Do-Ré-Mi

[Ratz19]

Mi-Sol-Ré-Do-Ré … Mi-Sol-Ré…

Je jouais du piano en journée. C’est le moment que j’avais pour moi : après qu’il se soit levé jusqu’au soir au souper. Il me laissait jouer, pendant qu’il travaillait, durant son gagne-pain, mérite-vie. Et ces heures, je les prenais avec son piano, bien entendu. Il m’accompagnait près de mon banc, sous mes doigts, dans le salon, à quelques pièces de lui. Tromper son épiderme pour divertir la mienne, diversion à mon corps.

Fa-La-Mi-Ré-Mi… Fa-La-Mi…

Je laissais mes yeux glissés, pendant que mes doigts martelaient. Je laissais quelques mots se chuchoter dans des soupirs de gammes mineures, entre les temps de silence en maladresse, je manquais de pratique apparemment… mais je les laissais s’exprimer dans une coordination malhabile, le temps que mes doigts apprennent leurs temps et leurs places, tout en laissant ma voix se faufiler dans des trous volontaires et des harmonies réfléchies...

« C’est bien ce que tu fais, vraiment bien… » disait-il, une main sur mon épaule… sur mon épaule… une main…

Do-Ré-Mi… jusqu’à ce qu’il part. Mi-Sol-Ré… acquiesçant un semblant de sourire, un semblant d’être bien. Fa-La-Mi… on grimpe jusqu’au pont, pour rejouer le refrain, puis, Fa-La-Do, pour en finir et refaire jusqu’au souper, jusqu’au coucher, jusqu’à ce que le soleil s’endort, jusqu’à ce qu’il meurt pour la lune. Parce qu’entre deux Mi, je n’y pense pas, je ne les crains, j’oublie qu’à l’extérieur, un soleil aime mieux mourir qu’avoir sa main sur son épaule et qu’une lune en oublie ses remords à comprendre ce que les chats font durant la nuit…

« Ce soir j’ai besoin d’un peu de tendresse… » chantait-il sur mon air, se trouvant drôle de déformer mes paroles pour exprimer les ébats de ses hormones. Encore une fois, je me força de me dessiner un semblant de sourire, ce qui me restait dans les poches, quelques miettes…

Puis, une miette d’appétit avant de retourner à mes quelques miettes de mélodies, de Do-Ré-Mi, ce qui me reste de temps, jusqu’au sommeil… jusqu’aux draps… Des mains, de la peau, des poils, des cuisses qui s’entre touchent, des fesses sans latex, au naturel, des fesses sous-danger. Des rides effleurant, éraflant, marquant les cicatrices. Des lèvres, une langue, de la salive, noyant, noyé… ce que les chats font durant la nuit… jusqu’au matin…

Enfin, réveil…

Devant le miroir, avant la douche. Je vois ce qui me reste de moi, ce qui me reste de la veille. Des bleus, des tâches, des cicatrices…. Je suis sale que je me disais, mais même après la douche, je restais tout aussi gris de poussière…

« Bébé? Ça va bien? Ça fait longtemps que tu es dans la salle de bain...» disait-il, s’impatientant...

« Et c’est ça mon gagne-pain? » me disais-je, regardant les traces sur mes fesses…

[Invité]

Mi-Sol-Ré-Do-Ré … Mi-Sol-Ré…
Je jouais du piano en journée. C’est le moment que j’avais pour moi : après qu’il se soit levé jusqu’au soir au souper. Il me laissait jouer, pendant qu’il travaillait, durant son gagne-pain, mérite-vie. (…)

Mi-Sol-Ré-Do-Ré … Mi-Sol-Ré…

Ah!, voilà qui me plaît mieux. Mais surtout le début, avant que tu ne repartes sur cette sexualité qui te ronge. Tu est léger et c'est excellent. Ensuite, tu deviens pathétique. C'est ce que tu veux je pense : tu portes sur toi même un regard pathétique. Mais ta qualité principale selon moi, c'est ce style étrange, cette langue mal maîtrisée, ces images qui portent parfois des fulgurances. Mais ça, je ne te le dis qu'a contrecœur car si tu le sais, ça risque de devenir un procédé. L'idéal serait que tu le gardes comme une routine, sans en faire un fond de commerce. Sur le fond, il serait bon de t'éloigner de ton obsession pour la prostitution. Non que ce ne soit pas un thème, mais plutôt qu'il serait bon que tu saches le transmuter de façon symbolique.

Mi-Sol-Ré-Do-Ré … Mi-Sol-Ré…

[Invité]

C'est pas mal. Tu peux inscrire le thème dans une démarche littéraire.
Pas le garder au stade de 1/10 de nouvelle. Le format n'éxiste pas, tu peux croire le spécialiste.

[Invité]

Obsession, obsessions. Une bonne construction. Narbah et Panda le disent mieux que moi. Un charme étrange, une espèce d'auto-dénigrement pathétique oui, qui ne laisse pas le lecteur "immune". Une grande puissance contenue. On devine qu'il vaut mieux contenir en effet, parce que si ça pète, ça peut faire très mal. Je te lis ici et avant et chaque fois je pense à "un garçon d'Italie" de Ph Besson.

[Invité]

Un parallèle assez bien vu, curieux, étonnant. "Des fulgurances", oui, ça a été souligné... "Une obsession", oui aussi, je répète tout ce qui a été dit. Qui ne demande qu'à arrêter d'être réprimée, refoulée... Moi j'ai bien envie de voir ces sentiments surgir. On reste trop à la surface ici. Et quel dommage que l'écriture suive moins !

Remarques :
- après qu’il se soit levé : après que + indicatif et non subjonctif. Donc, après qu'il s'est levé...
- Tromper son épiderme pour divertir la mienne : quel est le sujet de "la mienne" ? Tromper son épiderme pour divertir le mien, d'épiderme ?
- Je laissais mes yeux glissés : glisser.
- jusqu'à ce qu’il part : parte (subjonctif).
- jusqu’à ce que le soleil s’endort : s'endorme (pareil qu'au-dessus).
- jusqu’à ce qu’il meurt pour la lune : meure.
- je me força : je me forçai (première personne au passé simple).
- des cuisses qui s’entre touchent : s'entre-touchent.
- des fesses sous-danger : sous danger... En danger ?
- Des lèvres, une langue, de la salive, noyant, noyé : noyée. Enfin, je pense, tout dépend du sujet (elle, cette femme, je suppose...).
- Des bleus, des tâches, des cicatrices : tous en chœur comme le disait ma prédécesseur "une tache est une souillure, une tâche un boulot à faire, comme expliquer la différence entre tache et tâche".
- « Bébé? Ça va bien? Ça fait longtemps que tu es dans la salle de bain...» : manque l'espace final entre les trois petits points et les guillemets fermants. Typographie : il faut marquer un espace avant le point d'interrogation.
- « Et c’est ça mon gagne-pain? » : même remarque de typographie que ci-dessus.

[Invité]

Les remarques sur la typographie ont été faites, je n'y reviendrai pas, mais je les trouve moins gênantes que la très mauvaise conjugaison.
Tu devrais te faire lire, avant de poster, par une personne pouvant te corriger, car c'est vraiment dommage.
Il ressort de ton texte une amère poésie, un désenchantement et une sincérité qui impressionnent. Je pense que tu trouves dans l'écriture un exutoire nécessaire à ton équilibre, alors continue. Personnellement, je te lis avec attention et intérêt. Merci.

[Sahkti]

Des maladresses grammaticales de ci de là, voilà qui peut se corriger aisément, donc je ne m'y attarderai guère.
Quelques tournures bancales aussi, un équilibre souvent malmené au fil de la lecture... sans doute une structure de base plus solide aiderait-elle à harmoniser davantage tout cela ou bien au contraire, à en accentuer les reliefs mais de manière plus efficace. Je me demande si cette impression de va-et-vient n'est pas liée à la personnification du thème dans lequel tu sembles émotionnellement beaucoup t'investir, quitte à laisser peu de place au lecteur. C'est difficile à faire, je sais, mais ça vaudrait la peine de considérer cela avec recul, de te mettre en retrait dans l'écriture en te posant la question de la réceptivité de l'autre. Cela ouvrirait sans doute davantage de portes d'entrée et atténuerait ce côté obsessionnel qui risque de dérouter, voire d'éloigner.
En tout cas, bonne continuation !

[Ratz19]

Je me demande si cette impression de va-et-vient n'est pas liée à la personnification du thème dans lequel tu sembles émotionnellement beaucoup t'investir, quitte à laisser peu de place au lecteur.

Je crois que tu as raison, surtout dans ce cas-ci, où j'ai écrit le texte plus pour moi que pour le lecteur. Je crois que nous avons tous besoin d'écrire pour soi quelques fois et je crois qu'il me serait difficile de transcrire ce thème dans une démarche plus sérieuse... trop personnel.

[Lyra will]

Je ne crois pas avoir lu d'autres textes de toi...
Les erreurs de conjugaison m'ont gênées à la lecture, et puis bizarrement, les notes directement écrites aussi (ré-mi-fa) je ne sais pas pourquoi, mais ça m'a arrêté à chaque coup, ça me semblait artificiel, peut-être que ça aurait été plus fluide avec par exemple le simple constat qui informe que l'on joue des notes. Enfin je ne sais pas.

Sinon, cela m'a semblé confus dans l'ensemble, j'ai eu du mal à tenir le cap jusqu'au bout, des difficultés à entrer dedans bien que la fin soit intéressante.

[silene82]

Je trouve tes textes dérangeants, par les thèmes qu'ils abordent, d'une part, par l'impression de témoignage personnel qu'ils me donnent, d'autre part. Non que le thème ait une quelconque importance, la littérature transmute tout, et le plus anodin - ou malsain - peut être transcendé par la manière de le traiter. Au-delà des évidentes scories du texte, il y a un langage autre, dont je n'ai pas les clés, fort et structuré, et en même temps plein d'une espèce de désespoir souriant. Je ne sais comment tes textes évolueront dans l'avenir, mais je suis intéressé par ce mélange de rudesse prosaïque et de tendresse presque désuète qui me rappelle les pages de Genet où il fait l'apologie des décapités assassins - et saints, pour lui -.
Keep going.

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