Hiver blafard, hiver brouillard
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Mano
Zou
Arielle
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Hiver blafard, hiver brouillard
Un essai pour tenter d'échapper aux alexandrins et autres mécaniques torturantes. Un même sujet, les mêmes images deux formes différentes...
Paupière lourde de la brume, paupière pesant sur la colline et qui ne se lèvera pas. Ce n'est pas cette brume éphémère à la croûte craquant sous la dent du soleil et dont la mie légère fait saliver le pré. C'est ce brouillard collant, lourd comme un pain mal cuit et dont la pâte molle barbouille tout en gris, fait de cette journée une boule indigeste au goût de crépuscule. Là dedans, couteau à la lame rouillée, un corbeau plante un cri si âpre qu'on tressaille.
***
Hiver blafard, hiver brouillard.
Exhalaisons, vapeurs pesant sur la colline.
Portrait posthume peint par lui-même
D'un paysage paupières closes.
Pâte molle, pain mal cuit
Lourd, collant,
Dès l'aurore un indigeste crépuscule.
Journées ni morsures ni baisers
Qui n'ont ni prise ni repère
Seul
Un corbeau,
Couteau rouillé,
Plante là dedans son cri âpre
Et fait crisser sa lame froide contre un squelette d'espérance.
Paupière lourde de la brume, paupière pesant sur la colline et qui ne se lèvera pas. Ce n'est pas cette brume éphémère à la croûte craquant sous la dent du soleil et dont la mie légère fait saliver le pré. C'est ce brouillard collant, lourd comme un pain mal cuit et dont la pâte molle barbouille tout en gris, fait de cette journée une boule indigeste au goût de crépuscule. Là dedans, couteau à la lame rouillée, un corbeau plante un cri si âpre qu'on tressaille.
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Hiver blafard, hiver brouillard.
Exhalaisons, vapeurs pesant sur la colline.
Portrait posthume peint par lui-même
D'un paysage paupières closes.
Pâte molle, pain mal cuit
Lourd, collant,
Dès l'aurore un indigeste crépuscule.
Journées ni morsures ni baisers
Qui n'ont ni prise ni repère
Seul
Un corbeau,
Couteau rouillé,
Plante là dedans son cri âpre
Et fait crisser sa lame froide contre un squelette d'espérance.
Re: Hiver blafard, hiver brouillard
Dans ces deux variations sur un thème, je préfère indiscutablement la première, plus ramassée, plus expressive, qui vous gifle de sa force humide et poisseuse !
De la deuxième je ne retiens guère que
"Pâte molle, pain mal cuit
Lourd, collant,
Dès l'aurore un indigeste crépuscule."
Le corbeau en vers libres, ensuite, me paraît grandiloquent par rapport à la première version aussi brutale que son cri.
De la deuxième je ne retiens guère que
"Pâte molle, pain mal cuit
Lourd, collant,
Dès l'aurore un indigeste crépuscule."
Le corbeau en vers libres, ensuite, me paraît grandiloquent par rapport à la première version aussi brutale que son cri.
Invité- Invité
Re: Hiver blafard, hiver brouillard
J'aime beaucoup l'image de la brume-paupière. L'évocation pour moi est plus forte dans le texte en prose et s'étiole nettement, se disperse aussi, dans la poésie. Ceci dit malgré tout quelques lourdeurs dans le texte en prose qui le rend moins percutant que ce qu'il pourrait être me semble t il.
Zou- Nombre de messages : 5470
Age : 62
Localisation : Poupée nageuse n°165, Bergamini, Italie, 1950-1960
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Hiver blafard, hiver brouillard
Arielle a écrit:
Paupière lourde de la brume, paupière pesant sur la colline et qui ne se lèvera pas. Ce n'est pas cette brume éphémère à la croûte craquant sous la dent du soleil et dont la mie légère fait saliver le pré. C'est ce brouillard collant, lourd comme un pain mal cuit et dont la pâte molle barbouille tout en gris, fait de cette journée une boule indigeste au goût de crépuscule. Là dedans, couteau à la lame rouillée, un corbeau plante un cri si âpre qu'on tressaille.
Par exemple que dirais tu de :
"Paupière lourde de brume fermée sur la colline. Elle ne se lèvera pas. ...C'est ce brouillard....barbouille tout en gris. Journée indigeste au goût de crépuscule. Un corbeau, lame rouillée, y plante un cri si âpre qu'on en tressaille."
C'est évidemment toi qui vois ;-)
Zou- Nombre de messages : 5470
Age : 62
Localisation : Poupée nageuse n°165, Bergamini, Italie, 1950-1960
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Hiver blafard, hiver brouillard
Je préfère la première version mais je ne sais pas si elle ne gagnerait pas à être mise, elle, en vers libres...
Paupière lourde de la brume,
qui ne se lèvera pas,
pesant sur la colline.
Ce n'est pas brume éphémère à la croûte craquante
sous la dent du soleil dont la mie légère fait saliver le pré.
C'est ce brouillard collant, lourd comme un pain mal cuit
dont la pâte molle barbouille tout en gris
faisant de cette journée une boule indigeste
au goût de crépuscule.
Dans cette épaisseur matière,
couteau à la lame rouillée,
un corbeau plante un cri si âpre
qu'on en tressaille.
Loin de moi l'idée de corriger quoi que ce soit. Juste participer et essayer de pousser des portes.
De plus, les versions en proses que nous postons ont des lignes biens trop longues qui les rendent difficiles à suivre.
J'aime bien l'idée du découpage en vers car cela guide la lecture.
Par contre comme le faisait remarquer socque parfois cela a pour effet une grandiloquence une peu artificielle...
Paupière lourde de la brume,
qui ne se lèvera pas,
pesant sur la colline.
Ce n'est pas brume éphémère à la croûte craquante
sous la dent du soleil dont la mie légère fait saliver le pré.
C'est ce brouillard collant, lourd comme un pain mal cuit
dont la pâte molle barbouille tout en gris
faisant de cette journée une boule indigeste
au goût de crépuscule.
Dans cette épaisseur matière,
couteau à la lame rouillée,
un corbeau plante un cri si âpre
qu'on en tressaille.
Loin de moi l'idée de corriger quoi que ce soit. Juste participer et essayer de pousser des portes.
De plus, les versions en proses que nous postons ont des lignes biens trop longues qui les rendent difficiles à suivre.
J'aime bien l'idée du découpage en vers car cela guide la lecture.
Par contre comme le faisait remarquer socque parfois cela a pour effet une grandiloquence une peu artificielle...
Mano- Nombre de messages : 233
Age : 54
Localisation : hyères
Date d'inscription : 17/01/2008
Re: Hiver blafard, hiver brouillard
Pour moi, c'est la démonstration par excellence qu'il est archi difficile d'écrire de la poésie en prose.
J'ai l'impression, Arielle, que tu es de mon avis.
À tel point que je te soupçonne d'avoir fait exprès d'écrire un texte en prose... hem ! comment dire ? aussi peu poétique :
«ce n'est pas cette brume (...) et dont...
« c'est ce brouillard (...) et dont...(...) fait de cette journée...
(au lieu de : qui fait de cette journée.)
« Là dedans (...) si âpre qu'on...
Et puis : "la mie qui fait saliver le pré..." !
Ces tournures, c'est tout ...sauf de la poésie.
Voilà bien une démonstration qu'il ne suffit pas d'aligner des : brume éphémère, dent du soleil, brouillard collant, et autres "crépuscule" pour faire de la poésie.
Ceci dit, je trouve que ta poésie n'est pas très bonne non plus. La référence à la «pâte molle d'un pain mal cuit» pour évoquer un paysage d'hiver...
Tu nous as déjà montré beaucoup mieux.
Je pense que ce genre de poésie demande une harmonie et une cadence.
Ça devrait s'écouter comme une chanson ; et ça, c'est beaucoup plus facile de l'obtenir dans une forme classique qui respecte les règles ; au moins avec des pieds réguliers.
Bon ! Ce n'est que mon avis, bien sûr ! ...Je ne suis pas «parole d'évangile». ;-))
J'ai l'impression, Arielle, que tu es de mon avis.
À tel point que je te soupçonne d'avoir fait exprès d'écrire un texte en prose... hem ! comment dire ? aussi peu poétique :
«ce n'est pas cette brume (...) et dont...
« c'est ce brouillard (...) et dont...(...) fait de cette journée...
(au lieu de : qui fait de cette journée.)
« Là dedans (...) si âpre qu'on...
Et puis : "la mie qui fait saliver le pré..." !
Ces tournures, c'est tout ...sauf de la poésie.
Voilà bien une démonstration qu'il ne suffit pas d'aligner des : brume éphémère, dent du soleil, brouillard collant, et autres "crépuscule" pour faire de la poésie.
Ceci dit, je trouve que ta poésie n'est pas très bonne non plus. La référence à la «pâte molle d'un pain mal cuit» pour évoquer un paysage d'hiver...
Tu nous as déjà montré beaucoup mieux.
Je pense que ce genre de poésie demande une harmonie et une cadence.
Ça devrait s'écouter comme une chanson ; et ça, c'est beaucoup plus facile de l'obtenir dans une forme classique qui respecte les règles ; au moins avec des pieds réguliers.
Bon ! Ce n'est que mon avis, bien sûr ! ...Je ne suis pas «parole d'évangile». ;-))
Saint Jean-Baptiste- Nombre de messages : 440
Localisation : Ottignies Belgique
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Hiver blafard, hiver brouillard
Ben moi je trouve que, justement, ces "Ce n'est pas" et "C'est" "collent" parfaitement à l'idée de lourdeur poisseuse : la forme est cohérente avec le fond, au service de l'expression, et pour moi là est l'important !
Et l'idée d'un brouillard d'hiver comme une pâte moite, gluante, ah si, pour moi c'est excellent !
Et l'idée d'un brouillard d'hiver comme une pâte moite, gluante, ah si, pour moi c'est excellent !
Invité- Invité
Re: Hiver blafard, hiver brouillard
lu. Je n'ai pas d'avis particulier, je suis un dévoreur de poésie, et j'apprécie le travail fourni autour des variations. Bravo, même si, non la métaphore en pain mal cuit ne me séduit pas. Au plaisir de te lire encore dans de nouvelles aventures.
Invité- Invité
Re: Hiver blafard, hiver brouillard
Il semble que la première version emporte votre adhésion. C'est pourtant celle que j'ai le moins travaillée, celle qui m'est venue spontanément sous les doigts. Il y a de ce fait des lourdeurs à éliminer (phrases trop longues, "et" à supprimer… ) ainsi que Zou et Mano me le font remarquer avec raison.
J'ai souri en lisant ton commentaire Saint Jean Baptiste. Tu exprimes avec tant de sincérité et de conviction ta défense du vers régulier dont j'essaie de me libérer que je me suis reconnue dans cette apologie de l'harmonie et de la cadence…
Je crois que Socque a parfaitement compris que c'est dans le poids des images indigestes et les répétitions pataudes que je voulais faire passer cette impression d'étouffement et de malaise qui m'importait dans ces deux textes bien plus que le côté "poétique" d'une brume hivernale.
Merci à tous pour vos commentaires et vos propositions que j'apprécie énormément.
J'ai souri en lisant ton commentaire Saint Jean Baptiste. Tu exprimes avec tant de sincérité et de conviction ta défense du vers régulier dont j'essaie de me libérer que je me suis reconnue dans cette apologie de l'harmonie et de la cadence…
Je crois que Socque a parfaitement compris que c'est dans le poids des images indigestes et les répétitions pataudes que je voulais faire passer cette impression d'étouffement et de malaise qui m'importait dans ces deux textes bien plus que le côté "poétique" d'une brume hivernale.
Merci à tous pour vos commentaires et vos propositions que j'apprécie énormément.
Re: Hiver blafard, hiver brouillard
moi aussi je préfère le premier texte. sans doute cette spontanéité joue-telle en sa faveur.
Je pratique ici et là la poésie mais toujours en vers libres et j'admire ce que tu arrives à faire avec des formes aussi strictes que l'alexandrin ou l'octosyllabe.
Je ne suis pas convaincue pour autant que la poésie en prose soit si "difficile" à réussir. C'est juste qu'il faut la sentir. La poésie est là quand l'expression et l'émotions se rejoignent. Prose ou vers n'y sont alors pas pour grand chose.
enfin, c'que j'en dis...
Je pratique ici et là la poésie mais toujours en vers libres et j'admire ce que tu arrives à faire avec des formes aussi strictes que l'alexandrin ou l'octosyllabe.
Je ne suis pas convaincue pour autant que la poésie en prose soit si "difficile" à réussir. C'est juste qu'il faut la sentir. La poésie est là quand l'expression et l'émotions se rejoignent. Prose ou vers n'y sont alors pas pour grand chose.
enfin, c'que j'en dis...
Re: Hiver blafard, hiver brouillard
Arielle a écrit:
J'ai souri en lisant ton commentaire Saint Jean Baptiste. Tu exprimes avec tant de sincérité et de conviction ta défense du vers régulier dont j'essaie de me libérer que je me suis reconnue dans cette apologie de l'harmonie et de la cadence…
.
...un vrai plaisir de te "critiquer", Arielle. ;-))
Saint Jean-Baptiste- Nombre de messages : 440
Localisation : Ottignies Belgique
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Hiver blafard, hiver brouillard
Leila Zhour a écrit:La poésie est là quand l'expression et l'émotion se rejoignent. Prose ou vers n'y sont alors pas pour grand chose.
enfin, c'que j'en dis...
Tu en dis très juste...;-)
Et, parmi les grands poètes que j'admire, Saint John Perse et Jaccottet me le rappellent à chaque nouvelle lecture. C'est bien la raison pour laquelle j'aimerais abandonner un peu les formes fixes.
Re: Hiver blafard, hiver brouillard
Je n'aime pas la première version, je la trouve lourde et brouillonne, avec ue insistance sur cette métaphore du pain qui sonne un peu fausse à mes yeux, tant je sens qu'elle doit capter l'attention.
Pas séduite du tout, donc, mais la seconde version n'emporte pas non plus mon adhésion car je trouve (avis perso) qu'elle manque d'âme et qu'elle répond à une structure trop figée, peu en rapport avec un hiver ou une sensation de temps ou de mélancolie.
Pas pour moi cette fois.
Pas séduite du tout, donc, mais la seconde version n'emporte pas non plus mon adhésion car je trouve (avis perso) qu'elle manque d'âme et qu'elle répond à une structure trop figée, peu en rapport avec un hiver ou une sensation de temps ou de mélancolie.
Pas pour moi cette fois.
Sahkti- Nombre de messages : 31659
Age : 50
Localisation : Suisse et Belgique
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Hiver blafard, hiver brouillard
M'ont étonné, venant de vous, ces négations, cette recherche du flou. Nos goûts partagés, pour SJP ou Jaccottet, nous rapprocheraient-ils à nouveau ?
Les critiques des uns et des autres me semblent pertinentes, mais, malgré tout, et jusque dans ses inattendues arythmies, l'essai mérite que vous le "transformiez".
pierre-henri
Les critiques des uns et des autres me semblent pertinentes, mais, malgré tout, et jusque dans ses inattendues arythmies, l'essai mérite que vous le "transformiez".
pierre-henri
pierre-henri- Nombre de messages : 699
Age : 65
Localisation : Raiatea
Date d'inscription : 17/02/2008
Re: Hiver blafard, hiver brouillard
pierre-henri a écrit:M'ont étonné, venant de vous, ces négations, cette recherche du flou. Nos goûts partagés, pour SJP ou Jaccottet, nous rapprocheraient-ils à nouveau ?
pierre-henri
Ravie de vous rencontrer ici, Pierre-Henri!
Désolée du même coup d'être sur le départ mais je vous laisse en bonne compagnie ;-)
N'oubliez pas de vous présenter en quelques mots comme vous le recommande le Panda en commentaire à vos sèves.
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