Tic-Tac
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Peter Pan
M-arjolaine
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Tic-Tac
J'avais toujours été malade en voiture. Je ne savais trop à quoi pouvaient être dues ces fréquentes nausées, et au fond, je m'en fichais: ma mère avait un remède miraculeux.
C'était devenu coutumier: sitôt qu'était annoncée l'éminence d'un départ en vacances, nous nous empressions de faire l'acquisition de six ou sept boîtes de Tic-Tac à la menthe, que nous nous proposions mutuellement tout au long du voyage. C'était un procédé absolument ridicule: en vérité les manger ne faisait qu'accentuer mon envie de vomir. C'était proprement écœurant. Seulement, les délicates pastilles avaient, sous la langue de l'auteure de mes jours, obtenu la merveilleuse dénomination de « bonbons ». Les bonbons étaient à mes yeux pommes au jardin d'éden: je n'y avais pas droit, sauf cas exceptionnels, comme Noël ou les anniversaires. Refuser un bonbon était un geste absolument impensable: il faudrait être con pour ne pas jouir des cadeaux éphémères.
Je laissais éclater la violence de la menthe sur chacune de mes papilles: il fallait que je sois entièrement imprégnée, emplie à en être ivre de la saveur du fruit défendu qui m'était si gentiment proposé. Je devais le manger, en ronger le trognon, l'engloutir tout entier avant qu'il ne me soit à nouveau retiré. Malheureusement, mes plaintes geignardes n'avaient de cesse de se renouveler, au fur et à mesure que je me repaissais de l'abominable festin. L'on finit par en conclure que les Tic-Tac n'étaient d'aucun effet sur mes nausées: je fus horrifiée. Dernier repas du condamné, j'eus droit à un ultime bonbon, que je ne pouvais en aucun cas me résoudre à enfermer entre mes lèvres, au risque d'en être à jamais dégoûtée. Je pensai qu'une nouvelle expérience ne pourrait se révéler qu'enrichissante, et enfournai, sous l'emprise d'une inspiration soudaine, le messie de sucre au plus profond de ma narine. La gauche.
Sans doute espérais-je être rafraichie: j'eus en réalité l'impression d'être étouffée par un énorme serpent. J'eus beau souffler, tenter de le dégager avec mes doigts, rien n'y fit. La seule solution qui m'était offerte de le déloger était d'attendre sa fonte: il lui fallut longtemps. Mon dernier Tic-Tac ne m'avait absolument pas satisfaite: je décidai que jamais plus je n'en mangerais. Sans doute fut-ce l'unique résolution à laquelle je sus me tenir.
C'était devenu coutumier: sitôt qu'était annoncée l'éminence d'un départ en vacances, nous nous empressions de faire l'acquisition de six ou sept boîtes de Tic-Tac à la menthe, que nous nous proposions mutuellement tout au long du voyage. C'était un procédé absolument ridicule: en vérité les manger ne faisait qu'accentuer mon envie de vomir. C'était proprement écœurant. Seulement, les délicates pastilles avaient, sous la langue de l'auteure de mes jours, obtenu la merveilleuse dénomination de « bonbons ». Les bonbons étaient à mes yeux pommes au jardin d'éden: je n'y avais pas droit, sauf cas exceptionnels, comme Noël ou les anniversaires. Refuser un bonbon était un geste absolument impensable: il faudrait être con pour ne pas jouir des cadeaux éphémères.
Je laissais éclater la violence de la menthe sur chacune de mes papilles: il fallait que je sois entièrement imprégnée, emplie à en être ivre de la saveur du fruit défendu qui m'était si gentiment proposé. Je devais le manger, en ronger le trognon, l'engloutir tout entier avant qu'il ne me soit à nouveau retiré. Malheureusement, mes plaintes geignardes n'avaient de cesse de se renouveler, au fur et à mesure que je me repaissais de l'abominable festin. L'on finit par en conclure que les Tic-Tac n'étaient d'aucun effet sur mes nausées: je fus horrifiée. Dernier repas du condamné, j'eus droit à un ultime bonbon, que je ne pouvais en aucun cas me résoudre à enfermer entre mes lèvres, au risque d'en être à jamais dégoûtée. Je pensai qu'une nouvelle expérience ne pourrait se révéler qu'enrichissante, et enfournai, sous l'emprise d'une inspiration soudaine, le messie de sucre au plus profond de ma narine. La gauche.
Sans doute espérais-je être rafraichie: j'eus en réalité l'impression d'être étouffée par un énorme serpent. J'eus beau souffler, tenter de le dégager avec mes doigts, rien n'y fit. La seule solution qui m'était offerte de le déloger était d'attendre sa fonte: il lui fallut longtemps. Mon dernier Tic-Tac ne m'avait absolument pas satisfaite: je décidai que jamais plus je n'en mangerais. Sans doute fut-ce l'unique résolution à laquelle je sus me tenir.
Re: Tic-Tac
Bonjour M-arjolaine,
Ce n'était pas plutôt du Brown Sugar le Messie du sucre ?
Texte sympathique mais sans plus à mon avis...
Je pensai qu'une nouvelle expérience ne pourrait se révéler qu'enrichissante, et enfournai, sous l'emprise d'une inspiration soudaine, le messie de sucre au plus profond de ma narine. La gauche.
Sans doute espérais-je être rafraichie: j'eus en réalité l'impression d'être étouffée par un énorme serpent.
Ce n'était pas plutôt du Brown Sugar le Messie du sucre ?
Texte sympathique mais sans plus à mon avis...
Peter Pan- Nombre de messages : 3709
Age : 48
Localisation : Pays des rêves et de l'imaginaire
Date d'inscription : 16/04/2009
Re: Tic-Tac
Anecdotique, certes, mais quelle façon de raconter une anecdote !!
Tu as des aptitudes de conteuse brodeuse, M-arjolaine !!
Tu as des aptitudes de conteuse brodeuse, M-arjolaine !!
Invité- Invité
Re: Tic-Tac
Un petit texte, anecdotique certes mais très bien raconté: il m'a fait sourire, merci!
La seule chose qui m'a un peu dérangée:
Mais ça reste un détail...
La seule chose qui m'a un peu dérangée:
Je trouve le "con" est un peu décalé avec le reste du texte qui est d'un registre plus soutenu. Peut-être qu'un simple "stupide" aurait suffit?il faudrait être con pour ne pas jouir des cadeaux éphémères.
Mais ça reste un détail...
isa- Nombre de messages : 559
Age : 33
Localisation : Elbonerg
Date d'inscription : 08/04/2009
Re: Tic-Tac
- Remarque typographique : un espace insécable devant « : ».
- « sitôt qu'était annoncée l'éminence d'un départ en vacances », l’imminence, à moins que les vacances soient à la montagne.
J’ai beaucoup aimé ce texte, parti d’une situation plutôt banale, mais que vous avez su faire partager avec humour.
Le texte me fait penser à Amélie Nothomb, dans les phrases courtes et audacieuses, peut-être aussi par la façon de raconter ces moments avec un regard d’enfant.
J’ai beaucoup aimé « il faudrait être con pour ne pas jouir des cadeaux éphémères ».
- « sitôt qu'était annoncée l'éminence d'un départ en vacances », l’imminence, à moins que les vacances soient à la montagne.
J’ai beaucoup aimé ce texte, parti d’une situation plutôt banale, mais que vous avez su faire partager avec humour.
Le texte me fait penser à Amélie Nothomb, dans les phrases courtes et audacieuses, peut-être aussi par la façon de raconter ces moments avec un regard d’enfant.
J’ai beaucoup aimé « il faudrait être con pour ne pas jouir des cadeaux éphémères ».
Re: Tic-Tac
Vous parvenez à faire un petit quelque chose de pas grand chose, d'un fait si anodin qu'à peine le mentionnerait-on. Somme toute, la littérature n'est-elle pas cela, dans une certaine mesure?
Votre patte a les défauts de ses qualités, comme de juste: une certaine grandiloquence, souvent excessive compte tenu du propos, mais qui offre l'avantage de permettre de vous identifier dès la première ligne, quand vous apparaissez masquée comme une vénitienne (jouant Corelli, j'espère)
Détail: puisque vous donnez dans la féminisation, avec auteure, que ne nous parlez vous de conne, alors? A moins, bien sûr, que vous ne soyez androgyne, et ne considériez que c'est la part mâle qui l'emporte chez vous.
Votre patte a les défauts de ses qualités, comme de juste: une certaine grandiloquence, souvent excessive compte tenu du propos, mais qui offre l'avantage de permettre de vous identifier dès la première ligne, quand vous apparaissez masquée comme une vénitienne (jouant Corelli, j'espère)
Détail: puisque vous donnez dans la féminisation, avec auteure, que ne nous parlez vous de conne, alors? A moins, bien sûr, que vous ne soyez androgyne, et ne considériez que c'est la part mâle qui l'emporte chez vous.
silene82- Nombre de messages : 3553
Age : 66
Localisation : par là
Date d'inscription : 30/05/2009
Re: Tic-Tac
Quand tu tiendras un sujet, ça va faire mal !
J'espère que ça va durer, ta plume pointue, qui griffe et griffonne, chiffonne de petits texticules agaçants et savoureux !
J'espère que ça va durer, ta plume pointue, qui griffe et griffonne, chiffonne de petits texticules agaçants et savoureux !
Invité- Invité
Re: Tic-Tac
Je suis partagée.
D'une part, nous avons un fragment de vie, une anecdote, un truc vraiment sans importance sur le fond.
D'autre part, une écriture soignée, parfois chatoyante, chargée, travaillée à souhait. Et c'est là que ça coince à mes yeux. Par rapport à d'autres textes, tu as libéré quelque peu ta plume, ne l'a pas emprisonnée dans un registre trop pointu genre correspondance d'un autre temps, mais sa nature élégante demeure et se marie assez mal avec le quotidien. Les mots sont contenus, le propos bridé, pas de brin de folie ou de spontanéité dans tout cela. Cela devient un Tic-Tac mangé par la Première Dame de France, avec le sourire mais aucun bruit de mastication ou un quelconque travail buccal.
Je ne dis pas qu'il faut tomber dans le trivial ou le terre-à-terre, mais une adaptation du style plus concentrée sur l'objet du texte devrait aider à l'améliorer je pense. Car il y a une bonne base, vraiment.
D'une part, nous avons un fragment de vie, une anecdote, un truc vraiment sans importance sur le fond.
D'autre part, une écriture soignée, parfois chatoyante, chargée, travaillée à souhait. Et c'est là que ça coince à mes yeux. Par rapport à d'autres textes, tu as libéré quelque peu ta plume, ne l'a pas emprisonnée dans un registre trop pointu genre correspondance d'un autre temps, mais sa nature élégante demeure et se marie assez mal avec le quotidien. Les mots sont contenus, le propos bridé, pas de brin de folie ou de spontanéité dans tout cela. Cela devient un Tic-Tac mangé par la Première Dame de France, avec le sourire mais aucun bruit de mastication ou un quelconque travail buccal.
Je ne dis pas qu'il faut tomber dans le trivial ou le terre-à-terre, mais une adaptation du style plus concentrée sur l'objet du texte devrait aider à l'améliorer je pense. Car il y a une bonne base, vraiment.
Sahkti- Nombre de messages : 31659
Age : 50
Localisation : Suisse et Belgique
Date d'inscription : 12/12/2005
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