Deux papillons jaunes

[azertyui]

Deux bipèdes, chaque année, s’en allaient en voyage, comme le font souvent les humains fatigués. Ce couple - fille et garçon soit un de chaque genre- s’appréciait tellement qu’il avait décidé qu’ils s’aimaient aujourd’hui et s’aimeraient demain. Demain était venu et tous deux avaient pu vérifier, qu’en effet, ils n’avaient pas changé. Bien sûr, c’est ainsi pour nous tous, leurs yeux voyaient moins bien par rapport à hier, mais l’idée était là et tout allait au mieux, car leur vue diminuait pour tous deux à la fois et sur un même rythme.
Comme pour chaque année, ils filaient au soleil, chez un autre bipède, la sœur de l’un deux, et celle-ci, un peu seule, trouvait son réconfort à les voir tous deux saupoudrer autour d’eux de très doux sentiments, des rayons d’affection, des morceaux de bonheur comme on partage un peu, quand on fait table d’hôte, le plat en général qu’on se garde pour soi.
Chaque année ils venaient, mais ne venaient pas seuls. Deux petits papillons les rejoignaient toujours et volaient autour d’eux, toujours insouciants comme à leur habitude. Ils les accompagnaient, visitaient avec eux, les plages, les musées, et tout le jour durant. Puis ils disparaissaient quand les humains partaient, retrouver la grisaille du nord, où ils vivaient, et où les papillons ne vivent pas longtemps.
C’est étonnant bien sûr, me direz-vous, surpris, cette disparition et pour toute une année. Pourquoi ne pas attendre là où ils revenaient, chez la sœur un peu seule et qui les espérait ?
C’est bien ainsi, pourtant, et les deux papillons n’étaient que souvenir et nul ne les voyait avant que d’une année, la marche indifférente de ce bandit, le temps, ne les ramène enfin.
Un jour, discrètement, pour ne pas déranger, l’homme tomba malade et en fut désolé. Sa belle s’inquiétait, sa sœur s’interrogeait ; il les aimait encore et n’avait plus la force de leur dissimuler le mal qui l’emportait.
Encore une fois le temps, arbitre intransigeant, eut le tout dernier mot et l’homme disparut. Dans ses derniers instants, très occupé pourtant du mal qui le rongeait, il demandait pardon à ces femmes éplorées, de tant les inquiéter et de les tourmenter par sa pauvre santé - je crois- qui n’allait plus comme il aurait voulu. Bref, du premier jusqu’au tout dernier jour, notre malade fut un homme comme on aime connaître.
Le deuil, bien sûr, passa, sur celle qui aimait être deux avec lui, et le chagrin rongea un cœur gros comme ça. Elle attendit un peu, puis partit vers le sud, consoler, comme on peut, la sœur qui, elle aussi, trouvait le monde grand et tout petit aussi, pour compter tant de gens mais ne plus le trouver, ce frère tant aimé qui, quand elle y pensait, faisait rire ses yeux des moments de jadis et les faisait pleurer, comme pour ne plus rien voir, si le destin narquois avait seul décidé que ses yeux inutiles ne pourraient plus le voir.
Son arrivée, bien sûr, fut un peu différente, on parlait à voix basse, on retenait des larmes, on évoquait le temps où Lui était vivant. Mais il vivait encore, dans leurs mots, avec elles, qui s’habillaient de noir sous le soleil du sud, qui aime réveiller de ses rayons magiques, les couleurs les plus gaies, les parfums entêtants.
Cette année-là, ne vit pour elles point de couleurs, à l’exception, peut-être…d’une pointe de jaune, une seule, qui volait autour d’elles. Un petit papillon, citron, qui dès son arrivée, remit de la gaîté dans l’air qu’elles respiraient, et qui n’aurait, vraiment pour aucun prix, voulu être en retard. Son compagnon, hélas, l’autre lépidoptère, brillait par son absence -à moins, me direz-vous, qu’il ne se soit, en chemin, égaré ?- mais à aucun moment celui qui était là ne quitta, un instant, celle qu’il survolait, comme au temps où pour eux la vie se déroulait uniquement à deux et jamais autrement.

[azertyui]

"comme pour ne plus rien voir, si le destin narquois avait seul décidé que ses yeux inutiles ne pourraient plus le voir".
...lourdeur de la répétition mais je n'ai pas trouvé mieux...
la chose est dite... et pas d'accents circonflexes!

[Modération]

Sujet déplacé en forum PROSE, comme il se doit.
Verrouillé jusqu'à lundi en 8 car on demande (lire la ligne éditoriale de VE) au maximum un texte par semaine et par membre dans chaque catégorie.
Sauf erreur, vous en êtes à 3 textes en 3 jours...
Merci
La Modération

[Sahkti]

Il y a des aspects plaisants à cette histoire, mélange de fable et de conte moderne. L'idée des papillons, certes un peu naïve, est toutefois bien trouvée et apporte de la fraîcheur à l'ensemble.
Toutefois, j'ai tout de même trouvé l'ensemble un brin trop lisse à mon goût, avec une allure guimauve que je n'affectionne guère. Il y a également insistance à faire comprendre au lecteur le tracé suiveur des papillons, l'absence du compagnon à la fin, etc. pas tout le temps léger; ça vaudrait la peine d'alléger cela.

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