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Les multiples d'Eros

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Message  Raoulraoul Sam 4 Jan 2014 - 11:39

Les multiples d’Eros

Au plafond de grands ventilateurs brassaient des océans
d’odeurs. Rien cependant  n’arrêtait les rigolades des hommes.
Dans les haut-parleurs une musique techno si
forte à vous faire danser le squelette. Mais
ici jamais de gosse. De Ciz, quarante quatre ans,
fonctionnaire à l’ambassade, surveillait impatiemment la porte à
double battants comme celles qu’on voit à l’entrée
des bistrots de cow-boy. Dès fois qu’un somnambule

se serait trompé d’établissement ! Le giclement des jets
de douche était incessant. De Ciz apercevait des
jambes musclées avec leurs duveteux mollets de coq.
Sur les bancs des sacs ouverts. Mais ici
pas de chasseur mal intentionné. Toutefois le sommeil
n’était pas recommandé. C’était par des cadenas de
toutes les couleurs sur les armoires qu’on reconnaissait
la différence entre les adhérents. Devant les lavabos,

ils se gominaient coquettement les cheveux avec une
miette de Pento. Personne ne se regardait vraiment.
Mais tout le monde se posait des interrogations
envers tout le monde. Les aiguilles du destin
ici pouvaient tourner si vite pour chacun. De Ciz
le savait. Dans un micro le coach hurlait
ses consignes. Les épidermes sous l’eau retrouvaient leurs
couleurs. C’était avec la puissance et le tranchant
[4]
d’une charrue que tous fendaient l’air de leurs
mouvements au-milieu de la piscine. Des silhouettes nues
parfois s’esquivaient entre les cabines. Comme dans la
cheminée d’une vulve chaude De Ciz se sentit aspiré.
La température ambiante le libérait. Une vigilance d’épervier
avec une vélocité d’hélice devinrent les nouvelles qualités
du fonctionnaire. Partout, il y avait des fringues
par terre, souillées. Elles appartenaient à ces fantômes

que De Ciz espéraient surprendre. Il tendit l’oreille, ouvrit
l’œil. Lorsque soudain plus personne d’ordinaire ne hanta
les locaux. De Ciz pensa que le temps des
voilettes était arrivé. Ces voilettes qui confèrent aux
visages de troublantes apparences. Chaque colonne dans l’endroit
pouvait devenir le peuplier phallique d’une envoûtante forêt.
De Ciz aurait voulu que des charrettes d’hommes passassent
devant lui pour ouvrir son chemin. Par la

porte d’une cabine quelqu’un le fixait. Il avait
au ventre l’enflure hirsute d’un volumineux chardon sauvage.
Ses doigts ouvriers tannés de soleil faisaient signe
à De Ciz de s’approcher. « Mon nom c’est Almaric.
Et toi ? » il dit. Le fonctionnaire allait répondre,
mais sur le tapis de bain il dérapa.
Des vapeurs le détournèrent de la tentation. De Ciz
se cogna à une paroi de faïence dont

les décorations étaient aussi trompeuses qu’une bosse fallacieuse
sous un caleçon à fleurs. Dehors, dans la
rue, une Polo rouge, garée le long du
trottoir, au ras des flaques. « Alors tu as
fait tes élongations ? » demanda Ysé à De Ciz qui
s’engouffra dans la Polo. Les ongles vernis et
soignés d’Ysé plaisaient beaucoup à De Ciz, surtout quand
il les voyait plonger dans la mouvante chevelure
[8]
platine ou encore brandir une fourchette car Ysé
en était pourvu d’un bon coup. Un quatuor
de Vivaldi tournoyait sur le lecteur CD. Un
diamant brillait entre les deux seins d’Ysé, ce
qui déclenchait instantanément chez De Ciz une envie déferlante
de sperme. C’était Ysé, encore le matin, qui
choisissait de s‘imbriquer, son ventre contre les fesses
tièdes de De Ciz. Une vraie corde d’amour ainsi

les reliait avant le torrent de la journée.
Aujourd’hui par exemple ils partiront ensemble ramasser des
châtaignes dans le bois de Chaville. Ils les
dégusteront ce soir, à la lueur des bougies.
Cà, c’était une formule qui les rapprochait. Ysé
aussi insistait pour que De Ciz lise plus
régulièrement des ouvrages de philosophie. Elle reprochait souvent
à son mari d’être trop en retrait, de

se tenir dans les coulisses de la vie
et d’attendre que la vie se passe. Elle
l’entraînait toujours à boire un verre de cognac
avec elle. Elle l’invitait à observer les étoiles
au balcon. Mais lui, à sa table, préférait
le désordre de son chantier, celui de projets
jamais aboutis. Les gouttes d’huile essentielle qu’Ysé versait
pour parfumer son oreiller finirent par ressembler à

des larmes. De Ciz s’endormait, la tête aussi étanche
qu’une casserole. Seuls, à la campagne, ils se
retrouvaient parfois, débarrassés des croûtons rassis que sont
les opinions urbaines pour une pensée saine. Ils
se pressaient devant leur fenêtre pour savourer le
paysage. Ils se promenaient en visitant les églises
romanes. Le bitume dans les villages pour eux
avaient des déchirures qui laissaient pousser l’herbe. Quand
[12]
la période des élections présidentielles approchait, De Ciz et
Ysé discutaient longuement du candidat à choisir. Au
pied de la fontaine, ils s’asseyaient pour écouter
les discours enflammés sur leur transistor. Mais il
n’y avait rien de mieux que le partage
du silence, loin des autobus et du tourbillon
affolant du travail. Ysé appréciait au crépuscule, le
soleil sur la mer. C’était comme un reflet,

son miroir de conscience. Regarder un homme les
yeux dans les yeux lui paraissait tellement plus
pénible. Il n’y avait aucun horizon dans les
yeux de De Ciz. Même pas un éléphant rose
pour faire rêver. De Ciz, lui, se contentait de
parfums pubiens ou d’autres gouffres,  ce qui provoquait
la colère d’Ysé. Un jour, un midi, blotti
sous un orage effroyable, De Ciz avait déliré, en

évoquant l’image d’un certain Almaric, au corps râpeux
comme une montagne. A l’entendre dérailler ainsi, Ysé  
éprouva un immense chagrin incroyablement liquide . « Toutes les
preuves d’amour ne sont que fumée, nous poussant
vers une crevasse inévitable » pensa-t-elle violemment. Alors
elle partit. Sur la route. Elle se penchait
devant la beauté des fleurs champêtres. Derrière la
vitrine d’un bistrot de faubourg, elle retrouva Violaine,

une amie serveuse de très longue date. Ysé
la supplia pour qu’elle l’héberge chez elle un
moment. Violaine l’embrassa tendrement et elles montèrent se
coucher ensemble dans la mansarde d’un vieil immeuble.
De Ciz retourna se griser sous la pluie des
douches. Compensation douce sur les paupières. Il attendit
Almaric. Il savait que ses membres musculeux lui
offrirait une mort délectable. Celle qui vous pointe
[16]
l’index dans le tréfonds. Il rechercha le numéro
de l’armoire d’Alméric. Il n’y découvrit qu’une boîte
de limonade vide. De Ciz se dirigea vers la
piscine. C’était le marais qui sembla mieux lui
convenir à cette heure-ci. L’horloge indiquait quatre heures.
« Si je lui acheté un bonsaï ! » il pensa.
Mais trop tard. Alors avec des multiples de
quatre, il swingua cette  histoire triste, en quartet !
                                                                             
[128]
**
Raoulraoul
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Message  jfmoods Dim 5 Jan 2014 - 13:18

Tes textes, bien tissés, éveillent souvent des réflexions fines, troublantes, assez iconoclastes sur le monde. J'avoue que le ton nonchalant de celui-ci me ramène avec insistance au monde d'Albert Cohen, à cet humour bien particulier que l'on trouve chez lui, dans le personnage d'Adrien Deume notamment. Je me demande si cette perception que j'ai de ton texte est tout à fait liée au hasard...

Il manque ici pas mal de virgules et j'ai repéré 4 coquilles ("espéraient", "", "Amélric" et "acheté"). On peut décomposer le texte en 5 parties.

1. Du début à "… sous un caleçon à fleurs."
2. De "Dehors..." à "... sur le lecteur CD."
3. De "Un diamant..." à "… la colère d'Ysé."
4. De "Un jour..." à "… d'un vieil immeuble."
5. De  "De Ciz retourna..." à la fin.

La 3ème partie, qui, au travers de l'usage majeur de l'imparfait, décrit les habitudes du couple De Ciz / Ysé, apparaît comme le point de départ obligé de la problématique soulevée par le titre du texte. De fait, la relation qui s'est établie entre ces deux-là se trouve entachée d'une frustration impossible à combler ("Ysé...  insistait", "reprochait souvent", "Elle l'entraînait..." / "Il préférait..."). Alors, sans doute, en effet, n'y a-t-il pas d'alternative à l'inconciliable des caractères... sinon, en bout de course, le "partage du silence". Le sexe ("Un diamant brillait entre les deux seins d’Ysé, ce qui déclenchait instantanément chez De Ciz une envie déferlante de sperme.") et quelques moments de complicité ("Aujourd’hui, par exemple, ils partiront ensemble ramasser des châtaignes dans le bois de Chaville.") ne suffisent pas à cristalliser, à fixer la densité d'une histoire d'amour. L'initiative finale envisagée ("Si je lui achetais un bonsaï !") signale la médiocrité inhérente au personnage. Il nous revient alors en tête la ligne de fracture fondamentale (peut-être trop schématique ?) entre pôles masculin et féminin. Éternité du désir ("De Ciz, lui, se contentait de parfums pubiens ou d’autres gouffres...") contre désir de l'éternité ("Ysé appréciait, au crépuscule, le soleil sur la mer. C’était comme un reflet, son miroir de conscience."). Ce qui nous ramène violemment, pour de Ciz, aux parties 1 et 5 du texte. La proximité immédiate de corps masculins, de sportifs taillés pour l'effort, la compétition (l'hilarante hyperbole "C’était avec la puissance et le tranchant d’une charrue que tous fendaient l’air de leurs mouvements au milieu de la piscine."), le voyeurisme involontaire ("Des silhouettes nues, parfois, s’esquivaient entre les cabines.") ou pas ("Elles appartenaient à ces fantômes que De Ciz espérait surprendre.") constituent des éléments suffisants pour légitimer la tentation homosexuelle et franchir  conséquemment le pas fatidique ("... il swingua cette  histoire triste, en quartet !" ). Ce qui nous ramène, pour Ysé,  par dépit ("Toutes les preuves d’amour ne sont que fumée, nous poussant vers une crevasse inévitable"), à chercher consolation à sa tristesse infinie ("Violaine l’embrassa tendrement et elles montèrent se coucher ensemble dans la mansarde d’un vieil immeuble.").
Il ne faut évidemment pas prendre toute cette histoire au premier degré car les personnages sont absolument caricaturaux. Ils ont une épaisseur fine comme du papier à cigarette, tel, pour prendre un simple exemple, ce goût artificiel des citadins pour la campagne ("Ils se pressaient devant leur fenêtre pour savourer le paysage.", "Le bitume dans les villages, pour eux, avaient des déchirures qui laissaient pousser l’herbe."). Cependant, comme tous les personnages de comédie, ils dressent devant nous, derrière le masque distanciateur du rire, le miroir dérangeant de notre propre rapport au couple, à l'amour et au désir.
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Message  Pussicat Dim 5 Jan 2014 - 17:52

Raoul, j'ai lu ton texte par deux fois,
sous cette forme et dépliée que je me suis c/c, je ne sais pas laquelle j'ai préféré )))
les deux sans aucun doute,
je retrouve cette même force mêlée de fragilité que tu déploies tout au long de tes textes,
je suis comblée... que dire d'autre, c'est puissant,
merci et bravo !
Pussicat
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Message  seyne Lun 6 Jan 2014 - 12:12

Tu parles des poils comme personne ! ;-)
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http://www.angle-vivant.net/claireceira/

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Message  Louis Mar 7 Jan 2014 - 11:08

Dans la forme, un texte en 2 ; 4 ; 8 ; 16 ; dans le fond en 2 et 4. Toujours en multiple de 2 , en multiple d'Eros.
Narcisse cherche à ramener le double à l'unité, et en meurt. Eros se multiplie. Mais en vit-il ?

Le texte se met en seize. Seize paragraphes, qui se mettent en huit.
Chaque paragraphe comporte, en effet, huit lignes, huitaines des lignes de l'amour.

Huit mots pour chaque ligne. Non pas des octosyllabes, mais des sortes d'octaves. Ou bien chaque ligne comme un octet.

Les personnages se mettent en quatre.
Quatre personnages, inspirés de la pièce de Paul Claudel : Le partage de midi.
Dans le drame de Claudel apparaissent trois personnages masculins : De Ciz, Amalric, Mesa, et un personnage féminin, Ysé.
Dans ce texte de Raoul, deux personnages sont masculins : De Ciz et Amalric ; deux personnages sont féminins, Ysé et Violaine.

L'âge de De Ciz, personnage principal avec Ysé, est aussi en 4, en un double 4, 44 ans. L'âge du midi de la vie.

La musique écoutée est jouée par quatre instruments : "Un quatuor de Vivaldi tournoyait sur le lecteur CD" ; "avec des multiples de quatre, il swingua cette  histoire triste, en quartet !".
Quatre instruments, quatre solistes, quatre personnages. Une musique se joue entre eux.

Elle se joue d'abord en duo : le couple De Ciz et Ysé. Une musique d'amour sur des instruments à corde. "Une vraie corde d’amour ainsi les reliait avant le torrent de la journée."
Ils cherchent à vibrer sur la même corde. Ils cherchent tous deux des harmonies, et des accords dans des à corps. Ils cherchent l'union dans l'unisson : "Aujourd’hui par exemple ils partiront ensemble ramasser des châtaignes" ;  dans l'unité d'un regard : "Ils se pressaient devant leur fenêtre pour savourer le paysage" ( "aimer, ce n'est pas se regarder l'un l'autre, c'est regarder ensemble dans la même direction" disait St Exupéry ) ; dans une même promenade, une même élévation : 'Ils se promenaient en visitant les églises romanes" ; dans l'écoute d'une même parole : " Au pied de la fontaine, ils s’asseyaient pour écouter les discours enflammés sur leur transistor" ; une même parole et le partage du silence, de la musique du silence : "Mais il n’y avait rien de mieux que le partage du silence, loin des autobus et du tourbillon affolant du travail ".

Dans ce duo, Ysé est celle qui donne le ton, elle donne le la ; elle donne le tempo. Elle se met en quatre pour faire vivre le duo. De Ciz, lui, laisse aller, laisse les cordes dans le couple se distendre. Il ne joue pas toujours sa partition. Il ne joue pas assez la musique de la vie, n'en cherche pas les mélodies, sa poésie et sa beauté, "elle reprochait souvent à son mari d’être trop en retrait, de se tenir dans les coulisses de la vie et d’attendre que la vie se passe". De Ciz, passif, laisse passer la vie sur lui, il manque d'initiatives, ne vit pas assez, se laisse vivre ; De Ciz est indécis; "lui, à sa table, préférait le désordre de son chantier, celui de projets jamais aboutis", il ne crée pas la musique symphonique sur la scène de la vie.

Ainsi Ysé n'est pas Ysolde, De Ciz n'est pas Tristan, De Ciz qui, "la tête étanche", ne se laisse pas même imprégner par les larmes odorantes, les larmes de dépit, que verse Ysé sur son oreiller.
Aussi De Ciz n'a pas d'horizon, "Il n’y avait aucun horizon dans les yeux de De Ciz", on ne peut voir loin en lui, on ne peut, en lui, contempler l'immensité, y percevoir l'infini, nul rêve en lui, "pas même un éléphant rose", nul idéal, aucune utopie, aucune lueur. Une dimension étriquée dans son regard sur le monde. Il n'est qu'un "gouffre", un puits sans fond, un abîme, une "crevasse". Il n'est pas la vie dans son étendue sans fin, pas l'éternité, il est une faille dans le réel, puits temporel, béance ouverte dans l'étendue infinie où brille à l'horizon le soleil brûlant du désir.
Alors, en solo, Ysé contemple la mer, "Ysé appréciait au crépuscule, le soleil sur la mer. C’était comme un reflet, son miroir de conscience", Ysé contemple son âme dans son infinie distension,  son âme à la dimension de l'illimité, en renouvellement perpétuel du désir.


Ysé finit par entendre chez son mari un air caché, une musique de midi, l'air d'un démon : " Un jour, un midi, blotti sous un orage effroyable, De Ciz avait déliré, en évoquant l’image d’un certain Almaric".
Elle découvre l'homophilie de son mari, un horizon tout de même, mais un horizon masculin.
Elle découvre ce qui était révélé dès les premières scènes du texte, celles de la piscine. Le début était dévoilement.
A l'eau, à l'élément aquatique, à sa limpidité, est associée la révélation. Piscine et douche, d'abord, puis l'orage. L'eau tranquille des douches, puis l'eau furieuse, la colère de l'orage.
Ysé contemplait les étendues d'eau sans fin de la mer, les étendues horizontales, quand tout se révèle dans la chute d'eau à la verticale.
On comprend l'ironie de la remarque d'Ysé à son mari au sortir de la piscine : "« Alors tu as fait tes élongations ? », quand De cize se tenait dans la verticalité de l'eau descendante et des piliers montants des colonnes, "peupliers phalliques d’une envoûtante forêt"
Se dévoile ce que nous savions déjà, par la mise à nu des premières scènes. Se révèle clairement ce que déjà elle savait aussi, confusément. Le savoir est réminiscence, la connaissance est reconnaissance.
Les signes d'une tendance homosexuelle devaient lui apparaître, comme ils nous apparaissent dans la narration du texte : "Un diamant brillait entre les deux seins d’Ysé, ce qui déclenchait instantanément chez De Ciz une envie déferlante de sperme. C’était Ysé, encore le matin, qui choisissait de s‘imbriquer, son ventre contre les fesses tièdes de De Ciz."

Ysé, après la révélation orageuse, joue alors une musique, homophile, homophone, en écho à celle de son mari. Elle rencontre Violaine, dont le nom sonne comme le féminin d'un violon.
Le duo devient quatuor. Les duettistes jouent désormais en quartette.
Ysé joue tout haut la partition mezzo voce de son mari, dans un mimétisme, où elle se fait lui, où je est tu, où je s'est tu, où je se tue.

On y entend, dans ce quartette, quelques intonations de Quartett, la pièce de Heiner Müller, interprétation des Liaisons dangereuses de Laclos.

Toute se termine à quatre heures, à l'heure du quatre. Tout se termine dans l'élément aquatique, mais devenu marécage, "C’était le marais qui sembla mieux lui convenir à cette heure-ci". Marécage où chacun peut s'y enfoncer, et se perdre.

Bravo Raoul pour l'originalité de la construction de ce texte, et cette très intéressante version du Partage de midi de Claudel.

Louis

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Message  Raoulraoul Sam 11 Jan 2014 - 12:21

Merci à jfmoods : il n'y aucune référence à Albert Cohen, du moins consciemment. Je découvre par toi que mon texte peut avoir de l'humour. Je ne le refuse pas au contraire.
Merci Pussicat pour la force et fragilité
Merci Seyne pour "le pubien" ; si tu pouvais un peu développer...
Merci Louis : en effet mon repère c'est bien Le partage de midi de Claudel. J'ai eu envie d'écrire un contrepoint à la spiritualité affective de Claudel. C'est  iconoclaste, peut-être. Mais c'est un divertissement que j'ai voulu faire partager. Sans rien de savant, mais plutôt fantasmatique, onirique... Merci encore pour toutes les autres pistes et recoupements que tu m'as révélés.
Excusez-moi tous de ne pas développer davantage aujourd'hui, mais le temps me manque. A bientôt.
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Message  Pussicat Sam 11 Jan 2014 - 12:46

d'accord avec Louis pour son analyse pertinente, mais je mets un bémol sur son interprétation quant à la composition des vers en "octet", c'est à dire huit mots par phrase : c'est faux et cela commence dès le 5e vers avec :

ici jamais de gosse. De Ciz, quarante quatre ans, 9 mots

peut-être la présence présence du "gosse" oblige Raoul à cette exception, et dans ce cas elle fait sens... seul l'auteur peut nous éclairer )))

... et cela se poursuit tout au long du texte, à moins de retirer tous les "n', d', qu', l', c'...", ou de les compter comme unité-mot, alors dans ce cas, et seulement - excepté le vers cité - oui, les phrases compteraient bien 8 mots par phrase...

mais tout ceci n'est que bavardage au regard de l'oeuvre accomplie.

relu et encore bravo !

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