Pierre, Paul, les autres...
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Rebecca
elea
Clarisse
7 participants
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Pierre, Paul, les autres...
La secrétaire a marqué un temps d'arrêt puis a ajouté :
- Le jeudi 17 mars, est-ce que cela vous convient?
Je n'ai pas eu le temps de lui répondre. C'est Paul qui a pris la parole :
- Parfait, c'est noté!
Mais de quoi je me mêle! C'est mon idée, c'est mon rendez-vous! Ca fait six mois que je tergiverse : j'y vais, j'y vais pas… Alors, il me semble que je pourrais peut-être avoir mon mot à dire! Et justement, le jeudi, ça ne m'arrange pas. Je déteste les jeudis, tous les jeudis. Jeudi, le jour J, le jour où je dis. C'est pas me mettre la pression un rendez-vous pareil?
Et comme si ça ne suffisait pas, le 17 à 17 heures!
17, le condamné pendu, le chiffre mauvais par excellence, impair et entier, autrement dit indivisible! Comme si on pouvait être indivisible…. Quand on est indivisible, on reste chez soi, on ne va pas consulter!
Paul, lui, il s'en fichait, du moment que ça faisait plaisir au toubib de me recevoir, comme si c'était un gage d'amitié de dire tout le temps oui à tout le monde. Il a raccroché gentiment.
C'est à ce moment-là que Pierre est entré en action, furax, en hurlant :
- Non, pas un jeudi, pas un 17!
Il a fracassé le téléphone, déchiqueté l'agenda et mis le bazar dans tout l'appartement.
J'étais vraiment contrarié par la tournure des événements mais j'ai eu le temps de prendre une petite pilule et je suis allé dormir.
Ca leur a fait les pieds à ces deux abrutis… Plus rien à squatter, leur faudra repasser plus tard!
- Paraît qu'il y a des types qui ont tellement peur du reste du monde qu'ils ne sortent jamais de chez eux. Ils s'enferment à double tour. Ils ne savent pas la chance qu'ils ont, ils peuvent se mettre à l'abri et continuer à vivre tranquillement loin des autres et de leurs mauvaises influences. Ils sont pénards.
Pour moi, c'est pas pareil. Même quand je suis à la maison, les autres sont là, ils s'infiltrent sournoisement, à tour de rôle, ils envahissent mon corps, ils parlent par ma bouche, ils saccagent de mes mains.
Il n'y a que moi qui sais...
- Le jeudi 17 mars, est-ce que cela vous convient?
Je n'ai pas eu le temps de lui répondre. C'est Paul qui a pris la parole :
- Parfait, c'est noté!
Mais de quoi je me mêle! C'est mon idée, c'est mon rendez-vous! Ca fait six mois que je tergiverse : j'y vais, j'y vais pas… Alors, il me semble que je pourrais peut-être avoir mon mot à dire! Et justement, le jeudi, ça ne m'arrange pas. Je déteste les jeudis, tous les jeudis. Jeudi, le jour J, le jour où je dis. C'est pas me mettre la pression un rendez-vous pareil?
Et comme si ça ne suffisait pas, le 17 à 17 heures!
17, le condamné pendu, le chiffre mauvais par excellence, impair et entier, autrement dit indivisible! Comme si on pouvait être indivisible…. Quand on est indivisible, on reste chez soi, on ne va pas consulter!
Paul, lui, il s'en fichait, du moment que ça faisait plaisir au toubib de me recevoir, comme si c'était un gage d'amitié de dire tout le temps oui à tout le monde. Il a raccroché gentiment.
C'est à ce moment-là que Pierre est entré en action, furax, en hurlant :
- Non, pas un jeudi, pas un 17!
Il a fracassé le téléphone, déchiqueté l'agenda et mis le bazar dans tout l'appartement.
J'étais vraiment contrarié par la tournure des événements mais j'ai eu le temps de prendre une petite pilule et je suis allé dormir.
Ca leur a fait les pieds à ces deux abrutis… Plus rien à squatter, leur faudra repasser plus tard!
- Paraît qu'il y a des types qui ont tellement peur du reste du monde qu'ils ne sortent jamais de chez eux. Ils s'enferment à double tour. Ils ne savent pas la chance qu'ils ont, ils peuvent se mettre à l'abri et continuer à vivre tranquillement loin des autres et de leurs mauvaises influences. Ils sont pénards.
Pour moi, c'est pas pareil. Même quand je suis à la maison, les autres sont là, ils s'infiltrent sournoisement, à tour de rôle, ils envahissent mon corps, ils parlent par ma bouche, ils saccagent de mes mains.
Il n'y a que moi qui sais...
Clarisse- Nombre de messages : 227
Age : 72
Date d'inscription : 10/03/2011
Re: Pierre, Paul, les autres...
Oh ! Qu'il est bien trouvé ce titre ! C'est excellent.
Une histoire triste à pleurer sous ses airs de ne pas y toucher. J'admire la concision. Juste la bonne dose, juste ce qu'il faut. Bravo Clarisse.
Une histoire triste à pleurer sous ses airs de ne pas y toucher. J'admire la concision. Juste la bonne dose, juste ce qu'il faut. Bravo Clarisse.
Invité- Invité
Re: Pierre, Paul, les autres...
Très joli texte qui dit tant en si peu d‘espace, et surtout qui dit entre les mots, par les non-dits, qui suggère, tout en finesse.
Tout un (triste) monde évoqué en quelques phrases. Superbe !
Tout un (triste) monde évoqué en quelques phrases. Superbe !
elea- Nombre de messages : 4894
Age : 51
Localisation : Au bout de mes doigts
Date d'inscription : 09/04/2010
Re: Pierre, Paul, les autres...
Court mais percutant. Efficace . Les béances de l'âme...
Rebecca- Nombre de messages : 12502
Age : 65
Date d'inscription : 30/08/2009
Re: Pierre, Paul, les autres...
Pas mieux dans le commentaire aux lisières de la nuit...
Ba- Nombre de messages : 4855
Age : 71
Localisation : Promenade bleue, blanc, rouge
Date d'inscription : 08/02/2009
Re: Pierre, Paul, les autres...
Perplexe je reste.
bertrand-môgendre- Nombre de messages : 7526
Age : 104
Date d'inscription : 15/08/2007
Re: Pierre, Paul, les autres...
Magnifique, tellement de force en si peu de mots. Un exemple !
Lifewithwords- Nombre de messages : 785
Age : 32
Localisation : Hauts de Seine
Date d'inscription : 27/08/2007
Re: Pierre, Paul, les autres...
A force de créer, par l'écriture, des personnages fictifs, il est assez aisé de concevoir ce qui se passe dans le cerveau de quelques autres.
C'est ce que j'ai voulu retranscrire.
Si le perplexe, Bertrand, la mère veille, sanitaire!
Merci à ceux qui m'ont lue et commentée.
C'est ce que j'ai voulu retranscrire.
Si le perplexe, Bertrand, la mère veille, sanitaire!
Merci à ceux qui m'ont lue et commentée.
Clarisse- Nombre de messages : 227
Age : 72
Date d'inscription : 10/03/2011
Re: Pierre, Paul, les autres...
A force de créer, par l'écriture, des personnages fictifs, il est assez aisé de concevoir ce qui se passe dans le cerveau de quelques autres.
C'est ce que j'ai voulu retranscrire.
Eh bien bravo ! C'est sidérant de vérité, sans un mot de trop, un cri qui me va droit au coeur.
C'est ce que j'ai voulu retranscrire.
Eh bien bravo ! C'est sidérant de vérité, sans un mot de trop, un cri qui me va droit au coeur.
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