Tchaï

[Dilo]

Cinquante mâles indiens debout, à deux mètres, les yeux fixés sur nous. Nous, c’est deux jolies filles bien blanches assises par terre contre les sacs au bord de la route, et moi. Et puis un croisement, un ou deux bouibouis crasseux, quelques cactus et le désert à perte de vue. Silence. Une boutade en ourdou laisse éclater de rire tous les joyeux compères indiens, musulmans et camionneurs. Rien que ça. Bon alors, qu’est ce qui s’est passé ? Qu’est ce que je fous là ? Je me lève. On fait moins les malins, bande de nains. Mais ils sont beaucoup quand même. Je pars. Verrai ce qui se passera avec les filles. Vais au bouiboui boire un tchaï, un thé au lait avec des épices. Jette un œil de côté pour regarder ce rare spectacle : une bande de frustrés, et sûrement puceaux la plupart, avec deux Occidentales – et leur triste réputation, nous y reviendrons – perdues dans le désert. Le cercle se resserre autour des filles. Se resserre encore. Bientôt, elles disparaîtront. M’en fous un peu. Les connais à peine. Je ne les vois plus. Un instant. Un instant seulement avant un cri très fort. Un cri de femme, strident, enragé. Un cri terrible. Et, comme un départ de course : une bande de trous du cul qui se sauve en courant dans tous les sens. Une des filles s’est levée. C’est elle qui a crié. Un des mâles a osé toucher ses cheveux, elle lui a mis une grosse tarte dans la gueule. Du moins, elle aurait bien voulu mais ils sont partis trop vite. Au loin, ils rient. Ils pleurent de rire même car ils ont eu peur ces nigauds. C’est les nerfs en quelque sorte. Ils restent à distance maintenant. À dix mètres, le cercle se reforme. Ils attendent. Les filles n’ont pas l’air angoissé. Juste méfiantes. Le gars du bouiboui parle quelques mots d’anglais. On rigole ensemble de la situation. Cinq mètres, le cercle se rapproche. Ça va recommencer. Mais là, ça va m’agacer, je vais y aller ! J’y vais. Trop tard. Le bus arrive en klaxonnant. Il n’y a plus de place dedans. Monte sur le toit. Démarre. C’est parti ! Mais où on va au fait ?

[M-arjolaine]

Il y a une atmosphère qui me plaît beaucoup dans ce texte, les images me viennent très bien en tête...
Mais j'ai été dérangée tout le long par une grosse incompréhension : le narrateur/la narratrice est il/elle une des deux jeunes filles blanches ? La fin semble indiquer que non, mais le début du texte à la première personne du pluriel, et le "nous, c'est deux jolies filles bien blanches" me déstabilise. C'est vraiment mon gros reproche sur ce texte, qui est sinon écrit d'une manière tout à fait personnelle, et dont je le répète l'atmosphère est très bien retranscrite !

[Invité]

Bien aimé, le langage cru apporte ce petit plus qui rend le tout agréable à lire. Dans ma lecture, le narrateur n'est pas l'une des deux filles.

[Yali]

Bien aimé, le langage cru apporte ce petit plus qui rend le tout agréable à lire. Dans ma lecture, le narrateur n'est pas l'une des deux filles.

T'es bourré Panda ?

[Yali]

Bien aimé, le langage cru apporte ce petit plus qui rend le tout agréable à lire. Dans ma lecture, le narrateur n'est pas l'une des deux filles.

T'es bourré Panda ?

Je parlais de ça, pas du reste du commentaire.

[Invité]

Marrant, ce décalage et ce ton. Un peu court, hélas. On reste sur sa faim

[Invité]

Sympa le flash et typique l'anecdote. La brièveté du texte ne me dérange pas, tout au contraire. Que dire de plus ?
Surtout que la dérision, l'auto-dérision sont palpables ; ça marche.

[Invité]

Au fait Dilo, quand tu repasseras, si tu peux commenter un ou deux textes, les copains apprécieraient.

[Invité]

Tout comme Vincent M.

Une remarque :
« qu’est-ce (trait d’union) qui s’est passé ? Qu’est-ce (trait d’union) que je fous là »

[Invité]

(D'accord, l'anecdote ne méritait guère plus, mais j'aurais aimé quelques notations dispersées de ce genre, je pense que cela aurait mieux installé l'ambiance.)

[Invité]

Ah oui, la toute dernière phrase, je vois pas trop l'utilité.

[Gobu]

L'ambigüité sur la personne du narrateur ne me gêne pas outre mesure. Si elle est voulue, elle rajoute à l'effet d'étrangeté. C'est plaisant dans l'exotisme bien maîtrisé, quoique un peu bref. On aurait aimé un peu de rab. Peut-être une suite ? Ca me fait un peu penser (toutes proportions gardées) à l'ambiance de l'Antivoyage, de Muriel Cerf, ce qui n'est pas un mince compliment de ma part.

[Rebecca]

"Nous, c’est deux jolies filles bien blanches assises par terre contre les sacs au bord de la route, et moi."
Pour moi il n' y a pas d'ambiguité. Oui une scène pas mal décrite, une atmosphère assez lourde allégée de dérision. Un peu mince quand même le tout. A peine on s'installe, c'est fini.

[M-arjolaine]

Je n'avais pas lu le "et moi" O_o Il y a eu une édition ou bien j'ai vraiment sauté le truc ?
Désolée en tout cas, je retire ce que j'ai dit dans ce cas :-) !

[Sahkti]

Est-il vraiment besoin de préciser ce qu'est le tchaï ? Cela fait un peu guide touristique pour incultes, de la sorte.
D'ailleurs, je trouve qu'on retrouve cette tendance à plusieurs endroits du texte auquel j'accroche assez peu.
Tu décris quelque chose mais avec les yeux d'une personne extérieure qui semble ne rien comprendre à rien et c'est à la limite de la caricature. Pas drôle d'ailleurs la caricature car mauvaise.
Ces Indiens semblent être vus comme des demeurés qui vont violer vite fait deux morues en balade pour sensations fortes. Voilà ce que ça me laisse comme impression et franchement, c'est pauvret.
Davantage de psychologie et de profondeur dans les personnages serait plus séduisant, désolée.

[Invité]

J'ai bien aimé ce ton légèrement cynique mais pas complètement, une position preque Houellebecquienne. Le traitement est efficace dans sa sobriété.

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