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Fragment #544 - Mort d'une étoile solitaire

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Fragment #544 - Mort d'une étoile solitaire Empty Fragment #544 - Mort d'une étoile solitaire

Message  Altair Dim 28 Fév 2010 - 10:10

Samedi 20 février 2010
à Paris

L'alcool entre dans mon corps et envahit mon sang. Je danse en pleurant des larmes de fer. Autour de moi, des visages sans traits palpitent et se brouillent, et je me noie dans la musique aux rythmes telluriques. Mon cœur bouillonne, la douleur a planté ses griffes dans mon ventre et je sens que la raison m'abandonne. Tu m'abandonnes. Et je danse à en perdre la tête. Au milieu des corps sans nom et sans contour. Je ne vois plus rien d'autre que des rais de lumière surexcités, et la fumée mouvante qui baigne l'air saturé. La chaleur brûle autour de moi, des effluves de feu brillant. Et toujours les larmes s'écoulent sur mes joues, torrents de peine et crachin de mort. Pourquoi t'ai-je laissée partir ? Pourquoi n'ai-je pas crié pour que tu restes auprès de moi ? Que suis-je sans toi ? Que suis-je seul en cet enfer vivant ? Je voudrais me dissoudre dans vos corps et dans vos âmes, rejoindre un peu de ce que vous êtes et oublier mon être, le poids mort de mon existence, le silence des murs de mon ego. Je voudrais hurler à même vos pensées, vous implorer, et baigner dans votre amour. Je voudrais que vous m'enlaciez, au-delà de la chair, et que nos esprits se fondent. Je voudrais que le temps se plie et courber l'espace, je voudrais ramener Lola tout contre moi et retenir son amour. Je ne veux plus me réveiller au matin si tu n'es pas auprès de moi, je ne veux plus me coucher seul sans toi, je ne veux plus sentir ce silence, cette solitude, et le goût amer qui traîne sur mon coeur. Alors je quitte la boîte, vacillant, et je tombe à la renverse sur le trottoir, et la lumière trouble des réverbères semble brûler sur des piliers sans fin. Je me relève et l'alcool englue mes veines bariolées. Je sens la nausée me prendre à la gorge et mon corps trembler, je cours sans penser. Les phares des voitures crissent sur mon regard, m'aveuglent, s'enfuient. On me klaxonne, et des cris sonnent dans l'air glacé. Buée aux lèvres bleuies. Je cours. Je ne sais pas où je vais. Est-ce que c'est ainsi que les choses devaient s'achever ? Est-ce qu'il peut y avoir un après ? Je cours. Mes pas qui cognent sur le sol. Mes mains qui heurtent les murs sans fin. Je cours à en perdre haleine. Mon coeur est rempli d'épines et de glace. Je n'ai plus de raison de continuer. Est-ce que je ne pouvais pas te retenir ? Est-ce que la vie a encore un sens en ton absence ? Je cours et j'entends le fracas des flots. C'est la Seine au long cours qui hurle mon nom. Julian. Je ne sais plus qui je suis, car je me suis perdu. Il y a trop longtemps que je n'existe plus. Je voudrais effacer les jours et les nuits, revenir au temps où je n'étais encore qu'un enfant. Je voudrais que tu me serres si fort. Je voudrais pleurer tout contre ton corps, et m'endormir en paix. Me voilà au-dessus de l'eau. Mes doigts rougis sur la rambarde gelée. Je sens la nausée qui me tient et me dit « fais-le ». Longtemps j'ai rêvé de cet instant. C'étaient vos visages alors qui retenaient mon geste, et me gardaient immobile parmi les vivants. Le souvenir de vos visages. La douleur inventée sur vos faces. Est-ce que je pourrais me pardonner ? Je voudrais que vous m'aimiez. Je voudrais tant ne pas être seul. Le vide crie en moi, il a rempli tout mon être et je ne suis plus rien. Je suis le vide dans le vide. Il n'y a plus rien à attendre. Je suis sur la rambarde gelée. Les bras tendus en croix. Et la peur qui brûle dans mon ventre comme des serpents de feu. Je vois Anubis et ses yeux rougeoyants. J'oublie tous les visages et je me fonds dans le sien. Il n'y a plus de liens pour me retenir. Je suis une étoile solitaire.

Et je tombe dans le néant glacé.
Altair
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Message  Iryane Dim 28 Fév 2010 - 10:17

on ressent vraiment le désespoir et le mal-être de celui qui vient de se faire quitter.
l'atmosphere toujours un peu particulière des discotheques qui ennivre et enfume les pensées.

Le rythme du texte est tel, qu'un fois commencé, j'ai tout lu d'une traite, comme transportée par les émotions du personnage, et l'inéluctable de la situation.

de tres belles images :
les larmes s'écoulent sur mes joues, torrents de peine et crachin de mort
Mon cœur bouillonne, la douleur a planté ses griffes dans mon ventre et je sens que la raison m'abandonne
mais peut-être que la phrase :
C'est la Seine au long cours qui hurle mon nom
intervient trop tôt, car dès lors on se doute de l'issue fatale.
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Message  Lucy Dim 28 Fév 2010 - 21:22

Longtemps j'ai rêvé de cet instant. C'étaient vos visages alors qui retenaient mon geste, et me gardaient immobile parmi les vivants. Le souvenir de vos visages. La douleur inventée sur vos faces. Est-ce que je pourrais me pardonner ? Je voudrais que vous m'aimiez. Je voudrais tant ne pas être seul. Le vide crie en moi, il a rempli tout mon être et je ne suis plus rien. Je suis le vide dans le vide.
J'aime beaucoup cette idée d'une "douleur inventée". C'est très fort, et comme ce serait rassurant de savoir que l'on peut toucher les autres d'une façon, n'importe laquelle. Dans l'attrait de la mort, la pensée formulée du suicide, on se cherche ce genre "d'excuses" : si je pars, mes proches, que vont-ils penser ? Faire ? Comment vont-ils réagir ? Et comme le souligne le narrateur " C'étaient vos visages alors qui retenaient mon geste, et me gardaient immobile parmi les vivants", "immobile parmi les vivants" : le gouffre des idées noires, l'impression de ne pas pouvoir décoller, de ne rien faire. Très bien vu. Et ce : "Longtemps j'ai rêvé de cet instant." On ne peut plus vrai.
Pourtant, même si j'adhère énormément à ce genre de pensées n'en étant nullement dépourvue et me demandant quand sera la prochaine fois, quand ce sera la bonne, celle où je ne m'inventerai pas d'excuses, je déplore un ton légèrement pathétique dans ton écrit. Je sais que le sujet ne prête pas à rire, je sais qu'il est difficile d'éviter l'écueil d'un texte chagrin lorsqu'on parle d'un amour mort ou d'un passage à l'acte de la sorte, mais je pense, sincèrement, que certaines choses pourraient être affinées, nuancées, revues, etc...
Cependant, je conserve un plaisir de lecture. Les mots sonnent bien dans ta prose élégante. Juste une légère retenue de ma part. Voilà... Au plaisir de te relire, donc !
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