Changer de vie

[Funambule]

Moi aussi, un jour, j’ai rêvé changer de vie.

Un désir radical, une pulsion quasi animale. Un mélange de haine et d’envie. La haine pour cette vie là. L’envie pour cette vie-ci. Combien de fois devrais-je pointer ? Combien de salaires devrais-je toucher ? Combien de mensualités devrais-je payer pour enfin m’affranchir, pour enfin pouvoir dormir, libre.
J’ai souvent voulu quitter cette société qui m’assoupit le jour et blanchit mes nuits. Mais comme tout le reste, on a acheté ma volonté, rémunéré mon énergie, primé mon imagination. Mes rêves d’enfance ont été vendus aux enchères, j’ai mis la flamme de mon adolescence sur un compte à terme, les émotions de ma vie d’adulte sont côtées en bourse. Je suis payé pour oublier. Oublier que je me suis rêvé pompier, footballeur, rock star, savant , navigateur, photographe ou écrivain… mais pas banquier.
Oh bien sûr cela aurait pu être pire. J’aurais pu finir satyre, martyre ou vampire. Après tout, je vends un peu de rêve. Du rêve que l’on achète. A crédit.

Moi aussi, un jour, j’ai rêvé changer de vie.

Et puis mon regard a croisé le vôtre. Et j’ai compris. J’ai compris que c’était cette même vie qui m’avait fait vous rencontrer. Oui vous tous : famille, amours, amis . Tous autant, bénévoles de la chaleur humaine. Je vous écoute rire, chanter, aimer. Je me laisse envahir par la douceur des mots, la poésie des sourires. Je vous regarde me regarder et je me rappelle de tout. De nos jeux d’enfants, de nos caresses dans le noir, de ses souffles sur ma joue, de ses verres de vin renversés, des larmes retenues.

Oui, moi aussi, un jour, j’ai rêvé changer de vie.
Mais je n’en ai plus envie.

[Marie D]

J'ai bien aimé. Une certaine forme de poésie mêlée à la dure réalité de notre monde. Une belle période pour parler de banquier! lol

[Invité]

J'aurais aimé trouvé de l'ironie, de la causticité dans l'avant-dernier paragraphe, là ça fait un peu larmoyant, guimauve. D'un autre côté je comprends qu'il amène la conclusion. Bref, ça ne m'emballe pas plus que ça, les banquiers ne sont pas bien cotés en ce moment :-)

[Arielle]

j’ai mis la flamme de mon adolescence sur un compte à terme,

Après une phrase comme celle-ci, j'aurais aimé une fin plus acide, moins résignée, sans doute moins réaliste...

[Invité]

Tiens ! Quelqu'un qui n'est pas schizophrène...

[mentor]

la ballade du banquier repenti, c'est d'actualité ? ça pourrait. Mais ça risque pas !
;-)

[bertrand-môgendre]

on a acheté ma volonté, rémunéré mon énergie, primé mon imagination...
J'ai envie de corriger en disant tu as vendu ta volonté, on te rémunère pour ton énergie parce que tu le veux bien. Trop facile de reporter la faute sur les autres. Assumons nos choix.
Sinon, la fin, Mais je n’en ai plus envie confirme ma réflexion.

[Funambule]

Bon ok, c'est pas extraordinaire. Je comprends les remarques sur le côté larmoyant, le manque de causticité... Ce texte date un peu et aurait largement mérité d'être retravaillé avant de vous être proposé. Mais j'avais envie de vos retours sur un ton que j'emploie de temps en temps. Pour le coup je suis servi !
Pour Bertrand : ce texte n'a pas valeur de plaidoyer pour un banquier ou pour une personne qui aurait "vendu son énergie". Je partage l'idée qu'il faut assumer ces choix mais je pense que les choses ne sont pas aussi simples. Bien sur, chacun a une grande responsabilité sur la conduite de sa vie mais nous n'avons pas forcément les mêmes atouts (éducation, expérience, caractère, valeurs,...) pour éviter les pièges et faire les bons choix.

[Sahkti]

Le blues du banquier... bof bof (copyright Socque)
Il y a banquier et banquier, le type de la petite agence du coin qui va gérer comme un bon père de famille et puis le stratège de la haute finance qui sera au-dessus de la mêlée populaire. Le second n'aura pas le blues et le premier pas l'occasion d'en avoir puisqu'il décide de peu, en fait.
Le fond me laisse donc perplexe et la forme, appuyant trop à mon goût sur le côté pathétique des choses, ne me convainc pas davantage. Je n'ai guère accroché à ce texte, une autre fois sans doute.

[loic]

c'est vrai que la fin est trop douce; le dernier paragraphe aurait pu "synthétiser" l'amertume

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