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Pierre Rimblais

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Pierre Rimblais Empty Pierre Rimblais

Message  Lord Longford Sam 19 Jan 2013 - 15:37

Bonjour à tout le monde, voici le début d'une nouvelle, je me demande s'il est trop long et s'il est efficace...


"J’ai rencontré Olivier Glazer presque par hasard, si l’on peut dire. Je sortais à peine d’un rendez-vous avec mon supérieur lorsqu’un de mes amis journaliste vint dans ma direction accompagné d’un grand homme à l’allure distinguée.
— Julien, me dit-il, il y a quelqu’un qui désire s’entretenir avec toi. Je te présente Olivier Glazer, j’imagine que tu dois le connaitre, président directeur général de Rimblais-Glazer Médias. Monsieur Glazer, voici Julien Vanhoeren, le journaliste à qui vous désiriez parler.

Il nous laissa. Je regardai un instant mon visiteur. Il avait un visage mûr et des expressions franches, de l’homme qui condense en lui-même de nombreuses expériences de vie et la puissance des financiers. Ses gestes ne semblaient entravés par aucun embarras, ses traits étaient assez détendus et l’on sentait en lui une grande assurance, suffisante en tout cas pour qu’elle reste discrète. Je fus surpris par cet homme, car je connaissais les puissants. Bien qu’ils fussent tous différents, une chose néanmoins sautait eux yeux lorsqu’on les croisait : ils étaient incapables d’une authentique humilité. Certains faisaient tout pour cacher leur orgueil, allant jusqu’à le dissimuler dans de fausses attitudes, une modestie forcée, une gêne trop travaillée pour être naturelle. Mais ils étaient sincèrement persuadés de leur modestie ; par la force de l’auto-persuasion, par les mécanismes complexes du besoin de reconnaissance ils ne voyaient plus, ils ne distinguaient plus les limites entre être et paraitre. D’autres ne cherchaient pas même à cacher leur condescendance. Lorsqu’ils vous parlaient, vous saviez que vous n’existiez pas, peu importait la richesse de votre vie ou de votre âme. Tous avaient ceci en commun qu’ils étaient trop fiers d’eux-mêmes pour se détacher de leur personne et s’intéresser vraiment à leurs interlocuteurs. Mais Olivier Glazer me surprit. Il dégageait la même assurance que ses confrères, l’humilité en plus. Il y avait chez lui un je-ne-sais quoi qui transformait ses regards, ses mouvements et ses expressions. Une attitude intérieure qui conditionnait le reste et assurait à l’homme une ouverture plus honnête sur les personnes qui l’entouraient.
On aurait dit que derrière la réussite matérielle de cet homme, il y avait un chemin de sagesse déjà bien parcouru. Ou un accident qui l’avait fait surgir et l’y avait conduit.

— Excusez-moi de ne pas vous avoir téléphoné directement, monsieur Vanhoeren, me dit-il, mais je craignais de vous déranger, je savais que vous deviez avoir une réunion dans la journée, et je n’ai eu l’idée de vous rencontrer que ce matin de bonne heure.
— Oh, fis-je, désormais certain que mon impression était justifiée, mais ne vous en faites pas monsieur Glazer. Je suis flatté de vous recevoir !
Je grimaçai intérieurement. C’était moi qui faisais des courbettes, et lui qui était humble !
— Allons dans mon bureau, dis-je. Vous me direz ce qui vous amène.
— En vérité, fit-il avec un peu de gêne, je souhaitais plutôt prendre l’air, si ça ne vous dérange pas monsieur Vanhoeren. Le parc n’est qu’à deux rues.

Je fus là encore très surpris par cette étrange requête, et plus encore par la façon dont elle avait été formulée. A n’en pas douter, j’avais là un expert de la communication, un homme qui savait qu’un ordre n’est jamais mieux suivi que lorsqu’il est prononcé avec une douce gêne. Je vis clairement le puissant dans son costard, mais lui n’était pas déguisé en agneau comme les autres. Il témoignait de sa puissance non en affectant quelque chose, mais en étant ce quelque chose. En l’incarnant complétement.

Nous marchions dans le parc lorsque je lui demandai enfin ce qui l’amenait à un simple journaliste comme moi. Je fis exprès de dévaloriser ma fonction pour tester l’homme. Là encore, il me désarçonna. Il ne chercha pas à me revaloriser. Il avait évité le piège. Ou bien il ne l’avait pas vu. Je décidai que mon interlocuteur était différent des autres et arrêtai là mes petits stratagèmes.

— Voilà, me dit-il, comme sentant que le dialogue, le vrai, venait d’être amorçé. Je viens vous parler du fondateur de l’entreprise que je dirige. Je viens vous parler de Pierre Rimblais.
Il avait dit cela tout simplement. Je dus lui demander de plus amples informations.
— Il a été dit beaucoup de choses sur monsieur Rimblais, fit-il sur un ton d’explication. A sa mort, j’ai été effaré à la lecture de certains articles.
— Et vous souhaitez donc rétablir la vérité, dis-je.
— C’est bien le moins que je puisse faire pour Pierre, dit-il avec une pudique modestie. Je l’ai connu, il m’a formé, j’ai… certaines vérités à rétablir le concernant.

Je me demandais alors pourquoi il avait attendu si longtemps – deux ans après la mort de Pierre Rimblais, pour s’autoriser enfin à venir me voir et me parler de lui. Mais ce que dit Olivier Glazer juste après m’en donna une claire réponse.

— Il y a des décisions dans nos vies qui valent le coup d’être très longtemps et très mûrement réfléchies. J’ai hésité, j’ai demandé à sa famille. Ils ne se sentaient pas de parler de lui. J’ai alors compris que c’était à moi de mettre en lumière la véritable histoire de Pierre Rimblais. Une histoire aussi belle que tragique.
— Je n’en doute pas, fis-je.

Il perçut mon sceptiscisme. Je me sentis brusquement idiot, inférieur. Mais je n’aimais pas le portrait de Pierre Rimblais. Je n’aimais guère l’homme et ses propos si dérisoires avant sa mort. Le milieu journalistique avait été dur, certes, mais ce que j’avais envie de dire à Olivier Glazer, à ce moment-là, c’était que Rimblais avait tendu la perche et que les coups qu’il avait reçus de son vivant et après sa mort étaient bien davantage de son fait que de celui des journalistes. Cependant je me retins. Mais ma petite phrase avait parlé pour moi, et elle fit son effet.

— J’imagine ce que vous pensez, me dit Glazer d’une voix douce. La disgrâce de Pierre, l’interview, sont des choses qui heurtent. Et pas seulement à Paris. Mais je vais vous faire une offre, et j’espère que vous y donnerez une suite. Laissez-moi vous raconter la vérité sur Pierre, laissez-moi briser tous les mensonges qui ont écorné sa mémoire. Vous aurez les documents à l’appui, ceux que vos confrères ne voulaient pas avoir pour éviter de se confronter à une vérité qui dérange, une vérité qui jette une lumière crue sur la vraie nature humaine et oblige chacun à sortir de son environnement sécurisé. Je vous ai choisi parce que je vous fais confiance ; et si aujourd’hui je sens chez vous une réticence, j’espère que votre curiosité prendra le pas sur vos jugements. Je vous appelerai demain matin.

Nous nous saluâmes et chacun partit de son côté. Pendant que je marchais dans le parc, je me rendis soudain compte de ma propre vanité. De l’insignifiance, de l’inanité de ma position. Je devais reconnaitre la supériorité de cet homme. Il venait de me démontrer qu’il était plus intelligent, plus ouvert que moi, plus confiant aussi. Et pour quelle raison inexpliquée m’étais-je refermé dès que j’avais entendu prononcé le nom de Pierre Rimblais ? Parce que ses propos avaient été intolérables ? Parce qu’ils avaient froissé ma conscience et les idéaux que je m’étais forgés pour justifier ma propre existence ? Cela m’autorisait-il pour autant à refuser une explication à sa conduite ? Cela m’autorisait-il à le condamner encore, comme le faisait l’ensemble du microcosme, pour de simples propos ?
En rentrant chez moi, le soir, je me damnai pour ma réaction stupide et je me promis de laisser mes opinions en dehors de ma tête dès le lendemain. Olivier Glazer m’avait fait une très bonne impression.

J’avais une bonne situation sociale et l’impression d’avoir réussi une vie pourtant partie de très bas. Je n’avais parlé que quelques minutes avec Olivier Glazer, mais déjà je comprenais que je n’étais guère différent de ceux qui, riches et puissants, sont tentés de se pavaner, et de croire que leurs opinions et leurs arguments valent plus que ceux des autres parce qu’ils sont portés par de plus « grands » qu’eux.
Je fis pourtant ce que la plupart des gens font en des circonstances similaires : inviter quelques bons amis et dissiper au plus vite cette impression de malaise.

Le lendemain je recevais l’appel de monsieur Glazer. Nous devions nous rencontrer à l’extérieur de Paris, il fixait lui-même les rendez-vous et je n’avais rien à redire. Je sentais que j’allais au-devant d’une vérité qui arrangerait mes affaires et les siennes. Je sentais confusément qu’il me faisait l’offre d’une vie, une opportunité de carrière à laquelle je n’avais encore jamais osé rêver."
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Message  Invité Sam 19 Jan 2013 - 16:05

Le moins que l'on puisse dire, c'est que l'expression écrite est belle, claire et exempte de fautes.
Ce début est-il trop long ? Tout est question de proportions avec ce qui suit. Est-il efficace ? Oui. La situation est bien présentée, les caractères bien campés. Et le désir d'en savoir davantage est bien là, chez le lecteur.
Petite remarque : j'ai été un peu gênée par la phrase :
Ils ne se sentaient pas de parler de lui

qui fait par trop familier dans un contexte si bien écrit. J'aurais attendu un complément, comme :
Ils ne se sentaient pas le courage de...
Et puis une petite remarque orthographique :
dès que j'avais entendu prononcer er
Mais je me demande finalement si l'on ne peut concevoir "prononcé". Dès que le mot fut prononcé...


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Message  Lord Longford Jeu 31 Jan 2013 - 20:59

Merci pour votre commentaire Iris ! Oui, en effet j'ai bien rectifié le " ils ne se sentaient pas de parler de lui ", qui fait effectivement un peu trop familier dans ce contexte. C'est vrai que je me demandais si j'avais bien dosé le début, souvent c'est le début d'un récit qui est le plus difficile à écrire ( quoique la fin n'est pas simple non plus, et même le milieu aussi ! ) Mais comme ce récit fait une vingtaine de pages, je me suis permis de présenter un peu plus longuement la scène d'introduction.

Mais vous me rassurez, Iris, si le lecteur peut avoir envie de poursuivre. C'est ma hantise que le lecteur abandonne aux premières lignes comme cela m'arrive quand je lis certains livres...
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Message  polgara Dim 17 Fév 2013 - 14:52

je confirme le très bon commentaire d'Iris : oui on a envie de connaitre la suite, tout est bien amené.

A ma première lecture, j'ai trouvé le héros principal peut être un petit peu trop lisse à mon goût : en effet, ce journaliste qui est ébranlé dans sa routine semble garder cet aspect distant et limite condescendant durant l’entretien ; or, je l'aurais imaginé plus cassant, sa remise en question intervenant à froid : cet inconnu pourrait apporter finalement à sa vie qui ne lui convient plus, ce petit quelque chose lui permettant de revenir à du journaliste plus noble, loin de toute contingence politique, sociale etc etc.
Mais après relecture, cet aspect lisse en fait colle bien avec ce qu'est devenu le journaliste. Donc ça marche bien.

un petit truc qui m'a déplu : le terme pavaner, que je trouve en décalage par rapport au reste du texte.

mais oui, ce texte est accrocheur et la suite est attendue avec intérêt.
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Message  Sahkti Ven 12 Avr 2013 - 12:52

L'écriture est soignée mais justement, peut-être un peu trop. Cela donne, dès lors, naissance à des dialogues qui me paraissent un brin ampoulés, guère naturels. Sans compter cette pléthore de détails et de descriptions pour être sûre que le décor est bien planté, la scène bien posée et que le lecteur a tout compris. C'est dommage car on devine l'intrigue intéressante derrière tout cela mais la forme a tendance - à mes yeux s'entend - à nuire au fond; il faudrait sans doute rééquilibrer tout cela.
Bonne continuation en tout cas !
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