Exo "j'attendrai" : Le canotier

[Invité]

Je l’ai choisi avec un ruban rouge. Carmin pour être précis. Il me donne la belle allure des personnages de Gustave Caillebotte. Outre ce canotier, je me suis offert une périssoire. Aventurier dans l’âme, je puis ainsi faire de l’exercice et profiter du bon air tout en restant assis.

Surtout, ne parlez pas de ce qui suit à mes collègues de bureau. Autant de cuistres bedonnants. Ils n’y verraient qu’une occasion de rire.

Cet automne, un vol de bernaches s’est posé sur le petit lac où j’ai mes habitudes. J’ai eu cette chance extraordinaire d’assister à leur tonitruante arrivée. L’eau était vert bouteille, les berges commençaient à roussir sous un somptueux ciel de traîne. J’ai ressenti une félicité que les mots ne peuvent traduire ici.

Ces petites oies grises à tête noire ne sont pas très farouches. Lorsqu’elles naviguent en flottille, je puis m’en approcher à distance raisonnable. J’ai même fini par me faire adopter.

À ce point, qu’un après midi de janvier — le ciel était très pur, un peu de neige blanchissait le haut des collines — m’est venu cette idée un peu folle : atteler une demi-douzaine de ces volatiles afin qu’ils tractent mon esquif.

Dans un premier temps au ras des flots, comme une diligence aquatique. Mais ensuite, pourquoi ne pas prendre le chemin des nuages ? À condition, bien sûr, de munir ma périssoire d’un petit aérostat. Et surtout de convaincre et de harnacher toute l’escadrille.

Pour l’instant les palmipèdes refusent obstinément de collaborer. Mais il faut savoir donner du temps au temps.

J’attendrai.

[Invité]

Encore un exo ! c'est comme la canicule, ça vous arrive d'un coup. Mais bon, ne boudons pas notre plaisir, c'est du Tizef. Là il s'agit de l'extrait adapté d'une nouvelle que j'ai lu je ne sais plus où (sur Vosecrits vraisemblablement). Ceci étant, c'est fait avec élégance.
PS : pis, les exos c'est un peu l'identité du site (quoique parfois, cela devienne logorrhéique (si je puis m'exprimer ainsi)).

[Invité]

De Caillebotte ( et de mémoire... ) je connais des scènes de rue dans un Paris hausmannien, et puis la célèbre scène du parquet ( ai oublié le nom du tableau). Mais il faudra que j'aille sur google pour voir des porteurs de canotiers.

Sinon, j'aime beaucoup le côté calme, serein et poétique qui se dégage de ce texte.

[Invité]

Iris, voici un des tableaux de Caillebotte consacré aux périssoires

[Invité]

Ah, oui. On voit aussi des canotiers chez Renoir. Que tout ceci est beau !
Et ce petit texte est ravissant. En le lisant, je voyais un grand-père, au bord de l'eau, en train de raconter cette histoire à son petit-fils (ou petite-fille) avec plein de malice dans les yeux, et je voyais les yeux crédules, émerveillés, de l'enfant.

[Legone]

Pas mieux qu'embellie, c'est très joli.

[Rebecca]

Un tableau brossé avec toute la délicatesse et la fantaisie qui te caractérisent Tizef. Une écriture ciselée. Un p'tit moment de bonheur hors des sentiers battus.

[Invité]

1552 : un peu de relâchement ;-)

Jolie histoire où tu ne fais pas tout un fromage.

Je pense à un dessin, peut-être de Peynet, où il y aurait un tel attelage.

[Lizzie]

Toujours délicat, j'aime. L'humour, le brin de surréel, point trop n'en faut. Ah, oui, une image m'est venue à l'esprit: un Père Noël à canotier, plus léger que le rouge barbu. :-)

[Invité]

Merci pour l'image, Tizef !
Je vois que tu es aussi matinal que moi ! :-)

[Janis]

Ah, toujours cette joyeuse fantaisie qui réjouit la lectrice que je suis

[Marine]

Je vous préfère en poésie.
Je trouve qu'ici en prose il manque un peu de naturel ; j'ai pensé en lisant que vous aviez en tête de faire sourire ou de séduire et le mécanisme d'écriture m'en a semblé trop visible. J'ai eu l'impression d'un manque de sincérité, mais peut-être tout simplement que je n'apprécie pas ce style ici. Je reviendrai plutôt de l'autre côté !

[polgara]

encore du bon, très bon. Pour une raison que j'ignore j'imagine bien une petite chanson de Maurice Chevalier entrain de te trotter sur le clavier quand tu t'es plongé dans ce texte. Ce texte est déconcertant d'une complexe facilité. Enfin je me comprends. Et j'ai adoré naturellement.

[Sahkti]

Ha, Caillebotte... un univers brossé ici en quelques signes avec beaucoup de poésie, de tendresse aussi dans la façon de se fondre dans le décor. J'apprécie que l'exubérance ne soit pas présente plus que cela, qu'au contraire, simplicité et pudeur viennent s'ajouter à la douceur du récit.

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