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Les Confessions

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Message  Calvin Mar 5 Oct 2010 - 11:41

Peut-être que toute forme d’existence n’était pour moi condamnée qu’à se désagréger en malentendu. Tant pis. Comme le personnage qui au fil du récit s’étend lascivement sur plus de pages, je voyais cette fatalité prendre forme, et libérer sa chevelure, voilant ainsi tout ce qui l’attache à moi-même ; ce qui de la cause est manifeste. Elle peut voguer, cette raison, se laisser porter par le courant comme une épave heureuse. Et si souvent on m’a reproché mon inconstance, j’y voyais le plus noble de mes défauts ; tout bruit, tout craquement, feulement, toute manifestation de la vie, se trouvaient selon mon humeur figurée dans un jeu de miroirs déformants. N’eusse été les autres, j’aurais consacré mon existence à comprendre ces mécanismes intérieurs. On m’a reproché mon opportunisme, on m’a dit que j’agissais sans plus de souci de la cause que de la raison ; et si effectivement j’agissais sans considération de l’acte, c’était uniquement pour comprendre dans son aboutissement ce qui avait fait sourdre de tels prémisses. Toute parole devenait à la fois matière et outil ; je n’avais pas de pensée propre ; mes figures de raisonnement étaient volatiles, et c’est par la dialectique que je me construisait en miroir qui par les paroles de l’autre allait se cristallisant. De là il me devenait aisé de faire croire au monde que j’étais son frère, son double, abandonnant tout orgueil pour me hisser ou descendre au niveau des fleurs. Comme l’abeille le pollen, j’allais butinant chaque bouche où la corolle libérait les paroles dans ces emportements fleuris. De chaque passion suscitée, je savais en distiller l’essence pour en obtenir une liqueur de mélancolie. Il n’y a pas plus triste que la brise qui effleure les chose a défaut d’empoigne ; mais bientôt dans cette désillusion, où je me comportais avec moi-même comme avec une de ces fleurs, je voyais avec quelle facilité il m’était permis de souffler sur les gens, de les faire voguer à mon seul grès. Qu’il suffisait que je gagne leur confiance pour les voir aller toutes voiles dehors. Je ne réussi pas à chaque coup ; le nombre important de paramètre dont je devais tenir compte, la densité de ces mers et l’appétit des écueils, me firent me briser plus d’une fois contre les falaises. Mais à force de pratique, vint le temps où je devins expert en navigation : et je pouvais distordre chaque être avec les pinces du sentiment. De mon inconstance qui m’apparaissait comme axiome, et de la volatilité même de mes actes et de ma pensée, j’en vins à véritablement devenir vent pour moi-même, et d’engendrer et de guider chaque émotion, incarnant la cause comme l’effet. Je ne tardais pas à élargir ce mode d’agir au monde des phénomènes : les sons qui me viennent, la main du vent dans les feuillages, tout témoigne de la concentration de l’univers dans un coin de ma chambre. Et d’avoir la vue si dense, j’en ai nié les contours. Chaque objet que je regarde, je l’élu ; cet homme qui pisse contre un mur, dans le printemps tiède où le bruit liquide à la texture de la mousse d’arbre, vient se refléter dans mon cerveau dénoué de vue d’où, de cet état aveugle, je l’élève. Je connu l’ivresse du non-voyant. Rien ne m’excitais plus que l’abordage de terres inconnues : paysages ou nouveaux êtres. Je m’imaginais réceptacle, où le sensible était appelé à reposer, à se déformer, pour à mon contact se modifier et disparaître. De là vinrent ces années de demi-solitude, où je me complus lascivement.

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Message  Yali Mar 5 Oct 2010 - 12:23

C'est bien la première fois que j'ai l'impression d'être dans le fauteuil plutôt que dans le divan moi.
Alors j'en profite — parce que tout cela est bien dit :
— Mais encore ?

Yali

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Message  Calvin Mar 5 Oct 2010 - 12:25

Rien, c'était un essai. Voir si justement je peux "bien dire", mêler introspection et expression.

Calvin

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Message  Yali Mar 5 Oct 2010 - 12:34

Louis! a écrit:Rien, c'était un essai. Voir si justement je peux "bien dire", mêler introspection et expression.
C'est réussi, mais qu'en faire dans la longueur ?

Yali

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Message  Calvin Mar 5 Oct 2010 - 12:46

Ah, ça, je ne sais pas. Je ne me vois pas écrire plusieurs pages dans ce genre. Je voulais surtout exprimer ce qui m'est flou, pour de moi le déformer et l'apposer à, peut-être, de futurs personnages.


Calvin

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Message  Yali Mar 5 Oct 2010 - 13:04

Louis! a écrit:Ah, ça, je ne sais pas. Je ne me vois pas écrire plusieurs pages dans ce genre. Je voulais surtout exprimer ce qui m'est flou, pour de moi le déformer et l'apposer à, peut-être, de futurs personnages.

Ben oui, c'est pas très sexy un auteur au travail :-)

Yali

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Message  Invité Mar 5 Oct 2010 - 14:38

J'aime beaucoup, beaucoup ! Un parfum qui me fait penser à l'époque de Rousseau. Je vois très bien cela dans un texte plus long, mais pas tout de la même veine je crois, j'en lirais pas des tartines, ça finirait par m'étouffer. Mais là, c'est idéal pour moi, très bien équilibré.
Le fond est intéressant, en plus, et il y a des formules superbes.

Mes remarques :
« N’eussent (ou « n’eût », si vous écrivez l’équivalent de « c’est eux ») été les autres »
« je me construisais en miroir »
« la brise qui effleure les choses à défaut »
« les faire voguer à mon seul gré (« à mon seul grès », vous les faites voguer dans un pichet en grès) »
« Je ne réussis pas à chaque coup ; le nombre important de paramètres (puisqu’il y en a plusieurs) »
« Chaque objet que je regarde, je l’élis (puisqu’on est a présent, là ; si vous pensez à un passé simple, c’est « je l’élus ») »
« où le bruit liquide a la texture de la mousse d’arbre »
« Je connus l’ivresse du non-voyant. Rien ne m’excitait plus »

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Message  Invité Mar 5 Oct 2010 - 15:07

Salut.

Moi ça me fait penser à ces introductions interminables de E.A. Poe.

Je dois avouer que c'est rudement bien écrit, que le sujet est très intéressant... Mais que personnellement, ce type de texte a tendance à m'ennuyer. Mais chacun ses goûts, bien sûr.


Chaque objet que je regarde, je l’élu -> là je n'ai pas compris.

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Message  Invité Mar 5 Oct 2010 - 19:05

Si je te préfère dans d'autres élucubrations plus poétiques, je n'en apprécie pas moins ici encore cette aisance dans l'expression, et surtout cette opulence de la langue, comme un ruban soyeux et chatoyant qui se déroule.

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Message  Hegar Mer 6 Oct 2010 - 0:27

Très intéressant, beaucoup d'idées dans ce petit texte, par la taille. Je suis à des années lumières de faire aussi bien!
"Les confessions", le titre faisant référence à Rousseau manque peut-être de modestie vu le sérieux du texte, c'est ce que je ressens...
Je vois donc cela comme ton impression personnelle et j'ai des difficultés à appliquer cette façon de penser à de futurs personnages comme tu l'as commenté après, d'autant plus que le seul moment où tu évoques un personnage en exemple c'est dans une des premières phrases. Tout le reste du texte est un aggloméré de métaphores et de réflexions souvent absconses qui font des trucs parfois intéressants justement mais d'autres fois j'ai du mal à organiser les sens qui sont bombardés un peu partout.

"(...)e voyais cette fatalité prendre forme, et libérer sa chevelure(...)" si c'est bien la chevelure de la fatalité, je ne comprends pas.

"(...)se laisser porter par le courant comme une épave heureuse." OK. Je propose: "atteindre le rivage comme une épave heureuse."

"(...)tout bruit, tout craquement, feulement, toute manifestation de la vie, se trouvaient selon mon humeur figurée dans un jeu de miroirs déformants." Pourquoi un son de félin là dedans? dans quel but? si "figurée" a la bonne orthogtaphe cela s'applique à l'humeur donc la phrase devient confuse, si c'est "figurés" c'est original d'associer des sons à un miroir, objet de la vue.

"(...) tels prémisses" telles prémisses (féminin)

"De là il me devenait aisé de faire croire au monde que j’étais son frère, son double, abandonnant tout orgueil(...)" D'après moi, pour "tromper" le monde en étant son frère, double, je ne vois pas là d'abandon d'orgueil, bien au contraire.

À un moment, je me suis accroché au mot "fleur" (et au champ lexical qui va avec), mais en relisant je trouve que le sens de ces phrases, les idées, ne se rejoignent pas du tout malgré ce point commun.

"Il n’y a pas plus triste que la brise qui effleure les choses à défaut d’empoigne(...)" Très beau!

(...)bruit liquide a la texture de la mousse d’arbre(...)" Encore une fois la correspondance de choses relatives à des sens différents génère une confusion inutile selon moi.

"(...)dans mon cerveau dénoué de vue(...)" je mettrais "dénué" plutôt.

"(...)à se déformer, pour à mon contact se modifier(...)" petite paraphrase?

socque a relevé l'orthographe, il manque justement souvent des "s" assez gros mais j'ai du mal à croire que tu n'as pas relu ton texte pourtant.

C'est la première fois qu'un texte me motive au point de me faire relever des trucs comme ça, continue dans cette voie!
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Message  Calvin Mer 6 Oct 2010 - 19:46

Merci à tous ceux qui ont pris la peine de commenter.
Hegar, je réponds à tes remarques :


""(...)e voyais cette fatalité prendre forme, et libérer sa chevelure(...)" si c'est bien la chevelure de la fatalité, je ne comprends pas."
=> C'est une image un peu pourrie. Manière de dire qu'elle enfle, qu'elle prend forme, qu'elle occupe plus d'espace, qu'elle devient évidence.

""(...)tout bruit, tout craquement, feulement, toute manifestation de la vie, se trouvaient selon mon humeur figurée dans un jeu de miroirs déformants." Pourquoi un son de félin là dedans? dans quel but? si "figurée" a la bonne orthogtaphe cela s'applique à l'humeur donc la phrase devient confuse, si c'est "figurés" c'est original d'associer des sons à un miroir, objet de la vue."
=> Ce n'est pas fait exprès. Souvent quand j'écris je me laisse guider par les sons, et le sens tant bien que mal s'y appose. En écrivant cette phrase, donc, c'est malgré moi que l'allitération est apparue. Ensuite, pour "figurée", c'est une faute d'orthographe : il fallait effectivement lire "figurés".

""De là il me devenait aisé de faire croire au monde que j’étais son frère, son double, abandonnant tout orgueil(...)" D'après moi, pour "tromper" le monde en étant son frère, double, je ne vois pas là d'abandon d'orgueil, bien au contraire."
=> je dis ensuite "me hisser ou descendre au niveau des fleurs" ; on ne devient pas double de n'importe qui sans rechigner, parfois. Enfin, c'est une manière de dire que cela devenait instinctif : tout orgueil signifie aussi tout égo, toute individualité. M'enfin, je n'aime pas trop expliquer mes textes, je préfère laisser le lecteur prendre ça comme il veut (parfois au détriment, je l'avoue, de la clarté du sens)

"À un moment, je me suis accroché au mot "fleur" (et au champ lexical qui va avec), mais en relisant je trouve que le sens de ces phrases, les idées, ne se rejoignent pas du tout malgré ce point commun."
=> ce qui apparait comme une simple image au début ("me hisser ou descendre au niveau des fleurs"), voit le mot "fleur" se charger d'un autre référent (les hommes, autrui). C'est en fait une fausse métaphore filée, un peu vicieuse. Ça permet aussi de faire une transition de manière très naturelle. Mais comme j'écris très vite, parfois au détriment de l'idée, je n'avais pas cette intention au début ; me relisant, j'ai trouvé ça satisfaisant, j'ai donc choisi de garder l'enchainement tel quel, sans développement qui aurait alourdi le texte : je le voulais saturé.


"(...)bruit liquide a la texture de la mousse d’arbre(...)" Encore une fois la correspondance de choses relatives à des sens différents génère une confusion inutile selon moi."
=> J'use souvent de ce procédé. J'aime bien, une affaire de goût, je suppose.

""(...)dans mon cerveau dénoué de vue(...)" je mettrais "dénué" plutôt."
=> C'est une coquille que j'ai laissé telle quelle : elle créait une image.

""(...)à se déformer, pour à mon contact se modifier(...)" petite paraphrase?"
=> Oui, mais j'ai laissé, pour la sonorité.

Comme tu as pu voir, mon texte est truffé de petite imperfections, favorisant les sons ou l'image au détriment du sens clairement signifié. Mais c'est ce que je voulais : ne pas avoir un ton explicatif, professoral ; coucher un ressenti sur le papier, qui m'est flou au départ, et le laisser s'imposer doucement, par des moyens détournés, louvoyant entre des procédés captieux. Enfin, j'en fait tout un pâté, mais bon, j'ai écris ça vite, je ne me suis pas vraiment relu, je me charge de significations a posteriori, etc. Je vais donc m'arrêter là.

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Message  Invité Mer 6 Oct 2010 - 19:57

j’en vins à véritablement devenir vent pour moi-même, contrainte du col en V.
Super texte Louis! et super suite de commentaires. Tout ceci fait très plaisir.

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Message  michel Mer 13 Oct 2010 - 17:01

Toi qui aime les sonorités, je trouve que "Peut-être que toute forme d’existence n’était pour moi condamnée qu’à se désagréger en malentendu" ça sonne avec : "Toute vie bien entendu est un processus de démolition". Je me trompe sans doute, ou plutôt, tu le nieras sûrement, mais tu serais un bon Fitzgéraldien, je te vois bien dans la dégradation réaliste, à l'américaine.
Tient, et à propos de dégradation, quand tu dis, « qu’il suffisait que je gagne leur confiance pour les voir aller toutes voiles dehors » tu dégrades pas mal la sonorité et l’image de la phrase originale de Brel qui est à peu près ceci :
« (...) Filez toutes voiles dehors
Et ho hisse, les matelots
A chasser les cachalots (...) »
Enfin j’ai pas tout lu et je me suis surtout pas relu mais c’est juste ce qui m’est passé par la tête et que j’ai eu envie et essayer de dire dans un double mouvement simultané d’introspection et d’expression....

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Message  Calvin Dim 17 Oct 2010 - 11:21

(désolé de remonter le texte, mais ce commentaire acerbe m'avait échappé)
Je n'apprécie pas ton ironie mais, qu'importe ; je ne prends pas la pause, ça m'est égal. Quand à la phrase de Fitzgerald et celle de Brel je trouve ça.. tiré par les cheveux. Eussent-elles été empruntées, volées, déformées, ces phrases, je n'en aurait pas à rougir : c'est un procédé très commun, que j'ai utilisé plusieurs fois ; seulement quand effectivement je ne l'utilise pas, je ne tiens pas à ce qu'on me charge de fausses paternités. Ensuite, "aller toutes voiles dehors", question image, ça relève du truisme... Ce n'est certainement pas une trouvaille de Brel que j'ai déformé.

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Message  Sahkti Dim 17 Oct 2010 - 11:24

Un texte à la langue ample et déliée, d'une belle allure. Je trouve ceci très élégant et surtout exprimé avec justesse. J'ai failli dire "joliment" mais ça ne s'applique pas vraiment à ces lignes, même si elles le sont; c'est plus fort que cela.
Sur le fond, j'apprécie cette fragilité exposée qui ressemble à un appel et pourtant, pas mal de certitudes, un brin d'aveuglement aussi, dans la personne du narrateur qui aime se raconter tout en se cherchant. Cela donne un mélange bien équilibré entre le soi qui s'interroge et le moi qui se dévoile.
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