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Cactus

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Message  infected Mer 23 Sep 2009 - 23:58

Le vent dû à notre vitesse s'engouffrait allègrement par la fenêtre ouverte et apportait une agréable fraîcheur dans l'habitacle. Le délicieux contraste entre ce courant d'air frais dans mes cheveux et l'humide chaleur de la nuque de cette fille dont je ne connaissais pas le nom, appuyée sur ma cuisse, me faisait par moment frissonner. Le Soleil était au zénith depuis un laps de temps que j'aurais eu du mal à définir, instaurant une chaleur enivrante qui donnait un aspect surréaliste et hors du temps à notre situation. Nous étions trois : deux demoiselles, dont les visages ne m'étaient pas totalement inconnus, et moi. Nous étions affalés sur une espèce d'amas de coussins à l'arrière d'un fourgon, qui se dirigeait dans la même direction depuis une durée dont j'aurais eu, là encore, du mal à juger. La créature dégoulinante de sueur qui se reposait sur mes jambes semblait dormir ; pour sa part, notre troisième comparse regardait défiler d'un air morose le paysage monotone qui s'offrait à sa vue. Je ne savais ni quel jour nous étions, ni depuis quand j'étais là, ni où nous allions et qui conduisait notre véhicule ; et encore moins pourquoi j'étais là, en compagnie de deux personnes dont j'ignorais l'identité, et qui m'étaient tout-au-plus vaguement familières. Toujours est-il que nous avancions. Dans un paysage qui me semblait plutôt typique de la Provence, ou quelque-chose comme ça. Une espèce de garrigue qui occupait inlassablement de grandes étendues dans l'ensemble plates, mais parsemées de petites collines.

Nous finîmes bien par nous arrêter. Le camion nous déposa sous une espèce de grande construction de béton, qui aurait pu faire penser à un pont supportant une autoroute à six voies. Ne désirant point nous attarder en cet étrange espace, où régnait une ambiance malsaine, ainsi qu'un silence qui semblait en fait caractériser l'ensemble de l'espèce de désert dans lequel nous nous situions, nous nous mîmes rapidement à gravir la pente qui s'offrait à nous, parallèlement à la limite du territoire bétonné. Nous gravîmes donc en silence une sorte de sentier rocailleux, qui finit par arrêter de monter pour devenir à-peu-près plat. Nous marchions maintenant en travers d'une pente, sur un large chemin. Il n'y avait d'arbres que sur la partie inférieure de cette pente, soit à notre droite ; le dénivelé y était par ailleurs beaucoup plus important qu'à gauche, ou la pente n'était que légère. Nous marchâmes pendant un certain temps, avant d'arriver en surplomb d'une espèce de clairière.

Des visages souriants, montés sur pilotis. Se balançant doucement au gré du faible vent qui refroidissait à présent l'atmosphère. La bienveillance réduite à une simple expression faciale, se répétant avec quelques variantes sur une douzaine d'individus de trois ou quatre mètres de haut. Des visages souriants montés sur pilotis, regardant je-n'aurais-trop-su-dire-où, mais donnant une étrange impression d'omnipotence. Ces visages semblaient peints, ou sculptés ; on aurait pu dire qu'ils émanaient simplement du bois qui les constituait, si c'était du bois. Ces êtres intrigants mais bizarrement familiers étaient en fait semblables à des masques aborigènes ; leur expression était symbolisée par des traits grossiers, mais ils donnaient l'impression d'être vivants, animés. Leurs regards semblaient converger vers un même endroit, comme si un orateur invisible leur adressait la parole.
Nous assistions à une conférence. Quelqu'un, ou quelque-chose que nous ne voyions pas, qui devait se situer juste en dessous de nous, s'adressait à cette forêt de sourires sur bâtons, qui eux nous voyaient. Nous nous accroupîmes derrière une espèce de buisson, fascinés par ce spectacle. Le silence qui régnait toujours donnait un air surnaturel à la scène. Le vent se rafraîchit. Mon émerveillement fut brusquement mis à l'épreuve par un frisson de malaise. Les deux insignifiantes personnes qui m'accompagnaient semblaient de leur côté pétrifiées de terreur.

Les premières détonations résonnèrent au moment où le regard des deux filles croisa le mien. Celle qui était éveillée pendant le trajet en fourgon tomba en avant. Un léger craquement se fit entendre dans le silence revenu pour quelques secondes, quand son nez se brisa au contact du sol rocailleux. De nouveaux tirs crépitèrent, et quelques pierres éclatèrent à côté de nous.Cette fois-ci la fusillade ne s'arrêta pas ; les détonations retentissaient de manière continue, à la manière d'une crécelle dans la main d'un enfant hyperactif. La fille qui était encore en vie m'adressa un bref regard angoissé avant de s'enfuire en courant par là d'où nous étions arrivés, pliée en deux pour éviter les tirs qui fusaient apparemment dans toutes les directions. Je restai allongé au sol, hébété, et quand elle disparut de mon champ de vision, je pris soudainement conscience de la chaleur qui pesait sur mes épaules. Le sourire des grands masques sur pattes m'hypnotisait, il en émanait une joie malsaine et entêtante. La fusillade, qui continuait, donnait l'impression de ne viser personne : divers cailloux et végétaux étaient touchés, mais j'étais pour ma part indemne. La violence insensée que traduisait cette avalanche sonore, alors que j'étais encore en vie, me donna mal à la tête, et c'en fût trop pour moi.

Je repris conscience allongé sur du carrelage froid et sale. Je me traînai jusqu'au mur le plus proche et m'appuyai dessus. Mes jambes, ankylosées, me faisaient souffrir. Mon nez était également douloureux. La pièce qui s'offrait à ma vue était apparemment une salle de bain ; elle était intégralement carrelée et ne disposait d'aucune fenêtre. Un miroir était accroché au mur, à ma gauche, au dessus de lavabos comme on en trouve dans les toilettes publiques. Une ampoule nue et sale pendait au plafond et diffusait une lumière faible et tressautante. Il faisait froid.
Moins d'une minute après mon réveil, une porte, que je n'avais tout d'abord pas remarquée , s'ouvrit lentement en grinçant.
Je ne vis personne l'ouvrir, et son entrebâillement ne laissait apercevoir qu'une obscurité complète. Je sentais toutefois une présence, comme une entité invisible venue me rendre visite, et je commençais à entendre un râle grave et régulier. Ce souffle profond et envoutant semblait ne faire qu'un avec l'obscurité qui avait maintenant commencé à envahir la pièce, en s'engouffrant par l'ouverture de la porte qui continuait à pivoter. De longs doigts de ténèbres se mirent à ramper rapidement sur les murs, diffusant un froid plus glacial encore que celui qui régnait dans la pièce à l'origine. La pièce fondait, coulait et s'échappait par l'encadrement de la porte désormais grande ouverte sur le néant. L'ampoule résista un moment aux assauts de l'ombre, puis s'éteint dans un grésillement. Je restai assis, indifférent, attendant que quelque-chose se produise. Je fus brusquement recouvert par une substance visqueuse et désagréable, qui m'enveloppa avant de s'insinuer en moi par toutes les pores de ma peau ; je sentais ce corps étranger pénétrer mes sinus et mes oreilles, m'empêchant de respirer mais me maintenant en vie en contrepartie comme le ferait un marionnettiste vaudou. Je commençai à paniquer quand je sentis un contact métallique agresser mes paupières, et essayai vainement de me débattre lorsque deux lames de rasoir déchirèrent la fine membrane censée protéger mes yeux et entreprirent de me labourer les globe oculaires.

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Message  Invité Jeu 24 Sep 2009 - 0:36

Un chouette, si j'ose dire, cauchemar. J'ai trouvé votre texte mieux rédigé à la fin qu'au début, comme si votre écriture avait eu besoin de s'échauffer, de trouver une vitesse de croisière. Au début, en effet (les deux premières phrases), j'ai trouvé qu'il y avait beaucoup trop d'adjectifs, que cela chargeait le texte ; ensuite, ça allait mieux pour moi, j'ai beaucoup aimé cette évocation des visages sur pilotis, mais vous donniez à mon goût trop d'indications qui n'en étaient pas, du genre "espèce de" ; je crois que vous usez énormément de cette expression.
A partir du réveil du narrateur dans une pièce, je n'ai plus perçu ce problème, je trouve toute cette partie bien meilleure. Et le labourage des globes oculaires, muy bien ! Très buñuelien.

Quelques erreurs de langue dans votre texte, peu nombreuses, qu'à cette heure j'ai la flemme de relever.

Bienvenue sur Vos Ecrits, à vous relire bientôt !

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Message  Invité Jeu 24 Sep 2009 - 7:19

Sur un thème qui ne me passionne généralement pas, un texte très réussi, en grande partie grâce à une écriture neutre mais néanmoins propre à induire une ambiance dérangeante.
Certaines phrases percutent, celle qui m'a fait le plus d'effet est :
Des visages souriants, montés sur pilotis.

isolée comme ça elle est redoutable

Beaucoup aimé aussi à la fin les deux lames de rasoir déchirèrent la fine membrane censée protéger mes yeux et entreprirent de me labourer les globe oculaires.
ça me rappelle Bunuel, le prologue de "Un chien andalou", brrr....

NB : vers la fin du texte, je ne sais plus où précisément : s'enfuir

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Message  Invité Jeu 24 Sep 2009 - 10:25

Une histoire intrigante qui fait frissonner...
L'écriture est plus déliée dans la seconde partie.
J'ai relevé : L'ampoule résista un moment aux assauts de l'ombre, puis s'éteint dans un grésillement.
S'éteignit.

Pris du plaisir à lire.

Il y aura une suite ?

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Message  infected Lun 28 Sep 2009 - 22:10

Non pas de suite... Comme vous avez pu le deviner c'est juste un rêve que j'ai trouvé assez marquant pour vouloir le retranscrire; mais écrire n'est pas dans mes habitudes et c'est d'ailleurs le seul texte consistant que j'ai à proposer pour l'instant (& ça date de, oulah plus d'un an). Ceci dit vos remarques m'ont fait plaisir, ce sont les premiers avis concrets que j'ai dessus & elles me donnent envie de travailler mon écriture (merci pour les quelques fautes que je n'avais pas dépistées aussi !)

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Message  Enyo Mer 30 Sep 2009 - 20:07

Même impression que socque pour le "chouette cauchemar". L'utilisation du passé simple au deuxième paragraphe me paraît étrange voir incohérente par rapport à l'ensemble.

La tension décolle véritablement avec le troisième paragraphe.

Je ne sais pas si tu comptes continuer à puiser dans tes "visages souriants mais montés sur pilotis", si c'est le cas, je te conseillerai de te lancer dans l'analyse des fétiches de Karaba dans Kirikou (pour leurs formes e leurs gestuelles saccadées piquantes) et puiser dans le cubisme. Les figures tranchantes, triviales, et la chaleur aride qui s'en dégagent pourraient peut-être t'aider à persévérer dans un nouveau cauchemar. A la lecture, ça ne me donne pas l'impression que l'on évolue en Provence, ça sonne plus africain, mais bon, c'est peut-être moi qui divague.

Au plaisir de suivre ton affaire !
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Message  Sahkti Ven 23 Oct 2009 - 16:07

Beaucoup d'adjectifs et de précisions pas forcément utiles tout le temps; m'est avis qu'il y aurait moyen d'alléger tout cela sans que le texte y perde en force, au contraire. Sans compter que ça gâche un peu le plaisir du lecteur d'imaginer lui-même certains trucs, mais bon... qui trop en dit... !

A part ça, l'écriture est soignée et on sent qu'il y a de bonnes idées derrière tout cela, donc bonne continuation infected !
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