Myhlow
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Myhlow
La peur. Maladive, habituelle. Myhlow s’agite comme elle le peut, mais elle est très à l’étroit dans son trou d’eau, et les roches lui lacèrent sans arrêt le dos. Mais ce n’est pas de ça dont elle a peur ; ce n’est pas non plus le silence aquatique, ponctué de gargouillements et de bruits sourds, qui l’effraye. Quelques corps gonflés, à moitié décharnés, dorment dans un coin de sa tanière. L’un d’eux est mort avec une expression tellement horrifiée que même avec sa vue floue et son champ de vision rétréci, Myhlow la discerne parfaitement et détourne le regard. Telle est la source de sa crainte.
Que les heures sont longues, oppressantes ! Seule persiste la faim. Ce creux dans le ventre de Myhlow, qui depuis plus de deux semaines n’a rien pu ingurgiter, l’affaiblit tant que bientôt elle ne pourra plus même sortir de son bourbier. Mais à quoi bon sortir, au risque de croiser des humains hurlants, car les humains hurlent toujours ; inexorablement Myhlow perçoit leurs jérémiades, des cris stridents ininterrompus, qui expriment tant de haine, qui lui font bien comprendre que tout est de sa faute. Dans son arrête dorsale, un javelot est profondément fiché. Symbole de tous les griefs dont on l’accable, il a été planté par un des seuls hommes qui a jamais osé défier Myhlow ; malgré sa mémoire chancelante, elle se souvient avoir voulu fuir, ne plus se rendre coupable d’autre chose que de son existence ! Hélas, l’homme, téméraire, s’agrippa fermement à son flanc, jusqu’à atteindre son antre. A bout de souffle, il se tordit de douleur et y mourut en héros, dont la statue surplombe désormais la rivière.
Elle aimerait pouvoir partir loin, mais dans leur hargne les hommes ont cerné la rivière d’une longue palissade de bois circulaire, séquestrant la pauvre Myhlow dans un bassin fangeux, condamnée à en faire mollement le tour à longueur de journée, en attendant de mourir. Car c’est ce que Myhlow souhaite, ce que son instinct affûté lui empêche de laisser se produire.
Demain, Myhlow ira se nourrir ; demain elle se réveillera dans sa tanière, toujours aussi frissonnante. Un jour, elle en a bon espoir, elle mourra, et son cauchemar éveillé prendra fin. Mais jusqu’à ce jour salutaire, elle étendra encore et encore sa silhouette massive au beau milieu du bassin qui l’enserre.
Les habitants du village se massèrent sur la place publique, certains munis de longs harpons, à priori peu maniables. L’ancien, juché sur la statue d’Helshen, exhortait la populace :
« Qu’on en finisse ! » résonnait, fusait ça et là, avec des intonations de plus en plus gorgées de griefs : elle n’en avait plus pour longtemps.
Sur les murs de la cabane de l’ancien, quelques gravures bariolées s’effaçaient chaque jour un peu plus sous le soleil miroitant. L’une d’elle, sommaire, verte, représentait comme un gigantesque poisson, très large, la peau rugueuse. Son faciès grossièrement taillé laissait en valeur deux yeux gris qui luisaient, et aurait donné à quiconque l’envie de détester un tel être.
Que les heures sont longues, oppressantes ! Seule persiste la faim. Ce creux dans le ventre de Myhlow, qui depuis plus de deux semaines n’a rien pu ingurgiter, l’affaiblit tant que bientôt elle ne pourra plus même sortir de son bourbier. Mais à quoi bon sortir, au risque de croiser des humains hurlants, car les humains hurlent toujours ; inexorablement Myhlow perçoit leurs jérémiades, des cris stridents ininterrompus, qui expriment tant de haine, qui lui font bien comprendre que tout est de sa faute. Dans son arrête dorsale, un javelot est profondément fiché. Symbole de tous les griefs dont on l’accable, il a été planté par un des seuls hommes qui a jamais osé défier Myhlow ; malgré sa mémoire chancelante, elle se souvient avoir voulu fuir, ne plus se rendre coupable d’autre chose que de son existence ! Hélas, l’homme, téméraire, s’agrippa fermement à son flanc, jusqu’à atteindre son antre. A bout de souffle, il se tordit de douleur et y mourut en héros, dont la statue surplombe désormais la rivière.
Elle aimerait pouvoir partir loin, mais dans leur hargne les hommes ont cerné la rivière d’une longue palissade de bois circulaire, séquestrant la pauvre Myhlow dans un bassin fangeux, condamnée à en faire mollement le tour à longueur de journée, en attendant de mourir. Car c’est ce que Myhlow souhaite, ce que son instinct affûté lui empêche de laisser se produire.
Demain, Myhlow ira se nourrir ; demain elle se réveillera dans sa tanière, toujours aussi frissonnante. Un jour, elle en a bon espoir, elle mourra, et son cauchemar éveillé prendra fin. Mais jusqu’à ce jour salutaire, elle étendra encore et encore sa silhouette massive au beau milieu du bassin qui l’enserre.
Les habitants du village se massèrent sur la place publique, certains munis de longs harpons, à priori peu maniables. L’ancien, juché sur la statue d’Helshen, exhortait la populace :
« Qu’on en finisse ! » résonnait, fusait ça et là, avec des intonations de plus en plus gorgées de griefs : elle n’en avait plus pour longtemps.
Sur les murs de la cabane de l’ancien, quelques gravures bariolées s’effaçaient chaque jour un peu plus sous le soleil miroitant. L’une d’elle, sommaire, verte, représentait comme un gigantesque poisson, très large, la peau rugueuse. Son faciès grossièrement taillé laissait en valeur deux yeux gris qui luisaient, et aurait donné à quiconque l’envie de détester un tel être.
zeratul- Nombre de messages : 9
Age : 32
Date d'inscription : 21/05/2010
Re: Myhlow
Une histoire étrange, que j'aurais souhaitée plus aboutie : comment ont fait les humains pour séquestrer un être aussi gigantesque et dangereux ? Qu'est-ce qui l'empêche de se nourrir dans sa tanière, puisqu'il y a plein de charognes ? Est-il végétarien, donc ? Mais ça colle mal avec son côté dangereux, justement... Bref, pour moi le récit est tout juste esquissé ; dommage, j'aime bien ce côté horrifique.
Bienvenue sur Vos Écrits, à vous lire bientôt !
Mes remarques :
« Mais ce n’est pas de ça dont elle a peur » : « ce n’est pas ça dont elle a peur », ou « ce n’est pas de ça qu’elle a peur » ; ce que vous écrivez est équivalent à « ce n’est pas de ça de quoi elle a peur », avec un « de » en trop, donc
« Dans son arête (et non « arrête ») dorsale »
Bienvenue sur Vos Écrits, à vous lire bientôt !
Mes remarques :
« Mais ce n’est pas de ça dont elle a peur » : « ce n’est pas ça dont elle a peur », ou « ce n’est pas de ça qu’elle a peur » ; ce que vous écrivez est équivalent à « ce n’est pas de ça de quoi elle a peur », avec un « de » en trop, donc
« Dans son arête (et non « arrête ») dorsale »
Invité- Invité
Re: Myhlow
Je ne suis pas sur d'avoir bien compris mais j'aime les sonorités.
Nechez- Nombre de messages : 318
Age : 35
Date d'inscription : 19/12/2007
Re: Myhlow
Que de jeunes talents ces derniers temps sur ce forum. Encore un récit très intéressant. Je ne comprends pas cette phrase "Demain, Myhlow ira se nourrir".
Plotine- Nombre de messages : 1962
Age : 81
Date d'inscription : 01/08/2009
Re: Myhlow
Le principe de ce petit texte était de symboliser le rejet mutuel de deux entités qui ont appris à se détester, et dont les différences priment et primeront toujours sur la curiosité qui les anime et qui pourrait éventuellement les rapprocher. Il se peut que j'aie exagéré le caractère monstrueux de Myhlow, l'idée étant qu'elle soit trop différente des humains pour que les deux puissent s'entendre. J'espère avoir réussi à les placer à égalité devant le jugement du lecteur, et ne pas avoir fait passer l'un pour le plus fautif ni à l'inverse pour le plus innocent, de l'histoire. Quant au ton effectivement assez esquissé, c'était volontaire de ma part. Premièrement, ça m'a permis de créer une ambiance plus sombre, deuxièmement j'ai pensé que ça accentuerait l'idée d'un voile d'incompréhension entre des organismes qui ne soupçonnent pas que leur vis à vis est aussi doté d'une conscience. J'imagine que le rendu n'est pas tout à fait à la hauteur.
Merci en tout cas de permettre à des personnes qui n'ont jusque là pas eu beaucoup d'occasion de faire lire par un autre public que leurs proches de bénéficier d'avis extérieurs et au besoin de conseils.
Merci en tout cas de permettre à des personnes qui n'ont jusque là pas eu beaucoup d'occasion de faire lire par un autre public que leurs proches de bénéficier d'avis extérieurs et au besoin de conseils.
zeratul- Nombre de messages : 9
Age : 32
Date d'inscription : 21/05/2010
Re: Myhlow
A la lumière de tes explications, je dois dire que je n’avais pas lu le texte ainsi, j’ai pris parti pour la bête contre les hommes, sans doute parce que c’est elle qu’on entend et qui est au centre de la narration. Elle semble la victime et pas la coupable.
Pour contrebalancer, il aurait peut-être fallu le point de vue d’un des hommes, celui ayant planté la lance sur elle par exemple.
Pour contrebalancer, il aurait peut-être fallu le point de vue d’un des hommes, celui ayant planté la lance sur elle par exemple.
elea- Nombre de messages : 4894
Age : 51
Localisation : Au bout de mes doigts
Date d'inscription : 09/04/2010
Re: Myhlow
Je partage assez largement l'avis précédent ; je comprends bien votre démarche, le flou dont vous l'avez entouré n'est pas réellement gênant, même si certains détails manquent de cohérence, à mon sens.
Un aller-retour entre Léviathan et les humanoïdes permettrait peut-être d'aller dans le sens que vous vouliez donner au texte, et qui a eu besoin de vos explications, ce qui montre que l'intention n'en est pas si claire.
Quoi qu'il en soit, bienvenue sur VE, et à vous lire.
Un aller-retour entre Léviathan et les humanoïdes permettrait peut-être d'aller dans le sens que vous vouliez donner au texte, et qui a eu besoin de vos explications, ce qui montre que l'intention n'en est pas si claire.
Quoi qu'il en soit, bienvenue sur VE, et à vous lire.
silene82- Nombre de messages : 3553
Age : 66
Localisation : par là
Date d'inscription : 30/05/2009
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