Mélodie

[marla S.]

Les vagues ressassent toujours la même mélodie.
Elle me dit non. Elle me dit pas maintenant.
Sur la promenade, j’essaie d’avoir l’air courageux en prenant les devants.
Ses cheveux sentent la noix de coco, je la prends dans mes bras ils sont pleins de croutes et de bleus. Il n’y a plus rien que je veuille désormais, juste dormir en toi. La langue suspendue dans le velours de l’air glacé, la princesse ferme les yeux et sourit.
Les feux commencent, les gens sont dehors. Les rires mêlés au désordre qu’on a tous mérités. Un homme dit :
Nous ne sommes pas comme les politiques
Soumis à la pression de la rue.

La fumée arrive à ma gorge et de suite j’ai envie de fumer.
C’est la Révolution ! C’est la Révolution !
Ou c’est juste rien.
Sur la plage, on surprend un nécrophage. Il se planque dans une faille et se laisse envahir par les profondeurs. La jeune fille dont la jambe droite s’arrête au genou respire encore. Je me couche sur elle, l’oreille au cœur qui me transmet un message en morse.
Mon amie se met debout sur un rocher et cherche la police. Froide. La peau froide.

Je suis encore dans le coton mais je ne tarde pas dans ce coin.
Il n’y a personne, tous les démons de la nuit se sont évaporés. Le soleil n’est sorti encore que timidement de la mer.
Deux vieux sur un banc écoutent cette mélodie qui ressasse pour eux leurs souvenirs.

Non.
Pas maintenant.
Et voilà où j’en suis. Les amarres sont lâchées, je reprends tranquillement la route. Je regarde en face mais c’est le passé que je vois.
Hier soir.
Un groupe nous a pris sous son aile chargée. Le feu crépitait et nous envoutait, nous arrivions un instant à oublier le reste.

Tranquillement.

Dans un jardin près de la promenade : un mimosa en fleur. Je m’accroche aux branches et fait le cochon pendu. A l’envers, des mouettes par dizaines, quelques sportifs profitant de la brise matinale.
Le ferry pour la Corse.
Dans ma veste, j’ai un petit carnet de notes.
A la première page, un numéro suivi d’une adresse.

Le garçon s’appelle Jérémie. Il me demande où est la fille qui était avec moi.
Nous portons la même veste.
J’attrape une pomme dans une corbeille. Tout est blanc, blanc sale. Tout est vieux, là. Lui a mon âge, ou pas loin. Il porte la barbe.
La radio crépite avec souffrance une vieille mélodie.
Où va le monde ? Les gens qu’on ne connait pas et qui ne nous connaissent pas se le demande.
Nous on n’en sait rien non plus.
Ca nous est égal.
Est-il conscient qu’aux Philippines, des gens vivent sur des montagnes d’immondices ?

A son travail, la station service.
Il essuie les voitures.
Il essuie les insultes.
Un pauvre au service des riches. Et contre la planète, qui plus est.
Derrière la vitre mal teintée, il aperçoit des enfants. Ils regardent un film. La plus âgée se masturbe. Elle a du rouge aux lèvres et les ongles vernis en noir.

Les rats. Partout. Des rats partout. Dehors, sur les escaliers du palais de justice.
Les gens jouent avec, certains les écrasent. Trois jours après la mort, on ne voit plus les yeux.

Deux hommes. Ca serait l’occasion… mais non. Rien. On fume des fois, de sa fenêtre j’observe la vie couler. Les soirs où les feux reprennent, on est de sortie. Moi c’est juste pour la retrouver.
Lui je ne sais pas. Peut-être. A-t-il perdu quelqu’un lui aussi ?
Il y a des mouettes, il y aussi des corbeaux maintenant. Sur elle, dans mes cauchemars. Ses yeux lapis-lazuli survivant aux coups de becs.
La peau crème entourée d’ailes noires sur le sable me réveille.
Toujours la même veste, il me tourne le dos.
Je pars.
Définitivement.
Plus au Nord, à deux-trois kilomètres, pas plus, les chemins de montagne.
Je dors dans une carrière.
Je dors près d’une rivière.
Les matinaux ne sont pas angoissants comme en ville.
La mélodie.

Non. Pas maintenant.
Où es-tu ?

Les lumières laissent place progressivement aux étoiles dans le ciel. Les gens sont idiots, je pense. Ils ont ça à portée de main, eh bien alors ?
Je lave mes habits dans l’eau claire et fixe une libellule.
Arrivé dans un village. Une fontaine, sur la place. Le cimetière est joli, le marbre sur la paume est une sensation unique. En contrebas se trouve un champ de cerisier. Un vieil homme et son chien.
La grille a des bouts pointus.
Derrière moi, son nom est inscrit.
Qu’est-ce que ça peut faire ?

[Invité]

De belles images post-apocalyptiques, mais le texte est trop nébuleux à mon goût.

Bienvenue sur Vos Ecrits, à vous lire bientôt !

[boc21fr]

Je donnerais le même avis que le précédent (pratique de passer derrière vous socque), avec une petite nuance :

Le premier paragraphe n'est pas nébuleux...
j'enlèverais quand même"ils sont pleins de croutes et de bleus" ou -au moins- le "il".

[Mure]

S'il y a une suite, j'aimerai la lire.
Pour l'instant, je ne dis rien, j'attends, je digère. ;-)

[Invité]

J'attendais beaucoup du premier paragraphe puis je me suis vite ennuyée avec cette succession d'images sans fil directeur, enfin pas pour moi. Décousu, et donc l'intérêt se relâche.

[Invité]

Ce texte, avec sa multitude de phrases ultra-courtes, sans verbes, qui claquent comme des coups de fouet, ne m'est pas agréable à lire.
Aucun liant, aucune unité, on se lasse,on ne peut vraiment s'intéresser au fond avec un style si haché. Je regrette.

[Sahkti]

J'ai aimé cet assemblage d'images, cet air décousu s'articulant pourtant autour d'un fil conducteur. J'ai également apprécié l'allure poétique de l'ensemble qui colle assez bien au propos.

Toutefois, sur la longueur (pas bien grande ceci dit), on sent un peu trop l'effet de justement juxtaposer des scènes et des fragments; la volonté est trop visible, trop présente et c'est dommage.

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