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Lucienne

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Message  moun Sam 4 Oct 2008 - 21:34

voici un texte car je ne pense pas que ce soit une nouvelle. pas trop de valeur à mon goût mais je poste quand même.:


LUCIENNE



En cette fin de journée, la vieille Lucienne gémit à n’en plus finir. De longues plaintes lancinantes s’échappent par vagues régulières de la chambrée du fond, là où elle est sensée dormir depuis un petit moment.

Que ne donnerait – on pas pour avoir le silence. Mais Lucienne en a décidé autrement ce soir.

On aurait pu trouver tous les prétextes du monde quant à ce comportement étrange : ses débuts d’ escarres aux fesses qui la font souffrir, ou bien une digestion trop difficile, mais la réalité est tout autre et tellement banale.

Lucienne est tombée de son lit. Elle a échappé à la vigilance du veilleur de nuit et elle est passé par delà sa prison matelassée, pourvue de monstrueux barreaux de fer.

Lucienne est allée ensuite ramper jusqu’au milieu de la chambrée, et ses autres compagnes d’infortune, allongées dans leur lit, ouvrent des yeux ronds , interloquées par ce cinéma.

Lucienne est une vieille femme difforme ,énorme , obèse , ses chairs flasques et avachies par les grossesses, par les bals du samedi soir, par sa jeunesse, par la vie quoi, la prive de se tenir solidement sur les jambes. Alors elle passe son temps au lit , ou au fauteuil. Toujours attachée. Et voilà que cette nuit , le démon s’est emparée d’elle. Déjà qu’elle n’a plus l’esprit arrêté depuis bien longtemps, on dirait qu’une sorte de frénésie a pris possession de ce corps si mou et lui a ordonné de commettre quelque bêtise.

Elle ne s’est pas fait mal tant son trop plein de graisse a amorti la chute. Comme une folle à lier, elle s’est traîné et en a usé sa couche. Elle est restée là, les fesses contre le carrelage, et au contact du froid, elle s’est oublié. Une odeur épouvantable prend à la gorge. Lucienne geint, nageant dans ses excréments. Sa couche , qu’elle a finit de déchiqueter, gît autour d’elle, comme de gros flocons de neige tombés d’un ciel qui n’a de nom que le plafond écaillé de cette chambrée si vétuste.

Désormais Lucienne a froid et elle continue à gémir. Sa chemise blanche d’hôpital laisse apercevoir un dos large, une nudité autant obscène que morbide.
Lucienne frotte son derrière sur le carrelage, comme si elle voulait s’essuyer les fesses, mais ne fait rien d’autre que d’astiquer d’avantage le sol en étalant encore et plus loin cette flaque énorme et visqueuse qui n’en finit plus de sortir d’elle.

Alors de ses grosses mains maladroites, elle tente de se débarrasser de ce qui commence à l’incommoder, et la voici qui s’en sert comme shampoing , semblant se délecter de ce savon de fortune qui emmêle ses longs cheveux filasses.

Elle s’en tartine le visage et geint toujours, la vieille Lucienne.

D'un geste brusque, elle s'est dévêtue. Nue comme un vers , elle attend, mais n’en n’a pas véritablement conscience puisque la folie s’est emparée d’elle depuis longtemps.

Si on la regarde de dos , on a l’impression de voir un tronc d’arbre , car le cou est si fort, si trapu, un vrai cou de taureaux qu’il se confond avec des épaules charnues et tellement tombantes.

De face, de gros seins pendent lamentablement, formant deux poires sur une bedaine aux plis monstrueux.

Enfin quelqu’un a pitié de cette misérable gisant dans ce tas d’immondice gluant.

Le veilleur de nuit et l’infirmière arrivent enfin. Ils buvaient un café, les bienheureux, en se racontant leur sortie au cinéma le samedi dernier. Alors forcément, que Lucienne geigne, se lamente, ou crie, qu’importe, puisque ici, c’est le lot quotidien qu’apportent toutes ces vieilles chaque soir à leurs oreilles habituées à ces délires sans fin.

Mais , puisque leur conversation touchait à sa fin et qu’ils commençaient à somnoler à l’approche d’une veille qu’ils pensaient sans histoire , ils souhaitaient rendre une petite visite à la vieille Lucienne . Pas pour la réconforter, mais pour la houspiller un peu , parce que eux aussi , finalement, ils aimeraient bien se reposer.

En s’approchant de la chambrée ouverte, ils sont alertés par l’odeur. Une odeur épouvantable, que vient renforcer le chauffage au sol. En tournant l’interrupteur, ils manquent de buter contre la vieille Lucienne qui les observe maintenant en riant d’un air bête et qui malaxe un reste de se qu’elle a trouver sous elle…

L’infirmière a un haut le cœur, et le veilleur de nuit blanchit .

Il va falloir la nettoyer la Lucienne. Elle ne peut pas marcher, c’est un fait , alors de chaque côté, ils lui servent de béquille et la traînent ainsi , la portant presque à bout de bras, et se collant du même coup des saletés sur leur peau rose, lisse et parfumée, jeune... quoi.

La douche n’est pas loin mais la vieille doit être maintenue solidement sous peine de s’écrouler telle une chiffe molle. Alors le veilleur de nuit entre avec elle sous la douche et l’infirmière entreprend de la décrotter , longuement, avec du papier , des tas de rouleaux à papier, puis avec un grand drap qui sera brûlé. Ensuite viennent le décapage , les shampoings à n’en plus finir , mais toujours cette odeur entêtante et si tenace…. Même si à la fin il ne reste rien de suspect.

La vieille Lucienne a retrouvé une seconde jeunesse. Elle a fait peau neuve. On fait chemin inverse. Lucienne est recouchée à grand renforts de râles et d’essoufflements de l’infirmière qui semble au bord de la crise de nerf.

Elle attache les poignets de Lucienne au barreaux du lit, avec des bandes velcro , solidement, et tant pis pour les marques rouges qu meurtriront la peau demain au réveil.

Le carrelage est brièvement lavé , histoire d’enlever le plus gros , on ne va pas chipoter, les filles de salles sont là pour ça tous les matins…Puisla chambrée se retrouve plongée dans l'obscurité.

Un dernier café avant d’entamer une longue nuit de veille avec la chance , peut - être, de pouvoir somnoler quelques heures, après cet épisode somme toute , tellement ordinaire...



Mais quels sont ces hurlement là-bas au fond du couloir?...

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Message  Invité Dim 5 Oct 2008 - 8:10

Une crudité qui me plaît ! Pour moi l'horreur, la cruauté, sont bien mieux exprimées par ce ton factuel, détaché, empreint d'ironie. J'ai aimé ce texte.

Je me permets de relever les quelques fautes qui le déparent :
"là où elle est censée dormir"
"elle est passée par-delà"
"Lucienne est une vieille femme difforme ,énorme , obèse , ses chairs flasques et avachies par les grossesses, par les bals du samedi soir, par sa jeunesse, par la vie quoi, la privent de se tenir solidement sur les jambes" (j'ai cité toute la phrase car j'ai le sentiment qu'elle serait mieux balancée avec un point-virgule au lieu d'une virgule avant "ses chairs" ; mais c'est bien sûr à vous de voir !)
"son trop-plein de graisse"
"elle s’est traînée"
"elle s’est oubliée"
"qu’elle a fini de déchiqueter" (pas de "t" à la fin de "fini")
"mais n’en a pas véritablement conscience" (pas de double négation ; la phrase est peut-être un peu "de trop" pour moi, puisque vous avez déjà précisé que Lucienne était sénile)
"si fort, si trapu, un vrai cou de taureau qu’il se confond" (pas de "x" à "taureau", et je pense qu'il manque une virgule après ce mot)
"dans ce tas d’immondices gluantes"
"un reste de ce qu’elle a trouvé sous elle"

Sinon, pour "comme de gros flocons de neige tombés d’un ciel qui n’a de nom que le plafond écaillé de cette chambrée si vétuste" : l'image est belle mais son expression m'en paraît assez lourde.
"une nudité autant obscène que morbide" : ça gifle, j'aime.
"Elle s’en tartine le visage et geint toujours, la vieille Lucienne" : là aussi, j'aime, c'est tout simple et ça fait mal.
"à leurs oreilles habituées à ces délires sans fin.

Mais , puisque leur conversation touchait à sa fin" : la répétition de "fin" se remarque, je crois.
"telle une chiffe molle" : pas de faute, mais peut-être l'adjectif est-il inutile.
"Elle a fait peau neuve. On fait chemin inverse" : les deux "fait" me paraissent trop proches l'un de l'autre.

Voilà, je pense qu'avec un minimum de travail vous pouvez avoir quelque chose d'assez fort...

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Message  moun Dim 5 Oct 2008 - 9:37

bonjour dominical

pour " taureau"... j'ai toujours eu du mal ( les x). sinon eh bien merci je vais corriger mon texte.
Je pensais que ce texte justement faisait trop..... enfin trop...."dégoutant"de par tous ces excréments.

bonne journée à vous
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Message  Invité Dim 5 Oct 2008 - 20:11

C'est affreux, et ça sonne tellement vrai ! La narration par petits paragraphes chronologiques et une écriture dépouillée contribuent non pas au plaisir de la lecture (je n'irais pas jusque là), mais à un récit qui fait mouche, absolument.

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Message  mentor Dim 5 Oct 2008 - 20:16

c'est atroce mais efficace comme texte, quelle horreur !
j'ai eu du mal à aller au bout
et puis je me suis dit que tout ça était tout à fait plausible
sans doute même le quotidien d'une catégorie d'agents hospitaliers
bravo pour avoir osé aborder ce thème "délicat"

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Message  Invité Lun 6 Oct 2008 - 1:51

Oui un récit qui se tient, ne par pas dans un délire redoutable ou vulgaire.
M'enfin ce n'est pas le genre de chose qui me passionne en littérature.
Il y a quelques fautes faciles à corriger.

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Message  Sahkti Jeu 16 Oct 2008 - 8:27

C'est plausible, ça sonne vrai, oui, mais j'ai tout de même eu l'impression que par moments tu forçais la dose, notamment dans ces descriptions à répétition que tu glisses dans le texte et qui feraient presque oublier toute cette détresse humaine, même si tu abordes aussi clairement cet élément.
Ce genre de situation existe et est courante, tu la présentes sous une lumière crue un brin dérangeante, donc pas besoin d'en faire trop, tout cela est assez parlant (et affreux) comme ça.
Sinon, ton écriture est maîtrisée, assez sûre d'elle et ce texte semble couler de ta plume avec facilité.
Sahkti
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