Le père Jular

[Phoenamandre]

Le père Jular regardait le frigo avec son regard typiquement vide.
« Beh qu’est-ce tu fais là ? » Lui lança sa mégère.
- Rien, j’pensais qu’j’avais faim.
- T’veux que j’te prépare à bouffer ? »
« splash splash » lui répondirent ses chaussons usés. En trainant les pieds, il alla rejoindre les toilettes. Sur son passage la tapisserie elle-même préférait se décoller plutôt que supporter l’odeur du vieux poisseux.
Il prit son parfum favoris : « pourriture et rat crevé », s’en aspergeât les mains et s’en badigeonna la chemise, déjà dégoulinante de sueur. Le miroir des cabinets, en voyant cela, émit un gémissement métallique et se brisa sur le sol enduit de poussière grisâtre.
Le père Jular haussa les épaules, et les lèvres pâteuses, il partit s’asseoir sur le canapé vieux et gras, plus beau meuble de son salon en décomposition.
« Tu veux d’la pizza ? » hurla la mère Jular de ce qui semblait servir de cuisine.
« Non ! apporte moi une bière. »
Le vieux crouton, les bras sur la panse débordante de son pantalon troué, regardait ce qui s’approchait d’un match de foot, mais l’image floutée aurait tout aussi bien pu être celle d’un épisode des Télétubbies. Il laissa sortir un rot sonore et ris mollement.
« Il était gros c’lui là. »
Ah que j’les envi pas.

Spoiler:

[Égide]

Ah que j’les envie pas.

Moi non plus.

Tu dis que tu n'avais plus rien à mettre, mais il aurait été intéressant de savoir en trois mots comment Jular et son épouse en sont arrivés là. Est-il financier ruiné ? On suppose qu'ils sont âgés, mais n'ont-ils en fait que 35 ans et usés par la drogue ? Sont-ils ainsi depuis la naissance parce que leurs parents étaient ainsi ? Quoi qu'il en soit, tu nous fait entrer tout de suite dans l'atmosphère.

J'aime particulièrement : « j'pensais qu'j'avais faim », cela dit tout du personnage.

[boc21fr]

Tu en fais trop Phonénamandre, ou alors tu n'en dis pas assez :
Le parcours du père Jular jusqu'à ses chiottes est particulièrement excellent, mais il porte à son paroxysme l'adage littéraire qui veut que l'environnement du personnage reflète sa véritable nature.
Là c'est carrément Kafkaïen ton truc (sauf que ce sont les bibelots qui se métamorphosent et expriment leur indignation).
Non mais c'est carrément l'Attila des living-Room ce gars là :
Partout où il passe, la tapisserie à fleur agonise et ne se recolle pas.
bon allez, je ne vais pas faire la fine bouche : je me suis bien amusé !
Ton texte est une petite photo instantanée d'une beaufitude crasse, bien posée et un peu surréaliste...

[Invité]

Moi aussi j'aime beaucoup la séance de "toilette" du père Jular, l'effet surréaliste du personnage sur son environnement, cela dit, dans l'ensemble, je trouve la caricature vraiment trop forcée pour qu'elle soit drôle.

Quelques remarques de langue :
« En traînant les pieds, »
« Il prit son parfum favori (et non « favoris ») : « pourriture et rat crevé », s’en aspergea (et non « aspergeât » qui est la forme du subjonctif imparfait) les mains »
« Le père Jular haussa les épaules, et les lèvres pâteuses, (du point de vue ponctuation, je pense qu’il est préférable soit de mettre le membre des phrases « les lèvres pâteuses » carrément en incise, entre deux virgules, soit de ne pas l’encadrer du tout, mais cette « demi-incise », à mon avis, est boiteuse) il partit s’asseoir sur le canapé »
« apporte-moi une bière »
« Le vieux croûton »
« Il laissa sortir un rot sonore et rit mollement »
« Ah que j’les envie pas »

[Rebecca]

Je suis d'accord avec mes collègues.

C'est drôle évidemment, il y a là une belle fantaisie presque poétique dans l'écoeurement manifeste des objets, c'est potentiellement trés talentueux, mais je pense aussi que c'est trop...ou pas assez.

Là où ça se gâte, où je suis ressortie du texte et de l'ambiance, c'est quand tu as évoqué le nom du parfum....Soudain ton texte, inclassable,et c'était un atout, est devenu une blague de potache et je me suis retrouvée dans une cour de récréation, et même" à la rue" comme on dit.

Avec quelques rectifications et épaississements , ton histoire prendra de l'estomac comme ton "héros",et ça lui ira bien!

[Invité]

Le mieux est l'ennemi du bien, c'est-à-dire que le dernier paragraphe qui a voulu ponctuer l'histoire en grossissant encore le trait est de trop à mon avis.

[silene82]

C'est un sketch avec des trouvailles, pas de doute.
Cela dit, les Bidochon, c'est pas dégueu non plus; images et commentaires.
Ce qui veut dire que comme tu travailles sans images, toi, il faut arriver à l'excellence dans l'expression, puisque c'est ton seul vecteur.
Donc je trouve qu'il y a potentiellement de bonnes choses, mais que ça demande un peu plus de boulot pour concentrer et synthétiser ce que tu veux faire passer.
Mais ce n'est que mon avis.

[Plotine]

C'est honteux de nous infliger de telles lectures !

[CROISIC]

p'têtre un scénario pour Balasko...dommage Villeret est parti.
j'ai ri au début...plus du tout à la fin. Dommage.

[Sahkti]

La fin me paraît bien plus faible que le début, voire carrément mauvaise, désolée.
Ce qui est difficile dans la caricature, c'est de ne pas en faire trop, de surfer sur la vague de l'humour et de l'exagération sans tomber dans le trop-plein. Or ici, c'est un peu ce qui se passe, tu veux trop bien faire, en dire trop et blam, ça devient lourd. Dommage parce que l'histoire de ces deux-là pourrait donner un truc bien.

[mentor]

un peu comme Sahkti, la première moitié fait rire puis le sourire s'efface, ça devient trop, trop long, même si c'est court, au final
et comme Egide, j'ai trouvé excellent "j'pensais qu'j'avais faim"

[Invité]

Alors , ça avance ? On attend.

[Invité]

Curieux, : on dirait que ça fait partie de quelque chose de plus long...
J'aime cette ambiance Bidochon très bien rendue et l'humour dont tu pares.
les objets.
Socque étant absente, je vais faire intérimaire !! :

Il prit son parfum favori : « pourriture et rat crevé », s’en aspergea
Ah que j’les envie pas.

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