Ah si j'étais riche ! ( en ces temps de promesses )

[CALIJO]

Avec tous ces aimants qui tournent la boussole
Moi pourtant éloigné du miroir incurvé*,
A force de reflets saisissants, j’ai rêvé
Qu’au fond de mon jardin s’écoulait le Pactole.

Et ce que je faisais n’était pas agricole :
En remplissant des seaux du liquide exalté
Je conviais ici malheur et pauvreté
A boire sans pudeur la boisson bénévole.

Comblé par la richesse et le cœur généreux
Pour assouvir la gorge âpre des miséreux
Je me sentais dispos à partager la Lune.

O nobles pourfendeurs des vices du Pays,
Nous qui fûmes un jour par ce songe envahis …
Ah comme il est aisé d’être bon sans fortune !!



* la télé, à l'époque les écrans
n'étaient pas encore plats
Mai 92/11

[Invité]

Une fable savoureuse et bien torchée.
La chute est digne des meilleurs fabulistes.
Bravo

[Annie]

C'est intéressant, et attachant, mais je me sens insastifaite sur plusieurs points.

Quelques vers sont d'une expression vraiment banale, terne
"Et ce que je faisais n’était pas agricole"
un seul mot significatif dans ce vers: agricole, plus précisément pas agricole (ce qui fait 2, je l'admets!)
Le reste est du remplissage.

Et puis le moralisme en poésie --je sais, je sais, il y a de merveilleuses fables, est très délicat à manier.
D'autant plus que dans ce cas la morale est tout à fait paradoxale: il est surtout aisé d'être bon quand on est fortuné, donc ce retournement, qui peut se comprendre dans un autre contexte, me laisse perplexe.
Je suppose qu'il s'agit d'ironie de l'auteur à l'égard de soi-même, mais alors les 2 vers
"O nobles pourfendeurs des vices du Pays,
Nous qui fûmes un jour par ce songe envahis …"
détournent le sujet.

C'est ma lecture, n'en prenez surtout pas ombrage, je peux me tromper (comme tout le monde!)

[Albert-Robert]

J'aime (quand ils sont bien écrits, et c'est le cas) les poèmes qui n'hésitent pas à s'attaquer à des sujets actuels de société.

Et, Annie, je ne vois pas de moralisme ici, mais une juste dénonciation des promesses alléchantes ... mais jamais tenues.

Albert-Robert

[Ba]

Voilà un petit sonnet qui sonne juste dans nos " poches trouées ".

[Invité]

Le thème, les sonorités, le propos me plaisent moins que dans "APPARITION".

[CALIJO]

Merci Tizef, Albert-Robert et Ba pour vos commentaires.

A Annie : Il n'y a aucun coté moralisateur dans ce poème mais surtout de la moquerie.
je l'ai ressorti pour la campagne électorale car je pense qu'il s'adapte bien à la situation présente
mais au départ c'était juste une réponse moqueuse à l'écoute des gens devant les jeux télévisés.

Je reconnais que le vers : Et ce que je faisais n'était pas agricole n'est pas de grande facture
mais je réfute le coté remplissage.

Après j'adopte le NOUS car je pense n'être pas le seul à avoir eu ces pensées.

A Eclaircie : éclaircie n'aime pas les poésies engagées, c'est son droit mais alors faire fi des Châtiments ou L'Année Terrible ?
d' Aragon et Jean Ferrat ?

Cordialement

Calijo

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