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Révélation Posthume

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Révélation Posthume Empty Révélation Posthume

Message  Iryane Dim 21 Fév 2010 - 10:12

REVELATION

Paris, juin 1944

C’était comme un coup de poing au ventre, un vertige qui semble ne jamais cesser…
Un abîme, sans fond, qui s’ouvre sous vos pieds, qui déchire vos ambitions, qui réduit à néant vos sentiments.

Il suffi de peu, de vraiment très peu parfois.
D’un cheveu, d’un parfum inconnu, d'une parole malvenue …

Cela ne se fonde sur rien, aucune preuve tangible, rien de certain, mais pourtant le doute surgit, et effiloche tout ce qui a été construit.
Il rentre un peu plus tard ? Il me regarde un peu moins ?
Il profère des propos intolérants, des mots qui me choquent tant…
Son appétit sexuel s’amoindrit, ses gestes tendres sont moins fréquents … ?
Et déjà mon esprit s’emballe, l’imagination galope, tel un cheval sans rêne.
Je sens aussi que je l’agace, qu’il préfère son travail à moi, qu’il considère qu’il agit pour le bien commun, pour le bien de la société...


Il a suffi de si peu…
Mais d’un coup, plus rien.
Un simple doute, et ça en a été fini.
Si je doute de lui, c’est qu’au fond, je n’ai pas confiance, et que je le crois capable d’une telle trahison.
Je refuse de vivre dans une telle incertitude, y repensant à tous les instants, en me morfondant inlassablement.
Et de me rendre compte, petit à petit, que mes propres sentiments s’amenuisent.
Non, tout pour éviter cela, c’est pourquoi je suis dans ce train pris au hasard.
A peine honteuse de ma lâcheté, je lui enverrai peut-être une lettre, pour lui expliquer, mais ce n’est même pas sûr.

Je vais vivre au jour le jour, dans ce pays inconnu où ce wagon m’emporte.
Je vais l’oublier, oublier ses idées, m’oublier dans la recherche d’un nouveau logement, d’un travail, d’une nouvelle vie.


-------------------------------------


Toulouse, 13 mai 1972, 15h14

A l’enterrement de mon père, c’était si étrange, si peu de gens…
Mais dans le fond, comment s’en étonner !
Un suicide, dans cette famille si pieuse, c’est loin d’être très bien accepté !

Seuls quelques amis sont venus, ils n'étaient qu’une dizaine, tout au plus, à me répéter des bouts de phrases telles que : « mes condoléances Matthieu » ou encore : « si on peut faire quelque chose pour toi »...
Non, rien ne pouvait être fait : Charles, mon père, était mort, et bientôt enterré, sans que d’autres membres de la famille que moi ne soient présents.
C’était un homme si aimable pourtant, même si parfois sa brusquerie...

Et il y avait cette femme, à l’écart, que je ne connaissais pas.
Elle jurait parmi cette l’assemblée restreinte, avec ses habits si chics, même si elle portait le deuil.
Elle gardait son regard fixé au sol, ne relevant les yeux que de rares fois.
Des yeux gris, incroyables. Je sus dès cet instant que nos destins étaient liés, que je devais lui parler.


Je lui adressais timidement la parole, elle m'expliqua qu'elle venait d’un pays de l’est, qu’elle avait connu Charles il y avait fort longtemps...
Eliane n’a pourtant pas voulu me dire de quelle façon elle était liée à mon père. Elle a refusé mon invitation à se revoir, protestant qu’elle partait aussitôt la cérémonie terminée.
Elle a l’air si fragile, si mélancolique avec son accent, très léger, si attendrissant.
Son chignon grisonnant, d'où s'échappent quelque mèches rebelles, sa silhouette si frêle, tout en elle incite à la sympathie.
Je me sentis terriblement insolent de lui parler d'un rendez-vous dans de telles circonstances, je me reculai donc d’un pas, la laissant à sa tristesse.
Elle avait l’âge de mon père mais paraissait davantage marquée par le temps, tout en restant jolie.
C’en était encore plus triste.


------------------------


Toulouse, 13 mai 1972, 19h23

Quelle idiote j’ai été de le rejeter ! Il lui ressemble si peu, sa mère a donc déteint sur lui, heureusement.
Il est si jeune, la vingtaine seulement...
Et son prénom, _Matthieu_ lui va bien...
Comment le re-contacter sans paraître étrange à ses yeux ?
Lui téléphoner ? Ma voix tremblerait trop pour pouvoir tenir une quelconque conversation...


-----------------------

Toulouse, 16 mai 1972, 16h15
J 'avais vu le rideau bouger, comme à l'accoutumée...
Ainsi ne fus-je pas étonné lorsque la concierge ouvrit vivement la porte de sa loge pour me tendre une enveloppe, avec seulement mon prénom.
Son œil malicieux semblait, tour à tour, vouloir lire à travers le papier épais, puis me sonder pour deviner si je savais de quoi il s’agissait.
Son sourire s’étira lorsque je lui avouai que je n’avais aucune idée de qui pouvait être cette Madame E.Kritskov, nom griffonné au dos de l’enveloppe.
La concierge me regarda monter les marches avec une avidité telle, que je me retins de me retourner pour lui tirer la langue !

Une fois dans ma chambre, je décachetai l’enveloppe, en sortis une fine feuille de papier beige.
«Je vous attends au café du théâtre à 17h30 ».
Rien d’autre.
Très intrigant.


Je décidai d’y aller.
A ma grande surprise j'y retrouvais Eliane, l’inconnue de l'enterrement.
Seulement trois jours s’étaient passés, elle n’était donc pas rentrée dans son pays.
Elle serrait contre elle un petit paquet, comme si c’était la chose la plus précieuse qu’elle eut au monde. Je me surpris à me demander si elle avait des enfants, un homme dans sa vie...comme si cela pouvait m’intéresser, après tout, elle avait l’âge de ma mère !
Un peu intimidé et fébrile, je m’assis face à elle, dans ce bar quasiment désert.


-----------------

Toulouse, 16 mai 1972, 17h35

Matthieu a dû me trouver idiote, avec ma voie fluette, qui tremble, qui hésite, ma façon de buter sur les mots.
Peut-être aussi s'attendait-il à ce qu’une jeune fille lui ai donné un rendez-vous galant, quelle déception pour lui, j’imagine !
Pourtant, ma parole se déliait peu à peu, il semblait boire mes mots, s’intéresser à mon récit, parfois incrédule, parfois attristé, mais pourtant, il ne mit jamais mes dires en doute, et ne sembla pas m’en vouloir des révélations que je lui fis...

---------------------

Eliane était une ancienne conquête de mon père, pourquoi pas, pourtant elle semblait trop douce pour un caractère comme le sien.
Elle regrettait de l'avoir quitté 28 ans auparavant, elle aurait dû rester, pour au moins lui parler, lui expliquer, savoir ce qu’il en était vraiment.
Elle se reprochait aussi de devoir me parler de tout cela, mais elle ne pouvait garder ce secret plus longtemps.
Elle avait fait des recherches, confirmant hélas ses doutes.


Elle était obligée de me mettre au courant, l’action en justice allait être intentée, elle voulait que je le sache par sa voix plutôt que par la presse.

Etrangement, ça ne m’a étonné qu’à moitié, je comprend mieux le comportement, les contradictions de mon père.
Je comprends mieux, je lui en veux, j’aurais aimé que cette femme me prévienne avant, j’aurais aimé qu’il ne se fût jamais engagé dans ce côté- ci de la guerre, j’aurais aimé...

Ce n’est pas tous les jours qu’un père va être, même à titre posthume, inculpé de crime contre l’humanité, de collaboration avec les nazis.

Mais ce qui compte après tout, c’est que mon héritage aille aux descendants des victimes de guerre.
Ils en ont davantage besoin que moi …

Spoiler:
Iryane
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Message  Invité Dim 21 Fév 2010 - 12:27

Beaucoup de choses à dire sur ce texte, Iryane.
Tout d'abord sur le fond, deux choses m'ont arrêtée :

-le RV que donne la femme à Matthieu : comment a-t-elle obtenu son adresse ?
-la fin, un gentillette, et même sirupeuse, du moins dans le ton : "Mais ce qui compte après tout, c’est que mon héritage aille aux descendants des victimes de guerre.
Ils en ont davantage besoin que moi …"

Sur le fond, maintenant. Je commence par le détail des maladresses (avis personnel, je précise) :

Son appétit sexuel s’amoindrit, (ça m'a fait sourire... Je trouve très malhabile ce terme de "appétit sexuel", pas romantique du tout, il doit y avoir une façon de dire les choses plus subtilement)

y repensant à tous les instants, en me morfondant inlassablement.
Je vais l’oublier, oublier ses idées, m’oublier dans la recherche d’un nouveau logement, d’un travail, d’une nouvelle vie. (je ne crois pas que c'était si simple pour les femmes, qui plus est une femme étrangère, dans les années 40)

Je sus dès cet instant que nos destins étaient liés, que je devais lui parler.
(oh, la grosse phrase cliché !)

à me répéter des bouts de phrases telles que ("des phrases convenues/toutes faites" plutôt que "des bouts de phrase" ?)

sans que d’autres membres de la famille que moi

Je lui adressai timidement la parole, elle m'expliqua qu'elle venait d’un pays de l’est, qu’elle avait connu Charles il y avait fort longtemps...
Je me sentis terriblement insolent de lui parler d'un rendez-vous dans de telles circonstances (ceci n'est pas clair : donne-t-il RV ou en a-t-il seulement la tentation ? Je pense que non, vu la suite, mais c'est à éclaircir), je me reculai donc d’un pas, la laissant à sa tristesse.
Elle avait l’âge de mon père mais paraissait davantage marquée par le temps, tout en restant jolie.
C’en était encore plus triste.


La concierge me regarda monter les marches avec une avidité telle, (sans virgule) que je me retins de me retourner pour lui tirer la langue !



Matthieu a dû me trouver idiote, avec ma voie fluette, qui tremble, qui hésite, ma façon de buter sur les mots.
Peut-être aussi s'attendait-il à ce qu’une jeune fille lui ai donné un rendez-vous galant, quelle déception pour lui, j’imagine !
Pourtant, ma parole se déliait peu à peu, il semblait boire mes mots, s’intéresser à mon récit, parfois incrédule, parfois attristé, mais pourtant, il ne mit jamais mes dires en doute, et ne sembla pas m’en vouloir des révélations que je lui fis... (pourquoi le passage au passé simple ?)

Elle regrettait de l'avoir quitté 28 ans auparavant, elle aurait dû rester, pour au moins lui parler, lui expliquer (" se faire expliquer", plutôt, non ?) savoir ce qu’il en était vraiment.

côté orthographe :

Seulement trois jours s’étaient passé, elle
comme si c’était la chose la plus précieuse qu’elle eût (subjonctif) au monde. (qu'est-ce donc d'ailleurs ? la curiosité du lecteur est éveillée...)
Je comprends mieux le comportement, les contradictions de mon père.

Voilà Iryane, peut-être des pistes pour reprendre ce texte s'il te tient à cœur. Désolée de pointer le négatif, mais la critique se voudrait aide constructive.

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