Stalingrad / Dresde

[loic]

Stalingrad / Dresde

Au fond vers ce chien noir
Qui file haletant
Sur de mornes bourbiers
Aux arrêtes de neige
Et ce sale manteau blanc
Qui étouffe la plaine
Sous ces vents noirs défunts
Qui s’en viennent d’Ukraines
Ils courent vers l’Orient
Tristes septentrions
Et je vois ton visage
Qui s’efface déjà
En larmes faméliques
Grelottantes de misère
Paysage assonant désaccordé mineur
Steppes mortes

Où vont donc ces cohortes ?
De soldats sans valeur
Dont les armes de fer se vendent à l’encan
Tandis qu’au chant des orgues
Du petit père des peuples
Résonnent les requiems
De destins sans honneurs

Leurs femmes se désespèrent
Dans des caves assourdies
Frissonnant sous les bombes
En d’innommables Dresdes
C’est le chant de la guerre
Qui s’entonne dans ces nuits
Où l’espèce s’enivre
A l’alcool de haine
Qui s’épand sur les champs
Comme cette mauvaise graine

Qui engendre la ronce
En dévorant les murs de cette vieille masure
Elle coure dans le cosmos
En orbes éternelles
Autour d’une étoile
Fille de galaxie
Qui se consume sans hâte
Dans l’intemps déployé
Où planent des photons
Moissonneurs d’hydrogènes
Qu’ils jettent en grands troupeaux
Dans de grands moulins noirs
Dont les ailes dorées
Font crisser l’étincelle
Sous les meules de la vie

[Invité]

J'aime bien le rythme haché, mais c'est un peu touffu pour moi et j'ai eu peur de me perdre dans les multiples imbrications de la fin. Cependant, à la relecture, cela passe mieux, et même suffisamment bien pour me faire apprécier ce texte, en particulier :

Leurs femmes se désespèrent
Dans des caves assourdies
Frissonnant sous les bombes
En d’innommables Dresdes

et

de grands moulins noirs
Dont les ailes dorées
Font crisser l’étincelle
Sous les meules de la vie

[Marie D]

Magnifique.
J'aime quand les poèmes me montrent des images, quand ils me parlent. C'est le cas du tien

[Invité]

Un poème ample et beau, évoquant des images puissantes, mais j'aurai un bémol sur ce rythme d'alexandrins (en deux vers ou assumés), j'ai l'impression que le texte gagnerait à quelque chose de plus chaotique... D'un autre côté, cela convient au sujet, mais alors peut-être faudrait-il au contraire oser la suite d'alexandrins, la lecture en serait moins hachée.

J'ai beaucoup aimé le moment où on n'a pas que de l'alexandrin :
"Paysage assonant désaccordé mineur
Steppes mortes". Le dernier vers fait trébucher, et pour moi c'est une bonne chose.

[loic]

Soques : en fait l'idée d'alexandrins pour partie est bonne en le relisant effectivement...

la raison de cette écriture est la suivante, en général tout sort d'un trait et lorsque je veux modifier parfois c'est la catastrophe, le texte perd de son âme..

merci pour tes conseils je pense que je vous soumettrai d'autres textes

Marie :merci et au plaisir de t'en offrir d'autres

Islande tu as trouvé la clé il faut le lire à plusieurs reprise et trouver le rythme à la voix

[Invité]

On a là un jolis petit texte, d'intention et de forme.
Tout ce frou-frou de recherche me séduit.
Il y a un gros plantage de rythme ici:

Qui s’épand sur les champs
Comme cette mauvaise graine
...
Qui engendre la ronce
En dévorant les murs de cette vieille masure

[loic]

voyons voyons:

elle engendre la ronce
qui dévore les murs d'une ancienne masure

en fait je tiens à ce vers car il met en abyme un autre de mes textes que je vous soumettrais un de ces jours : "dans la cabane en fer d'une vieille bourrique"

[loic]

dernière strophe :


Elle engendre la ronce
Qui dévore les murs
D’une ancienne masure
Et coure dans le cosmos
En orbes éternelles
Autour de cette étoile
Fille de galaxie
Se consumant sans hâte
Dans l’intemps déployé

Y planent des photons
Moissonneurs d’hydrogènes
Qu’ils jettent en grands troupeaux

[pierre-henri]

voyons voyons:

elle engendre la ronce
qui dévore les murs d'une ancienne masure

en fait je tiens à ce vers car il met en abyme un autre de mes textes que je vous soumettrais un de ces jours : "dans la cabane en fer d'une vieille bourrique"

Pas l'ombre d'un plantage rythmique sur ces deux vers, camarade.
L'autre, là, il a une otite, dit-il. C'est sans doute la raison. Ou alors, il n'a pas d'oreille. Possible aussi.

Sinon, j'ai accroché moyen, mais, ça, c'est une histoire de coeur.

[bertrand-môgendre]

Tu as su façonner une ambiance difficile à ressentir. Il y a beaucoup de choses dites entre tes lignes. N'est-ce pas trop ? Dans le sens où en si peu de mots tu abordes un vaste sujet dont les ramifications entrainent vite une foultitude de conséquences toutes aussi dramatiques les unes que les autres.
L'exercice n'est pas facile. Tu l'abordes avec vigueur et détermination.

[Sahkti]

Il y a de très belles images dans ton texte, Loïc, peut-être un peu trop dans la mesure où ce rythme et cette structure en vers enferment quelque peu ces idées dans quelque chose de figé. Un peu plus de liberté aurait peut-être/sans doute permis à certaines esquisses de prendre plus de place et de donner un autre relief au poème, plus dessiné.

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