Consensuelle

[Iryane]

Ces longs cheveux ondulés, jusqu’à la taille, on s’y noierait.
Sans douleur, ni peur.
En douceur.
Se perdre dans leur noirceur, songeur.
Au moins y passer la main, les brosser, avec soin.
Mais il me faut y résister …

Ses cheveux recouvrent son dos nu, l’enveloppent comme un bouclier de suie.
Recroquevillée, elle semble lointaine.
Distante et sereine.
Le front contre le mur, elle ne veut pas m’en laisser voir davantage.
Je l’adule et je la hais.
Je ne peux pas lui faire de mal, je ne peux pas me permettre de l’abîmer.
Son mutisme me trouble. M’attire. M’insupporte.
Elle fait ça parfois, lorsque sa contrariété est trop forte.
Elle sait mon exaspération.
Elle en ressent les émanations, la colère qui gronde en moi. Latente. Violente.
Mais je ne la toucherais pas. Je ne m’y abaisserais pas. Pas même une caresse.
Pour un rien, un désaccord, une dispute, elle se tait. Se met à nue. Fragile. Frissonne.
S’assit au sol, ramène ses genoux sous le menton. Colle son front sur le papier peint.
Elle attend, immobile, que la tension retombe.
Je n’ai jamais comprit ce comportement.
Je ne peux m’empêcher de la regarder.
D’admirer son dos magnifique, la courbure de ses reins.
Avec de la chance, le début de la rondeur d’un sein…
Ses cheveux, ses épaules…
Mais pas davantage.

L’observer ainsi me calme.
Elle le sait.
Je desserre les poigts. Ralenti ma respiration. Tremble un peu moins.
Elle m’a désamorcée, une nouvelle fois.
Comme d’habitude, lorsque je sortirais de la pièce, elle se rhabillera, lentement.
Vaquera à ses occupations, tranquillement.
Et on se retrouvera, tout naturellement, sans qu’aucune trace de tension ne subsiste.

Mais aujourd’hui, c’est différent.
Ca fait 15 minutes que je suis sorti, et je n’ai entendu aucun bruit de la chambre.
Peut-être est-elle vraiment contrariée ?
Mais y retourner dès maintenant blesserait trop mon orgueil…

Une heure est passée. Je ne tiens plus en place. Pourquoi ne sort-elle pas ?
Elle a du s’installer sur le lit, à lire un magazine, en jubilant de me laisser mariner … elle ne l’a jamais fait, mais elle sait que ça m’excèderait !
Puis d'un coup, c’est comme si une vanne avait cédé dans mon esprit... Peu importe si elle a mal...
Peu importe si je l’abîme... Elle me fait tellement souffrir psychologiquement. A nier les conflits, les faire taire en se réfugiant, sans défense, nue et silencieuse… tout cela doit cesser !
D’une manière ou d’une autre, je le lui ferais comprendre !
Ma main est déjà sur la poignée et empli de frustration, j’ouvre la porte plus vivement que je ne l’aurait voulu, la lampe de chevet vacille pendant trois secondes qui me semblent interminables.
Pas sur le lit.
Toujours dans le coin, au fond de la pièce.
Elle semble relâchée.
Avachie.

Mon Estomac se crispe.
Sueur froide et mains moites.
Deux enjambées pour la rejoindre.
Rien ne soulève plus sa poitrine.
Ses yeux grands ouverts. Fixe. Vide.
Aucune larme ne dévalera plus sur ses joues.
Les miennes en sont déjà inondées …

[Invité]

Tu réussis, par des phrases courtes, à créer une ambiance intrigante et un climat de tension croissante. J'aime ça. Et j'aime la vulnérabilité du personnage "Elle".
J'aime moins le pathos de la fin.

Aucune larme ne dévalera plus sur ses joues.
Les miennes en sont déjà inondées …

[Kash Prex]

Une neutralité froide et un ton sec, ce texte sent la mort avant même ses dernières lignes. Tu installes très bien cette atmosphère et, bien que cela soit peut-être parfois exagéré, tes phrases courtes participent à cette tension croissante. Bien écrit =)

Mais je ne la toucherais pas. Je ne m’y abaisserais pas.

D’une manière ou d’une autre, je le lui ferais comprendre !

Pas de "s" au futur !

Je n’ai jamais comprit ce comportement.

Compris.

Je desserre les poigts. Ralenti ma respiration.

Poings.

Elle a du s’installer sur le lit

Dû.

j’ouvre la porte plus vivement que je ne l’aurait voulu

Aurais

[Invité]

Originale description d'une grosse bouderie ! L'atmosphère est bien rendue. Je n'aime pas non plus la fin, qui n'a guère de justifications. Je ne comprends pas le titre.
Outre celles relevées par Kash, j'ai noté celle-ci : Se met à nue. invariable : se mettre à nu

[Kash Prex]

Ah et bien moi j'aime beaucoup le titre ! "Consensuelle" parce que l'homme entre pour la violenter alors qu'elle est justement déjà morte... C'est comme ça que je le prends en tout cas.

Et en ce qui concerne la fin, j'enlèverais volontiers les points de suspension. Rien d'autre ne m'accroche.

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