Vos écrits
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.
Le Deal du moment :
Réassort du coffret Pokémon 151 ...
Voir le deal

L'endimanché

+3
mentor
Ba
ptipubi
7 participants

Aller en bas

L'endimanché Empty L'endimanché

Message  ptipubi Lun 6 Avr 2009 - 21:00

Le thème pour écrire ce texte était "le dimanche"

L’endimanché

− Non ! J’ai repéré un tapis. Son orangé franc m’a tapé dans l’œil et le vendeur m’a dit qu’il ne lui en restait plus que deux. Remettons ta visite de musée à dimanche prochain.
Elle me fait marrer ma mère avec son parler fait d’expressions vieille France toutes faites. Malgré sa petite taille, quelque chose en elle se dégage qui la grandit indépendamment de ses ascendances aristocratiques. Ses vastes yeux céruléens ne sont pas anodins quant à cette impression et ses longs cheveux auburn non plus. A l’inverse, parfois, son langage naturellement d’une préciosité appuyée, s’encanaille sans qu’on s’y attende comme une vitesse qui accroche. La faute à mon père sûrement. Moi, j’adore moduler mes expressions à l’opposé de ce qu’elle dit sur le moment. Expérimenter la vulgarité des mots consentie par l’autorité mammaire selon la situation. Hum ! C’est trop bon. Je n’aime pas parler mais je connais la valeur des mots. Comme un traider je prends des risques avec les mots des autres. Tout au plus, j’ai des remontrances, une gifle me donnerait sûrement la sensation d’exister. Je triche : mes parents ne m’ont jamais frappé. Ca va, comme révolte d’adolescent ?
−Allez maman…c’est gratos le premier dimanche du mois. J’ai pas envie de me taper du shopping tout l’après-midi !
− Tu n’as pas le choix. Tu es trop jeune pour rester seul à la maison.
Je ne lui réponds pas que, toute la semaine, je suis seul jusqu’à 20 heures. Voilà, tout est dit. La vie à deux est faite de compromis mais quand c’est avec ta mère y’a que cela, particulièrement le dimanche. Autant elle paraît raffinée dans ses tailleurs élimées autant elle est terre à terre : le négatif de papa. C’est sûrement cet aspect de sa personnalité qui a fait fuir mon père même si elle a invoqué sa lâcheté et son immaturité, les rares fois où j’ai dénoncé son absence. Désormais notre vie manque d’alternance. C’était le dimanche notre alternance.
La semaine, je me gave d’écrans. Je télécharge, je mate des films de cul, je me confie à des inconnus. C’est tellement facile de tomber dans le morbide et l’euphorique, le convivial et le nombriliste. Je suis seul et je m’y complais. Le soir de semaine, l’arrivée de ma mère, c’est comme une mise en bouche du dimanche. Je ne peux lui reprocher cet esseulement d’ordre économique mais cela décuple mes exigences dominicales.
J’avais six ans, la première fois que je suis allé dans un musée. J’avais gagné deux places à la tombola de l’école et c’est mon père qui s’y était collé. Aujourd’hui, c’est le jour que je me remémore le plus. Dans la queue, il se tenait droit, la face empreinte de terreur, touchant machinalement sa moustache couleur corbeau. Je tenais sa grande main rugueuse et j’ai senti durant toute la visite son pas s’accélérer. Les formes et les couleurs se collaient d’un tableau à l’autre, une impression de vitesse, les muscles de mon bras s’étiraient, mes pieds ne touchaient plus terre et je riais aux éclats. Et puis, il s’est arrêté net et ma tête a percuté sa hanche. Devant nous, des aplats et des couleurs se donnaient en spectacle sur une monumentale toile. Nous sommes demeurés longtemps face à ce tableau à l’attendre. Ces paroles ont été : « Dire qu’on allait manquer celui-là. ». Ce fut la seule fois où papa a mis les pieds dans un musée. C’est l’une des raisons pour laquelle j’aspire à aller au musée, pour retrouver ce tableau égaré dans une expo temporaire, pour qu’il ne soit plus uniquement une impression. L’autre raison c’est que ma mère est différente dans un musée, rien à voir avec la maman qui arpente les centres commerciaux avec une frénésie qui la rend fausse jusqu’à changer sa voix quand elle rencontre quelqu’un. Les copains me traitent d’intello quand je leur dis que je vais au musée avec ma mère s’ils connaissaient mes véritables motivations peut-être me regarderaient-ils avec compassion. Je m’y refuse quoique des fois ça me ferait du bien de tout dire à mon pote Dino. Mais c’est plus facile d’être heureux et détendu seulement le dimanche.
− Je ne veux pas être seul. Je veux être avec toi … mais pas aux courses.
Je sais qu’elle voit quelqu’un. J’ai récupéré des SMS sur son téléphone et, quand je lui ai pris quelques euros dans son sac− comme ça m’arrive de temps à autres − j’ai découvert des échantillons de lubrifiant savamment dissimulés dans une pochette. Ca ne me dérange pas qu’elle rentre parfois après 20 heures à cause de ça, mais alors qu’elle me laisse le dimanche et son sublime ennui.
La sexualité de maman, j’y ai surtout pensé le premier mois de la séparation. Quand mon père me déposait le dimanche soir, j’espérais qu’il s’attardât à la maison, outrepassât ses droits d’ex-mari et baisât maman comme avant que je naisse. Mais rien. Pourtant je me faisais transparent jusqu’à ne plus exister, scindé en deux, avec d’un côté l’ovule et de l’autre le spermatozoïde de manière bien distincte.
A un moment, j’ai aimé le dimanche soir, quand ma mère y imposa une réunion de liaison parentale pour maintenir mon équilibre psychologique. Déjà que papa habitait à 5 minutes en voiture c’était dire que ce triumvirat familial me laissait espérer que le mur pût être de nouveau cimenté. En fait, ces palabres du dimanche soir se transformèrent en torture quand je compris qu’elles étaient destinées à me montrer que le mur s’était définitivement cassé la gueule. Je me suis retrouvé avec ma pelle et mon seau à vouloir combattre un putain d’ouragan. Un château de sable que personne n’admire ou félicite. Progressivement ça a emmerdé ma mère alors que ça avait gavé mon père dès le départ le coup du « on se sépare mais on reste unis pour te préserver mon fils ». Moi, ça m’a fait voir mes parents différemment. Mon père n’était plus un prolo à la sensibilité d’artiste et ma mère était capable d’être sincère.
J’ai appris à être bavard pour taire ce qui me démange. Quand je parle ça rassure ma mère. Les soirées en semaine sont bavardes, bercées par le bruit monotone du périphérique. On mange dans la cuisine, l’un à côté de l’autre, c’était comme ça avant que papa ne s’en aille. Je dois être fort pour deux dans cette cuisine dont les murs sont recouverts de liège. Papa avait promis de tout gratter et d’y appliquer deux délicieuses couches de peinture jaune poussin. Douze et trente-sept, l’âge que mon père aurait dû avoir aujourd’hui. En semaine, je suis fort comme un alien de quarante-neuf ans. Seul, je déambule dans l’appart, me roulant en boule sur le fauteuil de papa puis dans feu le lit conjugal et, pelotonné sur mon lit, je finis par m’endormir pour un tour de cadran impromptu, accueilli au petit matin par une mare d’urine glaciale.
Ma vie tourne autour des dimanches. Durant six mois, mon père m’a ramené le dimanche. Il s’est détruit pendant cette période avec, je suppose, tous les produits qu’on ignore quand la félicité dégouline en vous. Dans la Clio, sur le bref chemin du retour, souvent je mourais d’envie de lui demander s’il se souvenait de la visite du musée et du tableau mais j’étais effrayé à l’idée qu’il eût pu considérer ce moment comme secondaire dans sa vie. Et il semblait tellement vouloir me montrer qu’il m’aimait différemment que j’y renonçai. Ce soir-là, il m’a déposé plus rapidement que d’habitude, il a moins fait semblant de s’intéresser à ce que ma mère lui disait. Il aurait pu continuer à se détruire lentement mais non. Le saut de l’ange. Seize étages à battre des ailes pour s’écraser comme une merde et laisser son fils dans l’incertitude qu’il n’était pas suffisant au bonheur paternel. Les flics m’ont expliqué qu’il est repassé à sa maison de Chatou pour s’habiller élégamment ensuite il a pris la direction de la banlieue nord. Apparemment, il a discuté avec d’anciens potes du quartier du vieux Saint-Ouen avant de gravir par l’escalier de service encombré de junkies les seize étages. La suite, je l’ai entendue murmurer entre ces messieurs de la marée chaussée. Il a sprinté sur la terrasse gravillonnée de la barre HLM pour aller le plus loin possible. Après le retour aux sources, il a eu la quête de l’extase ultime. Ca doit ressembler à ce sentiment que l’on ressent quand le sommeil vous prend, celui de choir dans l’abîme inexorablement.
Depuis je ne hais plus les dimanches soir de la même manière. Ils sont l’absence. Maman cache sa peine mais elle ressemble à celui qui mendierait avec une coupelle d’argent. Son cœur est sinistré et elle s’astreint à trouver un volontaire pour la démazouter malgré son mioche qui ressemble comme deux gouttes d’eau à son père. Je suis devenu un dépôt-vente. Je suis de la race de ceux que l’on endimanche. Les parents et la loi enlaidissent ce jour, l’économie l’aliène et la vie le condamne mais le dimanche demeure l’une des mamelles du week-end. Il en est la fin et pour cela, il est abhorré quand vient la brune.
− Le vendeur m’a sûrement roulée dans la farine. Il doit avoir un plein entrepôt de ces tapis orangé. On y passe dimanche prochain tout de même ? Histoire d’être sûr. Tu préfères Orsay ?
Elle s’incline trop facilement depuis la mort de mon père. Peur du conflit, peur que je dégueule sur tous ces achats qui sont autant d’écrans de fumée pour ne pas dire que nous sommes une mère et son fils complètement paumés.
− Il y a une expo temporaire au palais royal. Ca me dit bien !
− Ok, on y va.
Ses mots sonnent faux. Soudain son regard croise le mien et je comprends. Le dimanche soir avant de sauter, mon père lui a dit pour le tableau : nous étions une compression, un bloc. Elle redoute cette complicité post-mortem, je suis son dimanche. Je n’y tiens plus maintenant que j’ai deviné, je n’y tiens plus telle une envie de pisser décuplée par les cahots d’un car.
− Il t’a dit pour le musée ? Ca fait des mois et tu t’es tu. Quel était le tableau, maman ?...s’il te plait !
Mes mots s’adaptent à cette situation délicate. Je parle et je pleure. Pleurer dimanche est plus crédible diraient les bigots, moi je dirai que c’est plus familial.
− C’était un Kandinsky… Il n’a pas retenu le titre. Cette sortie avec toi a compté pour lui, Tu sais ? Il m’en a parlé le soir même avec la ferveur d’un illuminé, dit-elle en tenant la poignée de la porte d’entrée.
J’ai douze ans. Je me lance. Je parle à une copine.
− Maman, pourquoi il a fait ça ? On aurait pu fêter son anniversaire aujourd’hui.
− Je ne sais pas. Trop d’amour… Donné de manière trop anarchique pour que la réciproque soit possible… Je t’aiderai à retrouver ce tableau.
Les vrombissements des moteurs sont intolérables à travers le double vitrage. J’ai l’impression d’étouffer et c’est bouger qui me vient à l’esprit. Mâcher de la chlorophylle sans rien penser.
− Laisse tomber le tableau. On va faire un tour à la campagne. On trouvera bien quelque chose devant laquelle s’enthousiasmer. Une vache, un vieux chêne ou un ruisseau…je sais pas moi, dis-je, décidé à mûrir dans la seconde.
Elle ouvre la porte d’entrée qui laisse entrevoir le hall lumineux, végétal et inox et je l’entraîne en lui prenant le bras avec l’assurance d’un homme établi. Je fêterai l’anniversaire de papa quand il tombera un dimanche… c’est ça que je vais faire… C’est certain. Mais d’ici là, je fêterai ma vie, ma mère et nos instants endimanchés.
ptipubi
ptipubi

Nombre de messages : 80
Age : 57
Localisation : idf
Date d'inscription : 25/11/2008

Revenir en haut Aller en bas

L'endimanché Empty Re: L'endimanché

Message  Invité Mar 7 Avr 2009 - 10:39

Avec cette description, j'aurais parié sur un Rothko ...

C'est un texte fort, qui ne laisse pas indifférent, et sait créer un malaise durable. Beaucoup de colère, d'amertume, de souffrance mal ou in/ exprimée. Loin de l'idée du bonheur dominical bourgeois parfait ...
L'écriture est dense, normalement vraiment très efficace, même si cela se relâche un peu dans certains passages, avec des faiblesses dans l'expression, comme ici :

Expérimenter la vulgarité des mots consentie par l’autorité mammaire selon la situation.


"maternelle", peut-être ?

Et puis, je ne sais plus où, j'ai trouvé que l'emploi des temps était plutôt fouillis.

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

L'endimanché Empty Re: L'endimanché

Message  Invité Mer 8 Avr 2009 - 21:25

C'est vrai, le texte crée un malaise, mais en même temps il me semble trop nébuleux, pas vraiment concentré sur ce qu'il a à dire, ce qui, pour moi, l'affadit. Je crois qu'il gagnerait à être davantage resserré.

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

L'endimanché Empty Re: L'endimanché

Message  Ba Jeu 16 Avr 2009 - 14:03

Tiens, histoire que les " ministères" à mères se répondent sans se répandre.
Ba
Ba

Nombre de messages : 4855
Age : 71
Localisation : Promenade bleue, blanc, rouge
Date d'inscription : 08/02/2009

Revenir en haut Aller en bas

L'endimanché Empty Re: L'endimanché

Message  mentor Jeu 16 Avr 2009 - 21:45

un texte difficile à commenter je trouve
très... personnel ? ou pure fiction ?
peu importe, il touche, il dérange
manque un peu d'aération dans la mise en page

mentor

Nombre de messages : 20248
Age : 45
Localisation : œ Œ ç Ç à À é É è È æ Æ ù Ù â  ê Ê î Î ô Ô û Û ä Ä ë Ë ï Ï ö Ö ü Ü – — -
Date d'inscription : 12/12/2005

http://www.vosecrits.com

Revenir en haut Aller en bas

L'endimanché Empty Re: L'endimanché

Message  N.A Ven 17 Avr 2009 - 12:07

Bien que je sache que la modération préfère qu'on limite le "blabla" dans cette partie du site, je tenais à dire à l'auteur que je prépare une critique détaillée de son texte. Néanmoins, ayant mésestimé la longueur dudit texte, je me vois contraint de la terminer pour ce soir. A ce soir, donc.
N.A
N.A

Nombre de messages : 14
Age : 33
Date d'inscription : 10/04/2009

Revenir en haut Aller en bas

L'endimanché Empty Re: L'endimanché

Message  N.A Sam 18 Avr 2009 - 14:55

Bonjour,
Je commence par proposer une correction de vos (quelques) fautes d'orthographe ; mais surtout de votre tendance à omettre certains signes de ponctuation. J'attire donc votre attention sur le caractère subjectif de ce qui suit.

L’endimanché

− Non ! J’ai repéré un tapis. Son orangé franc m’a tapé dans l’œil, et le vendeur m’a dit qu’il ne lui en restait plus que deux. Remettons ta visite de musée à dimanche prochain.
Elle me fait marrer, ma mère, avec son parler fait d’expressions vieille France toutes faites. Malgré sa petite taille, quelque chose en elle se dégage qui la grandit ; indépendamment de ses ascendances aristocratiques. Ses vastes yeux céruléens n'y sont pas anodins, quant à cette impression et ses longs cheveux auburn non plus. A l’inverse, parfois, son langage, naturellement d’une préciosité appuyée, s’encanaille sans qu’on s’y attende ; comme une vitesse qui accroche. La faute à mon père, sûrement. Moi, j’adore moduler mes expressions à l’opposé de ce qu’elle dit sur le moment. Expérimenter la vulgarité des mots consentie par l’autorité mammaire selon la situation. (Cette phrase me paraît trop lourde pour être conservée tel qu'elle a été écrite... à vous de voir ce qui correspondrait davantage aux attentes du lecteur.) Hum ! C’est trop bon. Je n’aime pas parler mais je connais la valeur des mots. Tel un trader, (comme ce mot vient de l'anglais to trade, il me semble qu'il convient de l'écrire ainsi) je prends des risques avec les mots des autres. Tout au plus, j’ai des remontrances, une gifle me donnerait sûrement la sensation d’exister. (Cette phrase me paraît également trop lourde, mais pas seulement. En fait à ce moment de la lecture, j'ai du mal à la mettre en relation stylistique avec ce qui précède. Je comprends bien l'idée, mais le confort de lecture disparait.) Je triche : mes parents ne m’ont jamais frappé. Cela convient, comme révolte d’adolescent ?
− Allez maman… c’est gratos le premier dimanche du mois. J’ai pas envie de me taper du shopping tout l’après-midi !
− Tu n’as pas le choix. Tu es trop jeune pour rester seul à la maison.
Je ne lui réponds pas que, toute la semaine, je suis seul jusqu’à 20 heures. Voilà, tout est dit. La vie à deux est faite de compromis mais, quand c’est avec sa mère, il n'y a que de ça ; et particulièrement le dimanche. Parce que, autant elle paraît raffinée dans ses tailleurs élimées, autant elle est terre à terre : tout l'inverse de papa. C’est sûrement cet aspect de sa personnalité (L'assonance en "s" me paraît davantage un aveux de sa faiblesse qu'un effet de style. A revoir, je pense.) qui a fait fuir mon père ; et ce, bien qu'elle ait invoqué sa lâcheté et son immaturité les rares fois où j’ai dénoncé son absence. Désormais notre vie manque d’alternance. C’était le dimanche notre alternance. (Excellent, bien que la forme me paraisse "expéditive" ; c'est peut-être sa force.)
La semaine, je me gave d’écran. (Sans "s" à écran : un singulier de généralité est plus approprié qu'un pluriel de nombre... à moins qu'il ne se "gave d'écrans" au sens premier du terme... auquel cas il y aurait un problème.) Je télécharge, je mate des films de cul, je me confie à des inconnus... C’est tellement facile de tomber dans le morbide et l’euphorique ; le convivial et le nombriliste. Je suis seul et je m’y complais. Le soir de semaine, l’arrivée de ma mère, c’est comme une mise en bouche du dimanche. (Même problème que plus au-dessus : si je comprends l'idée, le style me freine dans ma lecture.) Je ne peux lui reprocher cet esseulement d’ordre économique, mais cela décuple mes exigences dominicales.
J’avais six ans, la première fois que je suis allé dans un musée. J’avais gagné deux places à la tombola de l’école et c’est mon père qui s’y était collé. Aujourd’hui, c’est le jour que je me remémore le plus. Dans la queue, il se tenait droit, la face empreinte de terreur, touchant machinalement sa moustache couleur corbeau. Je tenais sa grande main rugueuse et j’ai senti durant toute la visite son pas s’accélérer. Les formes et les couleurs se collaient d’un tableau à l’autre, une impression de vitesse, les muscles de mon bras s’étiraient, mes pieds ne touchaient plus terre et je riais aux éclats. Et puis, il s’est arrêté net et ma tête a percuté sa hanche. Devant nous, des aplats et des couleurs se donnaient en spectacle sur une monumentale toile. Nous sommes demeurés longtemps à l'attendre, face à ce tableau. Ces paroles ont été : « Dire qu’on allait manquer celui-là. ». Ce fut la seule fois où papa a mis les pieds dans un musée. C’est l’une des raisons pour laquelle j’aspire à aller au musée : retrouver ce tableau égaré dans une expo temporaire pour qu’il ne soit plus uniquement une impression. L’autre raison, c’est que ma mère est différente dans un musée. Rien à voir avec la maman qui arpente les centres commerciaux avec une frénésie qui la rend fausse jusqu'à se changer la voix quand elle rencontre quelqu’un. Les copains me traitent d’intello quand je leur dis que je vais au musée avec ma mère. Mais s’ils connaissaient mes véritables motivations, peut-être me regarderaient-ils avec compassion. Je m’y refuse quoique des fois ça me ferait du bien de tout dire à mon pote Dino. Mais c’est plus facile d’être heureux et détendu seulement le dimanche. (Très maladroit.)
− Je ne veux pas être seul. Je veux être avec toi… mais pas aux courses.
Je sais qu’elle voit quelqu’un. J’ai récupéré des SMS sur son téléphone et, quand je lui ai pris quelques euros dans son sac− comme ça m’arrive de temps à autres − j’ai découvert des échantillons de lubrifiant savamment dissimulés dans une pochette. (Je trouve la tournure de cette phrase un poil maladroite. Le passé composé "j'ai pris" nous décrit une action comme si elle se déroulait sous nos yeux alors que, si j'ai bien compris votre intention, vous vouliez exprimer une habitude.) Ca ne me dérange pas qu’elle rentre parfois après 20 heures à cause de ça, mais alors qu’elle me laisse le dimanche et son sublime ennui. (Tournure à revoir. "mais alors qu'elle" peut vouloir dire "mais alors que d'habitude elle" ; or, pour se rendre compte que ce n'est pas cet emploi qui est utilisé ici, il faut relire la phrase. Je ne vous cache pas que le plaisir de lecture en pâtit)
La sexualité de maman, j’y ai surtout pensé le premier mois de la séparation. Quand mon père me déposait le dimanche soir, j’espérais qu’il s’attardât à la maison, outrepassât ses droits d’ex-mari et baisât maman comme avant que je naisse. Mais rien. (Excellent.) Pourtant, je me faisais transparent jusqu’à ne plus exister : scindé en deux de manière bien distincte avec, d’un côté l’ovule, et de l’autre le spermatozoïde.
A un moment, j’ai aimé le dimanche soir. Quand ma mère y imposa une réunion de liaison parentale pour maintenir mon équilibre psychologique. Déjà que papa habitait à 5 minutes en voiture, c’était dire que ce triumvirat familial me laissait espérer que le mur pût être de nouveau cimenté. En fait, ces palabres du dimanche soir se transformèrent en torture quand je compris qu’elles étaient destinées à me montrer que le mur s’était définitivement cassé la gueule. Je me suis retrouvé avec ma pelle et mon seau à vouloir combattre un putain d’ouragan. (Excellent ; on croirait lire une réplique de film culte.) Un château de sable que personne n’admire ni ne félicite. Progressivement ça a emmerdé ma mère alors que ça avait gavé mon père dès le départ le coup du « on se sépare mais on reste unis pour te préserver mon fils ». (Tournure à revoir : phrase à rallonge mal construite.) Moi, ça m’a fait voir mes parents différemment. Mon père n’était plus un prolo à la sensibilité d’artiste et ma mère était capable d’être sincère.
J’ai appris à être bavard pour taire ce qui me démange. (Concordance des temps?)


Je posterais la suite un peu plus tard, pour l'heure je manque de temps. A bientôt.
N.A
N.A

Nombre de messages : 14
Age : 33
Date d'inscription : 10/04/2009

Revenir en haut Aller en bas

L'endimanché Empty Re: L'endimanché

Message  Sahkti Mer 13 Mai 2009 - 14:13

Cette première phrase de dialogue sonne vieille France? Ha bon ! :-)

J'aime cette image de musée collée à celle d'un tableau et d'un père absent, d'une mère différente. Cela donne de la charge au lieu et tu l'utilises bien.

Tu fais également jouer avec talent ce rôle de l'enfant au centre de tout et au milieu de nulle part, qui doit revêtir plusieurs habits, parfois trop lourds pour lui.

J'ai un petit bémol sur la partie "révélation" avec le tableau raconté par la mère, cela me semble plus laborieux que le reste, moins naturel, mais c'est peut-être dû à l'émotion qui les étreint tous les deux.

Sinon, j'ai trouvé ton texte bien ficelé, agréable à lire.
Sahkti
Sahkti

Nombre de messages : 31659
Age : 50
Localisation : Suisse et Belgique
Date d'inscription : 12/12/2005

Revenir en haut Aller en bas

L'endimanché Empty Re: L'endimanché

Message  Invité Dim 24 Mai 2009 - 12:35

je comprend rien a cette demie correction de n/a.
Oui, le texte presente des choses ecrites trop rapidement, qui laissent le lecteur sur place.
Un exemple, cet enchainement :
Je ne peux lui reprocher cet esseulement d’ordre économique mais cela décuple mes exigences dominicales.
Il n'a jamais ete question de fric avant, du coup je m'interroge sur l'objet des exigences : la monnaie ou la presence de la mere ?

Un texte, je pense , a developper plus qu'a raboter.

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

L'endimanché Empty Re: L'endimanché

Message  bertrand-môgendre Jeu 28 Mai 2009 - 9:25

L'intérêt de la lecture évolue au fil du texte.
Touché, je le suis. Ému, je le fus.
Il y a donc quelque chose qui se passe.
Une connaissance approfondie du problème ?
Une réelle proximité des personnages et de l'auteur ?
L'ensemble cohérent ne donne pas envie de corriger les imperfections, minimes.
bertrand-môgendre
bertrand-môgendre

Nombre de messages : 7526
Age : 104
Date d'inscription : 15/08/2007

Revenir en haut Aller en bas

L'endimanché Empty Re: L'endimanché

Message  ptipubi Jeu 28 Mai 2009 - 10:38

bertrand-môgendre a écrit:L'intérêt de la lecture évolue au fil du texte.
Touché, je le suis. Ému, je le fus.
Il y a donc quelque chose qui se passe.
Une connaissance approfondie du problème ?
Une réelle proximité des personnages et de l'auteur ?
L'ensemble cohérent ne donne pas envie de corriger les imperfections, minimes.

Bonjour,
tu n'es pas le premier à me demander si cette histoire est personnelle mais non! Je dirai même qu'elle est aux antipodes de mon enfance. En me relisant, je m'aperçois qu'il y a besoin d'effectuer quelques modifications, ce que je vais faire entre langueurs. merci de ta lecture.
ptipubi
ptipubi

Nombre de messages : 80
Age : 57
Localisation : idf
Date d'inscription : 25/11/2008

Revenir en haut Aller en bas

L'endimanché Empty Re: L'endimanché

Message  petit-doute Jeu 28 Mai 2009 - 10:41

un texte poignant, qui crée effectivement un malaise, un frisson
une histoire touchante, hurlante de désespoir refusé, nié, et d'amours
difficiles à vivre .....
une qualité d'écriture que j'ai appréciée et mis à part ce petit "ne" qui à mon avis manque devant félicite
Un château de sable que personne n’admire ni ne félicite.
rien n'a raccroché
ce qui m'a géné un peu (mais tout petit peu)
peut être la richesse du vocabulaire qui interroge sur l'âge de ce gamin quand même....
certaines phrases que j'ai du relire plusieurs fois aussi, voire relire dans le contexte entier du moment pour en saisir le sens .... peut être donc des phrases un peu longues où je m'égare pauvre lectrice limitée que je suis...
mais ce ne sont que détails au regard de la qualité du texte et du message qu'il m'a transmis.
merci
petit-doute
petit-doute

Nombre de messages : 150
Age : 66
Localisation : dans la banlieue encore verdoyante
Date d'inscription : 24/04/2009

Revenir en haut Aller en bas

L'endimanché Empty Re: L'endimanché

Message  Contenu sponsorisé


Contenu sponsorisé


Revenir en haut Aller en bas

Revenir en haut


 
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum