Programme de la journée : Se réveiller, se lever, et mourir

[Fireflyer]

Bonjour ! Ça faisait un moment que je n'étais pas passé ! J'ai ouvert un blog où je poste mes écrits, et je voulais vous faire partager un des plus récents :

Ce matin, je suis mort.
Je me suis levé, j'ai pris une douche, je suis allé dans le salon puis pouf ! Mort. Là, je suis allongé sur le tapis baroque de la salle à manger. Je suis sur le dos, la bouche ouverte, les yeux vides, et la main sur le cœur.
Moi qui ai vécu dans la dignité, ça n'est pas très glorieux. C'est con d'être mort. On a rien à faire. Je croise les bras, je regarde un peu autour de moi. Pendant ce temps la rigidité cadavérique faisait son travail, et j'étais maintenant raide comme une planche de chêne. Je me jette tout juste un regard.
C'est assez agréable, de mourir en fait. J'ai eu une forte douleur, et puis... et puis comme un soupir, une bouffée d'air frais qu'on inspire jusque dans les plus petites parcelles de mes poumons.
Soudain, un tintement de clefs, derrière la porte. Mince ! La femme de ménage. Comme j'ai les oreilles sensibles, je décampe vite fait. Tiens, je remarque que je peux me diriger dans à peu près toutes les directions, y compris le zénith.
J'y trouve mon salut en passant au travers des charpentes, et me retrouve en l'air. Trop tard, malheureusement. Un cri déchire l'air... elle n'a pas tardé à trouver mon cadavre, on dirait. Je décide de partir d'ici et de faire un peu d'espionnage. Pourquoi ne pas en profiter... Je commence par mon bureau. Il y a du monde, ce matin. Tiens, voilà mon « ami ». N'empêche que je suis mort depuis 2h, et qu'il s'en fout complètement. Il est à son ordinateur et... et joue à Solitaire. Lui qui me disait que si je voulais vraiment mon augmentation, je devais bosser dur ! Quel imbécile.
Je tente alors quelque chose : je débranche la prise. Miracle, l'ordinateur s'éteint ! Je vois sa grosse face joufflue se tourner dans toutes les directions, son regard se porter sur le fil de l'écran, et ses sourcils broussailleux se froncer, pour se rejoindre au dessus de son énorme nez couvert de varices. Je vois ses bajoues ballotter alors qu'il regarde à droite et à gauche pour comprendre ce qui s'est passé, je vois son dos gras s'arquer pour rebrancher la prise, et ses poignées d'amour, devrais-je dire avec le tiroir qui va avec, se tendre, sa chemise tachée se plaquer contre sa peau grasse, et le commencement de son derrière qui en vaut quatre faire son apparition.
Si je n'étais pas mort, je l'aurais été sur le champ. Pourquoi même sous forme de spectre je continue à voir des horreurs cachées que personne ne voudrait apercevoir dans sa vie ? Je me demande alors à quoi je ressemble, moi. Je me dirige vers les toilettes pour hommes, et je me place devant la vitre, ignorant le répugnant clapotis de l'urine d'un ancien collègue.
En face de moi, il y a un mur. Le mur qui se trouve derrière moi. Entre le miroir et le mur, il n'y a rien. Je me déplace, je recule, j'avance... il n'y a rien. C'était prévisible. Je m'avance encore vers le miroir, jusqu'à ce que mon nez imaginaire traverse la vitre.
Une partie de ma tête se fraye un chemin dans le verre argenté, et j'émerge de l'autre côté. HORREUR ! Un visage blafard me regarde, éberlué, la bouche ouverte. Il est à quelques millimètres de moi, je sens son souffle putride sur mon visage au rythme de sa respiration sifflante.
Il cligne de ses yeux globuleux... je remarque alors que l'être immonde a du mascara.
Un instant de flottement.
C'est la secrétaire du patron en train de s'épiler les sourcils. De près, elle ne paye pas de mine. Je regarde autour de moi. Je suis dans les toilettes des filles. Assez vu d'immondices pour la journée, je ne m'aventure pas plus loin, et repasse côté hommes.
Je décide alors d'aller voir ma femme à son travail. Je passe directement au travers des murs, des voitures, des gens. Il y a toujours cet instant, qui dure une fraction de seconde, où j'aperçois l'intérieur des gens. C'est horrible. J'arrive à percevoir jusqu'aux plus petits capillaires qui parcourent leur peau, leurs organes, leur cerveau, leur cœur battre ce sang liquide.
Le mien doit déjà être pâteux. Je suis devant le bâtiment du journal. Chaque matin, ma femme vient ici. Je franchis les portails de sécurité, narguant d'une honteuse grimace les deux colosses qui en gardent l'entrée. A présent, mon esprit se trouve dans un grand hall aseptisé. Je traverse un ascenseur dans lequel il y a un jeune apprenti transpirant, un cadre en costard cravate qui cache tant bien que mal ses douleurs hémorroïdales, et une femme de ménage espagnole, pour parvenir finalement au niveau du bureau de la rédaction. Le bureau de ma femme est devant moi. J'hésite à passer la porte, mais quelqu'un le fait à ma place. Un grand homme brun, poivre et sel, de la trentaine, bien bâti. Ma femme lui sourit, et l'embrasse.
La porte se referme. Mon cœur, si j'en avais eu un, aurait raté un battement. Lentement, je me laisse m'enfoncer à l'étage inférieur, pour revenir au rez-de-chaussée, où seul le sommet de mon crâne dépasse. J'observe les pieds qui foulent le carrelage blanc-cassé. Par réflexe, je ferme les yeux lorsque des mocassins ou des talons aiguille menacent de me fendre le crâne, mais étant immatériel je m'en moque.
La mort m'a fait voir des choses que je voulais ignorer. Soudain, il y a une vive lumière. Personne ne semble s'en soucier, ni même la voir. Je me sens m'élever, sans cette fois contrôler mes déplacements. Je vais de plus en plus vite, je passe sur les toits, incapable de me dégager de cette force qui m'attire. Enfin, devant moi, apparaît un individu, en noir, qui porte une large cape sombre. De sa main qui émergeait de son habit, je vois qu'elle est squelettique. Il parle.
- Tu es mort.
J'avais remarqué, pensais-je alors.
- Tu ne retourneras jamais sur Terre.
Je suis en face de la Mort. Au point où j'en suis, je n'ai plus rien à perdre.
- C'est de votre faute si je suis mort !
- Oui.
- C'est... mais c'est dégueulasse ! J'étais encore jeune !
Il y a un silence.
- C'est mon travail.
Je décide de la jouer diplomatique.
- Mais... ça ne vous fait pas de la peine de tuer tous ces gens ?
La Mort eut un hoquet. Puis un second. Je comprends qu'elle pleure. Sa voix se fait plaintive.
- J'aurais dû écouter maman, c'est un métier de merde ! Je suis même pas payé le SMIC ! Et en plus, mes clients râlent... Faites preuve d'un peu de bonne volonté quoi !
Un instant, je crois qu'elle se moque de moi. Finalement, je comprends qu'elle raconte la vérité. Récapitulons... je suis mort d'un infarctus, j'erre dans la ville, tout le monde s'en fout que j'aie disparu, ma femme me trompait, et je me retrouve devant une Faucheuse maniacodépressive. Non, allez, sérieusement, j'ai fait quoi pour mériter ça ?
- Et puis merde, je suis fatiguée... je dois prendre des vacances moi. Retourne sur Terre !
Sa voix s'est faite plus dure.
- Et fais pas chier !
Je décide de ne pas la contrarier. En un éclair, je me retrouve sur un lit d'hôpital. Ma femme est à côté de moi, elle me regarde avec un sourire niais. Alors je me souviens de tout.
- Chéri, j'ai eu si peur !
Un silence.
- Tu es resté mort pendant cinq minutes. On a réussi à te réanimer en vitesse, mais tu es resté une demi-journée dans un coma très profond.
Ça m'avait paru plus long. La sachant pieuse, je redoutais le pire. Je ne fus pas déçu.
- Tu as vu Dieu ?
- Non. J'ai vu la Mort, elle a fait une dépression, et m'a laissé revenir. A croire que même dans les cieux les gens sont dupes. Elle a pris des vacances il paraît.
Ma femme éclate de rire. Quelques jours plus tard, je sortais. C'est là que j'ai compris que la vengeance, chez les dieux, est un plat qui se mange froid. Un camion m'a fauché à ma sortie de l'hôpital, et une voix a résonné dans mon crâne en miette.
- Fallait pas me prendre pour une conne.
« Tiens, la Mort a repris du service », puis ce fut le noir, et pour un bon bout de temps. C'est rancunier, la Mort.

[mentor]

eh bien je trouvais ça un peu "gnan-gnan" au début, et puis je me suis laissé emporter dans ton aventure, curieux de chaque nouveau tableau
même si ça rappelle des choses déjà lues, je trouve que tu t'en tires bien, c'est bien écrit, amusant, pas ennuyeux pour 2 sous même si ça reste léger
c'est bien

[pierre-henri]

J'ai trouvé ça un peu téléphoné.
Des soucis de temps, au début, le passage du présent à l'imparfait, un peu zarbi, aussi.

[Invité]

L'histiore est amusante, et j'ai aimé le début et la chute, bien amenée. En revanche une grosse partie du milieu ne m'a guère convaincue, quand le personnage se balade au milieu des vivants ; j'ai l'impression que la narration, à ce moment, est sans relief, sans grand intérêt (sauf quand le gars s'enfonce presque complètement dans le sol, à l'hôpital).

Cela s'arrange pour moi à partir du moment où la Mort entre en scène.

Attention à la concordance des temps : il y a des passés qui se pointent on ne sait trop pourquoi au milieu du récit au présent...

[Invité]

"L'histoire", pardon.

[Néo Sivan]

Je trouve que le début est un peu classique (un homme qui meurs et vagabonde sous forme de fantôme sur Terre). Mais la Mort qui est payée juste au smic et qui prends des "vacances" pour tuer l'homme par surprise, c'est vraiment fort.

[Invité]

Ah oui, ça se laisse lire. D'emblée tu captes l'attention du lecteur et tu le tiens intéressé -plus ou moins selon les endroits- jusqu'à la fin teintée d'humour. Si le thème n'est pas surprenant ni les aventures que vit le personnage, il n'en reste pas moins une écriture de très bonne facture et ça, ça compte !

[Fireflyer]

Merci pour vos messages ! Je vais corriger ces histoires de passé/présent. Merci encore !

[Loreena Ruin]

Un texte bien sympathique, burlesque au possible (quoique l'histoire ait été vue et revue...).
Dans le genre, la Mort, j'en connais une pas mal chez Terry Pratchett (dans le registre heroic fantasy/burlesque), alors j'avoue que même si ton humour sarcastique (d'ailleurs très semblable à celui de cet auteur) est excellent, c'est pour moi du déjà vu...En gros ça ne casse rien, mais ça m'a fait passer un bon moment ;-)!

A bientôt sous tes lignes,

Ruin.

[pierre-henri]

Quand même, le titre, un sacré programme !

[Fireflyer]

Un texte bien sympathique, burlesque au possible (quoique l'histoire ait été vue et revue...).
Dans le genre, la Mort, j'en connais une pas mal chez Terry Pratchett (dans le registre heroic fantasy/burlesque), alors j'avoue que même si ton humour sarcastique (d'ailleurs très semblable à celui de cet auteur) est excellent, c'est pour moi du déjà vu...En gros ça ne casse rien, mais ça m'a fait passer un bon moment ;-)!

A bientôt sous tes lignes,

Ruin.

Je connais Terry Pratchett et j'avoue qu'être comparé à cet auteur me flatte. Quant à l'idée revue, c'était juste pour m'amuser à décomposer un monde quotidien d'un autre point de vue. J'ai pensé que la façon de voir d'un mort pouvait être intéressante. J'écris ce qui me passe par la tête en fait, il est possible que ce soit du déjà vu, du déjà revu, ou du carrément barbant, mais j'avais envie de le faire ^^
Merci encore à toi !

[Loreena Ruin]

C'était un plaisir ;-)!

[Sahkti]

Tu devrais aérer et créer des blancs entre les passages, histoire d'insister autrement sur la progression de l'action. Simple question de mise en page mais je pense que ça aiderait le texte.

Tiens, voilà mon « ami ». N'empêche que je suis mort depuis 2h, et qu'il s'en fout complètement
Le sait-il seulement?

Le dialogue entre le mort et la Mort me paraît assez bateau, plat.

Au final, je trouve que le texte manque d'ampleur. On sent qu'il pourrait s'élever un peu plus, secouer un peu le cocotier mais rien, ça retombe assez vite. Pas super séduite.

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