Exo "La parole est aux objets" : Le grand départ ?
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Exo "La parole est aux objets" : Le grand départ ?
Au coucher du soleil, on l’entendait à peine. Tout juste un crissement de sable. Peut-être un chant de coquillage. Mais à présent, je la sens toute proche. Elle monte.
Tout à l’euphorie de son premier bivouac, mon rêveur de pilote a négligé de me remonter en haut de la grève, hors de portée du flot. Sa façon à lui de faire des économies d’énergie. Les guitounes érigées, le petit groupe d'aventuriers du weekend casse la croûte autour d'un feu d'épaves et de goémon sec. Ils ont l'air de bien s'amuser et de se fiche comme d'une guigne du malheureux esquif oublié sur le sable humide.
Ma pointe arrive à peine au niveau du cordon de varech, témoin de la dernière pleine mer aux alentours de midi. Il suffirait que la marée de la nuit soit un peu plus forte pour que je parte à la dérive.
Et franchement, ça me plairait bien. Je mènerais ma petite vie d’esquif autonome, au gré des vents et des courants sans avoir à supporter mon lourdaud de bipède. Je me rirais des vents et des brisants, comme un oiseau de mer. Il n’y a que les sots pour prétendre que les kayaks de mer sont des bateaux instables. Ce sont nos pagayeurs qui nous font subir leur propre instabilité.
Une vaguelette est venue se briser au ras de ma pointe arrière. Encore un petit effort ! J’en frémis de plaisir.
J’irais sur les plans d’eau mythiques. Là où seuls les meilleurs osent s’aventurer. Ouessant, le Fromveur, la pointe du Raz... Et lorsque j’aurais profité tout mon saoul de la violence de l'Iroise, emporté par vents et courants, j’irais sous d'autres ciels. Comme ces bouteilles confiées à la mer et qui font le tour du monde.
Ça y est ! Je flotte !
J’ai reculé d’un bon mètre et je commence à pivoter. Sous un soupir de demoiselle, je me sens partir doucement vent de travers. Une risée. Ma dérive s’accentue. Le souffle s'évanouit. Mais je suis déjà à plus de dix mètres du rivage.
Ça y est ! Le zéphyr fraichit un poil. C’est parti pour la grande aventure ! Il me reste seulement à redresser le cap pour filer droit au lieu de chasser en crabe. Mais je ne sais pas trop comment m’y prendre. C’est agaçant. Je ne vais tout de même pas faire le tour du monde en dérivant comme un madrier…
– Oh ! Les mecs ! Il y a un bateau qui fiche le camp !
– Merde ! C’est le mien !
Tout à l’euphorie de son premier bivouac, mon rêveur de pilote a négligé de me remonter en haut de la grève, hors de portée du flot. Sa façon à lui de faire des économies d’énergie. Les guitounes érigées, le petit groupe d'aventuriers du weekend casse la croûte autour d'un feu d'épaves et de goémon sec. Ils ont l'air de bien s'amuser et de se fiche comme d'une guigne du malheureux esquif oublié sur le sable humide.
Ma pointe arrive à peine au niveau du cordon de varech, témoin de la dernière pleine mer aux alentours de midi. Il suffirait que la marée de la nuit soit un peu plus forte pour que je parte à la dérive.
Et franchement, ça me plairait bien. Je mènerais ma petite vie d’esquif autonome, au gré des vents et des courants sans avoir à supporter mon lourdaud de bipède. Je me rirais des vents et des brisants, comme un oiseau de mer. Il n’y a que les sots pour prétendre que les kayaks de mer sont des bateaux instables. Ce sont nos pagayeurs qui nous font subir leur propre instabilité.
Une vaguelette est venue se briser au ras de ma pointe arrière. Encore un petit effort ! J’en frémis de plaisir.
J’irais sur les plans d’eau mythiques. Là où seuls les meilleurs osent s’aventurer. Ouessant, le Fromveur, la pointe du Raz... Et lorsque j’aurais profité tout mon saoul de la violence de l'Iroise, emporté par vents et courants, j’irais sous d'autres ciels. Comme ces bouteilles confiées à la mer et qui font le tour du monde.
Ça y est ! Je flotte !
J’ai reculé d’un bon mètre et je commence à pivoter. Sous un soupir de demoiselle, je me sens partir doucement vent de travers. Une risée. Ma dérive s’accentue. Le souffle s'évanouit. Mais je suis déjà à plus de dix mètres du rivage.
Ça y est ! Le zéphyr fraichit un poil. C’est parti pour la grande aventure ! Il me reste seulement à redresser le cap pour filer droit au lieu de chasser en crabe. Mais je ne sais pas trop comment m’y prendre. C’est agaçant. Je ne vais tout de même pas faire le tour du monde en dérivant comme un madrier…
– Oh ! Les mecs ! Il y a un bateau qui fiche le camp !
– Merde ! C’est le mien !
Invité- Invité
Re: Exo "La parole est aux objets" : Le grand départ ?
Poétique cette envie d'affranchissement, de liberté.
Legone- Nombre de messages : 1121
Age : 50
Date d'inscription : 02/07/2012
Re: Exo "La parole est aux objets" : Le grand départ ?
Bon dieu, mais qu'est-ce que tu attends, Tizef, pour plonger et aller le récupérer ?
Finies les économies d'énergie !!! Allez, nage, nage...et reviens-nous vite quand-même.
Finies les économies d'énergie !!! Allez, nage, nage...et reviens-nous vite quand-même.
Invité- Invité
Re: Exo "La parole est aux objets" : Le grand départ ?
Le kayak libre : un remake du bateau ivre... *sourire*
Invité- Invité
Re: Exo "La parole est aux objets" : Le grand départ ?
Ce soir je voyage... De la mer d'Iris au kayak de Tizef.
Et j'ai aimé me laisser emportée par cette tentative d'évasion.
Phylisse- Nombre de messages : 963
Age : 62
Localisation : Provence
Date d'inscription : 05/05/2011
Re: Exo "La parole est aux objets" : Le grand départ ?
La marée montante vient titiller les vélléités de partir du petit esquif livré à lui-même. Les rêves de liberté sentent déjà le vent du large. De beaux horizons s'ouvrent. Mais se diriger tout seul, cela n'est pas si facile ! Quelle déception de redescendre "sur mer" en s'apercevant que l'on ne fait que tourner en rond !
J'ai adoré ce texte. On y sent la tendresse de l'auteur pour son frêle esquif et l'amour de la mer. Et de la liberté.
Invité- Invité
Re: Exo "La parole est aux objets" : Le grand départ ?
qu'est ce que j'aimerais que tu m'emmènes faire une virée maritime avec comme voile ta plume et comme boussole ton talent. j'ai aimé la douceur qui se dégage de ton exercice, la liberté qui éclabousse cette fugue. bravo, comme toujours.
polgara- Nombre de messages : 1440
Age : 48
Localisation : Tournefeuille, et virevolte aussi
Date d'inscription : 27/02/2012
Re: Exo "La parole est aux objets" : Le grand départ ?
Il suffit d'un 'tit zef pour que l'esquif s'esquive ! pffff ! et vogue.
Invité- Invité
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