Lettre de ménage

[Calvin]

Mercredi s’est fané comme un bleu de porcelaine
Et dans mon jardin j’avais
Deux pierres mortes de toi.
Deux ou trois notes tombées d’entre les ailes
De la musique
Que l’air déplace
(et le temps tourne encore et encore dans l’espace)
J'ai vu tant de sourires suspendus au plafond…

C’était un mercredi des cendres
Marque amère sur ventre rond.
Le soleil de Dakar
N’en fini plus de briller
Et son feu
Et ses cris
Et son fumier
Ne sont pas de ceux
Dont on perçoit les échos.
Ta bouche-balise dans le tumulte ne finira pas de chanter.

J’ai mal aux côtes et les poteaux
Me signifient autant de refus.
Je vois partout des non de toi
Ça me traverse

Le temps déborde

Il y a ces lampes que l’on n’éteint plus.

Sur les routes au visage grave
Les fleurs sont miroirs pour ceux
Qui disent l’amour dans les insultes
Et je porte mon cœur en médaille
Toujours plus triste et langoureux.

J’ai des pierre d’angoisse au fond d’un lit
Que j’avale toujours quand il est l’aube.

J'ai pris un cachet d'ivresse
ton souvenir sur moi s'assied
comme la chaleur de midi
Que sont tes jours que sont tes nuits

le temps déborde

[Calvin]

cette fin est mieux :

J’ai des pierre d’angoisse au fond d’un lit
Que j’avale toujours quand il est l’aube
Ou le soir
, jamais midi

J'ai pris un cachet d'ivresse
Que sont tes jours que sont tes nuits

le temps déborde

[Calvin]

ou alors comme ça (plus sobre) :


J’ai des pierre d’angoisse au fond d’un lit
Que j’avale toujours quand il est l’aube.

J'ai pris un cachet d'ivresse
Que sont tes jours que sont tes nuits

le temps déborde

[Invité]

Louis! écrit, et ça ne s'arrête pas, ça se mort la queue, et repart vers autre chose, puis revient au nid.
On a de la chance d'avoir des Véliens inlassables.

[Invité]

Il y a comme souvent dans tes écrits des passages,des images qui me frappent particulièrement, sans que je puisse expliquer précisément pourquoi elles me font réagir, leur côté très visuel sûrement, une originalité dans l'expression. Désolée que n'être pas plus constructive :

Mercredi s’est fané comme un bleu de porcelaine
Et dans mon jardin j’avais
Deux pierres mortes de toi.

et

J'ai pris un cachet d'ivresse
ton souvenir sur moi s'assied
comme la chaleur de midi
Que sont tes jours que sont tes nuits

le temps déborde


(j'aime cette première version, la troisième aussi.)

[Ba]

Ah, les " deux pierres mortes de toi " ! Rien à dire de plus au régal de l'image.

[Invité]

Ah, ces pierres mortes de toi !
J'ai pris un cachet d'ivresse
ton souvenir sur moi s'assied
comme la chaleur de midi
Que sont tes jours que sont tes nuits

le temps déborde
c'est cette version que je préfère.
Beaucoup d'images superbes, quelque chose de poignant, je suis complètement séduite.

[Invité]

Salut!

autant j'avais lu un texte de toi un peu trop précieux, autant celui-ci je le trouve magnifique. Des images époustouflantes, une émotion, une musicalité. Bravo.

ps: la première version pour moi

[Calvin]

Merci à vous.

Lettre de ménage 2 (Déminéralisation).


J’ai tiré les rues jusqu'à mes murs
Pour les voir emplies de moi
Pour m’oublier, me digérer
Dans le soleil et
Le rythme de mes pas.

Les astres me sont insignes
A mon cou comme deux perles
A mon torse comme un collier
A mon bras comme un bandeau.
J’ai tant vu de ne pas savoir, choisir
Et de rester dans la nuit
De sentir mon corps lourd
Se détacher
Ployant la gravité sous le poids de ses baisers.

J’ai tant vu de ne pas dormir,
qu’il n’y a qu’un pas
Au ciel le sol. Et la musique au ventre rond
Cadence la nuit
Tant qu’elle s’avance
traverse
déborde
Et de muer le jour en percera la peau
Où nous rêvons ;
Déminéralisation.

J’ai tant vu de ne pas savoir
Que je me suis cru fait d’inconstance.
J’ai les mains lourdes d’erreurs
Regarde moi
Elles sont chargées
Regarde comme elles sont pauvres d’être si pleines.
Et j’avais pourtant promis que je ne reviendrais pas
Mais les promesses sont de sel
Et le sel des promesses
Est ce qui reste au fond de mon cœur évaporé :
J’ai du dépôt
Au bout des doigts.

Dans la nuit qui baille j’en ai vu les contours
Comme tout ce que j’emporte de toi
Dessins
Photos
Paroles
Objets
Tout ce que je t’arrache à ton insu
Comme une jouissance du bout de moi.
Et à force de la connaître
J’en ai appris les courbes
Que je porte en mon sein
Comme une voix contre mon cœur.
Regarde :
Ça fait des échos.

[loic]

c'est excellent!

tu as vraiment 19 ans ?

[Calvin]

....oui, merci, c'est touchant, enfin, je connais plus précoce que moi quand même.

[Invité]

Oui. Une belle litanie : "J'ai tant vu".

Et ceci, si bien trouvé, qui remue des choses:

Regarde :
Ça fait des échos.

J'aime vraiment vraiment beaucoup.

[Sahkti]

En général, je suis assez peu réceptive aux textes dans lesquels le JE prend beaucoup de place, plaçant le narrateur en avant du thème abordé. Ici, cette réserve tombe car à travers ce JE et ce cri lancé, on sent toute la beauté de l'autre et tout le drame de la situation. Il y a là un mélange bien dosé entre ces éléments qui permet au texte de ne pas étouffer sous un quelconque nombrilisme mais au contraire d'exprimer des sentiments intenses.

[Rebecca]

Beau et touchant.

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