Train Cévenol

[loic]

Une pelure de lune transite via les nuages et les rails scintillent d’un livide aciéreux

De ces nuits Langeadoises où s’entame le Sud à l’ombre silencieuse d’obscures Margerides

Le crissement d’un grillon
Mes pas sur le ballast
La fragrance des traverses

Un express de nuit à l’assaut des tunnels débouche les vallées d’une onde chromatique

Feulement de diesels
Malmenant l’attelage
De voitures anciennes

L’œil rouge des fanaux accompagne les « clacs » d’essieux sur les éclisses
Une rumeur qui s’étiole dans le dais des étoiles

[Pussicat]

preum's !
alors j'adore... pas de chichis, j'aime, tout !
les vers en prose déroulent une musique en même tant qu'un paysage et la coupe du vers en rythme de six pieds me donne cette impression de ce passage, ce clic-clac, sur les rails...
le découpage, avec ces deux tercets, apporte un décalage à l'ensemble, la forme qui fait sens,
pour les couleurs, les sons et les images, pour ce déroulé et ce dépaysement, je dis bravo !
j'aime et je relis,

[Pussicat]

et les odeurs ! tout y est !!! j'y suis,

[Sahkti]

C'est magnifique loïc !
Je rejoins totalement pussicat à propos des sons,des odeurs... tout est là, on entend le cliquetis, le nez se plisse pour happer cet air particulier et on voit le train qui s'ébranle sous nos yeux. Tu as réussi, en quelques vers, à dépeindre un tableau complet sans avoir recours aux effets inutiles ou à un excès de précisions; c'est très bien joué.
J'apprécie également ce découpage qui donne du mouvement à l'ensemble. Bravo.

[Loïc Relly]

J'ai été happé par le rythme et la disposition, l'acuité des sens, la fin qui ne conclut pas... merci !

[Jano]

Toujours aussi perfectionniste dans le choix des mots Loïc. On dirait que chaque terme est pesé, évalué, pour s'imbriquer au mieux dans l'ensemble. Le résultat donne une oeuvre de précision où l'on entendrait presque arriver le train. Du bon travail, assurément.

[Annie]

Belle évocation du sud et de la Margeride en particulier qui évite le piège du régionalisme nostalgique, style marché paysan.
J'aime Loïc que tu évoques les régions à travers le passé industriel.

Je m'amuse le rythme est fait d'alexandrins, plus ou moins quelque E ou muet ou sonore :
De ces nuits Langeadois(es) où s’entame le Sud
à l’ombre silencieus(e) d’obscures Margerides
Un express(e) de nuit à l’assaut des tunnels
débouche les vallées d’une onde chromatique
L’œil rouge des fanaux accompagne les « clacs »

[Invité]

Pourquoi n'ai-je pas encore "commenté" ce poème ?
Je l'ai pourtant lu plusieurs fois, et l'ai beaucoup aimé.

[Frédéric Prunier]

ouai !
bien belle page de poésie animée, merci !

[Legone]

Bof, franchement pas terrible. Ces phrases sans verbe et ces images un brin convenues, c'est pas mon truc.

[loic]

merci a vous tous d'avoir apprécié ce texte (j'ai du mal à appeler ça de la poésie), je sais que le manque de verbe est rémanent dans mes écrits, c'est comme ça... c'est sans doute une façon d'expression qui m'est propre. je ne cherche pas à adopter de style particulier, c'est une façon d'évoquer a l'aide d'une palette de mots des images qui me ou m'ont marquées durablement.
je conçois parfaitement que l'on puisse trouver cela pas terrible, il n'y a ici qu'un partage de sensibilité qui parfois parle à des lecteurs qui passaient par là.
écrire n'est pas une compétition mais un échange un peu a sens unique néanmoins...
je le sais et j'assume

merci de vous être arrêtés à cette station perdue entre Langeac et Alès...

[Invité]

je sais que le manque de verbe est rémanent dans mes écrits, c'est comme ça... c'est sans doute une façon d'expression qui m'est propre

Notons tout de même que ta réponse à la remarque de Legone est écrite en français correct.
Preuve que dans la vie courante tu t'exprimes comme tout le monde.
Le mode d'expression que tu adoptes pour tes  textes n'a donc rien de naturel mais témoigne plutôt de ton besoin besoin de faire "poétique".

Si tu es content de toi, n'est-ce pas le plus important ?

[jfmoods]

J'apprécie personnellement ces phrases nominales qui viennent briser le rythme lent des verbales, qui établissent une immédiateté, comme une sorte d'éclat dans la perception.

[Legone]

L'oeil rouge du fanal : génial !

[Invité]

depuis 2008, 201 poèmes, loic. qui peut en dire autant?

en consultant le catalogue, on le voit bien qu’il y a matière!

avec ton pseudo minuscule, et le fait que tu ne prétendes pas écrire de la poésie,
tu ne cherches aucunement à plaire, encore moins à faire "à la manière de", et continues ta route intègrement avec ton style singulier. juste dommage que tu sois là rarement pour l'échange dont tu parles, justement.

contrairement à Tizef dont le commentaire me surprend, je ne crois pas en en "ton besoin de faire "poétique", mais plutôt en cela au contraire: "c'est sans doute une façon d'expression qui m'est propre. je ne cherche pas à adopter de style particulier, c'est une façon d'évoquer a l'aide d'une palette de mots des images qui me ou m'ont marquées durablement."

tu travailles dans ton coin, à ton heure comme ça vient, sans chichi ni besoin des sunlights, et tu reviens après six mois proposer un nouveau tableau, ce Train cévenol.
tu n'as à te justifier de rien.
au moins tu es sincère et tu as raison de dire simplement "c'est comme ça".
après, quand on est singulier on ne plaît pas à tout le monde, normal.
chacun ses goûts, et il y a une place pour chacun.

je rejoins la formulation de jfmoods,
concernant ta recherche, je n'aurais pas trouvé mieux:"une sorte d'éclat dans la perception"

les "phrases sans verbe" comme des coups de pinceau plus légers, évoquent et restituent les sensations, lumières, odeurs, bruits.
et ce changement de rythme épouse les focales différentes du regard qui balaie ce tableau.

"Une pelure de lune transite via les nuages et les rails scintillent d’un livide aciéreux"

"L’œil rouge des fanaux accompagne les « clacs » d’essieux sur les éclisses"

"Une rumeur qui s’étiole dans le dais des étoiles"

ces lignes ont eu ma préférence, comme toujours ça crisse et c’est sûrement ainsi que s'impriment les sensations qui t'ont marqué, que tu transmet.

à dans 6 mois...?

[Invité]

pour "dans le dais", je ne suis pas sûre...

[jfmoods]

"ce changement de rythme épouse les focales différentes du regard qui balaie ce tableau."

Un regard qui oriente l'angle de sa lecture selon certains critères bien particuliers. Un regard... photographique. Tu as trouvé mieux, finalement.

[Legone]

Un express de nuit à l’assaut des tunnels débouche les vallées d’une onde chromatique ????????????

[Invité]

onde: vibration qui se propage
chromatique (musique): qui procède par demi-tons consécutifs

tout se tient, il suffit d'y être.
c'est bruyant un train qui s'engouffre dans un tunnel, ça vibre et résonne dans la vallée.

maintenant, quand bien même on cantonnerait le chromatique à la couleur, il y en a bien qui associent des chiffres à des couleurs, et d'autres des couleurs à des vibrations.

[Invité]

Un express de nuit à l’assaut des tunnels débouche les vallées d’une onde chromatique

Igloo, le problème n'est pas dans l'onde chromatique, mais dans l'agencement de la phrase.
Pourquoi ne pas dire plus simplement, dans le simple respect de la langue... de de la beauté de l'image :

"L'onde chromatique d'un express de nuit débouche du tunnel, à l’assaut des vallées"

[loic]

ne te fatigues pas tizef, c'est comme ça que je le ressens et je suis musicien a mes heures...

https://www.youtube.com/watch?v=D1xHBmEnbOg

[Pussicat]

ne te fatigues pas tizef, c'est comme ça que je le ressens et je suis musicien a mes heures...

https://www.youtube.com/watch?v=D1xHBmEnbOg

bravo pour cette digression !
j'aime.

[loic]

https://www.youtube.com/watch?v=_d1K5k2k0cI
https://www.youtube.com/watch?v=9_9IBbUzN1o
https://www.youtube.com/watch?v=_H5CJNO3osc

[Invité]

LoÏc, je découvre avec plaisir ton talent de clarinettiste et ces ces airs de "jazz celtique"
J'aime beaucoup
Ma préférence va au "jazz aux oiseaux", qui t'accompagnent d'ailleurs bénévolement
Encore Bravo

[Invité]

Un express de nuit à l’assaut des tunnels débouche les vallées d’une onde chromatique

Igloo, le problème n'est pas dans l'onde chromatique, mais dans l'agencement de la phrase.
Pourquoi ne pas dire plus simplement, dans le simple respect de la langue... de de la beauté de l'image :

"L'onde chromatique d'un express de nuit débouche du tunnel, à l’assaut des vallées"

J'aime bien ce croquis sur le vif. Les phrases sans verbe, les images jetées, les traits parfois flous, les odeurs.
J'aime bien : Un express de nuit à l’assaut des tunnels
Je n'aime pas : débouche les vallées (j'aimerais qu'il débouche dans les vallées, ou alors qu''il percute les vallées ou qq chose comme ça…)
J'aime bien : d’une onde chromatique

Comme quoi ! Mais globalement, ça me plait.

[Invité]

oui, comme quoi.
je me rends compte, comme je l'ai dit autre part, que la perception que l'on a d'un poème dépend de la sensibilité de chacun.
les règles de la langue sont importantes aussi, même si elles ont leurs failles, ou leurs verrous.

ici, il est tout à fait légitime de se dire:
ah bon, les vallées d'une onde chromatique...euh?
complément du nom? COI? CC de moyen?
et: bug.

on ne peut pas dire: débouche une bouteille (à l'aide) d'un tire-bouchon
ça ne se fait pas.
en revanche, si on dit: repousse son voisin d'un mouvement brusque
cela ne choquera personne.

[loic]

pour l'onde chromatique, je fais référence au son du train (un mélange de son de moteur lourd, du claquement des roues et du bruit du roulement) dans ces vallées étroites du côté de langeac vers Monistrol d'Allier, il y a un effet très perceptible de l'effet Doppler du son qui s'approche entrecoupé de silences liés au passages des tunnels, et a chaque séquence on entend une montée en fréquence de la vibration de l'air pour des intervalles de demi ton, voire de quart de tons...

en gros le son devient de plus en plus fort à mesure que le train s'approche, le tout répercuté par l'étroitesse de l'endroit où seule la voie ferrée et l'allier encore jeune cheminent de concert

C'est magique les nuits d'été, cette partie c'est l'axe du texte....

A vous tous


mes amitiés

Loic

[Invité]

pour l'onde chromatique, je fais référence au son du train (un mélange de son de moteur lourd, du claquement des roues et du bruit du roulement) dans ces vallées étroites du côté de langeac vers Monistrol d'Allier, (...)

C'est magique les nuits d'été, cette partie c'est l'axe du texte....

J'ai entendu ça en effet dans ton texte. je ne sais où j'ai entendu cette “image sonore“ pour de bon, mais c'est un fait : je la connais et ton texte me l'a évoquée. Mais j'aime encore mieux comment tu l'expliques là dans ce commentaire. J'adore ce bruit qui augmente en grondant. Très belle image.

[Invité]

oui mais, loic

de toute façon
tu l'as très bien rendu.

et j'y étais aussi,

complètement
ça roule!

[loic]

a 1 minute 15, vous avez l'illustration sonore et visuelle

https://www.youtube.com/watch?v=ObatBaLU6UM

[jfmoods]

Merci.

J'aime décidément l'hypothèse que ce soit l'onde chromatique qui creuse ses propres vallées.

[Invité]

bref,
c'est quand même bien quand on discute,
au moins ça donne matière à réflexion au delà du pouce en l'air ou en bas!

[obi]

Merci.

J'aime décidément l'hypothèse que ce soit l'onde chromatique qui creuse ses propres vallées.

Moi aussi, j'aime cette idée. Le pire, c'est que les deux types de réaction me sont venus et me viennent encore à la lecture du poème. Il y a des expressions qui sont choquantes comme la fameuse onde chromatique qui débouche mais au-delà, quand on accepte d'y réfléchir, on s'aperçoit( enfin je parle seulement pour moi) que c'est un effort je crois pour coller le plus possible à la réalité, en tout cas au ressenti que l'on peut avoir quand un train débouche d'un tunnel.

Cela m'évoque un tire-bouchon avec ce glissement, crissement qui brusquement libère le goulot du tunnel. Je sens la justesse de l'idée, l'effort de transcription de la sensation et ça me plaît. Et c'est poétique sans guillemets parce que c'est une recherche artisanale( tant pis pour la grammaire!) de la vérité d'un ressenti très personnel, individuel, obligé de passer par les mots de tout le monde mais qui, par la distorsion de la grammaire justement, nous permet à chacun de revivre ces moments uniques et incommunicables, ces petits riens pleins de saveur.

Bref, une com très confuse , pardon mais merci loïc!

[jfmoods]

Ce poème m'intrigue depuis le début. Que dessine-t-il d'autre que l'horizon d'attente (vers 1 à 5) et la présentation (vers 6 à 11) d'un spectacle musical ? Un spectacle où, hormis le goût, tous les sens sont d'abord convoqués... avant que l'ouïe  ne prenne un relais obligé ? Qu'y a-t-il de plus normal, pour un musicien, que d'écrire... avec ses oreilles ?

"Un express de nuit à l’assaut des tunnels débouche les vallées d’une onde chromatique"

… constitue bien le centre névralgique du poème.

Déboucher quelque chose de quelque chose ? Évidemment, l'expression semble grammaticalement inadéquate. Cependant, et pour rester dans le domaine de l'ouïe, il ne m'apparaît pas tout à fait hors de propos de dire que l'on peut déboucher une oreille de son excès de cérumen.

Le spectacle qui se déroule ici résulte de circonstances atmosphériques (air), motrices (train et wagons), techniques (rails, tunnels) et topographiques (vallées) bien particulières. Cette réflexion m'a soudain ouvert des perspectives inattendues. La clarinette est un instrument à vent. Un instrument à embouchure. Embouchure. Débouche. Et si, en fin de compte, le clarinettiste avait construit là, souterrainement, une analogie avec son propre instrument, comme un écho à son propre vécu dans la construction si particulière, si personnelle, de ce moment ?

Un express de nuit (le souffle) à l’assaut des tunnels (bec, baril, corps supérieur, corps inférieur, pavillon de la clarinette)  débouche (utilisation des doigts et des clefs de l'instrument)  les vallées (les trous de la clarinette) d’une onde chromatique (notes qui forment une mélodie)

Cette première lecture est d'ordre descriptif. Nous assistons au simple travail descriptif d'un phénomène en analogie avec un autre.

La seconde lecture (qui admettrait, elle, la présence d'un complément du nom), se présente en superposition à la première...

Un express de nuit (le souffle) à l’assaut des tunnels (bec, baril, corps supérieur, corps inférieur, pavillon de la clarinette) débouche (utilisation des doigts et des clefs de l'instrument)  les vallées d’une onde chromatique

Ce qui se joue là, toujours dans le même jeu d'analogie, c'est plutôt le rapport entre le sens propre, apparemment évident,  transparent, de l'enclenchement d'un phénomène et le sens figuré, complexe, fascinant, déroutant, de son aboutissement.

[loic]

CQFD jf moods, cette analogie avec la clarinette est vertigineuse (comme quoi on écrit avec ses tripes parfois, sans même s'en rendre compte )

et tu n'as pas évoqué les doigtés particuliers, FA bouché; la colonne d'air et j'en passe

merci de toutes vos interventions lumineuses et auditives


loic

je ne commenterais plus ce texte, on va croire que je tiens à le faire remonter et ça me gêne...

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