Ca y est, c'est décidé...
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Lifewithwords
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Clarisse
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Ca y est, c'est décidé...
Ca y est, c'est décidé, je vais me flinguer. Enfin flinguer, c'est une image, je veux dire, je vais en finir.
C'est la première idée qui me soit venu ce matin-là. J'étais heureux, j'avais enfin de quoi m'occuper!
Et puis, comme à chaque fois que je prends une décision, les problèmes ont surgi.
Parce que mourir, c'est bien joli, mais ça ne se fait pas n'importe quand, n'importe comment, sans compter qu'il faut se justifier, expliquer son geste. Après, c'est trop tard.
Une mort, c'est important, ça se prépare longtemps à l'avance. Un enterrement, c'est pas comme un mariage, on n'en a qu'un, faut pas le rater. Je n'avais pas pu choisir ma date de naissance, je trouvais pour le moins équitable d'avoir le choix des larmes!
Comme il est dit dans le traité du parfait jardinier (chapitre "Engrais naturels, compost"), il y a un temps pour tout. Alors j'ai commencé par me pencher sur la saison propice pour ce genre d'événement.
L'été, c'était exclu. Les potes sont en vacances, potentiellement injoignables et quand bien même, l'amitié a ses limites. Pour peu qu'il y ait la canicule, vous risquez au mieux un enterrement à la sauvette, au pire la fosse commune.
L'automne, période de recueillement, me semblait assez judicieux. Mais j'ai craint la concurrence. On honore les morts, d'accord, mais les vieux morts, pas les tout frais. Ceux-là, on les tient au chaud pour l'année suivante, chacun son tour. On ne peut pas passer sa vie au cimetière tout de même!
L'hiver, c'est un peu comme l'été, en négatif. D'abord, il y a les préparatifs des fêtes, puis les fêtes, puis les lendemains de fêtes! Sans compter les alertes météos, neige ou verglas. Un coup à attendre le dégel dans ma caisse capitonnée, certes, mais pas chauffée. !
Non, moi je vous le dis, j'ai beaucoup réfléchi, le début de printemps, c'est ce qu'il y a de mieux pour mourir. Pendant le Carême, pour l'ambiance.
Une fois le "quand" cerné, je me suis attaqué au "comment".
Le comment, c'est comme en peinture, une question de sensibilité. Il y a les gothiques flamboyants (tout feu tout flamme), les pointillistes (une pastille bleue, une pastille jaune, une rose…), les hyper-réalistes (adeptes du direct), les tachistes et les cubistes (prévoir le nettoyage), ceux qui aiment le dessein à la sanguine sans pour autant négliger l'œuvre au couteau, et bien entendu les riches esthètes toujours prêts à payer quelqu'un pour faire le sale boulot à leur place.
J'avoue que j'étais hésitant. Alors je suis allé m'acheter une cartouche de clopes et un cubitainer de rouge, histoire de me laisser un peu de temps pour décider… et j'ai continué cul sec sur le pourquoi.
C'est là que c'est devenu compliqué. Parce que le pourquoi mourir, c'est comme le pourquoi vivre. Y'a pas de réponse!
J'ai longuement cogité et je me suis dit que s'il n'y avait pas de réponse, c'était peut-être simplement parce que la question était mal posée. Je me suis donc mis à chercher une autre formulation. J'ai potassé les grandes religions, les grands philosophes, j'ai assisté à des conférences, à des séminaires…
C'est là que j'ai rencontré Clarisse. Mêmes questionnements, mêmes recherches. On a décidé d'unir nos forces. J'avoue qu'on a perdu un peu de temps en approfondissant nos connaissances … Mais ça n'a pas ébranlé nos convictions!
Nous avons d'ailleurs pas mal avancé sur le sujet puisque nos épitaphes respectives sont en cours de réalisation. Pour elle : "Pourquoi pas?" Et pour moi, qui suis un peu plus rock and roll : "Why not?"
Quand je vous disais qu'on avait des points communs.
C'est la première idée qui me soit venu ce matin-là. J'étais heureux, j'avais enfin de quoi m'occuper!
Et puis, comme à chaque fois que je prends une décision, les problèmes ont surgi.
Parce que mourir, c'est bien joli, mais ça ne se fait pas n'importe quand, n'importe comment, sans compter qu'il faut se justifier, expliquer son geste. Après, c'est trop tard.
Une mort, c'est important, ça se prépare longtemps à l'avance. Un enterrement, c'est pas comme un mariage, on n'en a qu'un, faut pas le rater. Je n'avais pas pu choisir ma date de naissance, je trouvais pour le moins équitable d'avoir le choix des larmes!
Comme il est dit dans le traité du parfait jardinier (chapitre "Engrais naturels, compost"), il y a un temps pour tout. Alors j'ai commencé par me pencher sur la saison propice pour ce genre d'événement.
L'été, c'était exclu. Les potes sont en vacances, potentiellement injoignables et quand bien même, l'amitié a ses limites. Pour peu qu'il y ait la canicule, vous risquez au mieux un enterrement à la sauvette, au pire la fosse commune.
L'automne, période de recueillement, me semblait assez judicieux. Mais j'ai craint la concurrence. On honore les morts, d'accord, mais les vieux morts, pas les tout frais. Ceux-là, on les tient au chaud pour l'année suivante, chacun son tour. On ne peut pas passer sa vie au cimetière tout de même!
L'hiver, c'est un peu comme l'été, en négatif. D'abord, il y a les préparatifs des fêtes, puis les fêtes, puis les lendemains de fêtes! Sans compter les alertes météos, neige ou verglas. Un coup à attendre le dégel dans ma caisse capitonnée, certes, mais pas chauffée. !
Non, moi je vous le dis, j'ai beaucoup réfléchi, le début de printemps, c'est ce qu'il y a de mieux pour mourir. Pendant le Carême, pour l'ambiance.
Une fois le "quand" cerné, je me suis attaqué au "comment".
Le comment, c'est comme en peinture, une question de sensibilité. Il y a les gothiques flamboyants (tout feu tout flamme), les pointillistes (une pastille bleue, une pastille jaune, une rose…), les hyper-réalistes (adeptes du direct), les tachistes et les cubistes (prévoir le nettoyage), ceux qui aiment le dessein à la sanguine sans pour autant négliger l'œuvre au couteau, et bien entendu les riches esthètes toujours prêts à payer quelqu'un pour faire le sale boulot à leur place.
J'avoue que j'étais hésitant. Alors je suis allé m'acheter une cartouche de clopes et un cubitainer de rouge, histoire de me laisser un peu de temps pour décider… et j'ai continué cul sec sur le pourquoi.
C'est là que c'est devenu compliqué. Parce que le pourquoi mourir, c'est comme le pourquoi vivre. Y'a pas de réponse!
J'ai longuement cogité et je me suis dit que s'il n'y avait pas de réponse, c'était peut-être simplement parce que la question était mal posée. Je me suis donc mis à chercher une autre formulation. J'ai potassé les grandes religions, les grands philosophes, j'ai assisté à des conférences, à des séminaires…
C'est là que j'ai rencontré Clarisse. Mêmes questionnements, mêmes recherches. On a décidé d'unir nos forces. J'avoue qu'on a perdu un peu de temps en approfondissant nos connaissances … Mais ça n'a pas ébranlé nos convictions!
Nous avons d'ailleurs pas mal avancé sur le sujet puisque nos épitaphes respectives sont en cours de réalisation. Pour elle : "Pourquoi pas?" Et pour moi, qui suis un peu plus rock and roll : "Why not?"
Quand je vous disais qu'on avait des points communs.
Clarisse- Nombre de messages : 227
Age : 72
Date d'inscription : 10/03/2011
Re: Ca y est, c'est décidé...
Pourtant BREL a chanté: "c'est dur de mourir au printemps, tu sais!"
Merci pour cet humour que j'adore.
Invité- Invité
Re: Ca y est, c'est décidé...
Oui, c'est très bon. Beaucoup apprécié l'humour et la progression, même si elle m'a paru un chouïa trop logique et enchaînée, avec un passage un peu rapide sur la fin (du texte, pas de leurs vies...). Mais dans l'ensemble, l'impression est amplement positive. On ne sait rien, ou si peu, du personnage, et pourtant il est attachant.
Invité- Invité
Re: Ca y est, c'est décidé...
Plaisant et plein d'humour, comme j'aime.
Mais j'ai une question, j'allais dire "qui n'a rien à voir" mais en fait, si : pourquoi la narratrice Clarisse éprouve-t-elle le besoin de rencontrer une Clarisse dans son texte ?
Suis pas psy, mais je pourrai peut-être comprendre. ;-)
Mais j'ai une question, j'allais dire "qui n'a rien à voir" mais en fait, si : pourquoi la narratrice Clarisse éprouve-t-elle le besoin de rencontrer une Clarisse dans son texte ?
Suis pas psy, mais je pourrai peut-être comprendre. ;-)
Re: Ca y est, c'est décidé...
Hihi c'est drôle ton texte me rappelle quelque chose !
J'ai bien aimé, même si le pourquoi pas, c'est un peu facile :-)
J'ai bien aimé, même si le pourquoi pas, c'est un peu facile :-)
Lifewithwords- Nombre de messages : 785
Age : 32
Localisation : Hauts de Seine
Date d'inscription : 27/08/2007
Re: Ca y est, c'est décidé...
Et oui, Life, quand tu as posté "bien le bonjour d'un suicidé" j'étais en train de mitonner celui-là en me demandant si ça passerait à la censure!
Ca m'a amusé de le poster.
Mentor, le narrateur est un homme, ce n'est donc pas Clarisse. Je me la suis jouée hitchcockienne, avec une brève apparition en final! Un petit clin d'oeil au maître...
Ca m'a amusé de le poster.
Mentor, le narrateur est un homme, ce n'est donc pas Clarisse. Je me la suis jouée hitchcockienne, avec une brève apparition en final! Un petit clin d'oeil au maître...
Clarisse- Nombre de messages : 227
Age : 72
Date d'inscription : 10/03/2011
Re: Ca y est, c'est décidé...
D'accord, c'est une bonne raison, et pas compliquée à comprendre. Merci. :-))Clarisse a écrit:Je me la suis jouée hitchcockienne, avec une brève apparition en final! Un petit clin d'oeil au maître...
Re: Ca y est, c'est décidé...
marqué.Comme il est dit dans le traité du parfait jardinier
sinon ça passe pour moi aussi, joli moment de détente.
un jour, un truc plus long sans mise en page à la Rintintin, justifié et tout ? je l'espère, en tout cas.
Invité- Invité
Re: Ca y est, c'est décidé...
Un texte frais et léger sur un thème grave, du cynisme et des jeux de mots, de l'auto-dérision. La recette marche très bien, une lecture agréable =)
Re: Ca y est, c'est décidé...
D'autant que je prépare aussi un texte qui touche à ce thème !Clarisse a écrit:Et oui, Life, quand tu as posté "bien le bonjour d'un suicidé" j'étais en train de mitonner celui-là en me demandant si ça passerait à la censure!
Ca m'a amusé de le poster.
J'aime
Forcément, comme tout le monde, l'humour. Le style est agréable. C'est d'une grande clarté et l'invention est intéressante.
Le seul petit hic concerne la fin (je crois que quelqu'un a aussi émis cet avis...) : que j'aurais aimé le démontage cynique et humoristique de certaines réponses au pourquoi !
Mais c'était histoire de trouver un hic, c'était bien !
Le seul petit hic concerne la fin (je crois que quelqu'un a aussi émis cet avis...) : que j'aurais aimé le démontage cynique et humoristique de certaines réponses au pourquoi !
Mais c'était histoire de trouver un hic, c'était bien !
Bouli- Nombre de messages : 25
Age : 56
Date d'inscription : 09/03/2011
Re: Ca y est, c'est décidé...
Excellent.Pas une faute.Aquoi pensent les éditeurs?
François T- Nombre de messages : 147
Age : 96
Date d'inscription : 13/02/2011
Re: Ca y est, c'est décidé...
Texte bien tourné, thème bien cerné.
Cependant, une question me taraude l'esprit : pourquoi le personnage pense-t-il à cette éventualité ?
Le fond est d'une tristesse dramatique, même si l'humour vient détourner l'attention du lecteur.
Avant qu'il ne commette l'irréparable, j'invite ton héros à participer au stage nature et culture, les deux mamelles de la fange.
Cependant, une question me taraude l'esprit : pourquoi le personnage pense-t-il à cette éventualité ?
Le fond est d'une tristesse dramatique, même si l'humour vient détourner l'attention du lecteur.
Avant qu'il ne commette l'irréparable, j'invite ton héros à participer au stage nature et culture, les deux mamelles de la fange.
bertrand-môgendre- Nombre de messages : 7526
Age : 104
Date d'inscription : 15/08/2007
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