alors ce salopard devant toute la colonne, sur la branche d'un arbre. "Voilà ce qui arrive aux suppôts du capitalisme, de l'impérialisme, aux ennemis de la patrie !" hurlait le général, formidable, au milieu des cris du torturé. Ce genre de spectacle ne nous réjouissait guère, mais c'était le seul moyen de dissuader les éventuels mouchards, déserteurs ou assassins, qui pullulaient dans notre mouvement. Le général, d'ailleurs, les découvrait partout. Il avait le don de les repérer ; c'était instinctif chez lui. Des Aureliano, il en avait executé des centaines, par le cou, les couilles, la langue ; il les avait fusillés, écartelés, brûlés, étranglés parfois même de ses propres mains ; tant et si bien que, vers la fin de sa vie, oubliant sa propre invincibilité, il en était venu à soupçonner la présence d'ennemis jusque dans le cercle de ses collaborateurs les plus intimes. Ceux-ci le crurent même capable faire sauter la colonne à la dynamite, ni plus ni moins, pour se mettre à l'abri de ces putains de complots qui hantaient ses nuits d'insomnie.


Alors, lorsque nous découvrîmes qu'il était bel et bien mort, après lui avoir enfoncé un peu partout le canon de nos fusils, ce fut un soulagement. En le retournant sur le dos, nous constatâmes qu'il avait les yeux grands ouverts, vitreux, et une sorte de mousse verdâtre s'épanouissait aux commissures de ses lèvres. Mais aucune trace de sang. "De quoi est-il mort ?" "Que s'est-il passé ?" "Mon Dieu, il pue !" Toute notre colonne s'agitait. "Ecartez-vous !" dit le colonel Gerinaldo Martinez, le bras droit du vieux général. "Quelque chose a du péter dans son ventre. La nuit dernière, je dormais dans la tente à côté de la sienne et j'ai entendu, vers minuit, un énorme rot lui tordre les entrailles. Il a hurlé comme un gosse puis s'est rendormi. Je pense que c'est ça qui l'a tué." La nuit venue, nous l'enterrâmes à la hâte, en catimini, entre deux marécages en plein coeur de la forêt. L'armée régulière, comme si elle avait pressenti la mort du patriarche, avait commencé à pilonner notre campement. Nous étions donc obligés, une fois de plus, de déguerpir. Nous bougions tout le temps. Parfois, l'ennemi nous repérait des jours à l'avance avant de nous bombarder. Des flemmards. Cependant, quand ils pilonnait, ça virait toujours au carnage. Nous n'échangeâmes pas une parole durant tout l'enterrement du général. L'atmosphère était lourde, malgré l'étrange clarté lunaire qui tombait sur les marécages où flottaient des libellules bleues. De petites grenouilles multicolores sautaient également entre les plantes sauvages. Il suffirait de toucher l'une d'entre elles pour mourir instantanément foudroyé par un poison cent fois plus toxique que l'arsenic. Le général fut enterré dans une corbeille en osier gigantesque, accroupi, en simple costume de toile sans aucune décoration. C'était conforme à son souhait. Son corps était énorme, obèse, avec des guibolles éléphantesques, des bras d'orang-outan. Nul ne savait en outre quel âge il pouvait bien avoir. Lorsque nous étions arrivés, nous, la plus jeune génération à s'engager dans la guérilla depuis les années soixante, il avait déjà l'air très vieux, décrépit, avec un visage semblable à un parchemin tout craquelé, fendillé en mille endroits. La première fois que nous l'aperçumes, il sortait, furieux, d'un conseil de guerre. La journée avait été chargée : plus de trente cas de trahisons, de complots, de vols, d'infiltrations lui avaient fait perdre l'esprit, tant et si bien qu'il ordonna qu'ils fussent tous étripés en public, à poil, sous une armée de mouches empoisonnées qui venaient se repaître de leurs entrailles. Ce fut un spectacle particulièrement atroce. Mes amis et moi commencions même à regretter notre engagement, à mouiller nos frocs devant ces hommes qui se tordaient, hurlaient, déféquaient sous l'effet des pinces de leurs bourreaux, presque embrasées par le soleil. Mais lorsque l'exécution prit fin, que la nuit douce et tiède descendit sur le camp, et que l'odeur suffocante du sang fut remplacée par celle des amandes friant sur le feu, nous retrouvâmes notre calme, notre précieuse sérénité. Tout avait l'air si apaisé, comme si absolument rien de terrible ne s'était produit. Le général nous rejoignit, vers minuit, pour faire un discours. Devant le feu, qui projetait des ombres immenses lorsqu'il gesticulait, il avait l'air d'un colosse. Ses paroles étaient claires, précises, convainquantes. Il rappela notre mission, celle d'exterminer un ennemi vorace, égoïste, ce foutu capitalisme, afin de rétablir l'égalité,
l'ordre, la justice, dans un pays livré aux lubies d'un président incapable, fornicateur et vendu. Cétait précisément pour cela que nous étions venus. Toutes ces tortures, ces exécutions, n'étaient donc que des incidents, des évènements malheureusement indispensables au maintien d'un combat qui, lui, était profondément légitime. Depuis ce soir-là, nous, les jeunes collégiens fraîchement débarqués des régions du nord, ne le quittâmes jamais plus.

A cette époque-là, sa paranoïa ne l'empêchait pas encore d'avoir confiance en quelques collaborateurs aguerris, fidèles et qui ne vivaient que pour le contenter. L'un d'entre eux, Juan Tomaya, était spécialisé dans un domaine très précis : le commerce des femmes. Il allait souvent, le soir, marchander avec les veuves pauvres des bourgades voisines, leur proposant de la nourriture et des vêtements, en échange de leurs filles, qui seraient employées à la tâche hautement honorable de satisfaire les désirs du général Comala. En plus de cela, et si elles avaient de la chance, elles pouvaient espérer revenir dans leur foyer les entrailles pleines du fruit divin d'un si grandiose accouplement. Notre général, Dieu ait son âme, aimait beaucoup les femmes. Surtout les toutes jeunes, avec de grands noirs effrayés. Nous en croisions partout, derrière les arbres, sous les tentes, au bord des rivières où elles venaient s'allonger par désoeuvrement. Souvent, il en faisait entrer jusqu'à quatre dans sa tente. Nous attendions alors, lascifs, d'entendre ses grognement de vieil ours caverneux, pendant que les moustiques nous harcelaient, que l'ennemi nous pilonnait et que l'envie de faire l'amour nous déchirait les entrailles. De temps à autre cependant, il conscentait à nous les prêter, mais alors pour un laps de temps si bref que nous avions l'impression d'être d'éternels puceaux, à la recherche d'une jouissance que le monde entier nous disputait avec rage, comme des démons jaloux de notre bonheur. Mais le général nous répétait souvent que les femmes n'étaient qu'une distraction. " L'essentiel, disait-il, c'est la lutte, le combat ! On les aura ces fils de pute, on les aura ! Je le jure sur la mère qui m'a mis au monde !" Il est vrai que sa hargne était implacable, toujours intacte depuis un nombre incalculable d'années. Dans le nord du pays, majoritairement favorable au capitalisme, on le haïssait au-delà de toute expression. Son portrait figurait partout, maculé de crachats, dans les écoles, les mairies, les églises, les bordels même. Il était l'homme à abattre. Chaque jour, le président de la République rappelait aux citoyens par un discours télévisuel combien la nécéssité de se débarrasser du général se faisait sentir, pour la sécurité du pays. En ces occasions, on pouvait admirer son crâne chauve, ses yeux bigleux, ses lèvres de jouisseur que nous détestions tant. Il s'était couché devant les américains dès-avant son élection. Une vraie catin.

Cependant, aussitôt que la nouvelle de la mort de notre général se fut répandue, à une vitesse fulgurante, le Président, les experts, la police, l'armée régulière ne donnaient plus cher de notre mouvement. Ils pensaient que notre ardeur s'éteindrait ; qu'avec la mort de notre patriarche, nous n'aurions plus la force ni la volonté de poursuivre la lutte, et que nos colonnes se désintègreraient de l'intérieur. Il est vrai que nous étions bien désemparés...

hugofan

Nombre de messages : 86
Age : 33
Date d'inscription : 19/04/2009

Revenir en haut Aller en bas

Le général est mort  Empty Re: Le général est mort

Message  Invité Jeu 19 Juil 2012 - 17:32

Ok mais de plus fréquents retours à la ligne seraient bienvenus pour aérer. Ici par exemple :
"Notre général, Dieu ait son âme"
et
"Mais le général nous répétait souvent que les femmes n'étaient qu'une distraction. "
et
"Il est vrai que sa hargne était implacable, "



Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

Le général est mort  Empty Re: Le général est mort

Message  Invité Jeu 19 Juil 2012 - 17:34

Au fait, ce deuxième texte a été fusionné au premier post, comme il se doit ; pour des questions de catalogue mais aussi pour faciliter la lecture d'une suite plutôt que d'extraits séparés.

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

Le général est mort  Empty Re: Le général est mort

Message  hugofan Jeu 2 Aoû 2012 - 20:50

Le silence, atroce, n'avait jamais pesé si lourd sur nos hommes que lorsque le général fut bel et bien enterré, et que nous nous regardâmes avec stupéfaction, comme si aucun d'entre nous ne parvenait à croire qu'il était effectivement trépassé. Quelques-uns s'attendaient même à le voir revivre, surgir de sous terre pour nous engueuler d'avoir voulu l'asphyxier. Mais lorsque deux, trois heures passèrent, nous comprîmes qu'il n'était plus de ce monde et que nous allions devoir continuer sans lui. C'était presque inconcevable. La tristesse, l'abattement se lisaient sur tous les visages. Evidemment, celui qui était le mieux pressenti pour lui succéder était le colonel Gerinaldo Marquez, le dernier homme à l'avoir vu en vie, son bras droit, celui qui dormait, tous les soirs, dans la même tente que lui, déchiré par l'angoisse de se faire étriper, empoisonner, écarteler si le général venait à concevoir des soupçons à son égard. Ces derniers temps, le colonel s'était même assuré la protection de quelques combattants, serviables et vigoureux, au cas où notre patriarche aurait dans l'idée de se débarasser de lui. Car des bras droits en effet, il en avait eu des dizaines. Toujours, à un moment ou un autre, tout loyaux, honnêtes, cireurs de pompes qu'il fussent, on les retrouva morts, pendus, noyés, coupés en petits morceaux dans des boîtes de conserve. Dans cet univers où tout nous semble suspect, inquiétant ; où tout ce qui respire semble nourrir des intentions homicides à notre égard, le général Comala était le plus angoissé, le plus rongé par la peur de se faire crever comme un porc. "On me veut du mal disait-il. On veut se débarasser de moi !Mais personne n'aura pas ma peau ; personne ne me verra mort avant la victoire de notre mouvement !". Hélas, le combat fut beaucoup plus long, plus âpre, extrêmement plus subtil qu'il ne l'avait imaginé. Certes, dans sa jeunesse, il s'était engagé par conviction, obnubilé par les promesses mirifiques dont regorgaient la philosophie de Karl Marx ; il aurait donné sa vie pour rencontrer cet homme-là. Néanmoins, avec les années, il semble que les véritables motifs de son engagement s'étaient estompés dans le marécage gluant de sa mémoire, dans le labyrinthe obscur de sa longue vie, au point qu'il n'était plus, ces derniers temps, qu'un éléphant haineux et revanchard, un peu bègue et aveugle comme une taupe. Une semaine avant sa mort, il ne se déplaçait plus qu'à tâtons. Un après-midi, et alors que sa difficulté à reconnaître ses interlocuteurs exacerbait cruellement sa paranoïa, Alinardo, un jeune combattant arrivé le jour même, se retrouva en plein milieu de son chemin, tandis que le vieux général se hâtait de son mieux pour atteindre les cabinets. Tout rouge, au garde-à-vous, le timide Alinardo ployait sous le respect que lui inspirait cette vieille silouhette somnanbulique qui, au même moment, tentait désespéremment de l'identifier. "Qui es-tu ?" hurla enfin le général, de sa voix d'alcoolique incorrigible. Le jeune combattant, trop choqué, chamboulé, effarouché, ne sut que répondre.C'est alors que le patriarche, croyant se trouver en face d'un assassin, se jeta sur lui et, sortant le canif qu'il gardait toujours sans sa poche, lui trancha la gorge avec une adresse insolite. "On a essayé de me tuer ! A l'aide ! Au complot ! Au meurtre !" glapissait le général pour nous ameuter. Lorsque nous vîmes la dépouille du pauvre Alinardo, étendue sur le sol les yeux grands ouverts, exorbités, personne n'osa dire au général qu'il venait de supprimer un de nos hommes, qu'il s'était trompé. Nous nous contentâmes de le démembrer, de l'éviscérer et de brûler ses restes, comme il est coutume de le faire avec le cadavre des félons, et de disperser enfin ses cendres au vent, pour que de poussière il retourne, abominable pourriture, à la poussière.

C'est ainsi que lorsque notre guide mourut nous nous souvîmes avec commisération de notre infortuné camarade, sacrifié aux délires d'un général décrépit. Le colonel Gerinaldo Marquez lui rendit hommage dans un discours, les larmes aux yeux. Mais le problème de la succession vint très vite effacer ce petit moment de répit, de fraternité insolite au sein d'un mouvement ébranlé dans ses fondations les plus profondes. Six jours après que le général Armando Comala fut enterré, son bras droit réunit toute notre colonne dans une tente gigantesque, dressée pour l'occasion, tandis que les hélicoptères des forces capitalistes nous harcelaient comme des guêpes gigantesques et que le président de la République, cette vieille catin, se mourait lui aussi. Sous une chaleur suffocante, où même les mouches semblaient languissantes, nous débattions, féroces, de l'avenir de notre mouvement. "Celui qui est le plus à même de poursuivre la lutte, mes chers camarades, c'est bien notre colonel Gerinaldo Marquez, à n'en pas douter !" affirma Tomaso, vieux combattant aux manières singulièrement féminines. "J'en met ma main à couper!" renchérit Daniel, beaucoup plus jeune et plus cruel, aussi. Mais l'élection de notre colonel, contrairement à ce qu'on pourrait penser, était loin de faire l'unanimité dans notre colonne. D'abord, on le trouvait louche, avec ses moustaches sales et ses yeux enfoncés dans ses orbites au point qu'on avait du mal à les distinguer. Ensuite, il avait beaucoup moins de charisme que notre vieux général et pour enfoncer le clou on le soupçonnait d'être sodomite, car beaucoup de nos jeunes qui s'étaient risqués à accepter son invitation dans la vieille cabane en roseaux, celle qu'il avait construite lui-même à l'écart de nos tentes, s'étaient plaints à plusieurs reprises de caresses trop appuyées et de propositions salaces. Un de nos meilleurs tireurs, après une soirée arrosée dans la maudite cabane, s'était même tiré une balle dans la tête, rongé par le remords de s'être adonné à la plus aberrante des pratiques. Voilà pourquoi le colonel Gerinaldo Marquez, adulé par certains (dont, sans doute, quelques-uns de ses amants) était exécré par d'autres, en particulier par Arcadio et moi. Nous ne pouvions pas le supporter. Dans la suite des débats, plusieurs noms furent proposés, en tant que concurrents du colonel Marquez. Certains étaient très anciens, profondément respectés dans notre mouvement ; mais d'autres, curieusement, étaient beaucoup plus jeunes, peut-être à cause du fait que nos combattants les plus usés, laminés par des dizaines d'années de combats incertains et fangeux, voulaient, à travers l'élection d'un chef jeune et charismatique, être sûrs que la motivation, la hargne de notre mouvement ne s'émousserait pas suite aux circonstances de plus en plus difficiles. Un jeune homme, en raison même de son inconscience, est beaucoup moins sujet au découragement. Soudain, au milieu des discussions passionnées, Arcadio se leva d'un bond et hurla, comme sous le coup d'une révélation soudaine : "Je propose Armadio comme chef de notre mouvement!" Armadio, c'était moi.

Plusieurs têtes se tournèrent dans ma direction. J'en rougis jusqu'à la racine des cheveux. "C'est vrai, quoi ! poursuivit Arcadio. C'est le plus calme, le plus intelligent, le plus implacable de nos combattants ! Il ferait un guide parfait. D'ailleurs le général l'aimait beaucoup, et n'oublions pas que c'était lui qui nous lisait, chaque après-midi, les textes de Marx, parce que le général aimait sa voix." Il y eut un silence. Décidemment, ma candidature, contrairement à ce que je redoutais, ne suscitait pas la moindre moquerie. On y songeait même de manière sérieuse. C'est pourquoi les partisans du colonel Gerinaldo Marquez, scandalisés par la perspective d'une éviction de leur candidat, se mirent à vociférer, alléguant que ma candidature était une farce, et qu'à tout prendre je n'étais bon qu'à traire les vaches du mouvement révolutionnaire. Mais certains anciens prirent fait et cause pour moi, toujours en raison de la sale réputation du colonel Marquez et, je pense, de mon ardente jeunesse. Dès lors, il se forma deux clans dans toute la colonne ; deux clans qui s'épiaient, se calomniaient, complotaient au-delà de toute mesure. Mon adversaire, plus sournois que jamais, se lança dans une vaste campagne de séduction. D'abord, et pour infirmer sa réputation de pédéraste invétéré, il se procura des filles dans les bourgades voisines, par le même moyen que le général Comala, et s'enferma plusieurs jours dans sa tente avec elles. Mais j'étais sûr qu'il ne les touchait même pas, et que ses cris, ses halètements de pute simulatrice n'étaient que des artifices ingénieux dans le but de faire croire à son hétérosexualité, aussi soudaine que son penchant pour les combats de coqs et le tabac. Lorsqu'il sortait de sa tente, à la tombée de la nuit, il embrassait ostensiblement ces pauvres gamines, les enlaçait, torturait leurs petits corps en bourgeons ; il avait trop observé le vieux général pour reproduire exactement son comportement viril avec les femmes. Toute cette mascarade me mettait hors de moi. Mais je prenais soin, par contraste avec son comportement, de me montrer austère et sérieux, adoptant d'ores et déjà le comportement d'un chef, ce qui me valait beaucoup d'admiration et de crédit. Un soir, inspiré, je fis un discours auprès du feu, projetant de grandes ombres autour de moi, au fur et à mesure que je gesticulais ; les amandes grillaient sur le feu et l'univers entier me sembla pris dans une effervescence humaniste, patriotique et égalitaire. Mes partisans, enthousiasmés, entonnèrent à un chant de victoire, un chant à ma gloire, ce qui ulcéra le colonel Gerinaldo Marquez dans sa tente remplie de filles perdues dont le sommeil était plus agité qu'une mer en furie. C'est pourquoi, le lendemain, Daniel, le cruel partisan du colonel, tua, d'un coup de couteau en plein dans le coeur, un de mes hommes les plus proches, celui qui partageait, le soir, mes confidences les plus intimes.

Ps : je publierai la fin très bientôt, en espérant que ce texte vous plaise ^^

hugofan

Nombre de messages : 86
Age : 33
Date d'inscription : 19/04/2009

Revenir en haut Aller en bas

Le général est mort  Empty Re: Le général est mort

Message  Invité Ven 3 Aoû 2012 - 15:29

Hugofan, je continue à te lire et t'apporter un commentaire aussi succint soit-il parce que quand je commence quelque chose, je m'efforce de finir ; je constate toutefois avec agacerie que toi de ton côté et en dépit de remarques antérieures à ce sujet, tu continues à venir ici pour poster sans commenter quiconque. Ce qui explique, à n'en pas douter, que tes lecteurs soient clairsemés pour le moins.
Soyons donc clairs : je lis (et commente) cette nouvelle jusqu'au bout mais ne renouvellerai pas l'expérience si tu reviens poster sans contribuer plus activement à la vie du forum.

Donc.
Rien trop à dire sur le fond.
Bien vu l'entrée en scène du narrateur même si la façon de le présenter m'a tiré un sourire, tant elle est immodeste, même à travers les mots d'un autre : "C'est le plus calme, le plus intelligent, le plus implacable de nos combattants ! Il ferait un guide parfait."

Sinon, c'est toujours très dense, ce serait bien d'aérer la présentation à défaut de l'écriture.

Sur la forme, voici ce que j'ai relevé :

"peut-être à cause du fait que nos combattants les plus usés," (lourd ; "peut-être parce que" ?)

De toute façon, la phrase entière est trop longue :
"Certains étaient très anciens, profondément respectés dans notre mouvement ; mais d'autres, curieusement, étaient beaucoup plus jeunes, peut-être à cause du fait que nos combattants les plus usés, laminés par des dizaines d'années de combats incertains et fangeux, voulaient, à travers l'élection d'un chef jeune et charismatique, être sûrs que la motivation, la hargne de notre mouvement ne s'émousserait pas suite aux circonstances de plus en plus difficiles."

"il avait trop observé le vieux général pour reproduire exactement son comportement viril avec les femmes." ("assez" ; ou alors " il avait trop observé... pour ne pas reproduire")

"Toute cette mascarade me mettait hors de moi. Mais je prenais soin, par contraste avec son comportement, de me montrer austère et sérieux, adoptant d'ores et déjà le comportement d'un chef"

"Mes partisans, enthousiasmés, entonnèrent à un chant de victoire,"

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

Le général est mort  Empty Re - Le général est mort

Message  Raoulraoul Jeu 9 Aoû 2012 - 8:36

Atmosphère bien traduite. Toutefois je raccourcirais les phrases du début trop longues, lourdes en adjectifs. Je ne connais pas ton projet de longueur, mais il me semble que les actions pourraient être plus présentes, moins de longueur descriptive. Prévoir un peu de dialogue. Je sais que la littérature latino
des années 80 se répand en descriptions foisonnantes, mais les nouveaux auteurs d'aujourd'hui sont plus concis, moins complaisants avec les détails qui plombent le récit, surtout s'agissant d'une nouvelle.
Ceci n'est que mon point de vue... à relativiser, mais continue.
Raoulraoul
Raoulraoul

Nombre de messages : 607
Age : 63
Date d'inscription : 24/06/2011

Revenir en haut Aller en bas

Le général est mort  Empty Re: Le général est mort

Message  Contenu sponsorisé


Contenu sponsorisé


Revenir en haut Aller en bas

Revenir en haut


 
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum