Plan social

[loic]

Plan sociaux

L’usine nous est fermée, moi qui la croyait mienne

Et comment vais-je faire
Pour aller au marché
M’enquérir d’écrans noirs
A haute fidélité

Joues creusées de famines
Tendons au bout d’un bras
Près de longs fleuves sales où les vaches sont reines


Et puis voilà ruinées
Ces heures téléphonées
De mes pauvres enfants
Tout soudains désoeuvrés

Teint de cuivre nattes noires
Sous le bât de branches mortes
Errance d’altiplano en peau de parchemin toute ridée par l’air sec


Et ma belle fierté
Sur quatre roues perchées

J’ai vécu dans l’envie
Oubliant le désir
Sous le taud de l’usure
Où je vivais alors


Blanc de l’œil éclatant
Sous un soleil de fer
Attente de poussière, repeint de latérite, immobile des jours


Et j’ai la tête basse
De ceux qui sont floués

Parce qu’ostentatoires ils n’ont pas vu venir
La faux des m’as-tu vu qui moissonne à l’été

[Invité]

Me gênent :
-La lourdeur/longueur de certains vers
-Une expression que je trouve "brouillonne" (faute de meilleure mot), qui veut dire sans dire, se retranche derrière une forme d'hermétisme qui empêche une lecture fluide.
Et pourtant, je sens dans ce poème "militant" le frémissement de quelque chose de fort, une dénonciation dont l'expression gagnerait à être allégée, voire simplifiée.

Bravo pour ceci :

Et j’ai la tête basse
De ceux qui sont floués

Parce qu’ostentatoires ils n’ont pas vu venir
La faux des m’as-tu vu qui moissonne à l’été


NB : "Plan social" ou "plans sociaux".

[Invité]

Moi j'ai aimé, j'ai trouvé l'expression forte. Une belle relativisation ! J'ai aimé aussi que le rythme fût plus malaisé (pour moi, j'apprécie toujours aussi peu les suites d'hexasyllabes) dans l'évocation des "malheurs" des riches que dans celle de la vie des pays pauvres, comme si, malgré le sordide, il y avait là-bas une sérénité perdue dans l'occident et son opulence. La fin est absolument merveilleuse, résume tout : oui, ils ont été floués, tous ceux à qui on a dit que le bonheur résidait dans la consommation !

Bref, une dénonciation forte et subtile à la fois. Chapeau bas.

Ah, et puis j'ai appris le mot "taud". Merci !

[Ba]

Il est colères blanches qui se passent de commentaires. Arrêt sous la bannière en berne.

[Hellian]

Loïc, il faut souvent le lire cinq ou six fois avant de tout piger.

La première fois, tu te dis : « bizarre ce truc, de quoi t'est-ce quicause ? »
La deuxième fois, tu fais : « ah ouais ! »
la troisième, « pas mal ! »
la quatrième, quand tu as décrypté, tu saisis les subtilités
la cinquième, tu dis bravo.
La sixième...

[Sahkti]

A la première lecture, je me suis demandée si la prose n'aurait pas été plus adéquate, si la narration poétique n'était pas trop explicite.
Puis j'ai relu et certaines images se sont dégagées, fortes et sobres à la fois, dénonciation discrète mais bien réelle d'une situation révoltante.
Au final, je me dis que c'est sans doute un bon choix que d'avoir exprimé de la sorte un cri du coeur et de colère; ça évite les textes militants parfois trop lourds.

[Invité]

Mettre en vers les conséquences d'un plan social est une entreprise difficile, ici réussie. Les quelques vers longs, trop longs à mon goût, me gênent un peu pour la forme, mais le fond et la fin me plaisent beaucoup. Bravo et merci du partage.

[Poussetontraino]

le travail fait qu'on agit souvent par automatisme , les automatismes deshumanisent ...tout ça fait qu'on est pas souvent bien vigilents pour les moments où les faucheuses de toutes sortes sortent ...c'est bien de mettre en lumiére ces moments où le sol se derobe sous les pieds ...

[boc21fr]

C'est tout simplement excellent...
Sais pas quoi dire...
Ah non là je n'ai ni réserve ni conseil ni rien de rien...
Que de l'admiration...
Ah la vache...

[Manu(manisa06)]

Une belle ode à la conjoncture.
A remettre un peu en forme à mon goût.
Faire un petit concentré.
Bien écrit , bien crié.
Bravo

[Manu(manisa06)]

"Et ma belle fierté
Sur quatre roues perchées"

Très bien dit ça !!

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