Enfantines

[Arielle]

Ainsi font font chacun leur tour
les pantins frêles
puis s'en vont
dansent ensemble un rigodon
ou la pavane c'est selon

Ils avaient la cuisse légère
ou le pas lourd
c'était hier
on les a déjà oubliés
ils ont glissé dans la poussière

Impatients d'entrer dans la ronde
et de ramasser les lauriers
d'autres s'en viennent par milliers
avec leurs faims
refont le monde

Ils moulinent un peu plus fort
un peu plus vite et ils ont tort
brassent le vent
dans des turbines
leur farine n'est pas plus fine

―Maman maman les p'tits bateaux
finiront tous le bec dans l'eau ?
― Je n'en sais rien tais-toi et nage
chacun son caca
son naufrage

Ainsi font font leur petit tour
au bois joli
ils courent courent
les furets qui passent trépassent
et jamais par là ne repassent.

[Invité]

J'aime beaucoup à partir de la troisième strophe, les deux premières me paraissant assez convenues.

[Rebecca]

Ou comment mouliner le désespoir en farine légère et déposer sans grumeaux des mots choisis en une cerise sur le gâteau...
Joli et musical. Même si cynique.

J'aime la dérision de ce couplet :

―Maman maman les p'tits bateaux
finiront tous le bec dans l'eau ?
― Je n'en sais rien tais-toi et nage
chacun son caca
son naufrage

[Invité]

J'aime aussi beaucoup cette strophe relevée par Rebecca. Comme souvent dans ton travail, une légèreté de façade, ne pas se fier aux apparences. Un poème à clé... de Saint Georges, évidemment !

[Jérémie]

Moi aussi j'aimerais voguer avec les grands dans ma cocotte en papier, un écho de moi au bout des ondes..... pour l'instant je caillasse les mouettes.

[Lyra will]

J'aime aussi le couplet sur les bateaux.

Pour l'ensemble, j'ai été un peu dérangée par la multiplication de références et reprises des comptines, elles sont bien vues, pas de problème là dessus, c'est juste que malgré moi, je venais caler chaque fois le rythme de la chanson/comptine d'origine, d'une part ça me faisait caler automatiquement les vers suivants alors que ça ne fonctionne pas à chaque fois, puis, quand il en venait une différente, le rythme (dans ma tête!) se trouvait brusquement modifié et de plus "mélodié"
Du coup suis restée un peu à côté à cause de ça!

[Invité]

J'aime beaucoup ce doux-amer.
Un recueil de nouvelles de Marie Rouanet porte exactement le même titre. J'y ai tout de suite pensé et, curieusement, on y retrouve, comme dans ton poème, à la fois la fraîcheur et la cruauté reliés à l'enfance.

[Ba]

Ah, bien envoyée cette ritournelle un peu aigre ;" tais-toi et nage " avec bouée encore un peu...

[mychelc]

pour dire à quoi la vie nous destine
il fallait juste une comptine

Juste ce qu'il faut d'amertume, d'humour lucide et le tout est réussi


Mychelc

[Arielle]

Merci à mes lecteurs et commentateurs qui ont su garder leur âme d'enfant dans la tourmente ...

Jérémy, laisse ces mouettes tranquilles, applique-toi plutôt à soigner de jolis ricochets avec tes galets !
Easter, je ne connaissais pas cette clé de Saint Georges. Chez moi on perdait son mouchoir "A la rue de la gare" ...
Lyra je comprends le problème, je me retrouve souvent à fredonner une mélodie pour la journée entière, comme ça, rien que pour deux mots lus à la file ...

[Sahkti]

on les a déjà oubliés
Ce déjà est-il vraiment indispensable...


Ce détail mis à part, quelle alliance réussie entre une forme à la fois sûre d'elle et légère et un propos bien sombre qui porte un regard amer et lucide sur notre humanité. Une dextérité dans l'art d'écrire appréciable et appréciée !

[Contenu sponsorisé]