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Trois bouquets de phrases pour aimer

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Loïc Relly
Raoulraoul
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Message  Raoulraoul Mer 2 Oct 2013 - 17:40

Trois bouquets de phrases pour aimer
Ils grimpèrent tous s’accrochant aux herbes hautes, les cinéphiles. Ce n’était pas encore l’heure du cinéma de minuit. Soudain une grande locomotive traversa le verger de pommiers. Une dame en noir apparut  tel un soleil au reflet d’argent. Il s’empara d’elle, le mauvais terroriste, pour la conduire aussitôt dans son alcôve puante.
Il était environ huit heures lorsque de ses doigts de fillette le terroriste dégrafa la chemise de dentelle. Tout le monde s’écarta des fourrés de chèvrefeuille aux alentours. Au loin retendit une arme à feu. En répondant, un cheval hennit surgissant de son buisson d’aubépine. Il disait vrai du reste, attiré par ce parfum qui flottait au-dessus du canal silencieux.
A ces mots, dans la nuit, les  planètes prennent souvent la beauté du diable.
C’était un homme, oui, dont le ronflement dérangeait les pucerons du ciel. A cet instant pourtant, les tondeuses dans les jardins s’arrêtèrent pour écouter battre le cœur des amants. Tout cela comme un éclair caresse les grilles d’un château.
Le dénouement arriva. Une douce rédemption dans cet été indien. Le lendemain les mitrailleuses de la terreur n’étaient plus que de lointaines danseuses invisibles.
L’homme s’empressa à devenir humain, chassant ses hallucination, acceptant le bon  cigare de directeur que lui offrit la dame en noir.
Il y a des rencontres de gens comme ça, qui ont la tranquillité des gondoles de lumière. Par la suite, sans doute, les lacs eurent des mouvements aussi ondulant que les plis d’une jupe.
A ces mots maintenant, des herbes odorantes embaumaient l’alcôve puante. La dame en noir lâchait ses parfums telle une arme à feu. Ils grimpaient, émanant de ses bijoux, ses bracelets, ses caresses avaient des reflets d’argent.
A cet instant le terroriste bascula dans son cinéma de minuit. Il s’empara fougueusement de la planète noire en chemise de dentelle. En répondant à ses questions, sa voix de fillette avait la beauté du diable. Le jeune homme s’appliqua à faire taire son ronflement terrible.  Il se coula dans le canal silencieux de sa dame en noir.
Soudain un grand soleil illumina les vergers de pommiers. Tout le monde admirait la   locomotive à travers les buissons d’aubépine. Tout cela comme un éclair, une hallucination aussi électrique que les pucerons du ciel.
Le dénouement arriva en toute tranquillité devant les grilles du château. C’était un homme avec une dame en noir, à cheval, enlacés comme le cœur des amants. Il disait vrai du reste, maintenant l’homme, avec ses yeux en mitrailleuse d’amour, à elle, la dame en noir, danseuse invisible.
Par la suite, les tondeuses bruyantes dans les jardins respectèrent toutes à la même heure l’été indien.
Il y a des rencontres avec des gens, dignes d’une rédemption et plus salutaires qu’un épais cigare de directeur.
Il était environ huit heures alors, quand un chèvrefeuille très coquin glissa sa tige noueuse dans les plis d’une jupe.
Tout le monde à présent hélas, derrière la grille du château brandissait méchamment leur tondeuse. La dame en noir, c’était elle maintenant, comme une mitrailleuse, qui embrasait l’été indien.
Soudain, le verger de pommiers fut avalé par la locomotive. Par la suite, l’alcôve  puante grilla sous le dard du soleil. Il était environ huit heures. Le terroriste s’étouffa dans la chemise de dentelle. Il disait vrai du reste, avec ses cheveux de fillette aux reflets d’argent. En répondant à ses questions, les caresses de la dame en noir écrasaient son épais cigare de directeur. C’était un homme fini. Autour des buissons d’aubépine les pucerons du ciel s’énervèrent. A cet instant, toute rédemption cessa, elle avait tout à coup la beauté du diable.
Ils grimpèrent tous le long du chèvrefeuille, les cinéphiles, comme des danseuses invisibles. Tout cela en un éclair qui foudroya le cœur des amants sur leur planète.
Le dénouement arriva. Le cheval ombrageux se cabrait au bord du canal silencieux.
Il y a des rencontres, avec des gens sans arme à feu qui tombent brutalement dans l’herbe.
Le jeune homme s’empressa dans un pli de jupe de humer le dernier parfum. A ces mots, brusquement, la dame en noir émit un ronflement de vengeance.
Le lendemain, il se réveilla, le terroriste repenti, dans une gondole de lumière, avec tranquillité.
Soudain alors, sur le lac, prirent fin ces hallucinations qui vous gagnent lorsque vous regardez tardivement un bon cinéma de minuit.

**
Raoulraoul
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Message  Invité Mer 2 Oct 2013 - 17:43

Raoulraoul, pourquoi "re :" dans le titre ? Une référence à un texte précédent ?

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Message  Raoulraoul Mer 2 Oct 2013 - 17:47

Non Easter, c'est une erreur de ma part. Supprimons le "re". Mes excuses. Je veux aller vite c'est la fin de la journée... Merci pour ta réponse concernant le "citer'.

C'est entendu.
(Et de rien pour le "citer".)
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Message  Invité Mer 2 Oct 2013 - 20:07

Ah oui, très bien vu, si je puis dire.
Pas évident du tout à la première lecture, c'est un tourbillon dense de mots, d'images, un enchevêtrement (à l'image des lianes du chèvrefeuille) des lieux et des circonstances - réelles et fictives ; le résultat est exigeant, il surprend, déstabilise aussi.
Je me demande de quel film il s'agit, le titre doit comporter une indication qui m'échappe...

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Message  Loïc Relly Ven 4 Oct 2013 - 15:54

C'est drôle, l'enchaînement des deux premières phrases me fait penser à Vian: la façon de dire, et l'envie de ressusciter l'émerveillement premier suscité par le médium (bien sûr c'est devenu le cinémascope…): un incipit efficace. Tu fais deviner un film à la recette bien bateau et c'est tant mieux, parce que ça rappelle cette magie des histoires AV, et renforce par contraste l'évocation des éléments plus "poétiques" où résident habituellement leur pouvoir de fascination. J'aime "les pucerons du ciel" que je rattache à tous ces grains de sables, feuilles mortes, brindilles virevoltantes etc. qu'on retrouve partout, du bon spaghetti au Cheval de Turin (si je peux te tutoyer, as-tu vu Le vent de Sjöström ?), bien que tu n'y aies probablement pas entendu la même chose. C'est un exercice difficile que ce parallèle entre ce qui se passe sur l'écran et cette rencontre: riche en possibilités, et pourtant on aurait tendance à le trouver le recours facile, avec beaucoup de précédents. Le flou semble cultivé mais on comprend ce qu'il y a à comprendre, enfin je suppose. Je trouve que replacer l'espace de l'écran dans l'espace réel (j'ai pensé à la scène du projecteur retourné de Cinema Paradiso) en fait peut-être un peu trop dans le brouillage des pistes. Avec les gondoles j'ai repensé au dit film, l'excellent plan où se côtoient le bateau d'Ulysse, ceux des spectateurs illuminés comme la ville derrière eux, et les rangées dans l'ombre de ceux qui ont payé leur place. J'abuse moi aussi des reprises de mots mais dans ce texte elles prennent vraiment beaucoup de place, comme s'il fallait résoudre ce qui a été très partiellement montré en le répétant, en re-combinant les chemins de compréhension entre eux sans pour autant les lier, je ne sais trop qu'en faire en les retrouvant ainsi. Une broutille à ajouter: je suis perturbé par les quelques doubles espaces. Dans l'ensemble ce n'est pas ici que je te préfère (il y a de vraies perles dans ton catalogue) mais il s'en dégage quelque chose, je le relirai sûrement.
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Message  Sahkti Sam 5 Oct 2013 - 8:14

Dense et empli de références, mystérieux comme il se doit et pourtant truffé de pistes... à l'image du cinéma, d'un film qui nous entraîne sur la piste des souvenirs et des destins croisés, passant de l'un à l'autre côté du rideau et c'est sans conteste un des points forts du texte, cette quasi ubiquité.

Il y a des phrases, des mots, que j'aime beaucoup :
Le dénouement arriva en toute tranquillité devant les grilles du château.

Par la suite, sans doute, les lacs eurent des mouvements

Soudain une grande locomotive traversa le verger de pommiers.



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Message  Raoulraoul Lun 7 Oct 2013 - 16:19

Derrière les jeux de métaphores, les permutations, les reprises décalées d'incipit et de phrases, il y a une trame : le mauvais terroriste est métamorphosé par l'amour avec la dame en noir qui à la fin domine la situation. Renversement des rôles et des fonctions.
Le rapport au cinéma pour moi est secondaire. Non, Loïc, je n'ai pas vu hélas "Le Vent". Merci à vous (Easter, Sahkti, Loïc) d'avoir accepté ces glissades entre réel et fiction. Comment maintenir une ligne narrative (minimaliste), malgré les sauts de sens, la fragmentation, l'allusif, les associations mentales ? Pour moi c'est l'enjeu de ce texte.
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Message  Invité Mar 8 Oct 2013 - 9:04

Moi qui ne suis pas cinéphile, j'avoue n'avoir rien compris, au-delà d'une belle écriture.

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Message  Louis Sam 12 Oct 2013 - 8:46

La caméra emprisonne des images qui s'enchaînent pour, le plus souvent, construire une histoire. Toute la vie hors champ, hors les nécessités de l'histoire n'apparaissent pas.
Mais ici, le cinéma est en plein air, à l'heure de minuit. Un cinéma en pleine réalité, un cinéma en pleine vie.
L'écran où l'on projette des images est alors une lucarne dans un ensemble naturel, duquel on ne peut faire abstraction.
L'image à l'écran n'est qu'une image parmi tant d'autres, sur l'écran du réel et de la vie.
La représentation cinématographique n'est plus au centre ; elle n'est pas à part, elle subit un décentrement. Mieux, un éclatement. Cinéma éclaté en images mêlées aux scènes réelles, à leurs reflets dans le ciel et dans un lac, aux replis dans l'imaginaire halluciné du spectateur.  
Images éclatées, dispersées, parsemées dans la réalité, et un texte qui voudrait tisser un lien même ténu entre tous ces éclats, une écriture qui cherche à nouer toute la dispersion, la multiplicité , la dissémination ; à coudre une trame.
Un texte rhapsodique, cousu, décousu.

Première image, celle d'une « grande locomotive » qui « traversa le verger de pommiers », un verger très réel, et aussi très mythique. Il fallait que ce soit la première image cinématographique, parce que ce fut un train, une locomotive qui fut montrée dans le premier film diffusé en public par les frères Lumière, L'arrivée d'un train en gare de la Ciotat. Ce tout premier film fut diffusé à l'Eden Théâtre. L'Eden, le jardin, le verger, n'est-ce pas là que passent les trains, là où l'on passe les films ?
Dans ce cinema paradiso, une dame en noir paraît ; noire dans la nuit noire, elle est un « soleil » sous la magie du projecteur, une star à peine apparue. A peine apparue, elle est enlevée par un méchant, un « terroriste », une force sombre qui cherche à dérober la lumière. Le méchant l'entraîne hors du verger paradisiaque, dans un lieu du péché, dans un cercle de l'enfer, « son alcôve puante ».

Le « terroriste » diabolique a sa beauté, un paraître d'innocence d'une jeune enfant, «  de ses doigts de fillette le terroriste dégrafa la chemise de dentelle » ; beauté qui se reflète dans le ciel, « dans la nuit, les  planètes prennent souvent la beauté du diable. »  N'est-ce pas plutôt le jeune enfant qui a pris l'apparence diabolique ? Diabolique ambiguïté.
Le début de l'histoire et sa fin se télescopent, un enlèvement, une rédemption. L'homme est sauvé par l'amour rédempteur, l'amour pour sa victime ; la noirceur de l'homme couvrait une lumière d'enfance innocente, le manque d'amour d'un enfant. L'amour humanise le monstrueux et diabolique « terroriste » : « L’homme s’empressa à devenir humain... »
Enlèvement en écho à bien d'autres, mythiques : l'enlèvement des Sabines, celui d'Europe, d'Hélène ou de Psyché.
L'enlèvement est ici un ravissement, dans toute l'ambiguïté du terme.

Mais enlever ici n'est pas ôter, ni même prendre otage, mais déplacement, et tout ici est transposition, en un éclatement spatial, mais aussi dans un déplacement des rôles, leur interversion et permutation, qui fait de la dame en noir la séductrice, celle qui revêt la beauté du diable, celle qui ravit son ravisseur se révélant l'allure d'une fillette. Le début de l'histoire aussi prend la place de sa fin, et la fin occupe celle du commencement.  

L'éclatement prive d'espace l'intériorité de l'histoire, commencée, terminée. L'espace est rejeté au-dehors.

« Tout cela comme un éclair caresse les grilles d’un château. »
Les images, autant de concentrés d'idées ; éclair : fulgurance d'un amour, coup de foudre ; foudre qui traverse l'histoire pour joindre son commencement et son terme, son « dénouement » ; éclair brutal de l'enlèvement, douce « caresse » sur les grilles, d'une fermeture, d'une austérité, mais grilles d'une brûlure d'amour derrière lesquelles se tient le « château » des contes de fée, de la jeune fille enlevée et du prince charmant.

Recherche d'une trame pourtant entre début et commencement. On sait le « dénouement », mais quel est le « nouement », le nœud qui tiendra ensemble les événements, la couture qui donnera son textile au texte, un tissu à l'histoire, la matière nécessaire à étoffer le récit ?
Le texte est sans couture linéaire et temporelle. Le cousu est rhapsodique.
Il n' y a qu'une scène, un même point de couture, sans cesse repris, une scène et son miroitement, une scène et son reflet diffracté dans l'eau, dans le ciel, dans l'espace extérieur à l'histoire.

Juste un enlèvement : un déplacement qui déchire l'espace

L'union des amants, sur fond d'espace éclaté, de temps en rotation sur lui-même.

Le texte ne se présente pas comme un tout bien ficelé entre un commencement et une fin, masquant ainsi l'éparpillement, l'éclatement de la réalité vécue, et non seulement cinématographique. Un fil est tendu entre le distendu, l'épars, le disséminé, à minima. Un texte, oui, rhapsodique.  


Un beau texte, Raoul, pour la force de ses images ; un texte intéressant par son sujet et sa construction. Bravo Raoul.

Louis

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Message  Lisa Decaen Sam 19 Oct 2013 - 13:58

J'avoue n'avoir rien compris à la première lecture. A la deuxième certaines images ont commencé à me parler (pas toutes...). Ceci dit, la lecture (à mon sens) se doit d'être un plaisir, j'avoue que ce ne fut pas le cas, trop compliqué pour moi, j'aime comprendre d'emblée ce que je lis.

Mais ceci n'est que mon avis et n'enlève sans doute rien à la qualité du texte, ce sont plutôt mes facultés de lectrices qui sont à remettre en question.
Lisa Decaen
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Message  seyne Mar 22 Oct 2013 - 21:22

J'ai trouvé ce texte superbe, original et vertigineux.
Mon interprétation (visuelle) : une série de films projetés en silence sur les arbres d'un jardin noyé de nuit. Du coup je n'ai pas cherché de fil conducteur narratif, c'est plutôt comme un cadavre exquis ou un collage surréaliste.
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