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Enfin une bonne nouvelle (2)

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Message  Frédéric Prunier Mar 3 Fév 2015 - 20:52

II




        Au 21e siècle, le seigneur de la Part-Dieu est Gaspard, Gaspard Lechevalier. C’est mon meilleur ami, mon compagnon de galère.
  Depuis des années, nous vivotons grâce à un petit spectacle qui mélange le show transformiste avec le thé dansant. Nous sommes les rois de l’animation, les stars des maisons de retraite. Nous jouons les anciennes vedettes de café-théâtre en laissant planer le doute sur la véracité de notre couple de travestis et cette ambiguïté réveille immanquablement le sourire des résidents les plus atteints, ceux de la maladie d’Alzheimer.
  Gaspard a toujours été persuadé qu’il deviendrait un jour un vrai acteur, qu’il serait riche et célèbre. Il avait raison. Au 19e, il est devenu l’éclatant, le magnifique chevalier de la Part-Dieu !
  Pour ma part, j’ai abandonné mes rêves de show-biz, ayant enfin compris que je ne chanterai jamais tout à fait juste. Le monde de la fête et des étoiles a beaucoup d’appelés, mais peu d’élus.

  Le plus clair de notre temps, nous le passons chez Seb, le bougnat de la gare car nos petits spectacles nous permettent de longs moments de chômage. L’endroit n’a rien d’extraordinaire mais il est notre quartier général et la femme du patron est une vraie beauté, j’en suis raide dingue.
  Quand Gaspard est pour moi le chevalier de la Part-Dieu, c’est l’homme le plus influent de toute la province, l’ami du Roi, le conseiller des plus grands. Grâce à lui, dans cette partie de ma vie où tout me réussit, j’ai obtenu le poste de directeur de l’opéra régional, et il a promis de me présenter au Roi et à sa Cour… Je garde précieusement la joie de vivre cette folie en réserve, au fond de ma tête. Ce sera un concert feu d’artifice, une grand-messe du rock-n-roll. La fortune de mon ami nous permet les excès les plus fous.
  Il m’annonce justement le programme de la journée :
— J’espère que tu n’as pas oublié que nous fêtons aujourd’hui mon départ, j’embarque demain pour cette mission d’ambassadeur que le roi me confie. Viens ! On nous attend à l’auberge des trois routes. Où étais-tu passé ? Tes domestiques s'inquiètent... Je ne t’ai pas vu depuis une semaine. Si tu disparais sans me prévenir, c’est que le jupon troussé doit être de qualité, non ? Monsieur veut garder l’exclusivité de sa découverte volcanique ? Ne m’invente pas un mensonge aussi grossier que celui de la dernière fois. Tu ne t’enfermes pas comme un ascète dans une chambre de bonne pour composer une messe solennelle, je le sais. Tes doigts n’ont aucune tache d’encre…une messe… toi… Tu me prends pour un idiot ?

  Je ne peux rien répondre. Le chevalier m’a toujours imaginé en dragueur impénitent, alors que ma réalité est bassement plus sordide.
  Mes escapades n’ont rien d’amoureuses, elles sont nauséeuses, maladives, comateuses. Mes voyages sont ceux d’une épave ballotée au milieu de nulle part, et mon lit est à la fois mon radeau et l’océan tout entier. Il n’y a pas d’île à l’horizon, et si j’entrevois quelques femmes dans cet univers, j’ai le corps trop meurtri pour en ressentir les caresses.
  Cet ami m’invente une vie de tombeur ? Moi ? Le roi des encéphalogrammes au point mort ? La belle au bois dormant des substances hallucinogènes ? Comment avouer à mon confident de toujours que le masque éternellement souriant qu’il me prête ne tient qu’avec le fil de l’imaginaire ? L’être réel, à l’intérieur, se cache derrière une enveloppe de carnaval et vit dans un monde qui n’est pas le sien. Ma chambre du 21e siècle n’est pas un château des merveilles, loin s’en faut…
  Je n’ai pas le temps de trouver les mots pour lui avouer mon désastre. Nous rejoignons la fête, Gaspard a tout prévu. En fait, il a loué le café de Seb tout entier.

  Ancien relais de poste, l’auberge des trois routes n’est plus aujourd’hui à la campagne. L’extension industrielle de la ville et de la gare de triage ont depuis longtemps englouti le village de Glane sur l’Amour, devenu un quartier de la cité nouvelle. À l’époque, l’endroit était la première halte possible en quittant la vieille ville et on ne résistait guère à la qualité de ses vins ni aux rondeurs de ses servantes. Mais petit à petit, l’ensemble des bâtiments de l’auberge et la cour intérieure ont été morcelés, on a construit tout autour. Si l’on ne connaît pas l’historique du lieu, son ancienneté n’apparaît même plus.




*





       Des applaudissements et des sifflets nous accueillent. Le chevalier joue d’un sourire faussement surpris et marque un petit temps d’arrêt, sur le pas de la porte, profitant durant quelques secondes de l’ovation qui lui est réservée. Les bras largement ouverts, il annonce le début des festivités :
— Merci d’avoir répondu à mon appel ! Je voulais vous avoir auprès de moi avant mon départ. On dit que les îles caraïbes sont accueillantes, alors je n’ai fixé aucune limite à la durée de mes vacances. Essuyez vos petites larmes de pleureuses professionnelles, bande de faux culs alcooliques ! …Et non, non, non, non, non, je n’ai pas préparé de discours. Je peux uniquement vous assurer que la météo prévoit pour cette nuit un avis général de grand’soif ! Canicule oblige !
  Les applaudissements et les rires saluent ces quelques phrases.

  Comme à chaque fois, je suis impressionné par la prestance de cet homme et admiratif dès qu’il apparaît, à la ville où à la scène, on ne voit plus que lui. Le chevalier de la Part-Dieu ne joue pas, il est.
  Il est cette morphologie d'ogre que l’âge n'a pas encore transformé en notable obèse, superbe et conquérant.
  Ce soir, son argent et son rang lui permettent toutes les fantaisies. Sa bonté lui impose que ses amis en profitent et que les instants à venir seront un souvenir inoubliable.

   Le repas est ce qu’il est mais le vin coule à volonté. Nous sommes un brouhaha de ruche, ponctué d’éclats de voix et de blagues croustillantes, plus que moins grassouillettes.
   Tout à coup, un besoin urgent d'uriner force Gaspard à clamer son envie impérieuse à toute la compagnie :
— Le déluge presse à ma porte ! Je n’aurai jamais le temps d’aller me cacher au fond d’un bosquet ! Allons !  Qu’on m’apporte ici le paysage !
  Ces derniers mots provoquent un chahut monumental. Levant mon verre comme on porte un toast, je hurle au génie, en tournant sur moi-même et je salue, comme s’ils étaient des êtres vivants, les posters géants qui recouvrent les murs du café de la gare. Ces photos rappellent les anciens papiers peints panoramiques du début du 19e, comme ceux de la maison Zuber. L’auberge des trois routes exhibait déjà, à l’époque, cette modernité dans la salle de l’étage, comme on s’affuble du dernier vêtement à la mode.
  Chez Seb, c’est un chemin en sous-bois, en noir et blanc. L’automne joue du gris dans toutes ses variations et la lumière est blanche. Le premier plan est d’une netteté impressionnante et le tapis de feuilles sèches ne demande qu’à bruisser sous les pieds.

  Encouragé par des hourras et des sifflets, Gaspard se soulage devant nous comme il vient de prévenir, sans prendre le temps de sortir dans l’arrière-cour, ni d’utiliser les toilettes, pourtant juste à côté du bar.
  Nous considérons cette action comme superbe de bravache, la preuve que la soirée sera d’ores et déjà exceptionnelle. Les plus prompts à la connerie choisissent eux-aussi un arbre où vider leur vessie.

   Sébastien gueule qu’il va foutre tout le monde dehors. Brandissant un couteau, il menace d’émasculer quiconque salopera encore les murs de son bar.
  Dans l’impossibilité de stopper l’élan de son manifeste poétique, le chevalier de la Part-Dieu reste stoïque, fixant dans les yeux l’aubergiste. Il lui explique, tout en humidifiant un des chênes du premier plan, ce qu’il pense de la situation :
— Le prix de ton estanco est pour moi, maintenant, une broutille. Je te donne le double de ce que te coûtera une nouvelle tapisserie. Et j’y ajoute la rénovation complète de la pièce…
  Gaspard se reculotte, toisant toujours le patron, observant l’hésitation de ce dernier :
— Sais-tu ce que veut dire gagner au loto ? Imagines-tu ce que représente la plus grosse cagnotte jamais remportée à ce jeu ? Il me semble que cela devrait suffire pour avoir le droit de pisser contre ton mur, non ? Je te paierai une belle image toute neuve… Ils en font maintenant des en couleurs… ça te dirait une forêt en couleur ? …

  On tape du plat des mains sur le zinc, on le prend d’assaut, on réclame à boire, on emmerde la police !
  Fixant Gaspard d’un regard bouillonnant de colère, Sébastien est tout prêt à lui foutre son poing sur la gueule, mais une main lui presse heureusement le bras.
  C’est Janine, sa femme, qui est venue se placer discrètement derrière lui. Elle sait par expérience combien son bougnat est impulsif, surtout en fin de journée.

  Gaspard est aux anges, il savoure son nouveau pouvoir. Plus besoin de croire en ses rêves, la réussite est aujourd’hui réelle : deux cent vingt millions d’euros gagnés à ce jeu du hasard… Lui qui n’a jamais économisé quoi que ce soit, il est maintenant le dieu de la fête.
  Je regarde le chevalier de la Part-Dieu. Doré
navant, l’imaginaire n’aura plus de limite !
Frédéric Prunier
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Message  Frédéric Prunier Mer 25 Fév 2015 - 11:38

II



        Au 21e siècle, le seigneur de la Part-Dieu est Gaspard, Gaspard Lechevalier. C’est mon meilleur ami, mon compagnon de galère.
  Depuis des années, nous vivotons grâce à un petit spectacle qui mélange le show transformiste avec le thé dansant. Nous sommes les rois de l’animation, les stars des maisons de retraite, jouant les anciennes vedettes de café-théâtre et laissant planer le doute sur la véracité de notre couple de travestis. Cette ambiguïté réveille immanquablement le sourire des résidents les plus atteints, ceux de la maladie d’Alzheimer.
  Gaspard a toujours été persuadé qu’il deviendrait un jour un vrai acteur, riche et célèbre. Il avait raison. Au 19e, il est l’éclatant, le magnifique chevalier de la Part-Dieu !
  Pour ma part, j’ai abandonné mes rêves de show-biz, ayant enfin compris que je ne chanterai jamais tout à fait juste. Le monde de la fête et des étoiles a beaucoup d’appelés mais peu d’élus.
  Nos petits spectacles permettent de longs moments de chômage et nous passons le plus clair de notre temps chez Seb, le bougnat de la gare. L’endroit n’a rien d’extraordinaire sauf qu’il y a là-bas celle que j’aime plus que tout. Je ne conçois pas une journée sans avoir bu au-moins un petit café au bar, perdu une heure à l’apéro ou un après-midi tout entier à jouer à la belote avec Gaspard et ses deux cousins. Ici, c’est notre quartier général, Seb et Janine me louent une chambre à l’étage.
  Le soir, il faut bien compenser et couper la monotonie du silence. La boisson aide à s’endormir mais ne suffit pas toujours. Alors à l’intérieur de mes rêveries solitaires, Gaspard est devenu un chevalier picaresque, un vrai de la Part-Dieu, dans la vie comme au théâtre, dans la réalité comme dans ma folie douce. C’est un chef de troupe dont les envolées lyriques vous enflammeraient une armée en déroute. C’est Bonaparte au pont d’Arcole, le pirate des caraïbes, une figure que j’aimerai suivre au bout du monde… J’admire sa pugnacité face aux difficultés de notre quotidien. Grâce à lui, nous trouvons assez de contrats pour survivre et continuer les représentations de notre petite entreprise. Il a toujours le moral, rien ne peut l’ébranler, c’est un roc, une montagne… Et quand je voyage dans mon 19e  siècle, c’est l’homme le plus influent de toute la province, l’ami du Roi, le conseiller des plus grands. Quand il est à mes côtés, tout me réussit. Il a obtenu pour moi le poste de directeur de l’opéra régional et a promis de me présenter au Roi… Je garde précieusement nos aventures extravagantes dans le fond de ma tête. Je suis heureux comme cela, la fortune du chevalier nous permet les excès les plus fous.
  Il m’annonce justement le programme de la journée :
— J’espère que tu n’as pas oublié que nous fêtons aujourd’hui mon départ, j’embarque demain pour cette mission d’ambassadeur que le roi me confie. Viens ! On nous attend à l’auberge des trois routes. Où étais-tu passé ? Tes domestiques s’inquiètent… Je ne t’ai pas vu depuis une semaine. Si tu disparais sans me prévenir, c’est que le jupon troussé doit être de qualité, non ?... Monsieur veut garder l’exclusivité de sa découverte volcanique ? Ne m’invente pas un mensonge aussi grossier que celui de la dernière fois. Tu ne t’enfermes pas comme un ascète dans une chambre de bonne pour composer une messe solennelle, je le sais. Tes doigts n’ont aucune tache d’encre…une messe… toi… Tu me prends pour un idiot ?

  Je ne peux rien répondre. Gaspard m’a toujours imaginé en dragueur impénitent, alors que ma réalité est bassement plus sordide.
  Mes escapades n’ont rien d’amoureuses, elles sont nauséeuses, maladives, bêtement éthyliques et comateuses. Mes voyages sont ceux d’une épave ballotée au milieu de nulle part et mon lit est à la fois mon radeau et l’océan tout entier. Il n’y a pas d’île à l’horizon et si j’entrevois quelques femmes dans cet univers, j’ai le corps trop meurtri pour en apprécier les caresses.
  Cet ami m’invente une vie de tombeur ? Moi ? Le roi des encéphalogrammes au point mort ? La belle au bois dormant des substances hallucinogènes ? Comment avouer à mon confident de toujours que le masque éternellement souriant qu’il me prête ne tient qu’avec le fil de l’imaginaire ? L’être réel, à l’intérieur, se cache derrière une enveloppe de carnaval et vit dans un monde qui n’est pas le sien. Ma chambre du 21e siècle n’est pas un château des merveilles, loin s’en faut…
  Je n’ai pas le temps de trouver les mots pour lui avouer mon désastre. Nous rejoignons la fête, Gaspard a tout prévu. En fait, il a loué le café de Seb tout entier.




*




  Ancien relais de poste, l’auberge des trois routes n’est plus aujourd’hui à la campagne. L’extension industrielle de la ville et de la gare de triage ont depuis longtemps englouti le village de Glane sur l’Amour, devenu un quartier de la cité nouvelle. À l’époque, l’endroit était la première halte possible en quittant la vieille ville et on ne résistait guère à la qualité de ses vins ni aux rondeurs de ses servantes. Petit à petit, l’ensemble des bâtiments de l’auberge et la cour intérieure ont été morcelés, on a construit tout autour. Si l’on ne connaît pas l’historique du lieu, son ancienneté n’apparaît même plus.

       Des applaudissements et des sifflets nous accueillent. Le chevalier joue d’un sourire faussement surpris et marque un petit temps d’arrêt, sur le pas de la porte, profitant durant quelques secondes de l’ovation qui lui est réservée. Les bras largement ouverts, il annonce le début des festivités :
— Merci d’avoir répondu à mon appel ! Je voulais vous avoir auprès de moi avant mon départ. On dit que les îles caraïbes sont accueillantes, alors je n’ai fixé aucune limite à la durée de mes vacances. Essuyez vos petites larmes de pleureuses professionnelles, bande de faux culs alcooliques ! …Et non, non, non, non, non, je n’ai pas préparé de discours. Je peux uniquement vous assurer que la météo prévoit pour cette nuit un avis général de grand’soif ! Canicule oblige !
  Les applaudissements et les rires saluent ces quelques phrases.

  Comme à chaque fois, je suis impressionné par la prestance de cet homme et admiratif. Dès qu’il apparaît, on ne voit plus que lui. Le chevalier de la Part-Dieu ne joue pas, il est.
  Il est cette morphologie d'ogre que l’âge n'a pas encore transformé en notable obèse, superbe et conquérant. Ce soir, son argent et son rang lui permettent toutes les fantaisies. Sa bonté lui impose que ses amis en profitent et que les instants à venir seront un souvenir inoubliable.

   Le repas est ce qu’il est mais le vin coule à volonté. Nous sommes un brouhaha de ruche, ponctué d’éclats de voix et de blagues croustillantes, plus que moins grassouillettes.
   Tout à coup, un besoin urgent d'uriner force Gaspard à clamer son envie impérieuse à toute la compagnie :
— Le déluge presse à ma porte ! Je n’aurai jamais le temps d’aller me cacher au fond d’un bosquet… Qu’on m’apporte ici le paysage !
  Ces derniers mots provoquent un chahut monumental. Levant mon verre comme on porte un toast, je hurle au génie, en tournant sur moi-même et je salue, comme s’ils étaient des êtres vivants, les posters géants qui recouvrent les murs du café de la gare. Ces photos rappellent les anciens papiers peints panoramiques du début du 19e, comme ceux de la maison Zuber. L’auberge des trois routes exhibait déjà, à l’époque, cette modernité dans la salle de l’étage, comme on s’affuble du dernier vêtement à la mode.
  Chez Seb, c’est un chemin en sous-bois, en noir et blanc. L’automne joue du gris dans toutes ses variations et la lumière est blanche. Le premier plan est d’une netteté impressionnante et le tapis de feuilles sèches ne demande qu’à bruisser sous les pieds.

  Encouragé par des hourras et des sifflets, Gaspard se soulage devant nous comme il vient de prévenir, sans prendre le temps de sortir dans l’arrière-cour, ni d’utiliser les toilettes, pourtant juste à côté du bar.
  Nous considérons cette action comme superbe de bravache, la preuve que la soirée sera d’ores et déjà exceptionnelle. Les plus prompts à la connerie choisissent eux-aussi un arbre où vider leur vessie.

   Sébastien gueule qu’il va foutre tout le monde dehors. Brandissant un couteau, il menace d’émasculer quiconque salopera encore les murs de son bar.
  Dans l’impossibilité de stopper l’élan de son manifeste poétique, le chevalier de la Part-Dieu reste stoïque, fixant dans les yeux l’aubergiste. Il lui explique, tout en humidifiant un des chênes du premier plan, ce qu’il pense de la situation :
— Le prix de ton estanco est pour moi, maintenant, une broutille. Je te donne le double de ce que te coûtera une nouvelle tapisserie. Et j’y ajoute la rénovation complète de la pièce…
  Gaspard se reculotte, toisant toujours le patron, observant l’hésitation de ce dernier :
— Sais-tu ce que veut dire gagner au loto ? Imagines-tu ce que représente la plus grosse cagnotte jamais remportée à ce jeu ? Il me semble que cela devrait suffire pour avoir le droit de pisser contre ton mur, non ? Je te paierai une belle image toute neuve… Ils en font maintenant des en couleurs… ça te dirait une forêt en couleur ? …

  On tape du plat des mains sur le zinc, on le prend d’assaut, on réclame à boire, on emmerde la police !
  Fixant Gaspard d’un regard bouillonnant de colère, Sébastien est tout prêt à lui foutre son poing sur la gueule, mais une main lui presse heureusement le bras.
  C’est Janine. Venue se placer discrètement derrière lui, elle sait par expérience combien son bougnat est impulsif, surtout en fin de journée.

  Gaspard est aux anges, il savoure son nouveau pouvoir. Plus besoin de croire en ses rêves, la réussite est aujourd’hui réelle : deux cent vingt millions d’euros gagnés à ce jeu du hasard… Lui qui n’a jamais économisé quoi que ce soit, il est maintenant le dieu de la fête.
  Je regarde le chevalier de la Part-Dieu. Dorénavant, l’imaginaire n’aura plus de limite !
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Message  midnightrambler Ven 13 Mar 2015 - 15:17

Bonjour,

Mon cher Frédéric Poirier, je peux t'appeler Poirier aujourd'hui, tu as été Pommier récemment et ce changement d'identité ne doit pas poser de problème à l'un des rois de l'animation et du show transformiste !
Blague dans le coin comme disent nos amis les Belges, j'ai beaucoup aimé cette suite qui tranche complètement par rapport au premier chapitre.
La lecture est très plaisante, les mots glissent comme des gorgées de vin dans un oesophage desséché par la canicule et font naître des images colorées au gré d'une profusion d'averbes, d'adjectifs et de compléments de tous poils comme je les aime !
Et merci, nous sommes vendredi 13, je vais essayer d'imiter Gaspard ... d'autant plus que ce prénom m'a suivi, comme surnom, pendant toutes mes études supérieures depuis le jour où l'une de mes copines tripotant le camping gaz que j'avais dans ma chambre d'étudiant, je métais écrié : "Attention ! ... le gaz part !"

PS. Je vous ai tendu à tous toutes les perches, profitez-en !

Amicalement,
midnightrambler (Les mains d'un homme sur mon corps ... Section PROSE, au bas de la page 5)
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Message  Sahkti Mer 1 Avr 2015 - 9:36

Cela me paraît déjà bien plus fluide ici, même si de ci de là, il y a encore quelques heurts entre l'utilisation de ce JE omniprésent et une narration qui tend à prendre du recul par rapport à l'action qu'elle décrit. J'ai davantage aprpécié que le premier chapitre, réussissant à m'immiscer dans l'histoire avec plus de facilité, de simplicité aussi. Ecriture toujours aussi agréable et soignée, merci pour cela (aussi).
Le récit est plaisant et prend une tournure qui capte rapidement l'attention, donnant envie de suivre l'évolution de l'histoire.
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