Déchirance

[mychelc]

(inspiré par "The Lady of Shalott" – Loreena Mckennitt)


J'ai regardé muet, ma prêtresse échapper
Sa haquenée au trot s'envolait sur les terres
Dans les mottes de glèbe en gerbes de colères
Je sens par tous mes sens, le froid qui m'a happé.

Elle était ma Pythie aux doux rêves de braise,
Elle m'avait tout prédit des détours de l'amour
Moi si peu, si petit, aux portes de sa tour
J'ai cru devenir grand, m'arracher à la glaise.

Mais elle fuit à jamais, au galop d'amertume
J'entends comme un tambour le marteau des sabots
Ecrasant d'un bruit sourd nos souvenirs trop beaux
Il me reste un parfum de regrets que je hume.

Elle était Mélusine aux doux voiles enchanteurs
Et jouait de mes mains sa musique divine
Au piano de ses seins, sur sa bouche câline
Elle offrait son royaume aux infinies lenteurs.

A l'ombre des arbres comme de noires épées
Je guette immobile mon souffle qui s'en va
Car cette chevauchée m'entraîne en l'au-delà
L'Amour périt lassé, sans pleur ni mélopée.

Sans fin mon cœur redit les mots qu'elle me disait
Elle était l'Eternelle, amante d'espérance
Son cheval qui hennit ravive ma souffrance
Et mon cœur engourdi sait qu'elle me méprisait.

Elle se disait mon espérance
Sans lien, sans fin, sans déchirure
Mais je meurs en ce jour de cette déchirance.


Mychelc

[Roz-gingembre]

J'ai eu la curiosité d'écouter le chant qui t'aura inspiré.
Superbe.
Tu as écrit un très beau texte en résonance de cette voix, de cette histoire. Tu as trouvé la bonne tonalité, ce que j'admire.

Et ce titre qui semble si juste

Concernant la forme, je ne suis pas persuadée qu'il était nécessaire de dissocier autant les deux voix (italiques et centrage à droite) d'autant plus que sur la fin du poème elle ne forment plus qu'une.
Je laisse le soin à plus féru que moi pour analyser la prosodie, je peux seulement dire que ma lecture fut agréable et génératrice d'émois.
C'est ce que je retiendrais.

[valérie catty]

J'ai beaucoup aimé la musicalité de tes vers comme toujours.
Les images sont prégnantes et justes et résonnent d'émotions.
Tu as une très belle plume Mychelc.

[Invité]

Chanson elle-même inspirée du poème de Tennyson le victorien. Un classique de la littérature anglaise. Alors, ça fait beaucoup, tellement que je ne sais quoi penser de cette version, au-delà du plaisir qu'a eu l'auteur à communiquer son enthousiasme. Réellement, je suis perplexe.

[Rêvelin]

Moi j'ai décidé d'écouter la chanson après avoir posté, je serais peut être déçu ensuite, j'en sais rien. Tout cela pour dire que les deux voix ne me semble pas nécessaires ou tout du moins la quinconce est de trop je trouve.
Par ailleurs, ce poème est vraiment très musical, très bien tourné, quelques perles :

"Moi si peu, si petit,"

"Au piano de ses seins, sur sa bouche câline"

[Arielle]

Mychelc nous réinvente la légende, la colorant de sa mélancolie :
Il me reste un parfum de regrets que je hume.
... et Mélusine voit se profiler les tours de Camelot. Le monde du rêve est sans frontières, on s'y promène sans se lasser !

[echalot-lover]

C'est très beau, très original dans la mise en forme, j'aurais aimé avoir écrit ce texte

[Sahkti]

Il y a une allure prenante dans ce texte, due en partie à ce rythme scandé qui se déclame à haute voix avec aisance et permet de faire passer des rimes parfois visibles, telles terres/colères ou amour/tour.

Toutefois, attension que sur la longueur, j'ai eu le sentiment que le texte avait envie d'exploser ce moule qui le contient et de permettre aux mots de lâche toute leur exubérance. C'est toujours la difficulté de choisir entre un rythme soigneusement maîtrisé et un fond qui pourrait dire tant. Et si la critique est aisée, l'art est difficile... je serais bien incapable d'en faire autant ! :-)

[Poesita-Aestuat]

Elle était Mélusine aux doux voiles enchanteurs
Et jouait de mes mains sa musique divine
Au piano de ses seins, sur sa bouche câline
Elle offrait son royaume aux infinies lenteurs.

Magnifique.
Les images sont séduisantes.

Je regrette quelques alexandrins ratés...

Par exemple : Elle était Mélusine aux doux voiles enchanteurs :
J'aurais bien enlevés le "doux".

Sinon pourquoi pas faire des alexandrins oraux ? Mais bon, ça me paraît un peu facile.

[Reginelle]

cela peut se lire aussi en deux poèmes bien distincts. Chacun ayant son plein sens, sa pleine indépendance.

Très joli travail de construction. Pour un très beau poème.


Et Loreena Mckennitt ? mmmmmmm !!!

[Rebecca]

Superbe poème. Trés agréable à dire à haute voix.

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