Vos écrits
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.
Le deal à ne pas rater :
Funko POP! Jumbo One Piece Kaido Dragon Form : où l’acheter ?
Voir le deal

Jusqu'à la rouille des candélabres (extrait)

3 participants

Aller en bas

Jusqu'à la rouille des candélabres (extrait) Empty Jusqu'à la rouille des candélabres (extrait)

Message  Ichimaru Gin Lun 31 Aoû 2009 - 17:31

Le matin il se levait dans son lit à elle, les draps puant d'amour gluant, et il détestait voir cet amour hors de leur corps, corps si faibles qu'ils s'en vidaient dans des convulsions maladroites et inadaptées. Tandis qu'il lavait ses dents, il pensait que cette brosse ferait tout aussi bien l'affaire qu'elle, matière de tourner autour de sa langue. Ses cheveux à elle cassés, dans une autre brosse. Dégoûtante cette femme qui perdait son corps, coupait ses ongles, rasait ses jambes. Il luttait pour reconstituer ses traits, semblait ne l'avoir jamais vue, gardée en mémoire. Une inconnue. Une inconnue qui se vidait en lui. Sa main, d'un réflexe que provoquait le matin dans sa confusion, saisit la mauvaise bouteille de parfum, et il sentit comme elle. Une inconnue qui mentait sur son odeur. Il évita la chambre en quittant la salle de bain, remplit son sac, s'apprêtait à sortir, mais ses clés manquaient à l'appel de la porte. Perfides objets qui ignoraient son dégoût, le tentaient au relent. Il dut la voir, l'aurait détesté entière, mais un drap désordonnée tranchait son cou et l'amputait d'une jambe, entachait son dos, oh seulement une moitié de dos et l'autre de ventre, car elle reposait de côté, et il la vit morte, et voulut l'aimer sur le champ.

Toute la journée il formula des plans lâches, il la quitterait ce soir, mais le mieux en somme était de ne jamais la revoir, et sa décision définitive adoptée, il souriait à la simplicité des gens qui ne lui parlaient pas. S'aménager une garçonnière chez lui, virer Gaston et Jean de Dieu, oui une cage à garces, et les aimer chacune leur tour. Mais les amis. Garder Gaston, garder Jean de Dieu, les garces au diable, s'aménager une garçonnière et travailler beaucoup. Rentrer maintenant à l'appartement, prendre des décisions. Le magasine faussement suivi des yeux jeté, il se trouva les mains libres, encombrantes, leur ordonna de palper ses poches, et elles revinrent disant que ses clés n'étaient pas là. Absentes encore, à cause de l'image du matin. Retourner chez Aude, donc. Sonner. Elle aura lu son mot, ne voudra pas ouvrir, et il faudra supplier, s'excuser, mentir. Oh, ce qu'il était bête, Gaston sûrement aura ses clés, lui. Oui mais en vadrouille on ne savait où ce soir, lui et Jean de Dieu avec Jo. Lui téléphoner. Les mains protestèrent sur leur sort d'esclaves pieds et elles liés, et repartirent explorer les poches. Décidément, un imbécile né. Il avait laissé son téléphone chez elle.

Sur le palier, il essuya ses pieds longuement, s'y reprit, se maudit de n'avoir pas marché dans une grande crotte. Mais quoi, en chercher une et revenir ? Il hésita, se souvint du code, entra, évita l'ascenseur, et se découvrit un dieu qu'il pria d'aides. Je te revaudrai ça, copain. Mais le dieu s'en foutait, éphémère qui devait se reproduire avant de disparaître, et l'imago oublia son créateur.
Asa s'oublia quand elle lui ouvrit. Encore des vêtements partiels, ô cette femme jamais complète qu'une chemise trop longue et trouée découpait en rideaux de peaux. Il les écarta pour trouver le chemin de ses lèvres. Il l'entraîna, pression des mains sur sa hanche à demi couverte de tissu, vers la chambre. Eliminer le mot de la rupture, s'il était encore temps. Leurs langues persuadées que nulle brosse à dent n'égale ces tours de danse. Leurs doigts soudain chargés de l'eau de la sueur. Sur le bureau, il ne vit pas, durant la pause légale pour reprise de respiration, le papier écrit ce matin. Elle surprit son regard, et pour effacer sa confusion il enfonça son nez dans sa forêt de lianes brunes. Des cheveux se brisèrent, de concert avec leur volonté à tous les deux, et il comprit qu'elle avait lu son mot, l'avait pleuré toute la journée, folle et vidée par de nouvelles convulsions pour regretter les anciennes, parties, parties avec le méchant dresseur de ses seins. Je t'aime, lui disait-elle. Et cette nuit il l'aima quatre fois.
Ichimaru Gin
Ichimaru Gin

Nombre de messages : 23
Age : 38
Localisation : Lyon
Date d'inscription : 17/04/2009

Revenir en haut Aller en bas

Jusqu'à la rouille des candélabres (extrait) Empty Re: Jusqu'à la rouille des candélabres (extrait)

Message  Invité Lun 31 Aoû 2009 - 17:41

J'adore absolument : "Il dut la voir, l'aurait détesté entière, mais un drap désordonné (et non "désordonnée") tranchait son cou et l'amputait d'une jambe, entachait son dos, oh seulement une moitié de dos et l'autre de ventre, car elle reposait de côté, et il la vit morte, et voulut l'aimer sur le champ.", cela dit j'ai trouvé le permier paragraphe confus, par moments difficile à suivre, et j'ai trouvé "ses clés manquaient à l'appel de la porte" inutilement obscur.

Les deux paragraphes suivants me plaisent beaucoup, l'expression en est plus simple tout en épousant bien, selon moi, les méandres d'une pensée relâchée, voire embrouillée.
Ceci, très bien à mon avis : "vidée par de nouvelles convulsions pour regretter les anciennes, parties, parties avec le méchant dresseur de ses seins."

Ah, et puis le titre, super !

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

Jusqu'à la rouille des candélabres (extrait) Empty Re: Jusqu'à la rouille des candélabres (extrait)

Message  Rebecca Lun 31 Aoû 2009 - 18:56

Des corps adorés décor abhorré désirs macérés amours lacérées
des goûts et des douleurs des goûts et des couleurs quand dedans dehors tout se délabre jusqu'à la rouille des candélabres...
Oui on veut bien rouiller sur place à te lire.
Rebecca
Rebecca

Nombre de messages : 12502
Age : 65
Date d'inscription : 30/08/2009

Revenir en haut Aller en bas

Jusqu'à la rouille des candélabres (extrait) Empty Re: Jusqu'à la rouille des candélabres (extrait)

Message  Invité Lun 31 Aoû 2009 - 19:32

J'aime bien cette façon inattendue de parler des mains ("Les mains protestèrent sur leur sort d'esclaves pieds et elles liés"). Si je ne me trompe pas, ce procédé apparaissait déjà dans un précédent extrait ?

Sur l'ensemble, je trouve que ça piétine un peu, après la férocité du premier paragraphe, pas sûre que l'extrait choisi tienne absolument debout tout seul. Sur la forme, c'est bien écrit dans l'ensemble, ta manière directe de formuler les choses me va plutôt bien.

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

Jusqu'à la rouille des candélabres (extrait) Empty Re: Jusqu'à la rouille des candélabres (extrait)

Message  Invité Mar 1 Sep 2009 - 8:18

Très fort !
J'aime la façon dont tu rends le mélange, la confusion des sentiments ( ô Stephan!) le côté haché, en même temps la misogynie profonde de ton personnage m'agace et me séduit par cette écriture si expressive !
Vraiment très personnel, ça m'embarque bien !

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

Jusqu'à la rouille des candélabres (extrait) Empty Re: Jusqu'à la rouille des candélabres (extrait)

Message  Sahkti Mer 9 Sep 2009 - 20:34

Un bon texte, Ishimaru, qui retrace avec finesse des émotions brutes. J'ai particulièrement apprécié cette manière de se faufiler dans la peau du narrateur et de jouer avec ses pensées, ses pertes de contrôle. Tout cela est assez subtil, d'autant plus que tu agrémentes le tout de jolies tournures et de réflexions bien senties.
Tu arrives à contourner les sentiers qui pourraient mener à la confusion ou à la lourdeur, tout paraît maîtrisé et c'est un plaisir à lire.
Sahkti
Sahkti

Nombre de messages : 31659
Age : 50
Localisation : Suisse et Belgique
Date d'inscription : 12/12/2005

Revenir en haut Aller en bas

Jusqu'à la rouille des candélabres (extrait) Empty Re: Jusqu'à la rouille des candélabres (extrait)

Message  Contenu sponsorisé


Contenu sponsorisé


Revenir en haut Aller en bas

Revenir en haut


 
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum