Nuit blanche, tranchée rouge.
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Tristan
Arielle
ninananere
Lucy
milo
9 participants
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Nuit blanche, tranchée rouge.
14 février 1916 .
Sans toi les jours sont longs. Bien au-delà de toutes mesures.
Les secondes s’éternisent dans l’attente de l’instant
où mes râles se tairont, où la terre, rouge, se couvrira d’un linceul de lumière pure.
Ici, nos lits sont de boue; les rêves ont le goût de l’acier.
Le vent ramène avec lui l’odeur du charnier
Incrustant des larmes sur la crasse de nos joues.
Mais les berceuses sont lointaines
Ici maman, les chants des femmes heureuses ne sont que plaintes humaines.
La mort rode, elle jure.
Je me surprends à songer au temps où j’étais enfant…
Le tonnerre est un ange, maintenant j’en suis sur.
Il susurre aux parents les mots rassurants, les mots tendres.
Ici, même les hommes forts n’ont plus de membres
Leurs corps mutilés saignent;
Au creux de la nuit, seuls leurs cris nous étreignent.
Bientôt le jour va poindre, j’aimerais pouvoir te rejoindre…
Mais c’est la fin, le doc l’a dit, Je n’ai plus de jambes et la gangrène a pris.
Ne t’en fait pas, les larmes sont loin, maintenant.
Et je m’en vais, souriant, le visage posé contre ta main.
[Dernier éclat d’une détresse infinie, sur ma peau scintillante de vanité;
En mon torse, les battements lents de mon cœur épuisé, sonnent, comme le glas de ma longue agonie.
D’un coup vint l’éclair,
puis l’amère sueur
Fendant mes lèvres et les restes de mes rêves.
Seul, spectateur ivre de ma dernière heure, dans ce tumulte teinté de pourpre,
je crève.]
Sans toi les jours sont longs. Bien au-delà de toutes mesures.
Les secondes s’éternisent dans l’attente de l’instant
où mes râles se tairont, où la terre, rouge, se couvrira d’un linceul de lumière pure.
Ici, nos lits sont de boue; les rêves ont le goût de l’acier.
Le vent ramène avec lui l’odeur du charnier
Incrustant des larmes sur la crasse de nos joues.
Mais les berceuses sont lointaines
Ici maman, les chants des femmes heureuses ne sont que plaintes humaines.
La mort rode, elle jure.
Je me surprends à songer au temps où j’étais enfant…
Le tonnerre est un ange, maintenant j’en suis sur.
Il susurre aux parents les mots rassurants, les mots tendres.
Ici, même les hommes forts n’ont plus de membres
Leurs corps mutilés saignent;
Au creux de la nuit, seuls leurs cris nous étreignent.
Bientôt le jour va poindre, j’aimerais pouvoir te rejoindre…
Mais c’est la fin, le doc l’a dit, Je n’ai plus de jambes et la gangrène a pris.
Ne t’en fait pas, les larmes sont loin, maintenant.
Et je m’en vais, souriant, le visage posé contre ta main.
[Dernier éclat d’une détresse infinie, sur ma peau scintillante de vanité;
En mon torse, les battements lents de mon cœur épuisé, sonnent, comme le glas de ma longue agonie.
D’un coup vint l’éclair,
puis l’amère sueur
Fendant mes lèvres et les restes de mes rêves.
Seul, spectateur ivre de ma dernière heure, dans ce tumulte teinté de pourpre,
je crève.]
Re: Nuit blanche, tranchée rouge.
Beau texte encore une fois Milo.
Je n'avais pas besoin de la date en haut à gauche.
N'hésite pas à prendre plus de risque dans ton écriture,
Je peux la suivre aisément.
Exemple:
Ici, même les hommes forts n’ont plus de membres
Je verrais bien le "s" s'envoler à "membres"
Deux pierres d'un coup, tu déplaces le texte dans un domaine étendu,
et tu incites ton lecteur à creuser chaque phrase plus en profondeur pour y dénicher d'autres pistes.
Ici, même les hommes forts n’ont plus de membre.
Je n'avais pas besoin de la date en haut à gauche.
N'hésite pas à prendre plus de risque dans ton écriture,
Je peux la suivre aisément.
Exemple:
Ici, même les hommes forts n’ont plus de membres
Je verrais bien le "s" s'envoler à "membres"
Deux pierres d'un coup, tu déplaces le texte dans un domaine étendu,
et tu incites ton lecteur à creuser chaque phrase plus en profondeur pour y dénicher d'autres pistes.
Ici, même les hommes forts n’ont plus de membre.
Invité- Invité
Re: Nuit blanche, tranchée rouge.
Texte fort, avec cette chute : "je crève" qui remet la mort à sa place, une bonne fois pour toute. On est loin de la sublimation dont elle est, parfois, auréolée. Quand on est soldat, quand on ne l'a pas choisi, la mort est tout sauf jolie.
Lucy- Nombre de messages : 3411
Age : 46
Date d'inscription : 31/03/2008
Re: Nuit blanche, tranchée rouge.
Tout simplement wouaw...
ninananere- Nombre de messages : 1010
Age : 48
Localisation : A droite en haut des marches
Date d'inscription : 14/03/2007
Re: Nuit blanche, tranchée rouge.
Grave et poignant. Pourquoi, malgré la date, ce texte me parle-til avec une voix tellement actuelle?
l’amère sueur
Fendant mes lèvres et les restes de mes rêves
Ce mourant-là est de toujours.
l’amère sueur
Fendant mes lèvres et les restes de mes rêves
Ce mourant-là est de toujours.
Re: Nuit blanche, tranchée rouge.
C'est bellement dit, c'est puissant, et toujours d'actualité. Cela remet en mémoire d'autres textes de la même qualité. Bravo.
Et puis la proposition de Pandaworks de jouer sur l'équivoque du mot "membre" me paraît judicieuse voire nécessaire. Bien vu !
Et puis la proposition de Pandaworks de jouer sur l'équivoque du mot "membre" me paraît judicieuse voire nécessaire. Bien vu !
Invité- Invité
Re: Nuit blanche, tranchée rouge.
Dernier éclat d’une détresse infinie, sur ma peau scintillante de vanité;
En mon torse, les battements lents de mon cœur épuisé, sonnent, comme le glas de ma longue agonie.
Je trouve que "détresse infinie" est un peu mou, voire désuet. Il y a trop de "ma" et de "mon". Personnellement, j'aurais plutôt enlevé les possessifs, histoire de créer une distanciation :
"Dans le torse, les battements du coeur épuisé, sonnent, comme le glas d'une longue agonie", etc jusqu'au superbe "je crève"
sinon, oui, c'est un texte qui prend aux tripes, et pas uniquement par le sujet traité. Vraiment une belle écriture
Re: Nuit blanche, tranchée rouge.
Un beau texte, une écriture agréable mais tout comme Tristan, j'aurais aimé une plus grande distanciation au sujet (mais est-ce possible?), afin de créer une émotion plus forte, plus froide, quelque chose qui aurait sonné moins lyrique. Mais tout cela n'est bien sûr qu'une question de goûts personnels.
Sahkti- Nombre de messages : 31659
Age : 50
Localisation : Suisse et Belgique
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Nuit blanche, tranchée rouge.
Quelques belles images dans ce texte mais qui sont peut-être trop attendues au regard du contexte historique dans lequel tu inscris ces lignes.
Quelques passages me semblent vraiment faibles, celui-ci par exemple :
'Bientôt le jour va poindre, j’aimerais pouvoir te rejoindre'
Bref, il y a un potentiel certain dans ce texte mais il reste par moments (pas toujours) engoncé dans un pathos que j'ai tendance à trouver un peu facile.
Quelques passages me semblent vraiment faibles, celui-ci par exemple :
'Bientôt le jour va poindre, j’aimerais pouvoir te rejoindre'
Bref, il y a un potentiel certain dans ce texte mais il reste par moments (pas toujours) engoncé dans un pathos que j'ai tendance à trouver un peu facile.
Re: Nuit blanche, tranchée rouge.
"Ici, nos lits sont de boue; les rêves ont le goût de l’acier."
Rien que pour ce vers, j'adore ton texte (dont l'intégralité m'a touché). Bravo !
Rien que pour ce vers, j'adore ton texte (dont l'intégralité m'a touché). Bravo !
Re: Nuit blanche, tranchée rouge.
"les rêves passent par les goûts d'acier". Tu as su capter une ambiance critique chez cet homme qui se console comme il peut.
C'est dans la banalité de la mort au quotidien que l'on s'habitue le mieux à sa venue.
Partenaire, elle nous aide à supporter les affres des guerres meurtrières. Pas de longs discours. Cela suffit à donner au silence, la fureur des non-dits.
C'est dans la banalité de la mort au quotidien que l'on s'habitue le mieux à sa venue.
Partenaire, elle nous aide à supporter les affres des guerres meurtrières. Pas de longs discours. Cela suffit à donner au silence, la fureur des non-dits.
bertrand-môgendre- Nombre de messages : 7526
Age : 104
Date d'inscription : 15/08/2007
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