Le reflet de la tempête

[Attila]

Le colonel Aldo Grimaldi se tenait là, derrière son bureau, observant par la fenêtre sale force navire sortir du port. La pièce baignait dans une froide lumière hivernale. Et pourtant, la chaleur giclait comme une déferlante dans l'office. Il ne m'entendit pas entrer. Et pour cause, j'avais fait le moins de bruit possible. Cet homme me surprenait en tout, par ses attitudes, ses décisions. Les rares fois où nous discutâmes m'avaient fait l'effet d'un marathon ; je courais désespérément après les sens cachés des propos de cet homme étrange. Lorsqu'il riait, je ne savais si c'était de moi, de lui-même, d'une quelconque boutade que je n'avais su déceler. C'est pourquoi aujourd'hui, je ne prenais plus le risque d'être surpris en le laissant parler le premier.
Il avait gardé le costume de cérémonie. Sa casquette noire, sa cape rouge et son uniforme rigide faisaient de lui un personnage impressionnant. Mais je ne me laissai pas intimider. D'un raclement de gorge, j'attirai son attention. Il ne se retourna pas tout de suite, mais poussa un long soupir de vieillard.

- Je sais pourquoi tu es venu, me dit-il sans quitter les rivages des yeux.

- Daignerez-vous alors m'écouter?

- C'est trop tard, mon cher Dante. Beaucoup trop tard. Les navires ont déjà quitté le port.

- Pourquoi avez-vous laissé faire cela, colonel?

Il étouffa un rire nerveux. Puis, la voix teintée de ce qui semblait à mi-chemin entre de la colère et de la compassion, il me répondit:

- Tu es bien jeune, mon pauvre Dante. Crois-tu réellement que j'ai laissé faire cela? Crois-tu donc que tout cela dépend de moi?

En effet, je n'y avais jamais vraiment songé. Pour moi, le colonel Grimaldi était une sorte de dieu omnipotent. Je n'avais envisagé la moindre faiblesse dans cet homme. Rien ne lui échappait. Tout lui appartenait, le fort, la flotte, la forêt de pins même, chaque homme, chaque docker, chaque âme, chaque vague. Depuis six mois que j'étais en garnison à Barbariga, j'avais eu le temps d'oublier le reste, ma famille, la ville, la police. J'avais oublié que là-bas, pas si loin finalement, des hommes décidaient aussi, et que Barbariga, dans toute sa splendeur rustique, n'était rien d'autre qu'un fort comme tous ceux de la côte, et que Grimaldi n'était qu'un homme.
Je n'osais même plus répondre. Je me sentais écrasé, non seulement par le poids de cette révélation, mais également par l'immensité de ma naïveté qui me surprenait alors. Et dans toute ma stupidité, comme un marin annonçant à son capitaine que son vaisseau coule, je laissai échapper une ultime phrase désespérée, un dernier élan de candeur puérile:

- Mais des hommes vont mourir.

Le premier coup de canon retentit au loin. Le colonel fit d'étranges bruits. La salle puait le sel. Je m'assis sur une chaise et me laissa aller à mon désespoir. Aldo Grimaldi ne pleurait pas, pour sûr.

[Invité]

Un titre aux accents shakespeariens...
A priori pas ma tasse de thé, mais on demande à voir...

observant par la fenêtre sale force navires sortir du port.
Je n'avais pas/jamais (?) envisagé la moindre faiblesse dans cet homme.
Je m'assis sur une chaise et me laissai aller à mon désespoir.

[Invité]

Pour un début, je trouve cela assez intéressant (sauf que le narrateur s'attarde un peu trop à mon goût sur sa fascination pour Grimaldi ; il me semblerait préférable que le lecteur la comprît par l'interaction entre les deux potagonistes). Si c'est tout le texte, ben cela me paraît un peu léger, parce que vous vous donnez la peine d'évoquer toute une situation pour finir en queue de poisson !

Bienvenue sur Vos Écrits, à vous lire bientôt.

Remarques de langue :
« observant par la fenêtre sale force navires (il y en a plusieurs) sortir du port »
« Je m'assis sur une chaise et me laissai aller à mon désespoir »

[silene82]

Tout est possible, le décor est esquissé, la mise en bouche fonctionne, va falloir envoyer maintenant...
Je réserve donc mon avis pour la suite, même sil est manifeste que l'écriture se tient, et amène au moins la curiosité du lecteur pour la suite.
Bienvenue sur VE, à vous lire !

[silene82]

Serais-je persifleur que je suggèrerais qu'avec un tel nom, on ne peut dévoiler qu'une tuerie littéraire, sauf si l'on donne dans l'autodérision et le grotesque, bien sûr.
Pourtant, que la montagne est belle, avant qu'Attila ait passé...

[demi-lune]

un peu "hors contexte"' pour se faire une idée plus précise même si ça se lit bien. Je suis un peu étonnée que le narrateur déclare ne plus vouloir le laisser parler le premier et ensuite manifeste sa présence "D'un raclement de gorge", ce qui a pour effet... de laisser le colonel parler le premier : curieux non ?
"Le colonel fit d'étranges bruits" ???? certes : étrange !

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