Sunday, bloody sunday

[slave1802]

Nous sommes désolés, mais il n'y a plus aucun espoir. Votre fils est dans un coma dépassé. Pour nous il est cliniquement mort. Son électroencéphalogramme est totalement plat depuis deux mois. Sans les aides respiratoires et l'assistance cardiaque il serait déjà mort. Sans vouloir être cruel, il en est réduit à une vie végétative. Il à moins de sensation qu'un légume.

- Ce n'est pas possible, pas lui...

La vieille dame s'effondra sous le poids du chagrin, pauvre carcasse qui avait déjà tant pleuré et tant donné, pauvre matrice usée et abandonnée.

Ils l'aidèrent à se relever et l'entraînèrent plus loin pour cacher son chagrin (pour le soigner, précise la direction). Ils lui administrent des doses massives de tranquillisant. Comme si le chagrin d'une mère pouvait se soigner ! Comme si la marée pouvait un jour cesser !

Dans la chambre trois cent quarante trois, un corps inerte reposait, maintenu artificiellement en vie par une débauche de technologie. Simple enveloppe charnelle, simple recevable vide de toute conscience, triste morceau de bidoche tiède, cadavre en devenir, promesse de squelette, futures poussières.

" Sunday, bloody sunday "

Pourtant, ces infimes pics sur l'écran de contrôle de l'encephalo-mètre. Ces minuscules pics que personne ne voyait, car personne, jamais, ne venait l'arroser.

" Sunday, bloody sunday "... Ce refrain passe et repasse dans ma tête, comme une marche funèbre, comme un requiem, comme un générique de fin.

" Sunday, bloody sunday " C'est sur ces mots qu'a pris fin ma vie. La cassette s'est brisé en même temps que mon corps dans le maelström qu'était devenue ma voiture au moment du choc.

" Sunday, bloody sunday " Quand ce camion s'est dressé devant moi, haut comme le temps, noir comme la vie, je n'ai rien pu faire. Ma voiture s'est littéralement désintégré sous le choc. J'ai à peine senti les griffures de mon pare-brise quand je l'ai traversé, puis tout est devenu noir quand ma tête a heurté la calandre chromée.

" Sunday, bloody sunday " Mon thorax a été défoncé au passage par le volant. Mes jambes se sont brisées sur ce qui restait du tableau de bord.

" Sunday, bloody sunday " Il n'était même pas minuit ce samedi.

Je me suis réveillé dans la plus totale obscurité. Pas un bruit, pas un souffle, aucune présence, aucune sensation de mon propre corps. Je ne sens plus mes pieds, ni mes jambes, ni mes mains, ni mes bras...

La nuit succède à la nuit...

Les souvenirs antérieurs à l'accident restent très vagues. Je m'appelai Jacques ou Lucien ? Quelle importance puisque apparemment je suis mort et que me voila ailleurs !

- Regardez vous-même ! Vous appelez ça des yeux vitreux ?

La phrase me frappa de plein fouet et la lumière m'acheva.

Voila donc ou je me trouvais. Seul dans ma tête sans moyen d'appeler. Prisonnier de mon corps qui refusait de m'aider. Sale carcasse que j'avais tant aimée.

Puis la main relâcha ma paupière et la lumière s'éteignit.

Les bruits de pas s'éloignèrent et les sons s'estompèrent.

Je restai seul dans le noir, solitaire comme jamais.

" Sunday, bloody sunday "

[Invité]

Bien vu.
Une remarque :
"Simple enveloppe charnelle, simple réceptacle vide de toute conscience" (et non "recevable").

[Invité]

Un très bon texte mais aussi une impression de déjà vu/lu.

Ici : pauvre matrice usée et abandonnée.

Je n'ai pas aimé l'utilisation du mot "matrice " qui me semble péjoratif, dévalorisant...

[Lonely]

Je plussois les autres intervenants, et en plus du "réceptacle" déjà relevé, je rajouterai que dans la phrase :

Ils l'aidèrent à se relever et l'entraînèrent plus loin pour cacher son chagrin (pour le soigner, précise la direction)

l'emploi du "le" dans "le soigner" laisse songer qu'ils emmènent le corps du fils et non de la mère.



Sinon, je reste partagé. Ça se lit bien, le "Sunday bloody sunday" revient comme un gimmick représentant l'ultime moment de "vraie vie" du supplicié, mais le tout donne un sentiment de redite comme l'a justement remarqué Easter. Comme si on avait déjà vu ou lu cela auparavant. Ce qui rend le texte presque prévisible, car aucun élément réellement original ou novateur ne vient relancer un récit qui, pour touchant qu'il est, ne fait qu'exprimer ce qu'on ressent comme une évidence de la souffrance maternelle et du deuil de sa liberté.

Je me doute que cela est fait sciemment, et c'est très correctement exécuté, mais je pense qu'il manque une originalité. Voila :-)

[Loreena Ruin]

Franchement, j'ai aimé. De belles tournures de phrases, qui coulent toutes seules, comme si elles étaient là depuis toujours... et pourtant travaillées et nouvelles... Ce passage m'a marqué, je le retiendrais longtemps :

Dans la chambre trois cent quarante trois, un corps inerte reposait, maintenu artificiellement en vie par une débauche de technologie. Simple enveloppe charnelle, simple recevable vide de toute conscience, triste morceau de bidoche tiède, cadavre en devenir, promesse de squelette, futures poussières.

Au plaisir,

Ruin.

[Lusionnelle]

Il à moins de sensation qu'un légume.

Attention à ne pas mettre la préposition "à" à la place du verbe avoir "a".

Ils lui administrent des doses massives de tranquillisant.

Le verbe est au présent à la place du passé.

A mon avis, on ne "soigne" pas un chagrin dans un hôpital, même si je vois parfaitement où tu veux en venir ; je pense cependant qu'il faut trouver autre chose.

Ils l'aidèrent à se relever et l'entraînèrent plus loin pour cacher son chagrin (pour le soigner, précise la direction). Ils lui administrent des doses massives de tranquillisant. Comme si le chagrin d'une mère pouvait se soigner ! Comme si la marée pouvait un jour cesser !

Répétition du mot Chagrin trop proche, je pense. Tu peux utiliser un synonyme comme douleur, par exemple. Pareil pour soigner.

Je retire ce que j'ai dit pour soigner, même si ça paraît étrange, tu le justifies. ^^

Pourtant, ces infimes pics sur l'écran de contrôle de l'encephalo-mètre. Ces minuscules pics que personne ne voyait, car personne, jamais, ne venait l'arroser.

Je n'ai pas compris ce que tu entends par "arroser". Désolée, je dois être lente, mais c'est vrai que je ne saisis pas...

La cassette s'est brisé en même temps que mon corps dans le maelström qu'était devenue ma voiture au moment du choc.

s'est brisée

" Sunday, bloody sunday " C'est sur ces mots qu'a pris fin ma vie. La cassette s'est brisé en même temps que mon corps dans le maelström qu'était devenue ma voiture au moment du choc.

" Sunday, bloody sunday " Quand ce camion s'est dressé devant moi(...)

J'avoue que j'ai un doute sur l'emploi du temps étant donné que l'évènement où "le camion s'est dressé devant lui" est antérieur au moment où sa voiture le percute.

haut comme le temps

Encore, même si je vois où tu veux en venir, je trouve la métaphore assez maladroite car le temps est vraiment trop immatériel pour cela.

Ma voiture s'est littéralement désintégré

s'est désintégrée - Attention aux participes passés.

Je m'appelai Jacques ou Lucien ?

Je m'appelais

me voila ailleurs

me voilà

Voila donc ou je me trouvais

voilà - où

Voilà pour la forme. Je ne suis pas experte, j'ai pu omettre des éléments.

Sur le fond, à présent, ce n'est pas un sujet très facile parce que déjà utilisé maintes fois, ne serait-ce que dans des parties de romans. Difficile de faire du neuf ! Tu aurais peut-être pu réussir à te détacher du reste par l'émotion et si quelques phrases sont bien tournées, je crois que l'ensemble est à revoir. Attention, je ne dis pas que c'est mauvais, loin de là ! Mais une relecture et du travail de fond (comme de forme) pourrait le rendre meilleur. Ce serait intéressant d'en voir les améliorations.

Ensuite, je trouve que tout est un peu balancé comme ça, par idées qui te plaisaient et que tu voulais mettre. Et puis c'est tout. Il n'y a qu'une énumération des lignes principales. Il faut peut-être un peu plus étoffer.

Pour en revenir au fond, je crois qu'il y a également un problème au niveau des temps de verbe, mais comme je ne suis pas encore très bonne moi-même, je ne m'entends pas là-dessus, d'autres le feront beaucoup mieux ! ^^

Donc, en gros, ça manque encore de finesse et de finalité. L'idée est bonne mais il manque encore le reste.

[slave1802]

Foutu correcteur automatique qui me balance un recevable au lieu d'un réceptacle...

Pour l'arrosage, c'est une référence au légume cité plus haut. Mal emmené puisque mal compris.

Pour le chagrin, je ne ressent pas ça comme une répétition. Le paragraphe me semble bancal avec douleur en lieu et place.

Bref comme le temps ? Ça ne colle pas avec l'apparence d'un camion. Je sèche là !

Si j'étoffe, ça va tourner au roman...ce qui n'est pas le but !

[Roz-gingembre]

Lecture agréable, de bonnes choses comme cette liste de "sunday bloody sunday" qui fait monter la pression de l'enfermement et puis des maladresses déjà citées, particulièrement dans l'usage du mot "matrice"

[Sahkti]

De bonnes et moins bonnes choses dans ce texte. Le début me paraît laborieux, le dialogue pas tout le temps crédible, même si très naturel. Arrive ensuite l'intériorisation, qui me paraît plus réussie, plus poétique aussi, avec quelques belles réflexions.
Le refrain lancinant crée des coupures bienvenues (et puis bon… Sunday bloody Sunday, tout de même, ça le fait bien : - ))

[Charles]

pas mal écrit, je souscris aux remarques sur matrice , recevable ...

pas ressenti grand chose à la lecture, je suis resté un peu extérieur, pas touché, ému ... c'est une dimension qui me semble manquer à ton texte, la faculté de toucher le lecteur. A moins que ce ne soit que moi ;-)

[Charles]

Le refrain lancinant crée des coupures bienvenues (et puis bon… Sunday bloody Sunday, tout de même, ça le fait bien : - ))

ben tiens ! en voyant le titre, je me suis dit : sûr que Sahkti l'a lu rapidement. voyons ce qu'elle en dit ? ;-)

i can't believe the news today ...

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