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NOUVELLE VAGUE : La Princesse et l'oiseau bleu

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Message  Gobu Dim 18 Mai 2008 - 8:50

LA PRINCESSE ET L’OISEAU BLEU

I – Le royaume de Shamaâr

Il était une fois… Toutes les belles histoires commencent de la sorte. Les vilaines aussi, d’ailleurs, mais on ne le sait qu’à la fin. Quand il y a une fin : certaines histoires sont sans fin. Ce ne sont pas nécessairement les meilleures. Simplement les plus longues. Si longues qu’on n’en voit pas la fin, justement. L’homme en est frustré ; il est ainsi bâti, il lui faut une chute. Ne serait-ce que pour se rappeler qu’il est friable et que le sol est dur.

Il était une fois, donc, un petit, un tout petit royaume, égaré au milieu de l’infinitude du désert. On aurait dit l’unique caillou laissé par un minuscule Petit Poucet. Un grain de sable dans un océan de sable. Mais un grain qui scintillait sous la griffe du soleil comme un somptueux diamant. Tel celui qui ornait jadis le turban du Calife –.le Salam soit sur lui. Trois vastes et puissants états enserraient ce chatoyant royaume de tous côtés. Sur l’un régnait sans partage un ombrageux roi barbu, flanqué de princes et de docteurs pas moins barbus. Ce sont les plus princes et les plus doctes. Un militaire à moustache de guerrier – ou inversement – tenait l’autre sous sa poigne inflexible. Le dernier était une république démocratique. Le peuple y tenait le peuple d’une poigne aussi implacable que celle du roi ou du guerrier. Ces trois pays étaient riches, même si les pauvres n’y étaient pas moins nombreux ni moins pauvres qu’ailleurs. Le sous-sol du premier était une éponge de naphte. Le monde entier en fait le plus grand cas. Le second s’étendait sur d’immenses champs aurifères. Le monde entier ne crache pas sur l’or non plus. Le troisième ne possédait ni or noir ni or jaune, mais ses artisans étaient si habiles, ses marchands si entreprenants et ses financiers si retors que l’argent affluait des quatre points cardinaux dans les coffres de l’Etat. Et l’argent tourne la tête au monde entier.

Le petit royaume de Shamaâr, lui, était si petit qu’il ne figurait sur aucune carte. Si paisible que l’Histoire l’avait laissé sur le bas-côté. Et d’accès si périlleux que nul étranger n’ en avait foulé le sol depuis des temps immémoriaux. Pour s’y rendre, on devait traverser l’un des trois redoutables états qui l’entouraient, plus susceptible et querelleur l’un que les autre. A supposer qu’on fût assez courageux ou assez fou – c’est tout un – pour tenter l’aventure, il fallait encore venir à bout de quarante jours de caravane à travers les contrées les plus arides qu’on puisse imaginer. Il n’y pleuvait qu’un jour par an ; encore la pluie s’évaporait-elle avant même d’avoir touché le sol brûlant. Le chameau s’y déshydratait sur pied, la vipère à cornes racornissait sous sa pierre plate, même le scorpion, qui en a vu d’autres, n’en menait pas large. A perte de vue, ce n’était que sel rôtissant, incandescence de rocaille, squelettes blanchis par la fournaise. Le mirage y régnait en maître, conduisant à la folie ceux que la soif n’avait pas encore tués.

Pourtant, au cœur de cet empire de la Désolation, le royaume de Shamaâr détenait un trésor qui faisait rugir de convoitise ses trois richissimes voisins. Il jouissait en abondance d’un élément plus précieux que le pétrole, plus convoité que l’or, plus vital que l’argent : l’eau. Elle chantait dans les fontaines, irriguait les terrasses des jardins suspendus et rafraîchissait la plus étroite ruelle. Elle coulait à flots dans la plus modeste demeure, remplissait les bassins des nombreux bains publics et – que le Tout-Puissant leur pardonne – humectait même la liqueur d’anis que buvaient ceux que la soif faisait transgresser les interdits du Prophète. Cette eau provenait d’une source miraculeuse, apparemment inépuisable, qui jaillissait du plateau sur lequel on avait bâti la capitale. Les premiers rois du pays l’avaient enfermée à l’abri de leur citadelle, autant pour la protéger que pour garder la main sur le robinet. La capitale s’édifia autour, et le royaume entier s’y agrégea. Les souverains qui se succédèrent sur le trône se montrèrent sages. Il ne mégotèrent pas le précieux liquide à leurs sujets ; ils n’en eurent pas de plus fidèles, ni plus déterminés à défendre leur bien commun. On baptisa la cité d’un nom qui veut dire « la ville de l’eau éternelle » et l’on remercia chaque année le Tout-Puissant de ses bienfaits. En priant fort pour que cela dure. Eternellement si possible.

N’importe lequel de ses féroces voisins aurait pu depuis longtemps balayer d’une chiquenaude cette insignifiante monarchie et mettre la main sur son trésor, pourrait-on croire. C’est compter sans la jalousie des puissants. Que l’un voulût l’attaquer et il trouvait les deux autres, rabibochés aussi sec, sur son chemin. Plutôt que de s’en emparer, ils voulaient empêcher les autres de le faire. Il ne restait plus qu’à prier derechef pour qu’ils n’aient pas la funeste idée de s’entendre à trois. Cela n’arriverait, prophétisait un oracle ancestral, que lorsque la source se tarirait. Or si un tel malheur survenait – ce qu’au Créateur ne déplaise – il n’ y aurait plus aucun intérêt à envahir le pays. Vu le débit, la vigueur et la fraîcheur avec lesquels l’eau jaillissait, ce n’était pas pour le lendemain. Les sujets du Royaume de Shamaâr pouvaient se désaltérer tout leur soûl et dormir sur leurs deux oreilles.

II – Le roi Jen-Dîh

Il était une fois, sur le trône du Royaume de Shamaâr, un roi qui se nommait Jen-dîh, ce qui, en dépit des apparences, signifie « Celui qui lit à livre ouvert dans le cœur des hommes ». La langue de ce pays dit beaucoup de choses en peu de mots. Les chroniqueurs l’appelaient volontiers le Juste, comme son père, son grand-père, et tous ses aïeux aussi loin que la chronique s’en souvienne. Le peuple s’y était fait à merveille. La Justice lui allait comme un gant. Lorsqu’on baigne dedans, elle est comme l’air qu’on respire, on finit par l’oublier. On n’implore Justice que lorsqu’elle fait défaut.

Le roi Jen-dîh était si juste que nul ne s’était jamais estimé lésé de tout son règne. Comme partout, certains possédaient plus que d’autres, mais le souverain en personne compensait sur sa cassette les inégalités les plus criantes. De la sorte, les mieux nantis, pour ne pas être en reste, y allaient aussi de leur bourse et les pauvres du royaume étaient les plus prospères et les mieux nourris qu’on puisse trouver. Ainsi était respectée la recommandation du Prophète, qui veut que le riche donne chaque année le dixième de son bien aux démunis, non par charité, ni même par esprit d’équité, mais de bon cœur.

Le roi Jen-dîh n’était pas seulement juste. Il était sage. S’il avait à prendre une décision d’importance, il interrogeait d’abord ses conseillers, des hommes qui ne parlaient pas pour ne rien dire. Lorsque chacun avait exprimé son opinion, il pesait dans de fines balances le pour et le contre avant de décider. Et même lorsqu’il avait pris son parti, il ne tranchait pas avant d’avoir consulté l’ensemble de ses sujets. Tout cela prend du temps. Aussi les édits royaux étaient-ils presque aussi rares que les pluies dans le désert qui entoure le royaume. C’est tant mieux ainsi : lorsque le roi parle trop, le peuple se tait.

Or ce peuple aimait parler. Tous les peuples aiment parler, pourvu qu’on ne leur coupe pas la langue, mais celui-ci avait fait de la parole son art national. Autour de lui, il en allait différemment. La nation du roi barbu était renommée dans le monde entier pour la rigueur de ses théologiens ; même leurs traités portaient la barbe. C’est dire leur rigueur. Le pays cornaqué par le guerrier à moustache n’avait pas son pareil pour forger les armes les plus étonnantes et les plus meurtrières. On s’entretuait depuis la plus haute antiquité avec les merveilles issues de ses arsenaux. Enfin, l’Etat où le peuple s’opprimait démocratiquement lui-même avait porté l’architecture à des sommets inégalés. Le pain y était chichement rationné et l’eau délivrée au compte-goutte, quant à la liberté, mieux vaut ne pas en parler, mais la hauteur de ses habitations et le faste de ses palais nationaux lui valaient l’admiration des connaisseurs. On se console comme on peut.

Rien de tel au royaume de Shamaâr. On n’y était pas moins croyant qu’ailleurs, mais l’on n’en faisait pas tout un fromage. On savait se battre, à l’occasion, pour défendre son foyer et son roi, mais l’on n’éprouvait pas le besoin de vivre sur le pied de guerre. Et pour ce qui est de l’architecture, à l’exception de la citadelle aux murailles formidables qui défendait la précieuse source, les maisons étaient de hauteur modeste et à dimensions humaines. On s’y sent mieux : l’homme a parfois faim de grandeur mais il en est vite rassasié. Confort et tranquillité la remplacent avantageusement.

La vie s’écoulait paisiblement pour les sujets du roi Jen-dîh. La terre du royaume était riche et savamment irriguée. Il suffisait de cracher un noyau d’olive pour qu’un arbre jaillisse du sol. Autant dire que les travaux des champs ne tuaient pas leur homme. Il en allait de même pour l’artisanat. On produisait utile, et des objets faits pour durer. On se les repassait de génération en génération, et il était fréquent que le petit-fils mange dans la même assiette que le grand-père, ou que la jeune promise porte au mariage la robe qui avait embelli sa trisaïeule. Personne ne se fatiguait plus que le strict nécessaire ; ce n’est pas dans ce royaume qu’on aurait eu l’idée saugrenue de travailler plus pour gagner plus. Gagner plus ? Pour quoi faire ? Il y avait assez de nourriture et de biens domestiques pour satisfaire tout le monde, les soins et l’enseignement y étaient gratuits, et le peu d’or et de métal précieux était réservé aux artisans pour qu’ils parent les femmes de bijoux.

Ce peuple parlait beaucoup, donc. Aux terrasses des cafés ou sur le pas des portes, en fumant le narghileh. Devant les étalages des marchés, en admirant les amoncellements de fruits, de légumes et d’épices multicolores. Sur le lieu de travail, où il n’était pas rare que l’on prenne de longues pauses pour s’en raconter une bien bonne. Et même à la mosquée, au point que les bavardages couvraient parfois le prêche de l’imam. Lequel ne s’en formalisait pas plus que ça : la parole de Dieu s’adresse directement au cœur, pas aux oreilles. De quoi parlait-on ? Pas de politique, en tous cas. Le système n’était pas parfait – lequel est parfait ! – mais il avait le mérite de durer. On se lasse vite du changement. On ne commentait pas plus les faits divers. Le vol était inconnu dans un pays où chacun avait au minimum de quoi vivre décemment. Quant au meurtre, son châtiment était si terrible qu’il ne s’en commettait pas plus d’un par génération. Celui qui s’y risquait était banni, et rejeté à l’extérieur du royaume. Dans le désert. On comprend que l’enjeu n’en valait pas la chandelle. On parlait du reste. De la pluie de l’année précédente, de celle de l’année à venir, et du beau temps qui séparait les deux. On parlait du bon repas qu’on avait fait à midi, et de celui, pas moins savoureux, qu’on mangerait au soir. On se racontait de vieilles légendes du temps des guerres, heureusement révolu, et des fables éternelles, pleines de princes charmants, de princesses hiératiques, et de bonnes fées attentives à leur bonheur. On l’aura compris, ce peuple vivait heureux. Il avait rejeté l’Histoire hors de ses frontières, se tenait à l’écart du Progrès, et, chaque jour ressemblant comme un frère au précédent, ne se souciait en fait ni de la veille ni du lendemain. L’insouciance des hommes finit par courroucer les dieux. Ils se délectent des tracas. Et les dieux existent : c’est le Diable.
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Message  Gobu Dim 18 Mai 2008 - 8:53

III – La princesse Zulm-ahya

Le roi Jen-dîh avait à cœur de préserver sa dynastie et assurer la pérennité du trône ; il avait fait à la reine de nombreux enfants. A l’instar de la plupart des chefs d’Etat du voisinage – et même de plus loin – il aurait pu prendre jusqu’à quatre épouses et honorer autant de concubines que sa fantaisie et sa vigueur le lui permettaient. Le monarque à la longue barbe entretenait un harem plus peuplé qu’une ruche. On prêtait au despote guerrier autant de maîtresses que sa moustache comptait de poils. Les maîtres démocratiques de la république, tout vertueux qu’il pussent se montrer en public, ne dédaignaient pas en privé hanter les lupanars et se livrer à la pire débauche. Le roi Jen-dîh, lui n’avait qu’une épouse, mais il l’aimait et la respectait. Il ne prêchait pas la vertu, il la pratiquait. La reine était appelée Jen-dî-dah, forme féminine du nom de son époux, comme le voulait l’usage. Mais en vérité elle se nommait Ad-alma, ce qui veut dire à peu près « Celle dont la beauté fait blêmir de dépit le soleil » image un peu verbeuse et qui ne rendait qu’imparfaitement la grâce de la reine. L’âge, les maternités successives et une certaine prédilection pour les succulentes pâtisseries locales, lourdement sucrées, avaient certes arrondi ses formes jadis élancées, mais son maintien était plus que jamais celui d’une reine, et le pur ovale de son visage rendait toujours lyrique la plume du poète et fébrile le pinceau du portraitiste. Quant à son regard, il faisait fondre la pierre.

De cette femme admirable qu’il avait épousée vingt ans auparavant, le roi avait eu sept enfants. Les six premiers, des garçons, faisaient sa fierté, et celle de ses sujets. Ils brillaient aussi bien par leurs qualités physiques que morales, et chacun d’entre eux aurait été digne de succéder à son père sur le trône, même si la règle dynastique voulait que cet honneur échût à l’aîné, pour éviter les querelles de succession. Mais parmi tous ces enfants, c’est à la cadette que le roi vouait secrètement la plus grande affection. Il l’avait nommée Zulm-ahya « l’ange descendu du ciel » parce qu’il désespérait que son épouse lui offre une fille après avoir mis au monde six garçons. Certaines femmes semblent taillées pour n’enfanter que des mâles, tandis que d’autres accouchent d’une fille sur l’autre et font le désespoir du père qui voudrait voir perpétuer son nom. La venue tardive de la petite Zulm-ahya donna tant de joie à son père qu’il décréta pour l’honorer une semaine de réjouissances populaires, renouvelable à chacun de ses anniversaires. Inutile de dire que le peuple n’en aima que plus tendrement cette princesse arrivée comme un cadeau du Tout-puissant.

La princesse Zulm-ahya avait hérité de sa mère la reine la beauté du corps, la grâce du visage et la noblesse d’allure. Elle en avait hérité aussi la vivacité d’esprit et le caractère fier. De son père le roi, en revanche, elle tenait une sagesse qui plongeait ses maîtres dans l’embarras et une nature enjouée qui lui valait l’estime générale. Rien n’était trop beau pour elle. Les plus habiles artisans déposaient à ses pieds les jouets les plus extravagants, pâtissiers et confiseurs rivalisaient d’invention pour garnir son assiette de douceurs inédites, et même les plus élégantes femmes du royaume sortaient de leurs écrins les plus merveilleux bijoux pour en orner son poignet gracile, son cou délié ou son oreille à l’orle délicat. Les artistes, nombreux dans un pays où le labeur quotidien laissait du temps pour rêver, n’étaient pas en reste. Les poètes n’avaient pas assez de rimes pour exalter ses vertus. Les peintres manquaient de couleurs pour rendre la lumière de sa peau. Les musiciens traquaient des harmonies inconnues pour chanter sa démarche. Les ministres du culte eux-même, généralement moins indulgents, citaient sans relâche en exemple sa modestie, sa pudeur et sa piété. Bref, la petite faisait l’unanimité.

Au palais, plutôt d’ailleurs une belle demeure seigneuriale qu’un de ces monuments conçus pour écraser les sujets de leur munificence, le roi lui avait fait arranger un extraordinaire jardin, planté de toutes les essences que comptait le pays, paré des fleurs les plus chatoyantes, dans lequel plus de mille espèces d’oiseaux voletaient en toute liberté. Dans ce pays béni, on ne les mettait pas derrière des grilles. On préférait les voir partir plutôt que de les enfermer. Du reste, où seraient-ils allés ? Le désert qui entourait le royaume en faisait la plus sûre des cages. La petite Zulm-ahya avait grandi ainsi, entourée de camarades de jeu des deux sexes, éduquée par de bons maîtres à la férule légère, et surtout couvée d’un amour constant et attentif de la part de ses parents. Et puis elle eut douze ans.

La veille des festivités qui devaient marquer son douzième anniversaire, auxquelles le pays entier se préparait avec gourmandise, elle se précipita dès son réveil dans la chambre de sa mère, sans prendre même le temps de faire sa toilette et s’habiller pour la journée. La reine s’apprêtait à la gronder gentiment pour ce manquement exceptionnel, lorsqu’elle vit scintiller sous sa paupière une rosée de larmes. Or, de mémoire d’homme, on n’avait jamais vu pleurer la princesse Zulm-ahya. Lorsqu’elle se tordait le pied en courant ou en tombant de cheval –elle ne manquait ni d’énergie ni de témérité – elle se relevait en faisant bonne figure et en masquant sa douleur d’un sourire angélique. On raconte qu’alors même elle n’était encore qu’un enfançon, elle ne s’était jamais exprimée autrement que par des gazouillis. Or voilà qu’elle s’était jetée sur les coussins où sa mère prenait son petit déjeuner, pour y enfouir sa tête, le dos secoué de sanglots. Reposant la tasse dans laquelle fumait le moka, la reine entreprit de la caresser jusqu’à ce qu’elle se calme, et s’enquit du motif d’une réaction si inhabituelle.

Tournant vers elle un visage décomposé par le chagrin, la princesse souleva alors le bas de sa chemise de nuit. Le long du mollet, et jusqu’en haut de la cuisse, un filet écarlate balafrait sa peau de lait. Sa mère attendait ce moment depuis un certain temps déjà. Son enfant était devenue une jeune femme. Ma chérie, lui dit-elle doucement, tu n’as pas à pleurer. Le sang qui coule de toi est celui de la vie, et il annonce que tu es devenue femme. Nous aurons ainsi double raison de fêter ton anniversaire. Mais la petite ne voulait rien entendre, et continuait à désespérer de plus belle. Adieu mon enfance, sanglotait-elle, je ne suis plus une jeune fille, on va me séparer de tous ceux que j’aime et me préparer à devenir une épouse et à enfanter. C’est la nature, lui répondit encore sa mère, et ni toi ni moi ne pouvons rien contre elle. C’est la volonté du Très-haut que les enfants grandissent et tu dois encore l’en remercier pour cela. Sèche tes larmes, et va t’apprêter pour annoncer la bonne nouvelle à ton père. Jamais la petite n’avait désobéi à ses parents, aussi ravala-t-elle ses larmes et obtempéra sans discuter davantage.

Mais dans son for intérieur, sa mère comprenait ses appréhensions. Devenir femme, cela voulait dire être séparée des garçons, devoir porter le voile, surveiller chacun de ses gestes. Surtout quand on était la fille du roi. Comprenons-nous bien. Au royaume de Shamaâr, la religion était pratiquée avec ferveur, mais sans excès de rigueur. On y préférait la miséricorde d’Allah à la cruauté des châtiments rituels. On n’y coupait pas la main des voleurs, d’autant plus qu’il n’y avait pas de voleurs. On n’y lapidait pas de femme adultère, car en public, par courtoisie, personne ne s’affichait avec l’épouse d’un autre. Quant à se qui se passait en privé, cela ne regardait personne. On tolérait la consommation de l’alcool, à condition qu’on en usât discrètement pour ne point choquer ceux qui respectaient le commandement d’abstinence. Enfin on ne voilait pas les femmes au point de dissimuler leurs traits, et l’on ne s’offusquait point trop qu’on dévoile une épaule ou qu’un mouvement de la jupe révèle l’arc d’un mollet. En vérité, on considérait que le péché était avant tout une affaire entre le pécheur et Dieu. Qui sommes-nous pour juger d’autrui ? Cependant, on y respectait la tradition. Et celle-ci voulait qu’à sa puberté, la fille du roi fût séparée des hommes, et protégée des regards pour mieux se préparer à son état d’épouse princière. Dès que les réjouissances prévues pour son anniversaire seraient terminées, elle devrait quitter sa chambre d’enfant pour rejoindre ses appartements dans une tour de la citadelle, où seule sa mère et ses demoiselles de compagnie pourraient l’approcher. Finies les chevauchées à travers les rues de la cité ou les chemins de campagne. Finis les jeux interminables avec les jeunes gens de son âge. Finies, surtout, les promenades enchantées dans le jardin aux oiseaux. Tel était le prix à payer, pour une princesse de sang royal, lorsqu’elle devenait femme.
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Message  Gobu Dim 18 Mai 2008 - 8:55

IV – L’oiseau bleu

Cela faisait maintenant plusieurs mois que la princesse Zulm-haya avait été conduite dans sa nouvelle résidence. Assurément, elle y jouissait du plus grand confort. Dix chambrières et autant de demoiselles de compagnie veillaient à satisfaire le moindre de ses désirs. Mais elle semblait n’en plus avoir aucun. Elle, dont la vue d’un simple gâteau au miel et aux amandes emplissait jadis la bouche de salive, dédaignait maintenant les plus somptueux plateaux de sucreries. Elle qui riait du matin jusqu’au soir ne souriait plus que du bout des lèvres. Elle dont la volubilité ébahissait ses maîtres ne desserrait pratiquement plus les dents. Pire encore, elle qui n’aimait rien tant que la compagnie passait ses journées dans la solitude, recluse dans sa chambre, soit allongée sur son lit, soit à la fenêtre ogivale qui donnait sur le jardin. Quelles pensées morbides, quels sombres regrets, quels torturantes angoisses devait-elle ruminer, nul ne le savait. Sa mère elle-même, sa plus fidèle confidente, l’ignorait. Le roi la fit examiner par ses meilleurs médecins et questionner par ses mages les plus sagaces. Les premiers conclurent qu’en dehors de cette mélancolie qui la terrassait, sa santé était florissante. Les seconds furent d’avis qu’elle allait à merveille, sinon qu’un mauvais esprit s’était emparé d’elle. On n’en fut pas plus avancé.

Un jour qu’elle se morfondait ainsi, appuyée à la croisée de la fenêtre, un oiseau bleu rentra dans la pièce et vint se poser sur son épaule. C’était un oiseau magique et pas seulement parce qu’il parlait. En effet, dans le merveilleux jardin de son enfance, comme dans tout le royaume, on pouvait admirer des oiseaux verts comme l’émeraude, rouges comme le grenat, jaunes comme l’or, mauves comme le couchant, roux comme la biche, noirs comme le jais ou de la blancheur de l’écume de mer, voire de plusieurs de ces couleurs à la fois, mais aucun n’était bleu. Pour venir jusqu’à elle, il lui avait certainement fallu voler des nuits et des jours au dessus des immensités désertiques, et cela ne pouvait relever que de la magie. Dès lors, qu’il se mît à lui parler n’avait rien qui pût surprendre. Le Salam sur toi, noble princesse, lui dit l’oiseau. Sur toi le Salam, bel oiseau, répondit la princesse, qui connaissait les usages. Le volatile se rengorgea, gonflant le jabot. Tout oiseau qu’il était, il était sensible à la flatterie. D’ou viens-tu, lui demanda-t-elle ? Hé hé, fit-il, comme toi : je suis tombé du ciel. Et pourquoi t’es-tu posé ici ? L’oiseau lui répondit qu’il avait entendu de là-haut une belle princesse qui pleurait et se morfondait dans une tour, et que son devoir lui commandait d’aller la consoler. Ne pleure plus, douce princesse, pépia-t-il, et ouvre moi ton cœur.

La princesse lui conta tous ses malheurs. L’insouciance à jamais perdue de son enfance. Ses camarades avec qui elle ne jouerait plus jamais. La solitude forcée dans la prison dorée de cette maudite tour. L’oiseau opina du bec : les oiseaux non plus ne prisent guère les cages, fussent-elles dorées. La malheureuse poursuivait sa lugubre litanie. Le vent des chevauchées qui ne fouetterait plus sa joue. La terre fraîchement labourée que son pied nu ne foulerait plus. La cascade de ses longs cheveux qu’elle serait contrainte d’emprisonner dans un voile. Et surtout cet époux qu’on lui destinait, choisi par d’autres depuis sa naissance. Nous y voilà, sourit l’oiseau : tu ne veux point te marier. Non, pleurnichait la princesse, je ne veux pas devenir la femme de cet homme que je n’aime pas. Il a beau être tout comme moi de sang royal, posséder cent chevaux, mille arpents de terre et la plus belle maison du royaume, je ne veux pas de lui. Serait-il le plus beau, le plus sage et le plus galant des hommes – on dit qu’il est tout cela – que je n’en voudrais toujours pas ! Que veux-tu, alors ? Je veux la liberté.
La liberté, siffla l’oiseau bleu, tu n’y vas pas par quatre chemins, Princesse ! Ne t’a-t-on pas enseigné qu’elle n’appartient qu’aux oiseaux et aux fous ? Les premiers parce qu’ils peuvent s’envoler et les seconds parce que leur folie les fait croire libres. Mais elle n’est pas l’apanage de l’homme. Il en rêve, mais n’en veux pas : il ne saurait qu’en faire. Moi je saurais quoi en faire, trépigna la Princesse. On se souvient qu’elle avait du caractère. Et quoi donc ? demanda l’oiseau. J’irai de par le vaste monde. J’en ai assez de ce royaume de contes de fées qui n’est tout entier qu’une vaste prison dorée. J’en assez de ce peuple béat qui prend sa léthargie pour le bonheur. J’en ai assez, enfin, d’être condamnée à la même vie que ma mère, et la mère de sa mère et ainsi de suite jusqu’à la nuit des temps. Même si c’est une vie de reine. L’oiseau resta pensif un moment. La chose demandait réflexion. As-tu un miroir ? finit-il par dire…suis-je bête, les jolies femmes ont toujours des miroirs, ne fût-ce que pour les fracasser si ce qu’ils révèlent ne leur convient pas.

La princesse souleva une draperie qui dissimulait une grande glace sur pied. Au royaume de Shamaâr, on voilait les miroirs pour qu’ils ne reflètent que ce qu’on leur montre. L’oiseau bleu battit trois fois des ailes et le lac d’étain poli s’alluma. Il y fit défiler toutes les splendeurs des trois riches états qui entouraient le royaume, et même d’ailleurs. La Princesse, ses yeux d’amande verte écarquillés sur l’impensable, buvait du regard le spectacle. Il lui montra les palais aux coupoles d’or du roi barbu, si vastes qu’un chameau s’y perdrait. Il anima pour elle la parade des gardes d’élite du militaire à moustache, si nombreux qu’on aurait cru voir déferler une marée de fourmis guerrières. Il fit se dresser dans le cadre d’ébène les tours de métal et de verre où s’entassait le peuple démocratiquement opprimé, si hautes quelles semblaient crever les nuages. Tout n’était que surprise et nouveauté. Des chenilles interminables de voitures de métal, sans chevaux, encombraient les chaussées. Des bateaux géants déversaient sur d’interminables quais des montagnes de marchandises venues de partout. D’étonnantes machines volantes aux voilures en flèche sillonnaient le ciel. Partout la Science et le Progrès ridiculisaient la magie et la tradition. Qu’était-ce qu’un tapis volant comparé à ces oiseaux de métal qui se riaient de la pesanteur ? Que valait la boule de cristal de la voyante face à ces fenêtres géantes plantées à chaque carrefour, sur lesquels s’agitait un monde frénétique et bariolé ? La Princesse battit des mains. Encore, gentil petit oiseau bleu, encore, suppliait-elle, montre-moi encore toutes ces merveilles inconnues de nous. D’un seul battement d’aile, l’oiseau éteignit le miroir. Elle en soupira de désappointement. Puis il se fit grave. Désires-tu vraiment voir tout cela, Princesse ? Oui oui, cria-t-elle, maintenant que tu m’as fait voir à quoi ressemble le monde, j’en mourrais si je n’allais pas à sa découverte. Je peux t’y conduire, dit l’oiseau, mais je te préviens, je ne t’ai montré que les merveilles. Je t’ai fait voir la face ensoleillée du monde, mais il a aussi un visage de ténèbres. Toute médaille à son revers. Tu n’as pas vu la misère, la corruption, la tyrannie. Les supporteras-tu ? Je les supporterai, affirma la Princesse, si c’est là le prix à payer pour vivre. Ici, je m’éteins ; là-bas je me rallumerai. C’est bien, approuva l’oiseau, nul ne peut aller contre son Destin, et le tien est de partir. Viens avec moi, nous volerons vers la Réalité.

Alors les murs de la tour semblèrent se dissoudre et l’oiseau déploya des ailes qui s’étendaient jusqu’à l’infini. Il se transforma en dragon recouvert d’écailles de lapi-lazuli, et prit son envol, la princesse en croupe, si vite et silencieusement que nul ne put s’en rendre compte. Dans le ciel, l’azur de ses écailles se confondait avec celui du ciel. Peu importe la direction qu’il prit : au quatre coins de l’horizon, c’était ailleurs.


V – La fin du royaume de Shamaâr

La nouvelle de la disparition de la Princesse Zulm-ahya se répandit comme une traînée de foudre. Elle sema la consternation. Les hommes lacéraient leurs vêtements et se couvraient la tête de cendres. Les femmes poussaient des hululements funèbres à fendre les pierres. Les prêcheurs clamaient qu’une malédiction s’était abattue sur le Royaume de Shamaâr et imploraient la miséricorde divine. Mais celui que l’événement frappa le plus fut son père le roi Jen-dîh. Il en perdit la raison. S’enfermant au plus profond de son palais, il referma derrière lui les portes infranchissables qui gardaient l’accès de la source miraculeuse, que seul le monarque pouvait ouvrir. Une fois là, il ferma le robinet, puis, se dépouillant de tous les symboles de son autorité, il se donna la mort pour ne pas voir s’accomplir la plus funeste des prédictions.

Et l’eau cessa de chanter dans les fontaines, d’irriguer les terrasses, de rafraîchir les demeures et d’humecter la liqueur d’anis, et chacun comprit que le temps de l’insouciance était révolu à jamais. Alors, trois redoutables armées, alliées pour la circonstance, firent s’élever la poussière du désert de leurs chenilles de fer et convergèrent sur le royaume. Le firmament s’obscurcit d’oiseaux de malheur aux flancs chargés de mort, et le feu du ciel s’abattit, écrasant les maisons, incendiant les récoltes et jetant bas les séculaires murailles de la citadelle. En moins de temps qu’il n’en faut pour l’écrire, le pays fut livré à la soldatesque, ses habitants foulés sous la babouche de l’occupant et sa jeunesse emmenée en esclavage au service des nouveaux maîtres. On réussit à rouvrir le robinet de la source miraculeuse ; l’eau prit le chemin de l’étranger. Elle cheminait sur un gigantesque aqueduc jeté par dessus le désert. Rien n’est trop beau lorsqu’il s’agit de prendre. Ainsi prit fin l’existence de l’infortuné royaume de Shamaâr.

La princesse Zulm-haya ne reparut jamais. Certains prétendent qu’elle serait cloîtrée dans le sérail du roi barbu, dodue et appétissante à force de loukoums. D’autres, pas moins catégoriques, affirment que le militaire moustachu l’a prise pour égérie, et qu’elle fait la pluie et le beau temps à l’Etat-major. D’autres enfin jurent comme fer qu’elle se prostitue, émaciée et flétrie, dans une maison close d’un démocratique bas-quartier de la république du même nom. On dit tant de choses.

Quant au gentil, gentil petit oiseau bleu, il est retourné chez lui. Au ciel. Ou ailleurs.

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Message  Invité Dim 18 Mai 2008 - 9:40

Enchantée par ce conte dont la longueur m'avait initialement rebutée. Beaucoup apprécié le travail sur l'écriture tout en nuances et les détails et allusions savamment distillés tout le long du texte. C'est "tellement parfait" que j'ai un peu honte de pointer deux incorrections :

aux quatre coins de l’horizon
on devait traverser l’un des trois redoutables états qui l’entouraient, plus susceptible et querelleur l’un que l'autre
Et un doute sur la clarté absolue de cette phrase (que la suite explique, c'est vrai)
Au royaume de Shamaâr, on voilait les miroirs pour qu’ils ne reflètent que ce qu’on leur montre

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Message  claude Dim 18 Mai 2008 - 9:49

Un bien joli conte des 1001 nuits. Un conte parabolique : une tyrannie du peuple (démocratie), un clin d’œil au pourquoi « gagner plus » quand on dispose de déjà tout ce dont on a besoin pour vivre...
Un conte raconté par un conteur dont le langage est adapté au petit et au grand, où l’humour est sous-jacent et le sourire en coin.
Fantastique et magnifique. Du grand art !

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Message  claude Dim 18 Mai 2008 - 9:55

pour ce qui est des fautes, je n'ai pas osé relever les 2 ou 3 vues, mais tant qu'on y est : en tout cas, toujours tout avec un t. mais là ma femme m'appelle...
enchanté !

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Message  Lucy Dim 18 Mai 2008 - 15:20

Brillant, Gobu ! Un pur moment d'évasion et de plaisir comme à chacun de tes textes - ceux que j'ai eu le plaisir de lire, en tout cas.
J'ai aimé cette vision du peuple, dans les quatre royaumes.
le peuple démocratiquement opprimé
Tous les peuples aiment parler, pourvu qu’on ne leur coupe pas la langue
ce peuple béat qui prend sa léthargie pour le bonheur
Au fond, ils finissent par tous se ressembler ces peuples parfaits... ou pas.
Le bonheur est évanescent et la source finit toujours par se tarir. C'est l'histoire de l'humanité : on aime les emmerdes sinon, on a l'impression de s'ennuyer et de dépérir.
Merci pour ce conte.
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Message  souris Dim 18 Mai 2008 - 17:32

Maître Gobu sur sa branche perché tenait dans son bec un beau conte !
Ce serait pas toi l’oiseau bleu de ta fable ?
Il n’y a pas de magicien dans ton conte car il est occupé à l'écrire.
Tu fais encore la preuve qu'on peut compter sur toi, magicien des mots !
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Message  mentor Dim 18 Mai 2008 - 20:53

Superbe, Gobu, comme toujours. Quelle plume ! Et ton oiseau bleu aussi d'ailleurs ;-)
Au fait, moi j'ai noté une incorrection : "un oiseau bleu rentra dans la pièce ", pour "rentrer", encore eût-il fallu qu'il fût déjà entré au moins une fois :-))
Il y a les 1001 nuits, il y a Le Roi et l'Oiseau, il y a Sarko, il y a Ségo, il y a Momo, bref, tout y est pour passer un excellent moment.
Pas de lourdeurs, les allusions sont là mais pas trop appuyées, et l'allégorie est parlante.
Beau travail

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Message  bertrand-môgendre Lun 19 Mai 2008 - 8:06

Première impression : l'attente.
Tu plantes un formidable décor dans lequel je me fonds avec plaisir, tout en ayant la sensation qu'il allait y avoir un drame qui vienne tout bousculer. Le drame arrive sans surprise. La remarque concerne plus la construction de l'histoire, sans en critiquer son élégance.

Seconde impression : le constat.
Tu réussis à écrire le genre de conte, agréable à lire le soir, épisode par épisode, aux enfants prêts à chevaucher les délices et inquiétudes de leur nuit à venir. Gageure difficile à respecter tant ce public est intransigeant vis avis des auteurs. Avec plaisir, je me targue de le tester au plus vite.

Dernière impression : la joie.
Ta présence au sein de ce groupe révèle la Richesse de vos écrits.
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Message  Sahkti Mar 20 Mai 2008 - 9:34

Quel travail, Gobu! Bravo!

Un conte qui, à première vue, présente toutes les caractéristiques du genre: longueur, découpage, évolution, morale.
Si on le lit en ne tenant pas compte du monde qui nous entoure, il est brillant et bien écrit, on sent le travail rigoureux et le souci du détail, mais ça reste une jolie histoire, il faut aimer ça.
Si en plus, on l'intègre dans nos réflexions actuelles sur la société, sur le bling bling et le travailler plus, ça prend un sens non pas différent mais bien plus riche, qui lui donne toute sa force.

J'ai aimé cette seconde lecture, ce collage à une actualité pas super rose et à cette réflexion philosophique sur l'homme qui finit toujours par pourrir quelque chose, lui ou l'autre, quoi qu'il fasse.
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Message  Arielle Mer 21 Mai 2008 - 9:42

Quel conteur, Gobu!
L'évasion, l'humour, la réflexion, la poésie ... tout ce que j'aime dans ce genre littéraire que tu maîtrises parfaitement.

Le bonheur ne serait-il qu'une affaire individuelle et non pas celle d'une société? Merci Maître de confirmer si brillamment mon impression ;-)

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Message  Gobu Jeu 22 Mai 2008 - 9:30

Arielle a écrit:Quel conteur, Gobu!

Le bonheur ne serait-il qu'une affaire individuelle et non pas celle d'une société? Merci Maître de confirmer si brillamment mon impression ;-)

Eh, voilà une question qui demande aussi une réponse individuelle...

Mais on peut dire aussi que les petites sociétés fermées qui jouissent égoïstement de leur bonheur, aveugles et sourdes au reste du monde, sont tôt ou tard rattrapées par l'Histoire. Et ça fait toujours très mal.
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Message  à tchaoum Ven 23 Mai 2008 - 8:38

Comme si je l'avais gardé pour la bonne bouche...
Je me suis relevé pour aller chercher un stylo, pour souligner les choses qu'il faudrait que je reprenne en quote.
Lucy en a déjà relevé trois belle, moi j'ai coché aussi
La langue de ce pays dit beaucoup de choses en peu de mots.
et j'ai pensé à Yali qui avait fait écho au silences des aborigènes :-)
Revenons à toi :
On produisait utile, et des objets faits pour durer.
me touche beaucoup ainsi que :
Le vol était inconnu dans un pays où chacun avait au minimum de quoi vivre décemment.
il y avait un truc comme ça sur ma pancarte de l'avant dernière manif.
Pas vraiment une ombre au tableau, je tique sur ça :
Et les dieux existent : c’est le Diable.
on voit ce que tu veux dire, mais ça n'est pas encore la formulation lumineuse que ça mérite, cela dit sans t'offenser.
...autant de maîtresses que sa moustache comptait de poils
J'ai failli pisser de rire.
Encore un truc très fort :
elle tenait une sagesse qui plongeait ses maîtres dans l’embarras
d'ailleurs c'est tout le paragraphe qui est un régal, et particulièrement :
Les poètes n’avaient pas assez de rimes pour exalter ses vertus. Les peintres manquaient de couleurs pour rendre la lumière de sa peau. Les musiciens traquaient des harmonies inconnues pour chanter sa démarche.
Bref, tout m'a plu dans ce désert, comme... une fois par an.
Et puisque tu évoques le Petit Poucet au début, je t'invite à faire un saut ici :[url]:http://ww3.ac-poitiers.fr/arts_p/B@lise10/pageshtm/index.htm[/url] tu dis que tu viens de la part des objets qui dure longtemps...
en résumé merci beaucoup.
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Message  à tchaoum Ven 23 Mai 2008 - 8:42

http://ww3.ac-poitiers.fr/arts_p/B@lise10/pageshtm/index.htm
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Message  Gobu Ven 23 Mai 2008 - 9:10

à tchaoum a écrit:
Pas vraiment une ombre au tableau, je tique sur ça :
Et les dieux existent : c’est le Diable.
on voit ce que tu veux dire, mais ça n'est pas encore la formulation lumineuse que ça mérite, cela dit sans t'offenser

Y a pas d'offense mon cher : la citation n'est pas de moi ! C'est un emprunt à ce bon vieux Cocteau, placé en exergue de la pièce : "La machine infernale". J'ai oublié de la remettre en italiques pour marquer le coup.
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Message  Krystelle Sam 24 Mai 2008 - 7:50

Un joli conte, raconté avec élégance.
Le message passe, même si certaines allusions auraient mérité plus de finesse de mon de point de vue (cf : "ce n’est pas dans ce royaume qu’on aurait eu l’idée saugrenue de travailler plus pour gagner plus " ).
Je me suis dit que parfois tu en faisais trop en évoquant les bonnes vieilles valeurs du royaume de Shamaâr et que question morale, on était servi ! Et puis la fin vient donner une toute autre tonalité au texte et relativiser la question de la moralité.
Autre petit regret : cette fin de texte très rapide qui surprend d’autant plus que tu as pris le temps de planter longuement le décors. Tu as sans doute raison l’homme « est ainsi bâti, il lui faut une chute », c’est pas une raison pour l’expédier :-)
Cela dit, un grand coup de chapeau pour ce texte travaillé que j’ai lu avec plaisir.

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Message  à tchaoum Sam 24 Mai 2008 - 8:48

Krystelle a écrit:Je me suis dit que parfois tu en faisais trop en évoquant les bonnes vieilles valeurs du royaume de Shamaâr et que question morale, on était servi !
T'as raison Léon !
Brûlons les fables de La Fontaine !
Qu'est-ce qu'i' vient nous faire chier ç'mec là ?!
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Message  Gobu Sam 24 Mai 2008 - 13:51

à tchaoum a écrit:http://ww3.ac-poitiers.fr/arts_p/B@lise10/pageshtm/index.htm

Super !

C'est toi qui fais ça ?
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Message  à tchaoum Sam 24 Mai 2008 - 15:59

Gobu a écrit:Super !
Je ronronne :-)
C'est toi qui fais ça ?
Yessœur, votre serviteur.
à tchaoum
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Message  mentor Sam 24 Mai 2008 - 16:12

à tchaoum a écrit:
Gobu a écrit:Super !
Je ronronne :-)

C'est toi qui fais ça ?
Yessœur, votre serviteur.
bravo !
j'adore la photo avec les vieux sièges de ciné, les gros cailloux spectateurs et le film d'horreur : le panneau routier
c'est top
:-)))))

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Message  Arielle Sam 24 Mai 2008 - 16:30

L'huître, la godasse et le petit caillou vont, de ce pas, s'afficher sur mon tableau d'honneur des meilleures citations de la semaine.
Bravo, bravissimo A tchaoum!

Arielle

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Message  Reginelle Sam 24 Mai 2008 - 16:45

Le lien est en favori, j'ai fait une promenade "émerveillée"...

Oui, bravissimo à tchaoum !
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Message  Pierre de La Coste Sam 24 Mai 2008 - 21:38

Eh bien, je suis comme tout le monde, je trouve cela excellent. Pas très original (mon commentaire, pas le conte lui même). Ce texte fait l'unanimité. C'est un signe. Bien écrit, agréable, plein de sens, instructif, à la fois classique et imaginatif. Que dire de plus? Sinon se poser la question: quel est le devenir de ce texte? Doit-il faire partie d'un recueil "papier", d'un "vrai livre", en compagnie d'autres contes? doit-il s'étoffer pour devenir un roman, dans le genre très en vogue de l'héroic fantasy? Doit-il être illustré, viser plutôt les enfants? devenir une bande dessinée?
Une proposition, pour avancer. Il y a peut-être des illustrateurs parmi les habitués de ce forum ou leurs amis. Pourquoi ne pas poster des dessins scannés en guise de commentaires?
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Message  Invité Sam 31 Mai 2008 - 17:05

Le dernier était une république démocratique. Le peuple y tenait le peuple d’une poigne aussi implacable que celle du roi ou du guerrier

!

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Message  Invité Sam 31 Mai 2008 - 17:10

La langue de ce pays dit beaucoup de choses en peu de mots

C'en est assez. Je vais me dégoter une imprimante et me coucher ton texte sur papier. je te publie à un exemplaire à compteur d'encre.

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Message  Woody Sam 31 Mai 2008 - 17:45

Je ne serai pas très original non plus, j'ai adoré cette histoire, bravo, Gobu. Ce conte est plein de justesse, de belle ironie, et il a l'avantage de comporter une fin partiellement ouverte : on ne sait toujours pas ce qu'est devenue la princesse, et chaque lecteur peut choisir le destin qui lui sied le mieux. ;-)

La langue de ce pays dit beaucoup de choses en peu de mots, c'est avant tout une allusion au Bourgeois Gentilhomme de Molière, si j' ne m'abuse.
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Message  presqu'île Lun 2 Juin 2008 - 20:50

Vraiment génial ! Bien mieux que ce Voltaire dont on fait des tonnes ;-)

Bref, j'aime les folies à morale sans moraline, moi, dans les
"Etat(s) où le peuple s’opprim(e) démocratiquement lui-même".

Ceci étant, on t'a menti. La princesse, en vrai, elle s'est transformée en oiseau. On dit même que c'est un n'albatros, une sous-espèce rare de n'albatros qu'on appelle l'antigone-qui-meurt-pas-à-la-fin, et qu'a décidé de plus jamais redescendre...

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