Convois

[loic]

convois

Et marcher déjà mort en de longues colonnes
Le silence des pas étouffe encore les mots
Qui ne s’échappent plus de leurs faciès d’os

Et des arbres affamés semblent les abriter
Sur ces chemins de ruines qui ne mènent nulle part
Il n’y a plus d’horizon aux brisures des neiges

Même le vent s’est enfuit de ces tristes Polognes
Mécaniques rayures numérotées au bras
Vont sous la mansuétude d’un blanc soleil d’hiver

Leurs gardes fatigués, tatoués sous l’aisselle
Se prennent soudain de craintes, de n’avoir pas rêvé

[Invité]

Vu le sujet, je trouve que votre poème, en l'occurrence, manque de force.

Une remarque :
"Même le vent s’est enfui" (et non "enfuit")

[loic]

si l'administrateur peut corriger ce t...

Socque (sans faute cette fois);-), sans force c'est ce que je voulais...une sorte de mauvais rêve

[Invité]

Comme socque. Un très beau poème mais qui manque d'étoffe, je pense vraiment qu'il gagnerait à être développé, si tu pouvais... Parce que là, il donne l'impression d'une composition avortée, quelque chose qui pourrait gagner en puissance.

[Arielle]

Je trouve aussi que le traitement est un peu pâle pour un tel cauchemar.
La première strophe, pourtant, s'ouvrant sur ces faciès d'os avait retenu mon attention.
Il me semble que mort devrait être au pluriel se rapportant à "eux" q'on ne nomme pas mais qui sont sujets du poème.

Et des arbres affamés semblent les abriter
il y a quelque chose d'illogique là-dedans.

Mansuétude me parait un peu trop positif dans ce contexte. Je verrais bien plutôt de l'indifférence dans ce blanc soleil d'hiver

Et puis ces gardes fatigués, tatoués comme leurs prisonniers, on est à deux doigts de les plaindre ! Ils paraissent presque plus humains que les "mécaniques" qu'ils convoient. Cette idée me choque.

J'essaie juste, par ces quelques réflexions de t'indiquer ce qui me gêne dans ton poème Loïc. Ce n'est, bien entendu, qu'un ressenti très subjectif.

[Sahkti]

Le sujet ne peut qu'inspirer l'émotion et le thème choisi dégage par lui-même beaucoup de puissance, alors il n'est pas simple de surpasser cela. C'est ce que je ressens ici, une difficulté à donner une autre orientation à ce thème, à créer autre chose qu'une simple description qui ne peut que jouer sur les images et l'émotionnel. Le potentiel est pourtant là, il suffirait sans doute de peu mais de la sorte, ça fonctionne moyennement à mes yeux.

[milo]

"Même le vent s’est enfuit de ces tristes Polognes"

Je trouve ce vers magnifique.

[Invité]

Je pense que les gardes fatigués, tatoués comme les prisonniers, sont à plaindre en effet car à mon sens ce sont des "kapo" c'est-à-dire des prisonniers forcés au rôle de gardes vis-àvis de leurs collègues, rôle qu'ils n'ont évidemment pas choisi.
Ce texte me plaît ainsi. En voulant le rendre plus puissant, le danger serait de tomber dans une sorte de caricature.

[loic]

embellie petite précision, les SS étaient eux aussi tatoués...

[Hellian]

je fais abstraction du sujet (si c'était possible !) Pour ne m'attacher qu'aux seuls vers.

Je trouve celui-ci très beau :

Il n’y a plus d’horizon aux brisures des neiges

J'aime moins celui-ci :

Vont sous la mansuétude d’un blanc soleil d’hiver

La« mansuétude » du soleil, bof !

[Manu(manisa06)]

Un tel sujet a été traité maintes fois donc c'est un peu faible jeune homme.
Bien essayé quand même.

Comme Hellian je retiens ceci :

"Il n’y a plus d’horizon aux brisures des neiges"

Je suis allé en Pologne et j'ai ressenti des choses en parcourant les campagnes. C'était très fort.

[Manu(manisa06)]

Jean Ferrat
NUIT ET BROUILLARD
Paroles et musique: Jean Ferrat

Ils étaient vingt et cent, ils étaient des milliers,
Nus et maigres, tremblants, dans ces wagons plombés,
Qui déchiraient la nuit de leurs ongles battants,
Ils étaient des milliers, ils étaient vingt et cent.
Ils se croyaient des hommes, n'étaient plus que des nombres:
Depuis longtemps leurs dés avaient été jetés.
Dès que la main retombe il ne reste qu'une ombre,
Ils ne devaient jamais plus revoir un été

La fuite monotone et sans hâte du temps,
Survivre encore un jour, une heure, obstinément
Combien de tours de roues, d'arrêts et de départs
Qui n'en finissent pas de distiller l'espoir.
Ils s'appelaient Jean-Pierre, Natacha ou Samuel,
Certains priaient Jésus, Jéhovah ou Vichnou,
D'autres ne priaient pas, mais qu'importe le ciel,
Ils voulaient simplement ne plus vivre à genoux.

Ils n'arrivaient pas tous à la fin du voyage;
Ceux qui sont revenus peuvent-ils être heureux?
Ils essaient d'oublier, étonnés qu'à leur âge
Les veines de leurs bras soient devenus si bleues.
Les Allemands guettaient du haut des miradors,
La lune se taisait comme vous vous taisiez,
En regardant au loin, en regardant dehors,
Votre chair était tendre à leurs chiens policiers.

On me dit à présent que ces mots n'ont plus cours,
Qu'il vaut mieux ne chanter que des chansons d'amour,
Que le sang sèche vite en entrant dans l'histoire,
Et qu'il ne sert à rien de prendre une guitare.
Mais qui donc est de taille à pouvoir m'arrêter?
L'ombre s'est faite humaine, aujourd'hui c'est l'été,
Je twisterais les mots s'il fallait les twister,
Pour qu'un jour les enfants sachent qui vous étiez.

Vous étiez vingt et cent, vous étiez des milliers,
Nus et maigres, tremblants, dans ces wagons plombés,
Qui déchiriez la nuit de vos ongles battants,
Vous étiez des milliers, vous étiez vingt et cent.

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