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Sur les traces d'Alexis Z....

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Message  Plotine Sam 30 Jan 2010 - 9:58

Était-ce dû à l'été maussade ? J'eus soudain le désir de revoir Alexis.
Bien sûr, l'avion, le bateau, l'idée même du périple à accomplir, me pesaient, mais l'envie fut la plus forte. Après un voyage en avion sans histoire jusqu'à Athènes, je pris le bateau au Pirée.

"Heureux l'homme à qui il a été donné, avant de mourir, de naviguer dans la mer égéenne. Nombreuses sont les joies de ce monde (...). mais fendre cette mer-là, par un tendre automne, en murmurant le nom de chaque île, je crois qu'il n'est pas de joie, qui, davantage, plonge le cœur de l'homme dans le Paradis".

Le poète avait raison. La traversée fut un ravissement et je débarquai donc, un beau jour de septembre, dans le petit port de Réthymno, en Crète.

Je savais qu'Alexis m'attendait et me trouverait sans que j'aie besoin de le chercher. En effet, à peine descendue du ferry, je sentis une main forte sur mon épaule. Je me retournai : c'était lui. Je reconnus sa haute et puissante stature, sa tignasse noire et frisée, "ses yeux tristes, inquiets, moqueurs et pleins de flamme "et son sourire éclatant. Il me prit dans ses bras et me serra non sans me couper le souffle ! J'essayai de tempérer son enthousiasme mais c'était impossible. Je fus noyée sous les embrassades, un torrent de paroles, moitié en grec, moitié en français, des rires, de grands gestes et pour finir il me fit une courbette à la française en m'ouvrant la portière de sa vieille Peugeot.

Trente ans après, mon guide n'avait pas changé. Le soir tombait lorsque nous arrivâmes chez lui et je devinai plus que je ne vis la maison basse entourée de lauriers-roses, de figuiers et de caroubiers.

J'étais épuisée, la journée avait été suffocante de chaleur et d'évènements. Je me laissai guider vers une chambre blanche et fraîche aux murs peints à la chaux et ma dernière vision, avant de m'endormir, fut celle, par une petite ouverture, d'un bout de ciel étoilé.
Le lendemain matin, je fus réveillée par le son de sa voix. Il chantait. Du pas de la porte, je le vis, en contrebas, se raser près d'une source. Puis il se fit un moment silencieux. Il s'appliquait. Cette scène raviva un souvenir douloureux. Je me souvins du chagrin qui m'avait submergée lorsque j'avais eu, à propos d'un homme adoré auquel j'avais renoncé, cette pensée idiote : "je ne le verrai jamais se raser le matin". J'eus un moment de tristesse mais cette histoire était ancienne et je me repris à sourire, attendrie, en regardant Alexis. J'admirai son dos puissant et basané. "Des cicatrices zébraient sa poitrine, témoins des combats d'un passé agité mais, disait-il fièrement, son dos était intact". Je le soupçonnai d'avoir fait disparaître quelques cheveux blancs et, de la restanque d'où je le surplombais, je devinai un début de calvitie. Il me vit et est-ce simplement pour se rincer, ou pour m'étonner, je ne sais, mais il prit un seau plein d'eau et s'en aspergea la tête. Il vint s'ébrouer près de moi en riant.
La journée pouvait commencer et le spectacle allait être permanent. Nous courûmes à travers la Crète, de monastère en musée, de village en village.

"Parfois, je montai sur une hauteur et regardai. Un austère paysage de granit et de pierres à chaux très dure. Des caroubiers sombres, des oliviers argentés, des figuiers et des vignes. Dans les creux abrités, des jardins d'orangers, de citronniers et de néfliers embaumaient (...) et, plus loin, de la mer infinie, émanait une inépuisable poésie. La Crète murmurais-je, la Crète...et mon cœur battait".
Nous visitâmes des ruines qui me jetaient parfois dans un grand effroi. "Ce jour là, quand j'arrivai à la petite cité en ruine, je demeurai saisie. Il devait être midi, la lumière tombait d'aplomb et inondait les décombres. Dans les vieilles villes en ruine, c'est une heure dangereuse. L'air y est rempli de cris et d'esprits. Qu'une branche craque, qu'un lézard glisse, qu'un nuage passe en jetant son ombre et la panique s'empare de vous. Chaque pouce de terre que vous foulez est un tombeau et les morts gémissent".
Puis la gaieté reprenait, nous déjeunions sous les grenadiers, et le soir après un dîner confectionné par ses soins et dont j'avais appris à me méfier, nous buvions du raki. S'il était particulièrement heureux, il jouait du santouri. Il était la joie et l'exubérance. Puis, au-delà d'un certain nombre de verres, il devenait soudain grave et me parlait de Dieu : "Ne ris pas, me disait-il, je me représente Dieu tout pareil à moi. Seulement plus grand, plus fort, plus toqué. Et par-dessus le marché, immortel".

Se forçait-il pour répondre à l'attente de ce que devait être un vrai Crétois pour les touristes ? Je ne le pense pas, il laissait simplement libre cours à sa nature. Et c'est sans doute tout naturellement aussi qu'un soir, lors de mon premier séjour, il s'était fait plus tendre. Hélas, je n'avais pas la simplicité de celles qui font l'amour comme on mange une grenade et imaginer le nombre de femmes ayant succombé à son charme me chagrinait. Je n'aimais pas l'idée d'être une de celles qu'il avait "eues", et il en avait "eues" beaucoup. Je préférais être celle qu'il n'avait pas "eue". Ce fut souvent ma ligne de conduite avec les hommes. Foutue fierté, foutu orgueil, quel regret de n'avoir pas trouvé celui qui m'aurait fait céder contre ma raison et pour lequel j'aurais foulé aux pieds mes principes et" ma combinaison de soie avec de vraies dentelles" après qu'elle ait glissé le long de mon corps nu. Mais, Alexis, malgré sa superbe, ne faisait pas le poids. Sans doute lui manquait-il ce côté obscur qui m'attirait chez les hommes et qui, pourtant, me faisait m'enfuir au dernier moment ? Ce soir là, je feignis une soudaine migraine et allai me coucher. Il fut aux petits soins, toujours charmant mais je fis semblant de dormir quand il m'apporta un verre d'eau. Pauvre Alexis, je m'amusai secrètement de sa déconvenue car je la savais teintée de superstition. Ne m'avait-il pas dit un jour : "Le Bon Dieu pardonne tout mais j'irai en enfer si, une nuit, une femme m'attendait dans son lit et que je n'y suis pas allé." Et un autre soir, insistant : "Malheur à l'homme qui pouvait coucher avec une femme et qui ne l'a pas fait. Malheur à la femme qui pouvait coucher avec un homme et qui ne l'a pas fait". Je comprends maintenant pourquoi il m'arrive parfois d'être malheureuse.
Cela ne m'avait pas convaincue pourtant, j'avais ri et l'avais rassuré : "tu n'y es pour rien, c'est uniquement de ma faute". Mais cette fois-ci il fut sage. Cette escapade d'à peine une semaine s'achevait et nous parlâmes longtemps, dans la douceur de la nuit, de choses que nous n'aurions peut-être pas dites, si nous n'avions pas été certains de ne plus nous revoir. Nous nous embrassâmes tendrement avant d'aller dormir, fatigués et heureux.

Et puis, voilà. Ce matin, je me suis réveillée. Je n'étais plus en Crète mais chez moi et, pourtant, mon cœur était plein d'allégresse. En m'étirant voluptueusement, encore dans mon lit, j'ai fait tomber le livre relu la veille au soir et que j'avais abandonné près de mon oreiller. Ce livre, c'était "Alexis Zorba". Avais-je rêvé ?
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Message  Invité Sam 30 Jan 2010 - 10:22

Ah, les trois dernières phrases qui jettent le doute, je ne suis pas sûre, comme si vous, l'auteur, reculiez devent un texte trop intime... Pour le lecteur (enfin, moi), cela évoque un retrait et le provoque aussi ; du coup j'adhère moins à cette histoire plaisante.

Mes remarques :
« Parfois, je montais (l’imparfait me paraît ici bien préférable au passé simple) sur une hauteur et regardais (idem) »
« et il en avait "eues" beaucoup » : là, j’hésite, il me semble qu’on écrit « il en avait eu beaucoup », que dans ce cas le patricipe passé ne s’accorde pas
« après qu'elle aurait (« après que » n’est pas suivi du subjonctif ; le conditionnel ici me paraît mieux convenir que l’indicatif) glissé le long de mon corps nu »
« Mais, (je ne suis pas sûre de l’utilité de la virgule ici) Alexis, malgré sa superbe »

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Message  Iryane Sam 30 Jan 2010 - 16:27

j'aime beaucoup.
la lecture est simple et fluide, ca se lit vraiment bien, trés agreable.
A travers ces lignes, on sens le regret et la nostalgie de cette femme,
à la fois sa retenue et ses envies ,

Mais à l'encontre de Socque, j'aime le fait qu'à la fin, on se demande nous aussi, si tout cela n'était finallement qu'un doux rêve, platonique et pourtant aux désirs sous-jacent ..

Une phrase toutefois, me fait penser qu'il s'agirait bien d'un rêve :
"Je savais qu'Alexis m'attendait et me trouverait sans que j'aie besoin de le chercher. En effet, à peine descendue du ferry, je sentis une main forte sur mon épaule. Je me retournai : c'était lui."

il n'y a que dans les songes, une tel coincidence existe ^^
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Message  Rebecca Sam 30 Jan 2010 - 18:21

J'ai bien aimé ce texte charmant, charmeur et bien écrit. En plus les séjours que j'ai fait en Grèce sont parmi mes plus beaux souvenirs, ça m'a plu de voir ma nostalgie réactivée par ce récit.
Mais moi aussi, je regrette les deux dernières lignes qui sont comme une douche froide tiède .
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Message  Invité Sam 30 Jan 2010 - 18:44

Je l'ai reconnu tout de suite Zorba, sans rire. Grande fan.
Un de tes textes les plus personnels Plotine, pour ne pas dire "sentimental"- mal connoté. De l'émotion à peine voilée, le retournement induit par la fin ne m'a pas surprise, j'aime bien que tu flirtes avec notre imaginaire.

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Message  Plotine Sam 30 Jan 2010 - 18:46

Je suis heureuse que tu aies capté ce qui n'est le cas de toute le monde pparemment mais je ne suis pas très fière de ce texte, c'est facile de surfer sur une oeuvre superbe.
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Message  Rebecca Sam 30 Jan 2010 - 18:57

ah ok ! Je me demandais , les italiques....des extraits de l'oeuvre?
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Message  Plotine Sam 30 Jan 2010 - 18:59

Rebecca a écrit:ah ok ! Je me demandais , les italiques....des extraits de l'oeuvre?

Oui, hélas, ce n'est pas de moi.
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Message  Rebecca Sam 30 Jan 2010 - 19:03

Ça ne fait rien, c'était bien ! Je veux dire, le tout , à ta sauce...
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Message  Invité Sam 30 Jan 2010 - 19:33

Plotine a écrit:
Rebecca a écrit:ah ok ! Je me demandais , les italiques....des extraits de l'oeuvre?
Oui, hélas, ce n'est pas de moi.
Oui, ça je l'avais saisi au moment de la chute.

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Message  Invité Sam 30 Jan 2010 - 21:28

Joli texte évocateur. Mais on se passerait vraiment de la dernière phrase qui fait trop auteur débutant !

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Message  Zenati Dim 31 Jan 2010 - 6:38

Je trouve que la lecture de ton texte invite au voyage. Ecriture simple et fluide...ça se lit bien.
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