Je te suicide

[polgara]

bouboum......................bouboum..................................bouboum
Je te suicide mon cœur depuis que je te sais seul métronome de mes jours.
Je te suicide à grands coups de crème et de magrets, de clope allumée à la lueur de la précédente, de fine champagne évanescente comme de l’espoir noyé. Et de bourrelets en cellulite, tu t’accroches dans ma poitrine, te conforte dans ton lit de cholestérol que jour après jour je te construis.

bouboum...... bouboum........ bouboum
Je te suicide mon cœur à grands coups d’ulcères et de colère que tu t’efforces d’éponger dans tes ventricules altruistes. Je t’émiette de mes rêves évanouis, je t’effrite par mon insipide réalité.

Bouboumbouboumbouboum
Je te suicide mon cœur à grands coups de corps à corps inconnus et de plaisirs éphémères. Je te suicide sans protection, je te tue à grands coups de bonheurs illusoires.

Mais tu résistes.
Longtemps.

Bouboum
Bouboum

Infatigablement

Bouboum

Puis enfin, fatigué. Las d’une lutte que tu auras été le seul à mener, tu te suicideras finalement le jour où l’on m’annoncera que j’allais être mère. En quelques secondes tu réussiras ce que 37 ans n’auront fait que frôler.

Bouboum Bou bouboum bou _______________________________________

[Océacide]

Première lecture ... il me fait mal ... je reviendrai, le relirai et le commenterai ...

[Invité]

Il y a la vie, avec les plaisirs que l'on prend. Avec leurs conséquences parfois nocives que l'on connait, mais que l'on ignore. Il y a cette lutte d'un organisme qui se défend, résiste et finit par céder. La révélation de la maternité ne change rien. Tard. Il est trop tard.
Le rythme du texte, la voix de ce cœur qui s'essouffle, tout cela est rendu à merveille. Jusqu'au trait final, éloquent.

[Océacide]

Alors à première lecture j'eusse compris que cette femme faisait tout son possible pour "suicider son coeur", d'une manière lâche en fait car peut être pas la force de se foutre en l'air une bonne fois se cachant derrière une manière d' "à petit feu." Puis elle apprend qu'elle va devenir maman, trouve le goût de vivre mais trop tard ... cette version de prime abord m'a giflé, mais après relecture ...........................................................



Je relis et relis encore, et non, cette femme brûle la vie par tous les bouts, insouciante, comme beaucoup en fait, son coeur en fait les frais, comme son foie ou ses poumons auraient pu en faire ... du coup, bien j'aime moins, désolée.
Même si très bien écrit, surtout au niveau du rythme, ce côté, jouir de la vie, et mourir avec le côté un peu pathos (avant d'être mère) je suis moins fan.

[Invité]

Ce texte suscite l'effroi. Quel réalisme !
J'aime beaucoup : depuis que je te sais seul métronome de mes jours, Je t’émiette de mes rêves évanouis, je te tue à grands coups de bonheurs illusoires.
Ton style est direct, efficace. Très agréable.

[Raoulraoul]

Cardiaquement bien écrit. Ca pulse. Ca ventricule super, ca valvule intense, jusqu'à enfin la rupture de la myocarde ! Tu as raison d'avouer que la maternité est un suicide. On ne le dira jamais assez. Les femmes ; machines à produire. Et les hommes ; violeur de liberté. Enfin une parole sincère, à prendre au premier degré.

[polgara]

Merci de vos lectures !

Ce qui est sympa avec les textes courts c’est qu’ils ont leur propre vie, non pas comme le souhaiterait l’auteur mais bel et bien comme le perçoit le lecteur.
J’ai écrit ce texte comme tu l’as premièrement lu Océacide : c’est une femme qui ne veut pas vivre pour vivre mais véritablement vivre pour mourir. Trop lâche pour se terminer brutalement, j’avais envie d’une personne qui fait véritablement tout pour en finir. Et pourquoi viser particulièrement le cœur ? Parce que c’est le rare organe dont qui s’exprime à travers nos émotions : le cœur qui bat la chamade, le cœur serré, le cœur léger etc etc.
Donc oui, les choix qu’elle prend, elle le fait sciemment pour qu’il cesse de battre.
La maternité qui arrive n’avait pas pour but de susciter autre chose qu’une logique humaine, un évènement qui est arrivé, c’est tout et qui n’aurait pas du tourner au patho, même si je comprends que tu ais pu, a postériori le ressentir comme cela. Et puis Raoul, que tu mentionnes que la maternité était un suicide, oui, c’est ce que j’ai voulu montrer : le cœur n’aura à se battre, parce qu’on peut imaginer que cette femme allait cesser au moins un temps ces excès : du coup, plus de raison pour le cœur de se battre, c’est donc ce qui marque la fait de SA raison de battre à lui.

Je ne sais pas si cela vous permet de mieux comprendre ma démarche au moment où j’ai, peut être trop rapidement, écrit ce texte.
Iris, j’aime ta lecture finalement optimiste d’une femme qui ne fait que ce que beaucoup font, sans autre arrière pensée.

Embellie, j’apprécie que tu aies aimé « l’émiettement ». J’avais en tête des mains qui enlevaient l’excédent d’un visage façonné dans la terre. Sans rapport avec le texte, mais c’est l’image qui m’est venue de suite à l’esprit.

[Océacide]

Ma première lecture étant la bonne, je prends reprends donc une belle gifle, mon coeur fait boum, et je vais le relire car je suis maso, j'adore !

[Pussicat]

Une suggestion : coeur = amour
J'aurais bien vu le même texte avec le suspense de savoir de quoi il était question : un amour ou le coeur physique.
Maintenant, côté banquet, style et écriture, je suis plutôt déçue. J'attends donc le prochain pour m'empiffrer.

[Ben.G]

Je ne vais pas etre tres original apres ce qui a put etre dis, mais j'ai beaucoup aimé. Tu fais parfaitement monter l'intensité pour aboutir sur un constat fataliste, glacant, un certain cynisme desemparé/debauché, en bref c'est court mais il y a juste ce qu'il faut pour etre prit dans le rythme.

J'aurais bien vu le même texte avec le suspense de savoir de quoi il était question : un amour ou le coeur physique.

Pussicat je ne suis pas d'accord avec toi, puisqu'ici le coeur physique est mélé a l'amour de la vie, la ou un amour aurait -a mon sens- donné une dimension beaucoup plus 'pathetique'.

[Pussicat]

Pas d'accord mais pas grave.
Si vous voyez une dimension "pathétique" dans l'amour porté à l'être aimé, bien à vous.
Maintenant, je ne suis pas emballée par ce texte tout simplement parce que le style n'est pas au rendez-vous : pour moi, il est perfectible, ce n'est pas bien écrit.

[Ben.G]

Non c'est absolument pas grave de ne pas etre d'accord, heureusement qu'on est pas encore tous d'accord!!
J'avais mit pathetique en parenthese justement car ce n'est pas ce que vous avez comprit, par pathetique j'entend pathos, le coup du suicide par amour est quelque chose de deja beaucoup vu et revut (je ne dis pas la qu'il en devient ininterressant pour autant) et aurait donné une dimension trop 'romantique' a ce texte la ou la lutte contre le vie seule lui donne une certaine puissance (il me semblais bien que c'est pas facile de s'exprimer quand on trouve pas le bon mot!)
Et je ne remet pas en cause ce que vous pensez du poeme...

[Janis]

J'ai aimé cette lecture (sauf peut-être les bouboum, je vois l'intention mais ça me fait onomatopée, et surtout j'entends : bo bun bo bun, et ça me donne faim !)

Je n'ai fait que survoler ton explication parce que je n'aime pas les explications de texte ! les textes doivent fonctionner tout seul je trouve (mais tu as eu besoin d'expliquer face aux questions de tes lecteurs, je comprends)

Je n'avais d'ailleurs pas exactement tout saisi et ça n'a pas d'importance, tant le rythme, la construction sous forme de fragments, que j'affectionne, le côté âpre et sans concession, la chute aussi, m'ont plu.

[Invité]

J'ai bien aimé ce rythme, une façon de faire coller l'écriture au sujet, et ça je trouve que c'est intéressant - difficile aussi- mais sûrement plus intéressant sur ce sujet tant de fois exploité qu'une approche mieux "écrite"... l'intérêt c'est d'essayer d'innover, plus que de faire joli, d'apporter quelque chose de plus rugueux, et c'est ce que je trouve ici.

[Invité]

Je n'ai lu aucune des interventions précédentes aussi vais-je peut-être répéter ce qui a déjà été dit : je trouve une dimension un peu trop organique à ce texte, physiologique, surtout en première partie.
Et de me poser la question : de quel cœur s'agit-il ? De l'organe, justement, au sens propre ? Ou du cœur foyer des sentiments, émotions et autres affects ? La question de cette dualité me paraît intéressante à exploiter.
Peut-être qu'il serait possible d'étoffer, de donner une dimension plus charnelle à ce texte tout en conservant le rythme sec, rapide et emporté qui est le sien.

[Sahkti]

J'avais lu ce texte en son temps, l'avais emballé quelque part dans ma tête, parce qu'il me parlait beaucoup et j'y reviens, car il me parle toujours autant.
Une volonté d'autodestruction qui passe par un éblouissement dans les plaisirs nocifs (mais c'est si bon... si c'était du light, ça n'aurait pas de goût). Une culpabilité aussi, mêlée à une faculté d'assumer, de vivre à la fois dans le réalisme et le mensonge, de s'aimer et de se détester en même temps. Avec un courage ambigu, celui de vouloir en finir et celui de le faire à sa façon, avec paresse, avec force, sans oser franchir un certain pas.
Oui, décidément, ça me touche beaucoup et ce texte trouve un bel écho en moi.

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